La lettre juridique n°332 du 8 janvier 2009 : Sécurité sociale

[Textes] De quelques réformes en droit social/protection sociale introduites par la loi de finances 2009

Réf. : Loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008, de finances pour 2009 (N° Lexbase : L3783IC4)

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la Sécurité sociale"

le 07 Octobre 2010

La lecture attentive des lois de financement de Sécurité sociale (1) et de finances, en fin d'année, est un exercice familier pour les premières et plus inattendu pour les secondes (2). La loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008, de finances pour 2009, contient essentiellement des mesures qui intéressent les fiscalistes et spécialistes des finances publiques, mais, également, sans souci de cohérence ou de logique, des mesures relevant du droit du travail et de la protection sociale. Les premières ont trait aux aides à l'emploi et, plus précisément, aux exonérations de charges sociales : exonération pour les entreprises implantées dans une zone franche urbaine (ZFU) ou dans les DOM-TOM (I). Les secondes intègrent des réformes de l'allocation adulte handicapé (AAH), de l'allocation temporaire d'attente, de l'allocation de fin de formation et, enfin, de l'allocation de parent isolé (API) (II). Ces réformes visent une multitude d'objectifs : rendre plus efficace un dispositif de protection sociale (réforme de l'AAH), reconduire un dispositif qui a produit des effets positifs sur l'emploi (ZFU), favoriser l'emploi dans les DOM-TOM (nouvelle mesure d'exonération de charges sociales), inciter au retour à l'emploi (réforme de l'AAH), faciliter les démarches des allocataires (réforme de l'API) et, surtout, contenir les dépenses de l'Etat (réforme de l'allocation temporaire d'attente ou de l'allocation de fin de formation). Ce dernier objectif justifie la présence de ces réformes dans une loi de finances et non pas de financement de la Sécurité sociale. I - Exonérations de charges sociales

A - ZFU

La loi de finances 2009 (art. 190) réforme le régime des aides accordées aux entreprises implantées dans une ZFU. L'article 12 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville (N° Lexbase : L8850AGU), est modifié. Il prévoit que les salaires sont exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales, ainsi que du versement de transport et des contributions et cotisations au Fonds national d'aide au logement, dans la limite du produit du nombre d'heures rémunérées par le montant du salaire minimum de croissance, majoré de 50 % jusqu'au 31 décembre 2005, et pour les gains et rémunérations versés à compter du 1er janvier 2006, dans la limite du produit du nombre d'heures rémunérées par le montant du salaire minimum de croissance majoré de 40 %. En application de la loi de finances 2009, depuis le 1er janvier 2009, le montant de l'exonération décroît de manière linéaire lorsque la rémunération horaire est supérieure au SMIC, majoré de 40 %, et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à 2,4 fois le SMIC du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2009, à 2,2 fois le SMIC du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010 et à deux fois le SMIC à partir du 1er janvier 2011.

Enfin, la loi de finances 2009 prolonge la durée pendant laquelle les entreprises implantées dans l'une des ZFU (dite de troisième génération) (3) peuvent demander le bénéfice d'exonérations de charges sociales. Initialement, la date du 1er janvier 2009 avait été retenue par le législateur. La loi de finances 2009 prolonge le bénéfice de la mesure jusqu'au 31 décembre 2011 (art. 12 II bis loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, modifié par loi de finances 2009, art. 190).

B - Exonération de cotisations sociales patronales en outre- mer

Le législateur a institué un nouveau dispositif d'aide à l'emploi dédié aux entreprises localisées dans les DOM-TOM (art. 159, CSS, art. L. 752-3-2 N° Lexbase : L0935ICM). En Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, les employeurs, à l'exclusion des entreprises publiques et établissements publics (C. trav., art. L. 2233-1 N° Lexbase : L2335H9D), sont exonérés du paiement des cotisations patronales au titre de la législation de Sécurité sociale, à l'exclusion de celles dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles. L'exonération s'applique aux entreprises, employeurs et organismes (C. trav., art. L. 2211-1, al. 1 N° Lexbase : L5925IAP) occupant dix salariés au plus (4) ; aux entreprises, quel que soit leur effectif, du secteur du bâtiment et des travaux publics, de l'industrie, de la restauration, de la presse, de la production audiovisuelle, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies de l'information et de la communication et des centres d'appel, de la pêche, des cultures marines, de l'aquaculture, de l'agriculture, y compris les coopératives agricoles et sociétés d'intérêt collectif agricoles et leurs unions, ainsi que les coopératives maritimes et leurs unions, du tourisme, de la restauration de tourisme et de l'hôtellerie ; aux entreprises de transport aérien (5) ; aux entreprises assurant la desserte maritime ou fluviale de plusieurs points de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion, de Saint-Barthélemy ou de Saint-Martin, ou la liaison entre les ports de ces départements ou collectivités ou la liaison entre les ports de La Réunion et de Mayotte.

