Réf. : Loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, de financement de la Sécurité sociale pour 2009 (N° Lexbase : L2678IC8)
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la Sécurité sociale"
le 07 Octobre 2010
A - Incitation des entreprises à maintenir les seniors en emploi sous peine du versement d'une pénalité
L'article 87 (C. trav., art. L. 2241-4 N° Lexbase : L2798ICM ; CSS, art. L. 138-24 N° Lexbase : L2960ICM à L. 138-27 nouveaux et L. 241-3 N° Lexbase : L3113ICB) incite les entreprises à conclure un accord en faveur de l'emploi des salariés âgés ou, à défaut, à élaborer un plan d'action dans ce domaine, sous peine d'être soumises à une pénalité. Le Gouvernement a présenté, le 26 juin 2008, des mesures spécifiques pour l'emploi des seniors et a décidé de les mettre en oeuvre dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009. Prenant acte des limites des mesures purement incitatives, le Gouvernement a fait le choix, pour 2009, d'une politique plus directive. L'article 87 de la LFSS 2009 met en place un dispositif visant à mieux intégrer les seniors dans la politique de gestion des ressources humaines des entreprises.
L'article 87-II de la LFSS 2009 insère un chapitre VIII, intitulé "Pénalités", dans le titre III, consacré aux dispositions communes relatives au financement de la Sécurité sociale, du livre Ier du Code de la Sécurité sociale. Ce chapitre est composé de quatre articles. L'article L. 138-24 dispose que les entreprises employant au moins cinquante salariés ou appartenant à un groupe comprenant au moins cinquante salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l'employeur, lorsqu'elles ne sont pas couvertes par un accord ou un plan d'action relatif à l'emploi des salariés âgés. Le montant de la pénalité est fixé à 1 % des rémunérations ou gains versés aux salariés au cours des périodes au titre desquelles l'entreprise n'est pas couverte par un accord ou un plan d'action. Le produit de cette pénalité sera affecté à la CNAV. L'article L. 138-25 (N° Lexbase : L3018ICR) ajoute que cet accord, conclu pour une durée maximale de trois ans, devra comporter un objectif chiffré de maintien dans l'emploi ou de recrutement des salariés âgés ; au moins trois actions en faveur de l'emploi des salariés âgés, choisies sur une liste fixée par décret et adaptées aux spécificités de l'entreprise (tutorat, formation, temps partiel de fin de carrière, etc.) ; et des modalités de suivi de cet objectif et de ces actions.
L'article L. 138-26 (N° Lexbase : L2885ICT) prévoit que, à défaut d'accord d'entreprise ou de groupe, les entreprises pourront élaborer un plan d'action répondant aux mêmes exigences, après consultation des institutions représentatives du personnel (avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel). Elles ne seront, alors, pas soumises à la pénalité prévue à l'article L. 138-24. La durée maximale de ce plan d'action, qui devra faire l'objet d'un dépôt auprès de l'autorité administrative, est de trois ans. Enfin, les entreprises de moins de 300 salariés ou appartenant à un groupe de moins de 300 salariés, qui n'ont pas conclu d'accord ou élaboré de plan d'action à leur niveau, mais qui sont couvertes par un accord de branche ayant reçu un avis favorable du ministre chargé de l'Emploi, seront exemptées de pénalité. Le ministre est donc appelé à apprécier si l'accord de branche comporte des mesures relatives à l'emploi des salariés âgés. Cet avis est opposable aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 (N° Lexbase : L2321IBL) (Urssaf) et L. 752-4 (N° Lexbase : L7767G7S) (caisses générales de Sécurité sociale) du Code de la Sécurité sociale, ainsi qu'à l'article L. 725-3 du Code rural (N° Lexbase : L1488ANG) (caisses de mutualité sociale agricole).
Afin de faciliter la démarche de négociation des entreprises, l'article L. 138-27 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3086ICB) prévoit que l'autorité administrative compétente peut être sollicitée par toute entreprise afin de vérifier que l'accord ou le plan d'action, élaboré par elle, répond bien aux conditions fixées à l'article L. 138-25 du même code. Pour renforcer la protection des entreprises, le silence de l'administration, pendant un délai fixé par décret, vaut décision de conformité. En outre, sa réponse (même implicite) est opposable aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 (Urssaf) et L. 752-4 (caisses générales de sécurité sociale) du Code de la Sécurité sociale, ainsi qu'à l'article L. 725-3 du Code rural (caisses de mutualité sociale agricole), pour une durée ne pouvant excéder la durée de validité des accords ou plans d'action.
