Le Quotidien du 12 mars 2021 : Construction

[Brèves] Les travaux de reprise de dommages de nature décennale peuvent-ils, eux-mêmes, entraîner l’application de la responsabilité décennale ?

Réf. : Cass. civ. 3, 4 mars 2021, n° 19-25.702 FS-P (N° Lexbase : A00194KW)

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par Juliette MEL Docteur en droit Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 10 Mars 2021

► Les cas d’exonération de la responsabilité décennale des constructeurs sont strictement circonscrits à la cause étrangère ;
► les désordres initiaux qu’une entreprise ne parvient pas à réparer ne sont pas exonératoires de la responsabilité du constructeur ;
► les travaux de reprise de dommages de nature décennale peuvent, eux-mêmes, entraîner l’application de la responsabilité décennale.

Le constructeur n’a pas beaucoup de possibilité de s’exonérer de la responsabilité civile décennale mise à sa charge aux termes de l’article 1792 du Code civil (N° Lexbase : L1920ABQ). Il peut plaider l’absence de lien d’imputabilité, c’est-à-dire de causalité, entre son intervention et le dommage. Il peut également tenter de s’exonérer en rapportant l’existence d’une cause étrangère. L’article 1792 précité le prévoit expressément. Mais les juges sont particulièrement sévères quant à l’admission de la cause étrangère comme en atteste l’arrêt ci-avant rapporté (pour exemple, Cass. civ. 3, 23 septembre 2020, n° 19-20.374, F-D N° Lexbase : A06503WY).

Deux propriétaires d’une maison, dont la construction a été achevée en 1998 par deux entreprises depuis en liquidation judiciaire, se plaignent de l’apparition, en 2005/2006, de fissures et d’un affaissement du sol. Des travaux de reprise sont réalisés mais, compte tenu de la persistance des désordres, une autre société intervient en 2008 pour réaliser des injections de résine expansive. Ces nouveaux travaux ne permettent toujours pas de remédier aux désordres. Les propriétaires assignent alors la dernière entreprise intervenue, avec son assureur de responsabilité décennale, sur le fondement de la responsabilité civile décennale des constructeurs.

Les conseillers d’appel ont condamné l’assureur de responsabilité décennale de l’entreprise à prendre en charge les dommages. L’assureur forme un pourvoi en cassation aux termes duquel il expose, d’une part, que la garantie décennale d’un constructeur ne peut pas être mise en œuvre pour des désordres qui ne sont pas imputables à son intervention. Il est, d’autre part, allégué qu’il ne serait pas établi que les travaux réparatoires auraient été à l’origine de nouveaux désordres.

La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle opère un contrôle de la motivation.

La Haute juridiction relève bien que les travaux de reprise ont été inopérants dès lors que la stabilité du dallage n’était pas acquise et que les injections réalisées n’avaient apporté aucun remède, les fissures demeurant évolutives et la stabilité des murs périphériques non-obtenue. La cause de cette défaillance est due à la société mise en cause. Les injections ont été faites à une profondeur et un maillage insuffisant.

La Haute juridiction relève, également, que la reprise infructueuse des désordres compromet la stabilité de l’ouvrage puisqu’il en affecte la stabilité outre qu’elle est à l’origine de fissurations évolutives.

Gare donc à l’entreprise qui intervient pour réaliser des travaux de reprise ! Ses travaux réparatoires sont, eux-mêmes, éligibles à l’application de la responsabilité civile décennale des constructeurs si les conditions sont remplies.

Il n’est pas étonnant que la cause étrangère ne soit pas retenue.

La décision est l’occasion de rappeler que les critères d’application de la cause étrangère sont :

- la force majeure ;
- le fait du tiers ;
- la faute de la victime.

En dehors de ces trois cas, il n’est donc pas possible de la caractériser (voir, pour un exemple récent : Cass. civ. 3, 28 janvier 2021, n° 19-22.794, F-D N° Lexbase : A16494ES).

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