Le droit à la présomption d'innocence qui interdit de présenter publiquement une personne poursuivie pénalement comme coupable, avant condamnation, d'une infraction pénale n'a pas pour effet d'interdire à un employeur de se prévaloir de faits dont il a régulièrement eu connaissance au cours d'une procédure pénale à l'appui d'un licenciement à l'encontre d'un salarié qui n'a pas été poursuivi pénalement. La procédure disciplinaire étant indépendante de la procédure pénale, l'exercice par l'employeur de son pouvoir disciplinaire ne méconnaît pas le principe de la présomption d'innocence lorsque l'employeur prononce une sanction pour des faits identiques à ceux visés par la procédure pénale. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 13 décembre 2017 (Cass. soc., 13 décembre 2017, n° 16-17.193, FS-P+B
N° Lexbase : A1296W8I).
Dans cette affaire, un salarié fait l'objet d'une audition par les services de police pour des faits d'infraction à la législation sur les stupéfiants au sein du parc d'attractions dans lequel il travaille. Il n'est finalement pas mis en examen et ne fait pas l'objet d'une condamnation dans cette procédure. La constitution de partie civile de l'employeur est cependant déclarée recevable, une copie du dossier pénal étant communiquée à l'avocat. Le salarié est par la suite licencié pour faute. Contestant son licenciement, il saisit la juridiction prud'homale, le procureur de la République ayant autorisé l'avocat l'employeur à produire dans le cadre de cette instance, différentes pièces de la procédure pénale dont le procès-verbal d'audition du salarié.
La cour d'appel (CA Paris, Pôle 6, 11ème ch., 18 mars 2016, n° 15/03424
N° Lexbase : A3923RAK) prononce la nullité du licenciement, celui-ci étant intervenu en violation de la présomption d'innocence. L'employeur forme un pourvoi devant la Cour de cassation.
Enonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse et annule l'arrêt de la cour d'appel au visa des articles 6, § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (
N° Lexbase : L7558AIR), 9 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 (
N° Lexbase : L1373A9Q) et 9-1 du Code civil (
N° Lexbase : L3305ABZ ; cf. l’Ouvrage "Droit du travail"
N° Lexbase : E2765ETL).
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