L'article 87- IV de la LFSS 2009 fixe au 1er janvier 2010 la date d'application de ces mesures, ce qui laisse plus de deux ans aux entreprises pour conclure des accords ou mettre au point des plans d'actions sur l'emploi des salariés âgés (3).
B - Cumul emploi retraite
L'article 88 de la LFSS 2009 (CSS, art. L. 161-22 N° Lexbase : L2925ICC, L. 352-1 N° Lexbase : L4446ADZ, L. 634-6 N° Lexbase : L2945IC3, L. 643-6 N° Lexbase : L2998ICZ, L. 723-11-1 N° Lexbase : L3121ICL ; C. rur., art. L. 732-39 N° Lexbase : L2918IC3 ; C. pens. retr., art. L. 84 N° Lexbase : L2936ICQ) prévoit la libéralisation du cumul emploi retraite pour tous les retraités à partir de soixante ans, s'ils ont cotisé la durée nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein ou, à défaut, à partir de soixante-cinq ans.
Dans le secteur privé, la limitation du cumul d'un emploi et d'une retraite date de l'ordonnance n° 82-290 du 30 mars 1982. Le dispositif de limitation s'appliquait aussi bien aux retraites de base des salariés qu'aux pensions civiles et militaires de retraite des fonctionnaires. Elle a été conçue comme une contrepartie à l'abaissement de soixante-cinq à soixante ans de l'âge de la retraite. La principale condition posée au cumul d'un emploi et d'une retraite consistait à subordonner le service d'une pension de retraite à la rupture définitive, par le salarié, de tout lien professionnel avec son dernier employeur et, pour les assurés exerçant une activité non salariée avant le départ à la retraite, à la cessation définitive de l'activité exercée en dernier lieu. L'article 15 de la loi du 21 août 2003 (CSS, art. L. 161-22 et L. 364-6) a simplifié et harmonisé, pour les assurés du secteur privé, les règles relatives à la limitation du cumul d'une activité salariée et la perception d'une retraite. Le cumul est, désormais, soumis à une double condition de rupture du lien avec le dernier employeur avant la liquidation de la pension : un assuré ne peut reprendre une activité dans la dernière entreprise qui l'employait avant son départ en retraite qu'à l'issue d'une durée minimale de six mois après la liquidation de sa retraite ; et une condition de plafond de ressources totales (les ressources totales dont l'assuré dispose au titre de ses pensions de base et complémentaires, ainsi que de ses revenus d'activité, ne peut excéder la moyenne de ses salaires bruts mensuels soumis à la CSG au cours de ses trois derniers mois d'activité).
L'article 105 de la LFSS pour 2007 (loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, de financement de la Sécurité sociale pour 2007 N° Lexbase : L8098HT4) a assoupli les conditions du cumul emploi retraite, afin d'encourager l'utilisation du dispositif, notamment, par les travailleurs ayant de bas salaires. La loi a maintenu la règle selon laquelle la somme des pensions de retraite et des revenus d'activité professionnelle ne doit pas être inférieure au montant du dernier salaire d'activité, mais elle a permis de déroger à ce plafond, dès lors que les revenus tirés des pensions de retraite et de l'activité professionnelle nouvelle sont inférieurs à 1,6 fois le Smic.
Le régime du cumul emploi retraite des fonctionnaires a été défini par l'article 64 de la loi de 2003. Le cumul est libre en cas de prise d'activité dans le secteur privé. Il n'est autorisé, en cas de reprise d'activité dans la fonction publique, que si le revenu d'activité est, au maximum, égal au tiers du montant brut de sa pension ; à défaut, un abattement est appliqué (C. pens. retr., art. L. 84 à L. 86-1).
