La lettre juridique n°476 du 8 mars 2012 : Procédure pénale

[Chronique] Chronique de procédure pénale - Mars 2012

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par Guillaume Beaussonie, maître de conférences en droit privé, membre du CRDP de Tours (EA 2116) et du laboratoire Wesford, et Madeleine Sanchez, docteur en droit, membre de l'IDP de Toulouse (EA 1920)

le 02 Août 2012

Lexbase Hebdo - édition privée vous invite à retrouver la chronique de procédure pénale de Guillaume Beaussonie, maître de conférences en droit privé, membre du CRDP de Tours (EA 2116) et du laboratoire Wesford, et Madeleine Sanchez, docteur en droit, membre de l'IDP de Toulouse (EA 1920). Un aboutissement, un revirement et deux précisions au programme de cette chronique centrée sur la jurisprudence de la Chambre criminelle de la Cour de cassation. Faisant la synthèse de deux précédents arrêts, celle-ci confirme, tout d'abord, la nature juridique très particulière du rappel à la loi (Cass. crim., 17 janvier 2012, n° 10-88.226, F-P+B). Allant, ensuite, à l'encontre de la jurisprudence "Mathéron" et de ses propres positions, la Cour n'accepte plus qu'une personne mise en cause puisse soulever la nullité de la garde à vue qu'une autre personne mise en cause a subie (Cass. crim., 14 février 2012, n° 11-84.694, FS-P+B+R+I). A propos de la décision d'homologation dans le cadre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, elle indique encore qu'il s'agit alors d'instaurer un débat au fond, et en tire toutes les conséquences (Cass. crim., 22 février 2012, n° 11-82.786, F-P+B). Enfin, en matière d'extradition, la Cour de cassation souligne, en vertu de la Convention de Dublin, l'indifférence de la prescription de l'action publique selon le droit de l'Etat requis (Cass. crim., 8 février 2012, n° 11-88.044, FS-P+B). I - Rappel à la loi : troisième acte
  • La victime d'une infraction peut citer directement devant une juridiction pénale une personne qui a préalablement fait l'objet d'un rappel à la loi à raison des mêmes faits (Cass. crim., 17 janvier 2012, n° 10-88.226, F-P+B N° Lexbase : A8997IBT)

Confrontée de nouveau à une personne ayant fait l'objet d'une mesure de rappel à la loi puis, pour les mêmes faits et dans le cadre de la même procédure, d'un renvoi devant le tribunal de police et d'une condamnation par ce dernier, la Chambre criminelle de la Cour de cassation confirme sa position de principe selon laquelle il résulte de l'article 41-1 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L7207IMU) que "le Procureur de la République peut, préalablement à sa décision sur l'action publique, prescrire l'une des obligations prévues par ce texte, sans que l'exécution de cette obligation éteigne l'action publique" (1).

Pour la Cour de cassation, il n'existe définitivement pas d'obstacle à ce que soient cumulées l'une des mesures de l'article 41-1 du Code de procédure pénale et l'action pour l'application des peines. On pourrait alors se dire que les choses sont désormais claires et, qu'en conséquence, il n'apparaît plus vraiment nécessaire de s'y intéresser. La situation dans laquelle s'inscrit cette solution de principe permet cependant de progresser encore un peu dans l'appréhension de la nature juridique du rappel à la loi.

En effet, en l'espèce, il est notable que le mis en cause à qui les obligations légales ont été rappelées a, à la suite de cela, bien logiquement bénéficié d'un classement sans suite. Ce n'est alors que parce que la victime l'a cité directement devant le tribunal de police qu'il a, malgré le signal pénal déjà reçu, fini par être renvoyé devant cette juridiction puis, à l'issue, par être condamné.

Pour la Cour de cassation, il ne s'agit que de tirer toutes les conséquences de l'inaptitude du rappel à la loi à éteindre l'action publique, puisque celle-ci "implique que le plaignant peut [encore] mettre celle-ci en mouvement".

Le rappel à la loi, ainsi que toutes les autres obligations contenues par l'article 41-1 du Code de procédure pénale, n'est donc pas exclusivement une mesure destinée à préparer la décision qui sera prise par le ministère public de poursuivre ou de classer sans suite. Il l'est sans doute en majeure partie (2) et, en principe, son effectivité doit plutôt conduire à opter pour le classement sans suite, ce qui a été le cas en l'espèce. Toutefois, il ne faut pas oublier que ces mesures ont aussi leurs buts propres : "assurer la réparation du dommage causé à la victime, mettre fin au trouble résultant de l'infraction ou contribuer au reclassement de l'auteur des faits" précise l'article 41-1 du Code de procédure pénale.

