La lettre juridique n°332 du 8 janvier 2009 : Éditorial

Lois de finances : les Danaïdes avant les Dardanelles ? Ou 2009, l'année de la "sérénisation" fiscale ?

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N2151BII

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la publication

le 27 Mars 2014


Jadis, la promulgation de la loi de finances rythmait le calendrier chargé des fiscalistes, notaires, comptables et autres spécialistes de l'optimisation fiscale, tant toute l'activité des premiers mois de l'année se tournait vers une décortication des modifications et des nouvelles dispositions fiscales entendant régir, ou du moins profondément orienter, l'activité économique de l'année nouvelle.

Puis, la loi de finances rectificative est venu ajouter à la complexité pour ajuster, certes les prévisions budgétaires, mais pour "l'oeil égocentrique" du fiscaliste, essentiellement pimenter la sauce à laquelle il allait être imposé sur les revenus de l'année écoulée ; si bien que, petit à petit, le contenu des lois de finances rectificatives s'est avéré de plus en plus dense, jusqu'à affirmer sa prédominance sur la loi de finances elle-même qui, de toute manière, appellerait, à n'en pas douter, elle aussi une loi rectificative... Il en va ainsi du cycle fiscal, comme du cycle solaire : au solstice d'été, le soleil de la croissance est au zénith (loi "Tepa" en 2007, la "LME" en 2008)... à celui de l'hiver, la dure réalité de la récession oblige aux ajustements (de près de 9 milliards d'euros pour 2008). "L'histoire [de la fiscalité] est une galerie de tableaux où il y a peu d'originaux et beaucoup de copies" (emprunté à Alexis de Tocqueville, in L'Ancien Régime et la Révolution).

Le collectif budgétaire pour 2009, objet de toute l'attention de nos éditions fiscale et sociale de cette semaine, n'échappe pas à la révolution solaire, mais loin d'être à proprement parler révolutionnaire, il marque l'impéritie gouvernementale en matière fiscale. Au carcan communautaire qui, en matière de fiscalité directe et de TVA, régit l'essentiel de la matière, la crise financière et économique ajoute à l'incapacité gouvernementale à dégager quelconque marge de manoeuvre permettant d'élaborer un véritable outil économique, un levier d'orientation digne d'une planification.

Au menu de la Saint Sylvestre, on ne trouvera qu'une extension du crédit d'impôt recherche, la suppression en trois ans de l'imposition forfaitaire annuelle (IFA), l'aménagement des dispositifs permettant aux contribuables de réduire leur impôt sur le revenu sans limitation de montant (régimes "Malraux", "Outre-mer", des "loueurs en meublé"). Enfin, et surtout, la loi de finances pour 2009 traduit plusieurs des engagements en faveur du développement durable et comporte un important volet sur les logements économes en énergie. La liste des crédits d'impôt pour aménagements, travaux, investissements "basse consommation d'énergie" s'allonge à mesure de la promotion de l'agriculture biologique. Gageons que la loi de finances soit prophète en son pays et que, déshabillant Paul pour habiller Jacques, l'étroitesse des marges de manoeuvre budgétaire accentue la responsabilisation écologique par la promotion de "l'éconologie".

La loi de finances rectificative pour 2008, quant à elle, traduit un énième aménagement de la taxe professionnelle -toute réforme ou suppression s'avérant impossible sauf transfert massif de fonds au profit des collectivités territoriales-. A noter que la loi procède à la refonte de la procédure d'abus de droit. D'une part, elle prévoit, désormais, l'application de cette procédure à l'ensemble des impôts et des actes des contribuables et étend la définition de l'abus de droit aux opérations effectuées dans un but exclusivement fiscal. D'autre part, elle instaure une solidarité de paiement des pénalités entre tous les bénéficiaires de l'abus tout en introduisant une modulation de celles-ci entre 80 % et 40 %. Enfin, pour réaffirmer l'indépendance et l'impartialité du comité de répression des abus de droit celui-ci sera désormais dénommé "comité de l'abus de droit fiscal" et sa composition serait élargie à un expert-comptable, un notaire et à un avocat spécialisé en droit fiscal. Contradictoire quand tu nous tiens... Dans le même sens, la procédure de rescrit est conjuguée à toutes les genres et tous les nombres ; le rendement de l'impôt oblige, à la fois, à lutter contre la fraude à la loi et à renforcer la sécurité juridique des contribuables, désormais frileux d'investir, qui est plus sous le joug de l'épée de Damoclès du "bourreau de Béthune". Rassurer le contribuable-investisseur tel est l'objectif de cette profusion de rescrits ; lavé du "péché originel" de l'habilité fiscale, le contribuable pourra se donner à coeur joie au financement privé de l'économie collective.

Les éditions juridiques Lexbase vous présentent leurs meilleurs voeux pour la nouvelle année.

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