Le Quotidien du 12 mars 2021 : Avocats/Procédure pénale

[Brèves] Permis de communiquer : défaut de délivrance à l’avocat désigné et respect des droits de la défense

Réf. : Cass. crim., 10 mars 2021, n° 20-86.919, F-P+I (N° Lexbase : A47394KQ)

Lecture: 5 min

N6772BYH

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Permis de communiquer : défaut de délivrance à l’avocat désigné et respect des droits de la défense. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/65784090-breves-permis-de-communiquer-defaut-de-delivrance-a-lavocat-designe-et-respect-des-droits-de-la-defe
Copier

par Marie Le Guerroué

le 24 Mars 2021

► Le défaut de délivrance du permis de communiquer à un avocat désigné, avant un débat contradictoire tenu en vue d’un éventuel placement en détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen ;

Le fait que le mis en examen ait accepté d’être défendu par l’avocat de permanence lors du débat contradictoire ne permet pas d’écarter toute atteinte à ses droits.

Faits et procédure. Un mis en examen pour blanchiment et travail dissimulé, ayant sollicité devant le juge des libertés et de la détention un débat différé, avait été placé sous mandat de dépôt à durée déterminée. Dès le lendemain, son avocat avait demandé par télécopie au magistrat instructeur que lui soit délivré un permis de communiquer. Faute de réponse, il avait à nouveau réitéré sa demande le lendemain, le 25 novembre 2020. Le 26 novembre 2020, le greffier du juge d’instruction lui avait répondu par télécopie que son client n’était pas encore en détention provisoire, le débat sur le placement en détention provisoire n’ayant pas encore eu lieu, et n’avait pas donné suite à sa demande de permis de communiquer. Le débat contradictoire avait eu lieu comme prévu le 26 novembre 2020, en l’absence de l’avocat choisi. Le mis en examen était cependant défendu, avec son accord, par l’avocat de permanence, avec lequel il s’était préalablement entretenu, et qui avait eu accès au dossier. À l’issue du débat, il avait été placé en détention provisoire et avait fait appel de cette décision.

En cause d’appel. Pour écarter le moyen de nullité de l’ordonnance de placement en détention provisoire, tiré de l’absence de délivrance du permis de communiquer à l’avocat choisi par le mis en examen, malgré deux demandes de celui-ci adressées au greffe du juge d’instruction la veille et l’avant-veille du débat contradictoire, l’arrêt rendu par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris énonce notamment qu’en l’absence de toute réponse de l’avocat choisi aux sollicitations du juge des libertés et de la détention pour qu’il assiste son client lors du débat contradictoire, ce dernier avait avisé l’avocat de permanence, qui avait accepté de défendre l’intéressé, avait pris connaissance du dossier avant le débat, et s’était entretenu avec le mis en examen, qui lui-même ne s’y était pas opposé. Les juges ajoutent qu’il s’en déduit, aucune écriture n’ayant été déposée, aucune mention de protestation ne figurant au dossier, et l’avocat choisi ne s’étant pas présenté au cabinet du juge des libertés et de la détention lors du débat contradictoire différé du 26 novembre 2020, que le juge des libertés et de la détention est demeuré dans l’ignorance de la situation, et s’est trouvé dans l’impossibilité d’en tirer, le cas échéant, les conséquences de droit, le mis en examen ayant accepté, dûment éclairé par l’avocat de permanence, l’assistance de ce dernier. La chambre de l’instruction en avait conclu que la défense ne saurait, dans ces conditions, invoquer a posteriori une atteinte aux droits de la défense.

Réponse de la Cour. La Chambre criminelle rend sa décision au visa des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l’Homme  (N° Lexbase : L7558AIR), et 115 (N° Lexbase : L0931DY7) du Code de procédure pénale. Elle rappelle qu’en vertu du principe de la libre communication entre la personne mise en examen et son avocat, résultant du premier des textes précités, la délivrance d’un permis de communiquer entre une personne détenue et son avocat est indispensable à l’exercice des droits de la défense. Il en découle que le défaut de délivrance de cette autorisation à un avocat désigné, avant un débat contradictoire tenu en vue d’un éventuel placement en détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen. Dès lors, en statuant comme elle l’a fait, la chambre de l’instruction a méconnu les textes précités et le principe ci-dessus rappelé. En effet, les juges ayant constaté qu’un refus injustifié de délivrance du permis de communiquer avait été opposé à l’avocat choisi, lequel n’a pas été en mesure d’assurer la défense du mis en examen lors de ce débat, le fait que ce dernier ait accepté d’être défendu par l’avocat de permanence lors du débat contradictoire ne permet pas d’écarter toute atteinte à ses droits.

Contexte. Cet arrêt s’inscrit dans une jurisprudence constante de la Cour de cassation reconnaissant le caractère fondamental de la libre communication entre la personne détenue et son avocat, indispensable à l’exercice des droits de la défense. Ainsi la Haute juridiction avait-elle jugé que « le défaut de délivrance de cette autorisation à chacun des avocats désignés, avant un débat contradictoire tenu en vue de l'éventuelle prolongation de la détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen » (Cass. crim., 12 décembre 2017, n° 17-85.757, F-P+B N° Lexbase : A1221W8Q). Dans le même sens, la Chambre criminelle avait plus récemment affirmé que « le défaut de délivrance de permis à un avocat désigné « avant un débat contradictoire différé organisé en vue d'un éventuel placement en détention provisoire, fait nécessairement grief à la personne mise en examen » (Cass. crim., 7 janvier 2020, n° 19-86.465, F-P+B+I (N° Lexbase : A47823AD).

Pour aller plus loin : 

N. Catelan, ÉTUDE : Le recours à l'instruction préparatoire, Les droits du mis en examen, in Procédure pénale, (dir. J.-B. Perrier), Lexbase (N° Lexbase : E65783CM).

H. Diaz, Débat JLD différé, permis de communiquer et droits de la défense, Lexbase Pénal, avril 2020 (N° Lexbase : N2816BYX).

C. Carbonaro, Détention provisoire et contrôle judiciaire (juin 2019 à juin 2020), Lexbase Pénal, juillet 2020 (N° Lexbase : N4100BYI).

 

newsid:476772

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.