Dès lors, n'est-ce pas la seule référence à ces buts -déterminés et définis par la loi- qui devrait commander la suite procédurale à octroyer à un dossier lorsque le choix a préalablement été fait, par le ministère public, de recourir à ces mesures ? Plus encore, n'est-ce pas à partir de ces buts que l'on devrait, dès le départ, faire le choix, à la fois, de recourir à l'une des mesures de l'article 41-1 du Code de procédure pénale et de retenir la mesure la plus appropriée au dossier ?

En l'occurrence, c'est-à-dire dans une affaire où des violences sont en cause, la victime sanctionne en quelque sorte le mauvais choix fait par le ministère public, qui aurait peut-être dû privilégier une mesure de nature réparatrice à une mesure purement moralisatrice. Ne disposant plus que de la possibilité de déclencher le procès pénal pour parvenir à cette fin, -du moins si elle souhaite emprunter la voie pénale, ce qui est son droit-, la victime a fini par le faire, rien ne l'en empêchant juridiquement. Le but de réparation a fini par être atteint, mais pas celui de rendre la justice pénale plus rapide.

Guillaume Beaussonie, Maître de conférences en droit privé, CRDP Tours (EA 2116), Laboratoire Wesford

II - Vers une autonomisation des règles relatives à la garde à vue ?

  • Nul n'a qualité pour soulever la nullité de la garde à vue d'autrui (Cass. crim., 14 février 2012, n° 11-84.694, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A3688ICL)

Il devient difficile d'écrire sur la garde à vue, tant la réforme du 14 avril 2011 (N° Lexbase : L9584IPN) paraît susciter plus de questions qu'elle n'a apporté de solutions. Seule certitude : il existe désormais un droit propre à la garde à vue qui conduit, de plus en plus, à autonomiser cette dernière de toutes les autres mesures d'enquête, fussent-elles également restrictives de liberté. L'un des effets néfastes de cette disjonction du droit de la garde à vue des autres règles relatives à l'enquête est de ne plus savoir si ce qui vaut pour celles-ci vaut également pour celui-là, et inversement.

En l'espèce, une telle interrogation s'est posée à propos de la jurisprudence "Mathéron", en vertu de laquelle une personne est en droit de soulever la nullité d'un acte d'enquête qu'elle n'a pas personnellement subi, mais dont elle a démontré qu'il lui causait un grief. La règle ainsi posée, inspirée par le notoire arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme "Mathéron contre France", rendu le 29 mars 2005 (CEDH, 29 mars 2005, req. 57752/00 N° Lexbase : A6255DH7), a été assez rapidement reçue par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, qui l'a appliquée depuis dans de nombreux arrêts, à commencer par un arrêt du 7 décembre 2005 (3).

Pour autant, doit-elle être effective en ce qui concerne la nouvelle garde à vue ?

Dans l'affaire ayant conduit à l'arrêt du 14 février 2012, condamné en première instance, un voleur interjetait appel et soulevait, à cette occasion, la nullité de la garde à vue de son receleur. Le recours apparaissait pertinent puisque, d'une part, l'audition de son co-prévenu l'avait incriminé et, d'autre part, ce dernier n'avait bénéficié ni de l'assistance d'un avocat, ni de la notification de son droit au silence. Il n'était donc guère étonnant que la cour d'appel ait fini par donner raison au requérant, du moins si l'on considère que le droit positif est resté dans la droite ligne de la jurisprudence "Mathéron", aucun arrêt récent de la Cour de cassation n'inclinant à penser autrement.

Au visa des articles 171 (N° Lexbase : L3540AZ7) et 802 (N° Lexbase : L4265AZY) du Code de procédure pénale -le premier de ces articles n'ayant même pas été invoqué par l'auteur du pourvoi- la Cour de cassation sanctionne pourtant la cour d'appel, au motif que "la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue ne peut être invoquée à l'appui d'une demande d'annulation d'acte ou de pièce de procédure que par la partie qu'elle concerne".

Il s'agit sans aucun doute d'un revirement, la Cour de cassation mobilisant autrefois ces mêmes articles -il est vrai avec le puissant renfort normatif de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme- pour dire exactement le contraire : "le requérant à la nullité peut invoquer l'irrégularité d'un acte de la procédure concernant un tiers si cet acte, illégalement accompli, a porté atteinte à ses intérêts" (4).

La seule question qui demeure est donc celle de la portée de ce revirement.

