Lorsqu'il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif, notamment, aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, le juge doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel (voir CE Ass., 28 décembre 2009, n° 304802
N° Lexbase : A0493EQC et lire
N° Lexbase : N9786BME). Les parties à ce contrat ne peuvent invoquer un manquement aux règles de passation, ni le juge le relever d'office, aux fins d'écarter le contrat pour le règlement du litige. Il en va autrement lorsque, eu égard, d'une part, à la gravité de l'illégalité et, d'autre part, aux circonstances dans lesquelles elle a été commise, le litige ne peut être réglé sur le fondement de ce contrat. Telle est la solution de deux arrêts rendus par le Conseil d'Etat le 12 janvier 2011 (CE 2° et 7° s-s-r., 12 janvier 2011, n° 338551, publié au recueil Lebon
N° Lexbase : A8777GPR, et n° 332136, mentionné aux tables du recueil Lebon
N° Lexbase : A8756GPY). Dans la première affaire (n° 338551), le Crédit municipal de Paris a conclu, en application du 10° du I de l'article 104 du Code des marchés publics alors en vigueur (
N° Lexbase : L4327DAI), avec M. X, architecte, un marché négocié. Le Crédit municipal de Paris ayant informé ce dernier de mettre fin au marché litigieux, il a demandé à être indemnisé en application du CCTP. Le tribunal administratif saisi a rejeté cette demande, au motif que le marché litigieux, fractionné pour contourner les règles de passation du Code des marchés publics, était entaché de nullité, position confirmée par la cour administrative d'appel (CAA Paris, 4ème ch., 9 février 2010, n° 08PA03473
N° Lexbase : A3794ETP). Pour constater la nullité du contrat conclu par le Crédit municipal de Paris et M. X et écarter, en conséquence, son application, la cour s'est bornée à relever que le marché avait été passé en méconnaissance du seuil de 700 000 francs fixé par les dispositions du 10° du I de l'article 104 du Code des marchés publics, sans rechercher si, eu égard, d'une part, à la gravité de l'irrégularité et, d'autre part, aux circonstances dans lesquelles elle avait été commise, le litige ne pouvait être réglé sur le fondement du contrat. En statuant ainsi, elle a donc commis une erreur de droit. Dans la seconde espèce (n° 332136), aucune des irrégularités susceptibles d'affecter la procédure d'attribution du marché, et tirées soit de l'inapplication par elle-même des dispositions du Code des marchés publics, soit des dispositions du décret n° 93-584 du 26 mars 1993 (
N° Lexbase : L2095IPB), ne saurait être regardée comme un vice d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel (cf. l’Ouvrage "Marchés publics"
N° Lexbase : E4829ESN).
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