Le montant de l'exonération est calculé chaque mois civil, pour chaque salarié, en fonction de sa rémunération, telle que définie à l'article L. 242-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2700ICY). Lorsque la rémunération horaire est inférieure à un seuil égal au SMIC majoré de 40 %, le montant de l'exonération est égal au montant des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales. A partir de ce seuil, le montant de l'exonération décroît de manière linéaire et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à 3,8 fois le SMIC.

Le montant de l'exonération est égal au montant des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales, lorsque la rémunération horaire est inférieure à un seuil égal au SMIC majoré de 60 %, puis décroît de manière linéaire à partir de ce seuil, et devient nul lorsque la rémunération horaire est égale à 4,5 fois le SMIC, pour les entreprises situées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion respectant les conditions (6).

Le bénéfice de l'exonération est subordonné au fait, pour l'employeur, d'être à jour de ses obligations déclaratives ou de paiement à l'égard de l'organisme de recouvrement (la condition de paiement est considérée comme remplie, dès lors que l'employeur a souscrit et respecte un plan d'apurement des cotisations restant dues et acquitte les cotisations en cours à leur date normale d'exigibilité) ; de ne pas avoir fait l'objet d'une condamnation pénale passée en force de chose jugée soit pour fraude fiscale, soit pour travail dissimulé, marchandage ou prêt illicite de main-d'oeuvre (C. trav., art. L. 5224-2 N° Lexbase : L2549H9B, L. 8224-1 N° Lexbase : L3622H9Z, L. 8224-3 N° Lexbase : L2519IBW à L. 8224-6, L. 8234-1 N° Lexbase : L3642H9R et L. 8234-2 N° Lexbase : L3644H9T).

Cette nouvelle aide à l'emploi est applicable aux cotisations afférentes aux salaires et rémunérations dus à compter du 1er avril 2009.

II - Protection sociale

A - Chômage

  • Allocation temporaire d'attente (ATA)

Le 1° de l'article L. 5423-9 du Code du travail (N° Lexbase : L2833H9S) est modifié par la loi de finances 2009 (art. 156).

Tout demandeur d'asile non hébergé en centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA) et ayant accepté l'offre de prise en charge peut prétendre à l'allocation temporaire d'attente.

Ne peuvent bénéficier de l'ATA les personnes qui proviennent soit d'un pays pour lequel l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a décidé la mise en oeuvre des stipulations du 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, soit d'un pays considéré comme un pays d'origine sûre, au sens du 2° de l'article L. 741-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (N° Lexbase : L5929G4D), à l'exception des cas humanitaires signalés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans des conditions prévues par décret. Le 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève stipule que la convention cesse de s'appliquer aux personnes qui ne peuvent plus refuser la protection du pays dont elles ont la nationalité du fait de l'extinction des circonstances à la suite desquelles la qualité de réfugié leur a été reconnue. Un pays est considéré comme d'origine sûre s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2007, la CIMADE avait demandé au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2006-1380 du 13 novembre 2006, relatif à l'ATA (N° Lexbase : L4863HTB), soulevant, notamment, l'incompatibilité de la base législative dudit décret avec une Directive communautaire. Le Conseil d'Etat a jugé le 1° de l'article L. 5423-9 du Code du travail contraire à la Directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 (N° Lexbase : L4150A9L) (CE 1° et 6° s-s-r., 16 juin 2008, n° 300636, Association La Cimade N° Lexbase : A2370D9N). Selon le juge, les demandeurs d'asile ont droit, dès le dépôt de leur demande et aussi longtemps qu'ils sont admis à se maintenir sur le territoire d'un Etat membre, à bénéficier de conditions matérielles d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, ainsi qu'à une allocation journalière, quelle que soit la procédure d'examen de leur demande. Les étrangers demandant à bénéficier de l'asile qui ont la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûre ont droit, jusqu'à la notification de la décision de l'OFPRA, à bénéficier de conditions matérielles d'accueil comprenant le logement, la nourriture et l'habillement, ainsi qu'une allocation journalière. Il ressort des dispositions qui régissent ces structures que celles-ci ne fournissent ni nourriture, ni habillement et ne servent aucune allocation journalière.

