Réf. : CE 9° et 10° s-s-r., 16 octobre 2009, n° 308308, M. Giraud (N° Lexbase : A0751EMR)
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par Frédéric Dal Vecchio, Juriste-Fiscaliste, Chargé d'enseignement à l'Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
le 07 Octobre 2010
Au cas particulier, le contribuable a créé en 1998, avec sa soeur et son épouse, la SARL Jalco, relevant du régime des sociétés de personnes, et proposant des prestations en matière de saisie et de traitement informatique de données économiques et financières, de suivi administratif et de conseil en gestion d'entreprise. Cette société a réalisé, pour les années 1998 à 2000 sujettes à une vérification de comptabilité, la quasi-totalité de son chiffre d'affaires avec plusieurs sociétés relevant du secteur agricole dont elle a assuré le secrétariat et la comptabilité avec les moyens matériels ayant auparavant appartenu à deux de ces sociétés avec le concours de l'épouse du contribuable et dans les mêmes locaux. On apprend, non sans surprise, à la lecture de l'arrêt d'appel (CAA Bordeaux, 4ème ch., 7 juin 2007, n° 04BX00974, M. Alain Giraud N° Lexbase : A8174DXZ), que la société Jalco a assuré des prestations comptables à des tiers, activité pourtant réservée aux professionnels libéraux que sont les experts-comptables (3) dont la profession est réglementée par l'ordonnance du 19 septembre 1945, instituant un monopole légal à leur profit (ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, portant institution de l'Ordre des experts-comptables et réglementant le titre et la profession d'expert-comptable N° Lexbase : L8059AIC), et dont la violation emporte des sanctions pénales à l'encontre des contrevenants (Cass. crim., 19 mai 2004, n° 03-83.647 N° Lexbase : A6351DC9 ; Cass. crim., 22 février 1996, n° 95-82.506 N° Lexbase : A9166AB4).
Dans ce dossier, tout démontrait qu'il s'agissait d'une restructuration d'activités préexistantes à telle enseigne que les circonstances citées par le juge de l'impôt sont topiques : ainsi, le tribunal administratif de Poitiers (TA Poitiers, 25 mars 2004, n° 0300232, M. Alain Giraud, N° Lexbase : A1723EMR) va considérer que ces fonctions de gestion étaient préexistantes aux entreprises clientes de la société Jalco, car l'instruction a fait apparaître que le dirigeant de la société redressée était commun à presque toutes les entreprises clientes et que seule une infime partie de son chiffre d'affaires était réalisée avec une entreprise avec laquelle il n'y avait pas de communauté d'intérêts pour le seul exercice 2000. Tant devant la cour administrative d'appel de Bordeaux que devant le juge de cassation, les critiques du contribuable ne trouveront pas grâce, dès lors qu'il s'avère, en fait, que les prestations proposées par la société Jalco ne sont que la conséquence d'un regroupement d'activités exercées auparavant au sein des structures "clientes".
Cette suite de décisions rendue par les juridictions, que l'on peut rapprocher d'un arrêt de 2004, dans lequel le défaut d'autonomie administrative s'analysait comme une émanation d'une entreprise préexistante (CAA Nantes, 4 février 2004, n° 00NT02037, Société Brioviande N° Lexbase : A0819DCC), démontre le contrôle très serré des circonstances de fait permettant de faire le départ entre les entreprises réellement nouvelles et celles qui tentent de faire croire qu'elles le sont. En effet, la jurisprudence et la doctrine administrative ont fourni des éléments d'appréciation permettant de les distinguer (instruction du 5 novembre 2001, BOI 4 A-6-01 N° Lexbase : X8207AA9) : l'identité au moins partielle d'activité, l'existence de liens privilégiés entre l'entreprise créée et l'entreprise préexistante et le transfert de moyens d'exploitation de l'entreprise préexistante à l'entreprise nouvellement créée caractérisent la restructuration d'activités préexistante (v., notamment, CE 9° et 10° s-s-r., 10 novembre 2006, n° 271520, Société SAEML Sovameuse N° Lexbase : A2875DSB) et ce, quelles qu'en soient l'ampleur, la date et les modalités (CE 3° et 8° s-s-r., 18 mai 2005, n° 270343, M. Encinas N° Lexbase : A3553DIG ; CE 3° s-s., 3 septembre 2007, n° 270344, M. Moury N° Lexbase : A0591DYK ; CE 3° s-s., 3 septembre 2007, n° 270345, M. et Mme Buffat N° Lexbase : A0592DYL). Au cas présent, les conditions caractérisant la restructuration d'activités préexistantes étaient remplies justifiant, ainsi, le rejet du bénéfice des dispositions de l'article 44 sexies du CGI.
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