D'un côté, en effet, il peut être avancé que ce revirement se limite à la garde à vue : l'attendu de principe ne se réfère qu'à cette mesure, et les droits du mis en cause -notamment ses droits au silence et à une assistance- trouvent une intensité si particulière durant cette mesure, que l'on pourrait croire qu'ils ne s'appliquent qu'à cette rétention et que durant cette rétention, ce qui est faux. Une telle interprétation a pour intérêt, à la fois, de limiter l'atteinte portée à la jurisprudence "Mathéron" et d'expliquer en quoi tout autre que le gardé à vue ne peut disposer de la qualité à agir en nullité de sa garde à vue, puisqu'il ne peut être considéré comme le titulaire des droits en question. La Cour de cassation ne dit pas autre chose lorsqu'elle conclut que "le demandeur était sans qualité pour se prévaloir de la méconnaissance d'un droit qui appartient en propre à une autre personne".

D'un autre côté, cependant, les règles visées en l'occurrence par la Chambre criminelle de la Cour de cassation sont les plus générales qui soient, et l'on ne trouve pas en leur sein une règle propre à la garde à vue. Au surplus, au-delà des considérations qui précèdent, une personne peut avoir tout autant d'intérêt à annuler la garde à vue d'autrui, que la perquisition ou les écoutes téléphoniques subies par quelqu'un d'autre. Dès lors, interdire son action relativement à l'une quelconque de ces procédures conduit, bien logiquement, à le faire pour l'ensemble de ces procédures.

Guillaume Beaussonie, Maître de conférences en droit privé, CRDP Tours (EA 2116), Laboratoire Wesford

III - Précisions sur l'homologation d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

  • L'homologation d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité instaurant un débat au fond, toute personne est forclose à présenter postérieurement une exception de nullité de la procédure antérieure (Cass. crim., 22 février 2012, n° 11-82.786, F-P+B N° Lexbase : A3094IDX)

A la différence de son homologue civil, le Code de procédure pénale n'a pas vraiment bénéficié de la plume pédagogue de quelques grands juristes et, en conséquence, il ne contient pas de définitions et de classifications des différents actes qui jalonnent le procès qu'il encadre. Il n'est alors pas toujours facile d'identifier la nature et le régime juridiques de certains grands mécanismes procéduraux propres au droit pénal sauf, précisément, à les comparer avec ceux qui paraissent propres au droit civil.

Un tel problème se pose notamment pour la procédure de reconnaissance préalable de culpabilité et, en son sein, à propos de son homologation nécessaire par le juge (5).

En l'espèce, une personne comparaissait suivant cette procédure devant le président du tribunal correctionnel lequel, par ordonnance, homologuait la peine proposée par le procureur de la République. Le prévenu et le ministère public interjetaient alors appel de cette ordonnance, le premier soulevant, à cette occasion, la nullité de sa garde à vue, ce qu'il n'avait pas fait lors de l'homologation. La cour d'appel considérait néanmoins que cette exception de nullité était recevable, la simple audition du prévenu assisté de son avocat par le juge ne pouvant, selon elle, être assimilée à une défense au fond, au sens de l'article 385 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3791AZG). Dès lors, les juges d'appel en déduisaient qu'il leur appartenait de se prononcer sur les moyens de nullité ainsi soulevés devant eux avant toute défense au fond et, se prononçant, en concluaient qu'il convenait d'annuler la garde à vue et, conséquemment, de relaxer le prévenu.

La Cour de cassation sanctionne ce raisonnement, précisant que "s'instaure un débat au fond devant le président du tribunal correctionnel, lequel, après avoir vérifié la réalité des faits et leur qualification juridique, s'il décide d'homologuer la proposition du Procureur de la République, constate notamment que la personne, en présence de son avocat, reconnaît les faits reprochés et accepte la ou les peines proposées".

Autrement dit, même si l'office du juge pénal se trouve nécessairement atténué lors d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité -c'est d'ailleurs un peu le but d'une telle procédure- la comparution devant le juge du siège dans l'optique d'une homologation n'en instaure pas moins un véritable débat au fond, dont l'objet est de vérifier, à la fois, la légalité et l'opportunité de l'accord passé entre les parties (6).

A l'instar d'une procédure gracieuse, la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité fait intervenir un juge qui accomplit un acte de juge : "d'une part, le juge du siège vérifie la conformité de la procédure dont il est saisi aux exigences du Code de procédure pénale. Dès lors, il s'assure de la concordance de la situation factuelle à la règle de droit. D'autre part, cette ordonnance, émanant d'un juge tiers, est indispensable au succès de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité" (7).