L'article 88-I concerne les pensionnés du régime général et du régime des salariés agricoles. Il modifie l'article L. 161-22 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2925ICC) afin de supprimer la condition selon laquelle la rupture du lien professionnel entre l'employeur et son salarié doit être définitive pour le service d'une pension de vieillesse ; et de permettre, par dérogation aux règles actuellement en vigueur, de cumuler sans restriction une pension de vieillesse et une activité professionnelle. Sont, ainsi, levées les deux limites précitées : délai de latence de six mois avant de retourner chez son dernier employeur et plafond de cumul de ressources. Deux conditions doivent, toutefois, être remplies par le pensionné : avoir liquidé ses pensions de vieillesse auprès de la totalité des régimes de retraite de base et complémentaires légalement obligatoires, dont il a relevé (cette disposition s'applique aux pensions personnelles de droit direct) ; et avoir liquidé ses pensions de retraite, soit à partir de l'âge de soixante-cinq ans (âge prévu au 1° de l'article L. 351-8 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L7663DKZ), soit à partir de l'âge de soixante ans (âge prévu par le premier alinéa de l'article L. 351-1 N° Lexbase : L7665DK4 du même code) s'il a justifié d'une durée d'assurance ouvrant droit au taux plein.
L'article 88-III étend les nouvelles règles de cumul aux régimes des professions artisanales, industrielles et commerciales, ainsi qu'au régime des professions libérales ; l'article 88-IV aux avocats ; l'article 88-V aux non-salariés des professions agricoles et l'article 88-VI, en complétant l'article 84 du Code des pensions civiles et militaires de retraite, aux fonctionnaires (4).
C Surcote
L'article 89 (CSS, art. L. 351-10 N° Lexbase : L2811IC4 et C. pens. retr., art. L. 14 N° Lexbase : L2920IC7) prévoit que le bénéfice de la surcote sera élargi aux personnes recevant le minimum contributif et que le taux de surcote sera revalorisé pour la rendre plus attractive. Créé par l'article 25 de la loi du 21 août 2003, le dispositif de surcote (ou coefficient de majoration) vise à favoriser le maintien en emploi des salariés âgés : les assurés qui poursuivent leur activité professionnelle après soixante ans et au-delà de la durée nécessaire pour bénéficier d'une retraite à taux plein, voient leur pension majorée (CSS, art. L. 351-1-2 N° Lexbase : L7667DK8). En 2007, seulement 7,6 % des attributions de droits directs à pension de retraite par la Cnav ont donné lieu à une surcote. Le gain mensuel, qui évolue en fonction du montant de la pension moyenne et du nombre de trimestres de surcote, s'établit à 35,7 euros, soit 5,90 euros par trimestre de surcote. La surcote permet, ainsi, de majorer de 5 % les pensions liquidées par le régime (5).
Les études montrent que le coefficient de majoration n'a pas pleinement atteint ses objectifs. Il se révèle insuffisamment incitatif pour retarder les départs en retraite des assurés. La proportion des nouveaux retraités bénéficiaires d'une surcote, à situation démographique constante, augmente régulièrement : une meilleure connaissance du dispositif et une valorisation accrue des trimestres cotisés supplémentaires devraient permettre d'accroître l'efficacité du dispositif.
Cette réforme a été proposée par le conseil d'administration de la Cnav, faisant valoir que les bénéficiaires du minimum contributif sont actuellement exclus du dispositif de la surcote. En effet, la surcote est calculée à partir du montant initial du droit propre de l'assuré, c'est-à-dire avant l'éventuelle application du minimum contributif et sans prise en compte des avantages complémentaires (majorations pour enfant, pour conjoint à charge, etc.). Or, si le montant du droit propre est inférieur au minimum contributif, le bénéfice de la surcote sera annulé en tout ou partie par l'application du minimum contributif. Ce qui n'incitera pas, au final, l'assuré à poursuivre son activité. L'article 89 de la LFSS 2009 permet aux assurés concernés par le minimum contributif de bénéficier pleinement de la surcote.
