Le Quotidien du 14 octobre 2020 : Droit financier

[Brèves] Obligation d'information en matière de services d'investissement : quid lorsque le questionnaire d’évaluation est incomplet ?

Réf. : AMF, blog du médiateur, 1er octobre 2020

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N4810BYS

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[Brèves] Obligation d'information en matière de services d'investissement : quid lorsque le questionnaire d’évaluation est incomplet ?. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/60859972-breves-obligation-dinformation-en-matiere-de-services-dinvestissement-i-quid-i-lorsque-le-questionna
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par Vincent Téchené

le 07 Octobre 2020

► En cas de questionnaire d’évaluation du client incomplet, la banque, prestataire de service d’investissement, doit alerter son client mais transmettre son ordre de bourse.

Contexte. Avec la « Directive MIF 2 » (Directive n° 2014/65 du 15 mai 2014 N° Lexbase : L5484I3I), les obligations des prestataires de services d’investissement (PSI) en matière d’évaluation de leurs clients ont été renforcées : plus que jamais, ces derniers doivent s’assurer que le produit ou le service envisagé correspond au profil de leurs clients. Toutefois, pour ce faire, ils doivent disposer des informations nécessaires. Or, il arrive qu’un client refuse de compléter le questionnaire d’évaluation rendant impossible la détermination de son profil.

Faits. M. B (l’investisseur) a indiqué à la médiatrice de l’AMF que, lors de la période de confinement, il a voulu ouvrir un compte-titres afin d’y investir en bourse auprès d’un site de courtage en ligne partenaire de sa banque traditionnelle. Cependant, selon l’investisseur, le questionnaire permettant de déterminer son profil investisseur était très long et très précis, ce qui, outre le délai de validation d’ouverture dudit compte, l’aurait découragé de poursuivre.

Il précise que sa banque permettait également l'ouverture d'un PEA et qu’il aurait ainsi très rapidement validé l’ouverture du plan en 24/48H, ce qui lui aurait permis d'investir aussitôt. Le 15 avril 2020, après ouverture de son PEA, il a ainsi transmis un ordre d’achat au marché de 95 000 actions X, pour un montant total de plus de 50 000 euros. Toutefois, voyant le cours de l’action X chuter et craignant de tout perdre, il a revendu sa position, enregistrant ainsi une moins-value de près de 50% de son investissement initial. L’investisseur estime qu’eu égard à son profil, il n’aurait pas dû pouvoir investir en bourse et considère que son intermédiaire financier a failli dans ses obligations en ne l’empêchant pas de procéder aux opérations litigieuses.

C’est dans ces conditions qu’il a saisi la médiatrice afin d’obtenir un dédommagement à hauteur de la moins-value enregistrée.

Recommandation. L’investisseur se prévalait de son profil « Débutant » pour considérer que sa banque n’aurait pas dû l’autoriser à transmettre son ordre de bourse et qu’elle avait donc, selon lui, failli à ses obligations.

Sur ce point, la médiatrice rappelle que, en application de l’article L. 533-13, II du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L4222AP3), en vue de fournir un service de réception-transmission d’ordres, et non un service de conseil en investissement,  les prestataires de services d’investissement (autres que les sociétés de gestion de portefeuille) « demandent à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, des informations sur leurs connaissances et leur expérience en matière d'investissement, en rapport avec le type spécifique d'instrument financier ou de service proposé ou demandé, pour être en mesure de déterminer si le service ou l'instrument financier est approprié. […] Si les clients, notamment les clients potentiels, ne fournissent pas les informations mentionnées au premier alinéa ou si les informations fournies sont insuffisantes, les prestataires les avertissent qu'ils ne sont pas en mesure de déterminer si le service ou l'instrument financier envisagé leur convient ».

Il s’agit donc d’un devoir d’alerte, et non d’une obligation d’abstention de fournir le service demandé. Ainsi, contrairement à ce qu’arguait l’investisseur, sa banque n’était, en aucun cas, tenue de refuser de transmettre son ordre mais devait seulement l’avertir. Or, selon la médiatrice, la banque, en l’absence d’éléments quant à ses connaissances et son expérience – informations que l’investisseur n’avait pas souhaité communiquer –, l’avait averti préalablement à la transmission de l’ordre objet du litige et à chaque transaction initiée.

La circonstance que l’investisseur ait fait le choix de confirmer ses instructions, malgré l’avertissement qui lui a été délivré, ne saurait, selon la médiatrice de l’AMF, être imputable à son intermédiaire financier. Elle a donc considéré qu’il n’y avait pas lieu, dans ce dossier, de recommander un dédommagement

Enseignements. Pour la médiatrice de l’AMF, perçu parfois comme intrusif, le questionnaire d’évaluation du client n’est pas qu’une obligation réglementaire. Il s’agit d’un document aussi utile qu’important tant pour la banque que pour l’épargnant. Il permet à la banque, qui est tenue réglementairement de le soumettre à son client, d’apprécier son profil et de déterminer que le service ou l’instrument financier lui convient. Il est donc dans l’intérêt du client de le compléter avec soin et exactitude. Par ailleurs, s’agissant du conseil en investissement (ou du service de gestion de portefeuille), les obligations du PSI et de réponse du client sont plus exigeantes :

- d’une part, l’évaluation du client est plus approfondie :  outre l’expérience et les connaissances du client, le PSI doit également recueillir des informations relatives à sa situation financière, y compris sa capacité à subir des pertes, et à ses objectifs d'investissement, y compris sa tolérance au risque ;

- d’autre part, si le client ne communique pas les informations requises, le PSI ne lui délivre pas un simple avertissement mais doit s’abstenir de lui recommander des instruments financiers (ou lui fournir le service de gestion de portefeuille).

Il est à noter que, depuis janvier 2018, cette obligation ne figure plus au I de l’article L. 533-13 du Code monétaire et financier mais au point 8 de l’article 54 du Règlement délégué n° 2017/565 de la Commission européenne du 25 avril 2016 (N° Lexbase : L4545LDP).

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