Seule l'ATA, répondant aux conditions fixées par la Directive 2003/9/CE, ne saurait être refusée aux demandeurs d'asile, à l'exception de ceux qui sont hébergés en CADA ou qui ont refusé l'offre de prise en charge (C. trav., art. L. 5423-9, 2° et 3°). L'article 156 de la loi de finances 2009 tire donc les conséquences de la décision du Conseil d'Etat, en supprimant les exclusions jugées non conformes à la Directive.

La loi peut exclure du bénéfice de l'ATA les demandeurs d'asile qui ont déjà introduit une demande en France.

Dans sa décision du 16 juin 2008, le Conseil d'Etat a annulé l'article R. 5423-22 du Code du travail (N° Lexbase : L0354IAD), dans la mesure où il prévoyait que le droit à l'ATA ne pouvait être ouvert qu'une fois. Cela avait pour conséquence d'exclure du bénéfice de l'allocation les demandeurs d'asile qui sollicitaient le réexamen de leur demande sur la base d'éléments nouveaux. Le Conseil d'Etat a jugé que, dès lors que le directeur général de l'OFPRA a décidé qu'il y a lieu de procéder à un nouvel examen de la situation de l'intéressé, rien dans la loi ne s'oppose au versement de l'ATA. L'article 156 de la loi de finances 2009 introduit donc, dans la partie législative du Code du travail, une nouvelle exclusion du bénéfice de l'ATA, s'agissant des demandeurs d'asile déboutés par une décision devenue définitive et présentant une demande de réexamen à l'OFPRA. Il est prévu une exception pour les cas humanitaires signalés par l'OFPRA, dans des conditions à prévoir par décret. La Directive 2003/9/CE autorise le refus du bénéfice des conditions d'accueil lorsqu'un demandeur d'asile a déjà introduit une demande dans le même Etat membre. De fait, l'article 16 de cette Directive prévoit que les Etats membres peuvent limiter ou retirer le bénéfice des conditions d'accueil lorsqu'un demandeur d'asile a déjà introduit une demande dans le même Etat membre (7).

  • Allocation fin de formation

L'article L. 5423-7 du Code du travail (N° Lexbase : L2828H9M) est abrogée à compter du 1er janvier 2009 (art. 188). Les allocataires qui, à la date du 1er janvier 2009, bénéficient de cette allocation fin de formation continuent à la percevoir jusqu'à l'expiration de leurs droits. Les coûts afférents au maintien du bénéfice de cette allocation restent à la charge du fonds de solidarité (C. trav., art. L. 5423-24 N° Lexbase : L8598IAP). Dans un contexte financier alors très difficile pour l'Unedic, l'Etat avait pris en charge, jusqu'en 2008, le financement de la prolongation de l'indemnisation de certains demandeurs d'emploi en formation, sous la forme de l'allocation de fin de formation (8). La réforme engagée par le loi de finances 2009 devrait inciter à des entrées en formation plus précoces pendant la période d'indemnisation en allocation de retour à l'emploi (donnant droit à une rémunération en allocation de retour à l'emploi-formation), favorisant, ainsi, les parcours de reconversion ou d'adaptation vers les métiers en tension. La réforme simplifie, également, le mode de financement d'une même action de formation (qui a deux financeurs, Assedic et Etat). Cette mesure engendre une économie de près de 169 millions d'euros sur le budget de l'Etat en 2009 (9). Certains parlementaires ont exprimé leur opposition à cette mesure, qui revient à transférer sur les partenaires sociaux une dépense jusque-là assurée par l'Etat (10).