L'article 89-II tend à revaloriser le taux de surcote. Ce taux est fixé par décret pour les assurés relevant d'un régime d'assurance du secteur privé (pour les fonctionnaires, il dépend de la loi). Dans le régime général, le régime social des indépendants (artisans, commerçants et industriels) et les régimes des professions agricoles (exploitants et salariés), le taux de surcote est actuellement de 0,75 % du premier au quatrième trimestre cotisé au-delà de la durée d'assurance et périodes équivalentes ouvrant droit au taux plein (soit 3 % la première année) ; 1 % par trimestre à partir du cinquième trimestre (soit 4 % les années suivantes) ; 1,25 % pour chaque trimestre accompli au-delà de l'âge de soixante-cinq ans (soit 5 % par année). Le taux de surcote appliqué par le régime de base des professions libérales est de 0,75 % par trimestre. Pour les fonctionnaires, la surcote se traduit par une majoration de 0,75 % par trimestre de services (et non par trimestre cotisé) effectué au-delà de soixante ans (en plus du nombre de trimestres permettant d'obtenir le taux plein), dans la limite de vingt trimestres.
L'objectif du Gouvernement, fixé au printemps 2008, est de porter, par décret, le taux de surcote à 5 % pour toutes les années travaillées à compter du 1er janvier 2009. L'article 89-II de la LFSS 2009 met en oeuvre cette volonté pour les fonctionnaires, en modifiant l'article L. 14 du Code des pensions civiles et militaires de retraite, qui définit les modalités de prise en compte de la durée d'assurance dans le calcul des pensions de retraite des fonctionnaires. La LFSS 2009 substitue à la notion de "trimestres de services" celle de "trimestres d'assurance" qui est utilisée pour tous les assurés du secteur privé. Le législateur a, également, modifié la règle de prise en compte, pour le bénéfice d'une surcote, du nombre de trimestres de services accomplis au-delà de la durée d'assurance exigée pour obtenir une liquidation de pension au taux maximum par les fonctionnaires au moins âgés de soixante ans. Jusqu'à présent, le nombre de trimestres de services accomplis par le fonctionnaire est arrondi à l'entier supérieur. Cette règle représente un avantage par rapport au secteur privé, où le trimestre doit avoir été entièrement cotisé pour être validé. En outre, pour qu'une pension de fonctionnaire soit majorée par une surcote, il faut que la pension soit liquidée par un fonctionnaire achevant sa carrière professionnelle. Si un fonctionnaire quitte l'administration et achève sa carrière dans le secteur privé, sa pension civile ou militaire de retraite ne bénéficiera pas d'une surcote (les trimestres supplémentaires n'étant pas considérés comme des trimestres de services pour la fonction publique). L'article 89 revient donc sur ces deux dispositions pour rapprocher les règles de surcote dans la fonction publique de celles du secteur privé. L'article 89 porte le coefficient de majoration de 0,75 % par trimestre supplémentaire à 1,25 %.
La réforme de l'arrondi et le relèvement du taux de surcote s'appliqueront aux trimestres d'assurance cotisés et effectués à compter du 1er janvier 2009 ; l'application de la surcote aux bénéficiaires du minimum contributif, ainsi que la substitution des trimestres d'assurance aux trimestres de services entreront en vigueur au 1er avril 2009 (6).
D - Age de la retraite: suppression de la mise à la retraite d'office
L'article 90 (C. trav., art. L. 1221-18 N° Lexbase : L2899ICD et L. 1237-5 N° Lexbase : L2959ICL à L. 1237-8) modifie, à compter du 1er janvier 2010, la possibilité, pour un employeur, de mettre d'office un salarié en retraite. Inciter les entreprises à maintenir les seniors en emploi figure parmi les trois objectifs définis par le Gouvernement, le 27 juin 2008, à l'issue de la concertation sur l'emploi des seniors. Dès lors, la possibilité, pour un employeur, de mettre à la retraite d'office un salarié est en contradiction avec la poursuite de cet objectif. La décision du passage de l'activité à la retraite devrait relever du seul choix du salarié, quel que soit son âge. Dans le cadre de la mobilisation pour l'emploi des seniors, il convient, en effet, de permettre à chaque salarié de pouvoir retarder le moment de son départ en retraite.
L'article L. 1237-5 du Code du travail autorise les employeurs à procéder à la mise à la retraite des salariés âgés d'au moins soixante-cinq ans ; âgés de soixante à soixante-cinq ans s'ils peuvent bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein et si cette mise à la retraite d'office s'effectue dans l'un des cas suivants : jusqu'au 31 décembre 2009, dans le cadre d'un accord collectif étendu, conclu avant le 1er janvier 2008 et fixant des contreparties en termes d'emploi ou de formation professionnelle ; en application d'un accord professionnel (mentionné à l'article L. 5122-4 du même code N° Lexbase : L2047H9P) en cas de cessation d'activité ; dans le cadre d'une convention de préretraite progressive conclue antérieurement au 1er janvier 2005 ; dans le cadre du bénéfice de tout autre avantage de préretraite défini antérieurement à la date de publication de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, portant réforme des retraites.