En conséquence, en vertu de l'article 385 du Code de procédure pénale, il n'est plus possible, en appel, de faire droit à une demande de nullité d'un acte de procédure antérieur à l'ordonnance d'homologation.

Guillaume Beaussonie, Maître de conférences en droit privé, CRDP Tours (EA 2116), Laboratoire Wesford

IV - Quelques précisions en matière d'extradition

  • Obligation pour l'avocat de présenter des observations en français lors de l'audience et indifférence de la prescription de l'action publique selon le droit de l'Etat requis (Cass. crim., 8 février 2012, n° 11-88.044, FS-P+B N° Lexbase : A8787ICG)

Le mandat d'arrêt européen étant aujourd'hui l'une des traductions de principe de la coopération judiciaire entre les Etats membres de l'Union européenne, les demandes d'extradition entre lesdits Etats se raréfient.

Néanmoins, en France, le mandat d'arrêt européen n'est pas applicable aux faits commis antérieurement au 1er novembre 1993, pour lesquels seule la procédure d'extradition peut permettre la remise, par un Etat requis, d'une personne poursuivie ou condamnée par un Etat requérant. Compte tenu de l'ancienneté des faits concernés dans de telles situations, le débat porte alors parfois sur la question de la prescription de l'action publique ou de la peine.

Tel est justement l'un des problèmes soulevés par l'affaire soumise à l'appréciation de la Chambre criminelle de la Cour de cassation le 8 février 2012.

Deux textes relatifs à la prescription sont susceptibles de recevoir application et se contredisent.

D'une part, l'article 10 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, adoptée par le Conseil de l'Europe, prévoit que "l'extradition ne sera pas accordée si la prescription de l'action ou de la peine est acquise d'après la législation soit de la Partie requérante, soit de la Partie requise".

D'autre part, la Convention de Dublin du 27 septembre 1996, adoptée par les instances de l'Union européenne afin de renforcer la coopération entre les Etats concernés, en accélérant et en simplifiant les procédures d'extradition des résidents sur le territoire de l'Union européenne, complète les silences de la Convention européenne d'extradition, et s'y substitue pour les points déjà envisagés par la première. Or, l'article 8 de la Convention de Dublin dispose que l'extradition ne peut pas être refusée au motif qu'il y a prescription de l'action ou de la peine selon la législation de l'Etat membre requis. La prescription de l'Etat requérant doit, seule, être prise en considération. L'entrée en vigueur de cette convention étant tributaire des diligences des Etats membres de l'Union européenne, la Convention de Dublin n'est entrée en vigueur en France que le 1er juillet 2005, et en Pologne, Etat requérant dans l'affaire soumise à la Cour de cassation, le 18 juillet 2006.

En l'espèce, les faits reprochés à la personne faisant l'objet de la demande d'extradition consistaient en un meurtre, commis le 30 octobre 1992 en Pologne, et en un vol avec effraction et un recel, commis dans la nuit du 5 au 6 novembre 1992 dans le même Etat. Devant la chambre de l'instruction, la défense du suspect arguait de ce qu'en l'absence d'acte interruptif de prescription entre le 7 novembre 1998 et le mois de mars 2002 (8), selon la loi française, la prescription de l'action publique était acquise le 7 novembre 2001 pour les deux délits. Elle était donc largement acquise lorsque entrait en vigueur la Convention de Dublin dans les rapports entre la France et la Pologne, soit le 18 juillet 2006. Or, en vertu de la règle selon laquelle une loi nouvelle ne peut faire renaître une prescription déjà acquise (9), l'article 8, alinéa 1er, de ladite Convention, qui oblige désormais à ignorer les règles de prescription de l'Etat requis, ne pouvait recevoir application en l'espèce.

Cette solution, pourtant justement argumentée, a été rejetée par la chambre de l'instruction. Cette dernière a rendu un avis favorable à l'extradition au motif que "ne peut pas être opposé à l'application de cette disposition le principe de la non rétroactivité de la loi pénale, dès lors que les effets défavorables d'une modification d'un régime de prescription ne peuvent s'analyser en une peine au sens de l'article 7 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme". Ce faisant, la chambre de l'instruction fait rétroagir la loi nouvelle, alors que celle-ci ne s'applique en principe qu'aux situations en cours au jour de son entrée en vigueur. On ne peut considérer comme encore en cours une situation qui s'est achevée par l'effet des règles de prescription.