B - Allocation de parent isolé

L'article 181 de la loi de finances 2009 réforme l'allocation de parent isolé (API) sur deux points : il prévoit que les bénéficiaires de l'API aient automatiquement droit à l'allocation de soutien familial (ASF) ; et il aligne en partie les conditions de récupération des indus de l'API sur les modalités en vigueur pour le revenu minimum d'insertion (RMI). Du fait de la généralisation du revenu de solidarité active (RSA) et de la future disparition de l'API, les dispositions de l'article 181 s'appliqueront à l'API en métropole jusqu'au 1er juin 2009 et à l'outre-mer jusqu'au 1er janvier 2011 au plus tard. Après ces dates, ce sont les dispositions de la loi créant le RSA (loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008, généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion N° Lexbase : L9715IBG), prévoyant des mesures identiques, qui s'appliqueront. Les dispositions prévues préfigurent donc celles qui seront en vigueur pour le RSA. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009 prévoit, également, une modification des règles de récupération du RSA, qui s'appliquera à compter du 1er janvier 2010. Son article 118 dispose que les indus de prestations familiales peuvent être récupérés sur différentes allocations, dont le RSA (11).

  • Instauration d'un lien automatique dans les versements de l'ASF et de l'API

Il existe deux procédures distinctes pour obtenir l'API et l'ASF, alors que ces allocations s'adressent au même public. Ces deux allocations concernent, en effet, les familles dans lesquelles un seul des parents assume la charge des enfants. La majorité des cas concerne un parent qui a la charge de son ou de ses enfants à la suite d'un divorce et qui est dans l'attente du versement d'une pension alimentaire. L'API est accordée à toute personne assumant seule la charge d'un ou plusieurs enfants. L'ASF est versée dans les cas où l'un des parents ou les deux ne peuvent ou ne veulent assurer l'entretien de l'enfant (CSS, art. L. 523-1 N° Lexbase : L5338AD3) (12). Toutefois, en dépit de ce recoupement des critères d'attribution, le bénéficiaire de l'API doit déposer une demande spécifique pour bénéficier de l'ASF (CSS, art. L. 524-4 N° Lexbase : L3424HWQ), demande enserrée dans un délai de deux mois. Pour inciter les bénéficiaires de l'API à demander l'ASF, un dispositif de sanctions est prévu. Les allocataires de l'API qui ne demandent pas l'ASF peuvent être sanctionnés par une diminution de l'API d'un montant au plus égal à celui de l'ASF due au titre d'un seul enfant soit 85 euros au 1er janvier 2008.

La loi de finances 2009 instaure le caractère automatique de l'octroi de l'ASF aux bénéficiaires de l'API qui remplissent les critères. Cet article 181 de la loi de finances 2009 s'inscrit dans la continuité de l'instauration du principe de subsidiarité prévu par la loi de finances pour 2007 (loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 N° Lexbase : L8561HTA) : l'allocataire est obligé de faire valoir prioritairement ses droits à l'ASF et aux créances alimentaires pour bénéficier de l'API.

  • Alignement des règles de l'indu de l'API sur celles du RMI

Les règles de récupération des indus de prestations familiales et, plus particulièrement, d'API (CSS, art. L. 553-2 N° Lexbase : L2884ICS) prévoient qu'en cas d'absence de contestation de l'allocataire, tout paiement indu peut être récupéré par retenue sur les prestations à venir ou par remboursement intégral en une seule fois. Les retenues sont déterminées en fonction, notamment, de la composition de la famille, de ses ressources, ainsi que des charges de logement. Ainsi, après la détermination des revenus de la famille, auxquels sont soustraites les charges de logement, est déterminé un revenu net qui est pondéré par la prise en compte d'un quotient familial. Une fois le revenu mensuel pondéré déterminé par cette équation, un barème permet d'appliquer un taux de récupération adapté aux différentes tranches de revenus. Au total, ce dispositif souffre d'une grande complexité et de l'inconvénient de ne pouvoir récupérer des sommes substantielles en raison, notamment, de la pondération du revenu. En moyenne, les montants de recouvrement d'indus s'établissent ainsi à 8 % du montant de l'allocation.