L'article 90 de la LFSS 2009 introduit quelques changements conséquents.
Le départ du salarié avant l'âge de 65 ans était possible, en cas de cessation d'activité, en application d'un accord professionnel mentionné à l'article L. 5122-4 du Code du travail (C. trav., art. L. 1237-5, al. 2, 2°). La LFSS 2009 prévoit, désormais, cette possibilité de départ à la retraite pour les bénéficiaires d'une préretraite ayant pris effet avant le 1er janvier 2010 et mise en oeuvre dans le cadre d'un accord professionnel (mentionné à l'article L. 5123-6 du Code du travail N° Lexbase : L2063H9B).
Le départ du salarié avant l'âge de 65 ans était possible, dans le cadre du bénéfice de tout autre avantage de préretraite défini antérieurement à la date de publication de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, portant réforme des retraites (C. trav., art. L. 1237-5, al. 2, 4°). La LFSS 2009 limite cette possibilité de départ à la retraite pour les bénéficiaires d'une préretraite ayant pris effet avant le 1er janvier 2010.
La LFSS 2009 a repoussé à 70 ans l'âge auquel le salarié pourra être mis à la retraite d'office par son employeur, sous réserve que celui-ci respecte la procédure décrite aux septième, huitième et neuvième alinéas de l'article L. 1237-5 du Code du travail. Cette procédure prévoit que les salariés, qui le souhaitent, pourront prolonger leur activité au-delà de soixante-cinq ans, sous réserve d'en avoir préalablement manifesté l'intention auprès de leur employeur, et dans la limite de cinq années.
Le septième alinéa dispose que, avant la date à laquelle le salarié atteint l'âge de soixante-cinq ans et dans un délai fixé par décret, l'employeur interroge, par écrit, le salarié sur son intention de quitter volontairement l'entreprise pour bénéficier d'une pension de retraite. Le huitième alinéa précise que, en cas de réponse négative du salarié ou à défaut d'avoir respecté l'obligation mentionnée au septième alinéa, l'employeur ne peut le mettre à la retraite d'office pendant l'année qui suit la date à laquelle le salarié atteint l'âge de soixante-cinq ans. Le neuvième alinéa prévoit que la même procédure est applicable les quatre années suivantes, c'est-à-dire jusqu'à ce que le salarié atteigne l'âge de soixante-dix ans. La mise à la retraite d'office d'un salarié âgé de soixante-cinq ans demeurera donc possible, si celui-ci n'exprime pas la volonté de poursuivre son activité au-delà de cet âge.
Le Conseil constitutionnel s'est prononcé favorablement à cette mesure et ne l'a pas censurée (décision n° 2008-571 DC du 11 décembre 2008 N° Lexbase : A6887EBP). Les requérants faisaient grief à ces dispositions d'être étrangères au domaine des lois de financement de la Sécurité sociale, de priver de garanties légales les exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 (N° Lexbase : L6821BH4) (droit à la santé et au droit au repos) et de porter atteinte au principe d'égalité devant la loi.
Ces trois arguments ont été rejetés par le Conseil constitutionnel. La prolongation d'une activité salariée au-delà du temps nécessaire pour obtenir une pension de retraite à taux plein se traduit par un effet direct sur les dépenses, comme sur les recettes des régimes obligatoires de base : dès lors, les dispositions contestées peuvent figurer dans une loi de financement de la Sécurité sociale. Les dispositions de l'article 90 de la LFSS 2009 se bornent à permettre aux salariés de prolonger chaque année, de manière volontaire, leur activité jusqu'à cinq années supplémentaires : dès lors, elles ne méconnaissent pas les exigences du onzième alinéa du Préambule de 1946 (N° Lexbase : L6821BH4). Enfin, pour le Conseil constitutionnel, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. En l'espèce, les dispositions contestées de la LFSS 2009, qui ne créent aucune différence de traitement entre les salariés, ne méconnaissent pas le principe d'égalité.
