Le Quotidien du 22 mai 2018 : Pénal

[Brèves] Terrorisme : le délit d’apologie de terrorisme déclaré conforme à la Constitution

Réf. : Cons. const., décision n° 2018-706 QPC, du 18 mai 2018 (N° Lexbase : A9687XMQ)

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par June Perot

le 18 Mai 2018

► Les dispositions de l’article 421-2-5 du Code pénal (N° Lexbase : L8378I43) qui répriment le délit d'apologie publique d'actes de terrorisme d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, peine portée à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende lorsque le délit a été commis en utilisant un service de communication au public en ligne, de l’article 422-3 du Code pénal (N° Lexbase : L2510IBL), qui instaurent des peines complémentaires susceptibles d'être prononcées à l'encontre des auteurs de ce délit (interdiction des droits civiques, civils et de famille, interdiction d’exercer une fonction publique, etc.), ainsi que de l'article 422-6 (N° Lexbase : L6420ISL) qui punit les personnes «coupables d'actes de terrorisme», à une peine complémentaire de confiscation de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition sont conformes la Constitution. Telle est la position adoptée par le Conseil constitutionnel dans sa décision rendue le 18 mai 2018 (Cons. const., décision n° 2018-706 QPC, du 18 mai 2018 N° Lexbase : A9687XMQ).

 

Le Conseil constitutionnel avait été saisi par la Chambre criminelle le 27 février 2018 (Cass. crim., 27 février 2018, n° 17-83.602, FS-D N° Lexbase : A0557XGQ), laquelle avait estimé que les peines principales et complémentaires encourues pour le délit précité pourraient méconnaître le principe de nécessité et de proportionnalité des peines et porter une atteinte excessive à la liberté de communication.

 

Dans le cadre de cette QPC, le requérant faisait valoir que ces dispositions méconnaîtraient le principe de légalité des délits et des peines, faute pour le législateur d'avoir suffisamment circonscrit le champ d'application de ce délit. Elles violeraient la liberté d'expression, dès lors qu'elles incriminent un comportement sans imposer que son auteur manifeste une intention terroriste et sans exiger un risque avéré de passage à l'acte terroriste. Il soutenait, enfin, que les peines sanctionnant ce délit pourraient contrevenir aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines. 

 

Le Conseil constitutionnel réfute ces critiques et formule une réponse en trois points :

 

  • S’agissant de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines

 

Le Conseil relève qu'il résulte de la définition du délit d'apologie de terrorisme établie par l'article 421-5 du Code pénal que le comportement incriminé doit, d'une part, inciter à porter un jugement favorable sur une infraction expressément qualifiée par la loi d'«acte de terrorisme» ou sur son auteur. D'autre part, ce comportement doit se matérialiser par des propos, images ou actes présentant un caractère public, c'est-à-dire dans des circonstances traduisant la volonté de leur auteur de les rendre publics. Dès lors, les dispositions contestées ne revêtent pas un caractère équivoque et sont suffisamment précises pour garantir contre le risque d'arbitraire

 

  • S’agissant de la méconnaissance des principes de nécessité et de proportionnalité des peines


Le Conseil constitutionnel relève notamment qu'en aggravant le montant de la peine encourue par l'auteur du délit lorsque celui-ci a été commis en utilisant un service de communication au public en ligne, le législateur a pris en compte l'ampleur particulière de la diffusion des messages prohibés que permet ce mode de communication, ainsi que son influence dans le processus d'endoctrinement d'individus susceptibles de commettre des actes de terrorisme. Le Conseil constitutionnel juge qu'au regard de la nature des comportements réprimés, les peines instituées, qui sont prononcées en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur, ne sont pas manifestement disproportionnées.

 

  • S’agissant de l’atteinte à la liberté d’expression et de communication invoquée

 

Sur ce point, le Conseil relève qu'en instituant le délit d'apologie publique d'actes de terrorisme, le législateur a entendu prévenir la commission de tels actes et éviter la diffusion de propos faisant l'éloge d'actes ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur. Ce faisant, il a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et des infractions, dont participe l'objectif de lutte contre le terrorisme.

 

A noter qu’il relève, en outre, que l'apologie publique, par la large diffusion des idées et propos dangereux qu'elle favorise, crée par elle-même un trouble à l'ordre public et que les actes de terrorisme dont l'apologie est réprimée sont des infractions d'une particulière gravité susceptibles de porter atteinte à la vie ou aux biens. L'atteinte portée à la liberté d'expression et de communication par les dispositions contestées est donc nécessaire, adaptée et proportionnée à l'objectif poursuivi par le législateur.

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