La loi de finances 2009 applique à l'API certaines règles de récupération des indus applicables au RMI (C. act. soc. fam., art. L. 262-41, al. 1 et 3 N° Lexbase : L0902ICE et art. L. 262-22, al. 2 N° Lexbase : L0977IC8). L'article 181 de la loi de finances 2009 constitue une nouvelle étape dans le processus d'alignement des règles de contrôle appliquées au RMI et à l'API. La loi n° 2006-339 du 23 mars 2006, pour le retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux (N° Lexbase : L8128HHI) avait appliqué à l'API le même régime de sanction en cas de fraudes que celui prévalant pour le RMI. Le nouveau dispositif prévoit une récupération des indus dans la limite de 20 % du montant de l'allocation versée. Il n'est donc plus fait application de la formule visant à prendre en compte différents critères de famille ou autre pour calculer le montant à recouvrir. Seule une limite de 20 % de l'allocation versée limite la récupération. La possibilité de récupérer 20 % de l'allocation, comme pour le RMI, ouvre la voie à un taux de récupération de cette proportion, contre une moyenne de 8 % actuellement.

L'article 181 de la loi de finances 2009 ne modifie pas la procédure de recouvrement de l'indu. La LFSS 2009 prévoit une telle modification de la procédure. Pour l'accélérer, la possibilité est ouverte au directeur de la CAF de se délivrer son propre titre exécutoire pour recouvrer l'indu. Cette nouvelle procédure se rapproche de celle applicable au RMI depuis le décret n° 2006-1197 du 29 septembre 2006, relatif à la prime de retour à l'emploi et aux primes forfaitaires dues à des bénéficiaires de minima sociaux (N° Lexbase : L2558HSK), qui dispose que le trésorier-payeur général peut être chargé du recouvrement. La LFSS 2009 prévoit, en outre, la possibilité de récupérer un indu au titre d'une prestation familiale sur le montant versé au titre d'une autre prestation familiale (13).

C - Allocation adulte handicapé (AAH)

L'article 182 de la loi de finances 2009 vise à favoriser l'emploi des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), tout en réformant le mécanisme de revalorisation de cette prestation. Plusieurs mesures sont mise en oeuvre. Les I et II de l'article 182 proposent que l'octroi de l'AAH n'aille pas sans procédure de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé et que celle-ci implique systématiquement une orientation vers l'emploi. Le III de l'article 182 met en oeuvre la suppression de la condition d'inactivité d'un an nécessaire aux personnes ayant un taux d'incapacité permanente entre 50 % et 79 % pour bénéficier de l'AAH.

  • Un lien nécessaire entre attribution de l'AAH et retour vers l'emploi

En l'état actuel du droit, l'octroi de l'AAH et l'obtention de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé font l'objet de procédures distinctes. La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé n'est, en effet, pas un préalable au bénéfice de l'AAH. De ce fait, environ 184 000 bénéficiaires de l'AAH (soit près d'un quart du total) n'ont pas de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. La procédure d'octroi de l'AAH (CSS, art. R. 821-2 N° Lexbase : L9118G9L) implique pour le futur bénéficiaire de présenter une demande à une maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Celle-ci transmet la requête à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) qui statue sur la demande. La qualité de travailleur handicapé est, également, octroyée par les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) (14), mais par le biais d'une procédure séparée.

La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé est, en pratique, une condition sine qua non pour trouver un emploi. Elle implique, en effet, des avantages pour les employeurs, notamment, par l'accès à des aides financières de l'association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH). Ces avantages permettent de réduire le coût pour l'employeur de l'embauche d'un employé handicapé, dont la productivité est, en principe, inférieure à un salarié non handicapé. La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé offre, en outre, la possibilité à son bénéficiaire d'avoir accès à certaines aides, ainsi qu'à des formations et à l'aide du réseau de placement spécialisé Cap Emploi. La reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé offre, enfin, l'occasion de procéder à une évaluation des capacités et des incapacités de la personne, dans l'optique de son orientation vers l'emploi. La loi de finances 2009 couple l'octroi de l'allocation et l'engagement de la procédure de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé.

  • Une orientation automatique vers l'emploi après l'obtention de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé

L'orientation des travailleurs handicapés est l'un des quatre éléments constitutifs des politiques en faveur de l'emploi des handicapés (C. trav., art. L. 5211-1 N° Lexbase : L2405H9X). Elle est assurée par la CDAPH (C. act. soc. fam., art. L. 241-5 N° Lexbase : L8826G8E), qui propose plusieurs solutions à la personne handicapée. Elle évalue le taux d'incapacité de la personne, qui correspond à sa capacité de travail rapportée à celle d'une personne de même qualification non handicapée. Si ce taux est inférieur à un tiers ou s'il est supérieur à un tiers, mais que la personne nécessite un soutien médical, social ou psychologique, la CDAPH propose une orientation vers un établissement ou service d'aide par le travail (ESAT). Dans le cas contraire, la CDAPH oriente la personne handicapée vers le marché du travail ou vers un centre de rééducation professionnelle lui permettant d'acquérir une qualification pour s'intégrer in fine au marché du travail. L'article 181 de la loi de finances 2009 associe cette orientation avec la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Celle-ci conduirait donc automatiquement à une orientation vers un emploi.