II - Branche vieillesse
A - Revalorisation du minimum vieillesse
L'article 73 de la LFSS 2009 (CSS, art. L. 815-1 N° Lexbase : L8707GQK, L. 815-2 N° Lexbase : L8674GQC, L. 815-13 N° Lexbase : L8697GQ8, L. 815-24 N° Lexbase : L2807ICX, L. 815-24-1 nouveau N° Lexbase : L2987ICM et L. 816-2 N° Lexbase : L7528DKZ) autorise le Gouvernement à augmenter progressivement, par décret, le montant du minimum vieillesse et de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), en les fixant à un niveau supérieur à celui qui résulterait de la revalorisation sur les prix prévue par la loi. Le minimum vieillesse a pour objet de garantir un revenu minimal à toutes les personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans (soixante ans en cas d'inaptitude au travail), sous condition de ressources. Il s'agit d'un dispositif constitué de deux prestations : l'allocation de premier étage ou allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS) (3 122,08 euros par an, soit 260,17 euros par mois, au 1er septembre 2008) ; l'allocation supplémentaire vieillesse (4 475,49 euros par an, soit 372,95 euros par mois, au 1er septembre 2008) (7). L'ordonnance n° 2004-605 du 24 juin 2004, simplifiant le minimum vieillesse (N° Lexbase : L5053DZ8), a institué une prestation unique et différentielle : l'allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa). La réforme est entrée en vigueur à compter du 13 janvier 2007. L'Aspa se substitue, pour les nouveaux bénéficiaires, aux deux prestations précitées, ainsi qu'aux sept autres prestations non contributives (c'est-à-dire sans contrepartie d'un versement de cotisations) constitutives du minimum vieillesse, à savoir : l'allocation aux vieux travailleurs non salariés, le secours viager, l'allocation aux mères de famille, l'allocation spéciale vieillesse, l'allocation de vieillesse agricole, l'allocation viagère aux rapatriés et la majoration de l'AVTS prévue en cas d'inaptitude au travail (8).
La fixation du montant du minimum vieillesse et de l'Aspa, ainsi que des montants des plafonds de ressources et des montants limites de récupération sur les successions des bénéficiaires de l'allocation, relève du pouvoir réglementaire. Cependant, il revient au Parlement d'autoriser le Gouvernement à déroger aux dispositions de la loi pour revaloriser le minimum vieillesse et l'Aspa au-delà de l'indexation sur l'évolution des prix à la consommation hors tabac. En effet, l'article 27 de la loi du 21 août 2003 pose la règle d'une revalorisation du minimum vieillesse, comme celle de l'ensemble des pensions, sur l'évolution des prix (CSS, art. L. 816-2).
Enfin, l'article 73-II de la LFSS 2009 modifie et complète l'article L. 815-24 du Code de la Sécurité sociale, relatif à l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI). L'article 73-II-1° supprime la disposition mettant en place l'alignement du plafond de ressources de l'ASI sur le plafond de ressources du minimum vieillesse et de l'Aspa. Il est donc procédé à la déconnexion des deux plafonds, afin d'éviter le relèvement de 25 % du plafond de ressources de l'ASI. L'article 73-II-2° insère un article L. 815-24-1 au Code de la Sécurité sociale pour définir de manière autonome le plafond de ressources propre à l'ASI. Cette nouvelle base légale ne modifie pas la définition actuelle de son plafond de ressources. Selon le droit aujourd'hui en vigueur (CSS, art. L. 815-9 N° Lexbase : L8693GQZ), l'ASI n'est due que si le total de cette allocation et des ressources personnelles de l'intéressé et du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un Pacs ne dépasse pas des plafonds fixés par décret. Cette disposition demeure inchangée (9).