Dans l'arrêt du 8 février 2012, la Cour de cassation ne s'intéresse pas à cette divergence d'interprétation. Elle déclare irrecevable le pourvoi fondé sur ce moyen, l'article 696-15, alinéa 5, du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L0815DYT) réservant à une hypothèse unique l'ouverture du pourvoi en cassation. En effet, selon ce texte, "le pourvoi formé contre un avis de la chambre de l'instruction ne peut être fondé que sur des vices de forme de nature à priver cet avis des conditions essentielles de son existence légale". Le sens retenu pour l'expression "vices de forme" laisse peu de place à la critique des avis rendus par les chambres d'instruction sur les demandes d'extradition qui leur sont soumises. L'intervention judiciaire est ainsi fortement encadrée dans un domaine qui relève en principe du politique.

L'autre problème posé par cette même décision était celui de l'intervention d'un avocat étranger au soutien de la défense de son client, également étranger. Etant accompagné d'un avocat français, l'avocat étranger a cru pouvoir s'exprimer à l'audience dans sa langue maternelle, considérant que ses propos seraient traduits par l'interprète présent pour son client. La Cour de cassation rejette cette possibilité et rappelle, en s'appuyant sur de nombreux fondements, que le français est la seule langue de procédure admise devant les juridictions répressives françaises. Le bénéfice de l'interprète ne profite qu'aux particuliers.

Madeleine Sanchez, docteur en droit, IDP UT1 (EA 1920)


(1) Cass. crim., 21 juin 2011, n° 11-80.003, F-P+B (N° Lexbase : A5150HUB), nos obs. in Chronique de procédure pénale - Juillet 2011, Lexbase Hebdo n° 450 du 28 juillet 2011 - édition privée (N° Lexbase : N7203BSL) ; Cass. crim., 6 décembre 2011, n° 11-80.419, F-P+B (N° Lexbase : A1988H4E), nos obs. in Chronique de procédure pénale - Janvier 2012, Lexbase Hebdo n° 468 du 12 janvier 2012 - édition privée (N° Lexbase : N9557BSR).
(2) C'est la raison pour laquelle, notamment, la prescription de l'action publique est suspendue durant la procédure alors mise en oeuvre : cf. C. pr. pén., art. 41-1 (N° Lexbase : L7207IMU). On suspend le temps durant lequel aucune décision n'a encore à être prise.
(3) Cass. crim., 7 décembre 2005, n° 05-85.876, F-P+F+I (N° Lexbase : A1792DMC]. Voir cependant, précédemment, Cass. crim., 15 janvier 2003, n° 02-87.341 (N° Lexbase : A8209A4S) : "toute personne mise en examen dont les conversations téléphoniques ont été enregistrées et retranscrites a qualité, au sens de l'article 171 du Code de procédure pénale (N° Lexbase : L3540AZ7), pour contester la régularité de ces mesures".
(4) Cass. crim., 6 septembre 2006, n° 06-84.869 (N° Lexbase : A3669DRC).
(5) C. pr. pén., art. 495-7 et suivants (N° Lexbase : L3860IRE).
(6) Voir les Directives du Conseil constitutionnel à cet égard, dont la Cour de cassation tire en l'espèce toutes les conséquences : il appartient au juge de l'homologation "de vérifier la qualification juridique des faits et de s'interroger sur la justification de la peine au regard des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur" ; "il pourra refuser l'homologation s'il estime que la nature des faits, la personnalité de l'intéressé, la situation de la victime ou les intérêts de la société justifient une audience correctionnelle ordinaire" (Cons. const., décision n° 2004-492, du 2 mars 2004, loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, § 107 N° Lexbase : A3770DBA).
(7) A. Botton, Contribution à l'étude de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, Bibl. sc. crim., t. 49, LGDJ, 2010, n° 301.
(8) Les actes interruptifs de prescription à prendre en considération sont ceux accomplis par les autorités compétentes de l'Etat requérant. En effet, la personne en fuite est en principe cachée sur le territoire de l'Etat requis, qui ignore les soupçons dont elle fait l'objet. Il est donc dans l'impossibilité de procéder à des actes interruptifs, et n'en aurait de toute façon pas compétence dans la plupart des hypothèses concernées. Or, le mécanisme de la prescription sanctionne l'inertie fautive, non l'ignorance d'une situation dissimulée. Elle ne peut donc sanctionner que l'éventuel défaut de diligence des autorités compétentes, c'est-à-dire celles de l'Etat requérant.
(9) C. pén., art. 112-2, alinéa 4 (N° Lexbase : L0454DZT).

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