L'application de l'ancien article 226-10, alinéa 2, du Code pénal (
N° Lexbase : L2218AM4) est contraire à la présomption d'innocence garantie par l'article 6 § 2 de la Convention (
N° Lexbase : L7558AIR). Tel est l'enseignement délivré par la Cour européenne des droits d'Homme dans un arrêt du 30 juin 2011 (CEDH, 30 juin 2011, Req. 30754/03
N° Lexbase : A5584HUD). En l'espèce, Mme K. a déposé plainte contre son ancien supérieur hiérarchique pour viol et harcèlement sexuel. Un non-lieu définitif ayant été prononcé à défaut de preuves suffisantes, l'homme qu'elle avait accusé l'a poursuivi pour dénonciation calomnieuse. Mme K. a été condamnée à payer plus de 12 000 euros de dommages et intérêts. Le juge s'est fondé en particulier sur l'article 226-10 du Code pénal, aux termes duquel, à l'époque, un non-lieu définitif entraînait mécaniquement que les accusations de la personne ayant dénoncé les faits litigieux étaient fausses. Invoquant notamment l'article 6 § 2 de la Convention, Mme K. a dénoncé cette présomption légale de culpabilité. Elle a soutenu que, du fait qu'une ordonnance de non-lieu a été rendue pour insuffisance de charges, la fausseté des faits n'était pas établie et que les juges de la dénonciation calomnieuse auraient donc dû rechercher si les faits étaient établis. Or, il ressort du texte de l'article 226-10 du Code pénal, tel que rédigé à l'époque des faits et de l'interprétation qui en était faite par la jurisprudence interne que la fausseté des faits dénoncés résultait nécessairement d'une décision de cette nature. Certes, le libellé de l'alinéa 2 de l'article 226-10 du Code pénal a abouti, le 9 juillet 2010, à l'adoption d'une loi qui remplaça dans le texte de l'article 226-10 les termes "
déclarant que la réalité du fait n'est pas établie " par " déclarant que le fait n'a pas été commis" (loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010
N° Lexbase : L7042IMR). Selon le texte nouveau, il faut désormais que la personne dénoncée ait été déclarée, par une décision ayant autorité de chose jugée, non coupable du fait en question. Mais, dans la présente affaire, la Cour constate que la requérante s'est trouvée exactement dans la situation dénoncée à la fois par la Cour de cassation et par l'Assemblée nationale et à laquelle la loi de juillet 2010 a voulu remédier. Elle ne pouvait donc aucunement se disculper de l'accusation de dénonciation calomnieuse portée contre elle dès lors que la personne dénoncée par elle avait pu obtenir le bénéfice du doute quant à la réalité du fait ayant fait l'objet de la dénonciation. La Cour considère que, dans ces conditions, la requérante n'a pas pu bénéficier d'un procès équitable et de la présomption d'innocence. Partant, il y a eu violation de l'article 6 §§ 1 et 2 de la Convention.
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