B - Rachat de trimestres pour l'ouverture du droit à retraite anticipée pour carrière longue
L'article 83 de la LFSS 2009 (CSS, art. L. 173-7 nouveau N° Lexbase : L8693GQZ, L. 351-14-1 N° Lexbase : L3072ICR et L. 382-29 N° Lexbase : L3045ICR ; C. rur., art. L. 742-3 N° Lexbase : L2929ICH ; loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, de financement de la Sécurité sociale pour 2007, art. 114) modifie les règles de rachat de trimestres au titre des périodes d'études supérieures ou d'années d'activité incomplète pour l'ouverture du droit à une retraite anticipée pour carrière longue. La retraite anticipée pour longue carrière a été mise en place par les articles 23, 24, 90, 97 et 99 de la réforme des retraites. Elle bénéficie aux travailleurs salariés du régime général, du régime des salariés agricoles, aux exploitants agricoles, aux membres des professions indépendantes ou libérales et aux avocats. Le décret n° 2003-1036 du 30 octobre 2003 (décret relatif à l'abaissement de l'âge de la retraite pour les assurés ayant commencé à travailler jeunes et eu une longue carrière N° Lexbase : L5664DLD) a fixé les âges de début d'activité professionnelle et les durées d'assurance minimales exigés pour être éligible au dispositif. La retraite anticipée pour carrière longue est, ainsi, ouverte, depuis le 1er janvier 2004 aux assurés âgés de cinquante-neuf ans ayant débuté leur activité professionnelle avant l'âge de dix-sept ans, justifiant d'une durée d'assurance validée au moins égale à celle fixée pour obtenir le taux plein majorée de huit trimestres et ayant cotisé sur une période au moins égale à la durée d'assurance exigée pour obtenir le taux plein majorée de quatre trimestres ; aux assurés de cinquante-huit ans ayant débuté leur activité professionnelle avant l'âge de seize ans, dans les mêmes conditions ; et aux assurés âgés de cinquante-six ans ayant débuté leur activité professionnelle avant l'âge de seize ans, selon les mêmes règles.
Selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale, le nombre de bénéficiaires sur 2004-2008 est actuellement évalué à 556 000 et le coût cumulé de la mesure à 8,3 milliards d'euros. Ceci correspond à un surcoût de 13 % par rapport aux prévisions de 2003. Le dispositif de régularisation de cotisations arriérées, défini à l'article L. 351-14-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3072ICR), a été initialement conçu comme une mesure de souplesse pour traiter des cas exceptionnels. Le recours au "rachat" connaît une véritable montée en charge. En effet, le nombre de ces régularisations (majoritairement au titre de périodes d'apprentissage) est passé de moins de 5 000, en 2003, à environ 30 000 par an depuis. Pour le seul régime général, la régularisation des cotisations arriérées aurait produit un supplément de prestations de l'ordre de 350 millions d'euros, en 2006, et d'environ 450 millions, en 2007. Le décret n° 2008-845 du 25 août 2008 (N° Lexbase : L7488IAL) a durci les conditions financières de régularisation d'arriérés de cotisations (10).
L'article 83 de la LFSS 2009 révise, également, le dispositif de rachat de trimestres, pour que celui-ci ne soit pas détourné de son objectif initial et utilisé pour bénéficier d'un départ à la retraite anticipé. Les travaux parlementaires ont relevé l'utilisation, par certains assurés, de cette technique pour augmenter leur durée d'assurance et remplir les conditions pour un départ avant soixante ans. L'article 83 de la LFSS 2009 crée une nouvelle sous-section consacrée au rachat de cotisations au sein de la section III ("coordination en matière d'assurance vieillesse entre divers régimes") du chapitre III ("coordination en matière d'assurance vieillesse et d'assurance veuvage") du titre VII (coordination entre les régimes) du livre Ier du Code de la Sécurité sociale. Cette nouvelle sous-section 9 est composée d'un article unique, l'article 173-7 (N° Lexbase : L2813IC8), selon lequel les versements de cotisations effectués au titre des périodes d'études supérieures ou d'années d'activité incomplète, mentionnés au premier alinéa des articles L. 351-14-1 (pour les salariés du régime général), L. 634-2-2 (pour les membres des professions indépendantes), L. 643-2 (pour les membres des professions libérales), L. 723-10-3 (pour les avocats) du Code de la Sécurité sociale, à l'article L. 732-27-1 du Code rural (pour les exploitants agricoles), ainsi qu'au cinquième alinéa de l'article L. 9 bis du Code des pensions civiles et militaire de retraite (pour les fonctionnaires), ne seront pas pris en compte pour l'ouverture du droit à la retraite anticipée.
Ces dispositions du nouvel article L. 173-7 du Code de la Sécurité sociale seront applicables aux demandes de versement déposées à compter du 15 octobre 2008. Par ailleurs, les trimestres rachetés au titre des années d'études supérieures ou d'années d'activité incomplète continueront à être pris en compte pour le calcul des pensions de vieillesse (11).
(1) Sur le premier volet, lire nos obs., LFSS 2009 : de quelques réformes des branches maladie, accident du travail/maladie professionnelle et famille, Lexbase Hebdo n° 332 du 7 janvier 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N2160BIT).
(2) Bibliograpghie très abondante. V., not., F. Favennec-Héry, L'accord national interprofessionnel relatif à l'emploi des seniors : un premier pas, JCP éd. S, n° 21, 15 novembre 2005, étude n° 1329, p. 14 ; P.-Y. Verkindt, Changer le regard sur le travail des seniors après l'ANI du 13 octobre 2005, SSL, 31 octobre 2005, n° 1234 ; nos obs., Les apports de l'ANI du 13 octobre 2005 aux politiques de vieillissement actif, Lexbase Hebdo n° 191 du 24 novembre 2005 - édition sociale (N° Lexbase : N1192AKD) ; P. Marioni, Accroître l'emploi des travailleurs vieillissants : entre volontés et difficultés, DARES, 1ères informations, 1ères synthèses, 2005-01, n° 04.1 ; Synthèse actualisée d'un ouvrage collectif coordonné par F. Lerais et P. Marioni, Dossier Age et Emploi : synthèse des principales données sur l'emploi des seniors, Document d'études n° 82, Dares, 2004 ; IGAS, Gestion des âges et politiques de l'emploi, Rapport annuel, La documentation française 2004.
(3) A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83 (2008/2009), tome VII, examen des articles, p. 248 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, p. 161 s. ; D. Leclerc, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome V, Assurance vieillesse, pp. 26-44.
(4) A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83 (2008/2009), tome VII, préc., examen des articles, p. 252 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 161 s. ; D. Leclerc, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome V, Assurance vieillesse, préc., pp. 26-44.
(5) Le régime des indépendants se caractérise par des taux de recours à la surcote plus importants que dans le régime général (en 2006, de l'ordre de 10 % chez les artisans et 13 % chez les commerçants). Dans les régimes de la fonction publique, en raison de règles spécifiques, la part des pensions attribuées avec surcote atteint des niveaux encore plus élevés (en 2006, de l'ordre de 19 % à la CNRACL et 25 % dans la fonction publique d'Etat).
(6) A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83 (2008/2009), tome VII, préc., examen des articles, p. 256 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 161 s. ; D. Leclerc, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome V, Assurance vieillesse, préc., pp. 26-44.
(7) Au 1er septembre 2008, le montant global du minimum vieillesse atteint 7 597,57 euros par an, soit 633,12 euros par mois pour une personne seule, et 12 905,40 euros par an, soit 1 135,78 euros par mois pour un couple.
(8) L'Aspa, comme le minimum vieillesse, est attribuée à toute personne âgée d'au moins soixante-cinq ans (ou soixante ans en cas d'inaptitude au travail), sous réserve de respecter les conditions de résidence et de disposer de ressources inférieures à un plafond (7 781,27 euros pour une personne seule et 13 629,44 euros pour un couple, au 1er septembre 2008). Celui-ci est identique à celui du minimum vieillesse, qui continue à être servi aux personnes qui touchaient l'allocation avant la création de l'Aspa.
(9) A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83 (2008/2009), tome VII, préc., examen des articles, p. 217 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 161 s. ; D. Leclerc, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome V, Assurance vieillesse, préc., pp. 26-44.
(10) Afin d'éviter de tels abus, une circulaire de la Direction de la Sécurité sociale DSS/3A n° 2008-17 du 23 janvier 2008 (N° Lexbase : L8037H33) a renforcé les modalités de régularisation des cotisations arriérées concernant les périodes d'activité salariée non cotisées et les périodes d'apprentissage.
(11) A. Vasselle, Rapport Sénat n° 83 (2008/2009), tome VII, préc., examen des articles, p. 239 ; J.-J. Jégou, Avis Sénat n° 84, 2008-2009, préc., p. 161 s. ; D. Leclerc, Rapport Sénat n° 83, 2008-2009, tome V, Assurance vieillesse, préc., pp. 26-44.
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