  • Suppression du délai d'un an sans emploi pour le versement de l'AAH

L'article 821-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L3438HWA) prévoyait que l'AAH puisse être versée, par dérogation aux conditions générales de l'article L. 821-1 du même code (N° Lexbase : L5364H9K), à certaines personnes cumulant les trois conditions suivantes : un taux d'incapacité permanente compris entre 50 % et 79 % ; pas d'emploi depuis plus d'un an (condition ajoutée par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées N° Lexbase : L5228G7R) ; la reconnaissance, par la CDAPH, d'une restriction substantielle et durable à l'emploi. Au 31 décembre 2007, 255 00 personnes bénéficient de l'AAH à ce titre. L'article 181 de la loi de finances 2009 retient la suppression de la condition d'absence d'emploi pendant un an. Cette mesure a pour but d'ouvrir l'accès à l'AAH aux personnes handicapées qui, répondant à la première et à la troisième condition, ont, toutefois, occupé un emploi pendant l'année, ce qui les empêche de percevoir l'allocation. Le fait d'occuper un emploi n'est donc plus pénalisant, dans la mesure où cela ne constitue plus un obstacle pour bénéficier de l'AAH. Cette mesure tend donc à inciter ces personnes bénéficiaires de l'AAH à occuper un emploi en leur permettant de percevoir à nouveau l'allocation sans attendre un an après la perte de l'emploi.

  • Revalorisation de l'AAH

En l'état actuel du droit, le montant de l'AAH est identique à celui de l'allocation de solidarité des personnes âgées (CSS, art. D. 821-3 N° Lexbase : L4956IB8), qui a remplacé le minimum vieillesse, ainsi que d'autres allocations semblables en 2006. Son montant est fixé par décret. Sa revalorisation n'est donc pas systématique et le revenu réel provenant de l'allocation peut diminuer chaque année si elle n'est pas revalorisée à hauteur de l'évolution du niveau général des prix.

La loi de finances 2009 prévoit une revalorisation annuelle qui soit, au moins, égale à l'inflation, ainsi qu'un réajustement en cours d'année si celle-ci ne correspond pas à la prévision initialement faite. L'indexation peut être réalisée en une fois ou en plusieurs fois successivement au cours de l'année. L'article 181 ouvre la possibilité de découpler l'évolution de l'ASPA et de l'AAH. Les revalorisations de l'une et de l'autre allocation deviendraient donc indépendantes. Selon les travaux parlementaires (15), jusqu'en 2012, le minimum vieillesse connaîtra, comme l'AAH, une hausse de 25 %.


(1) Loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, de financement de la Sécurité sociale pour 2009 (N° Lexbase : L2678IC8) et nos obs., LFSS 2009 : de quelques réformes des branches maladie, accident du travail/maladie professionnelle et famille, Lexbase Hebdo n° 332 du 8 janvier 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N2160BIT).
(2) Lire nos obs., Dispositions de la loi de finances pour 2006 relatives à l'emploi et à l'indemnisation chômage, Lexbase Hebdo n° 199 du 26 janvier 2006 - édition sociale (N° Lexbase : N3607AKS) et Aspects de droit social de la loi de finances pour 2008, Lexbase Hebdo n° 288 du 17 janvier 2008 - édition sociale (N° Lexbase : N8029BDQ).
(3) Nos obs., Réforme des ZFU par la loi du 31 mars 2006, Lexbase Hebdo n° 210 du 13 avril 2006 - édition sociale (N° Lexbase : N6869AKM).
(4) Si l'effectif vient à dépasser le seuil de dix salariés, le bénéfice intégral de l'exonération est maintenu dans la limite des dix salariés précédemment occupés ou, en cas de départ, remplacés. Un décret fixe les conditions dans lesquelles le bénéfice de l'exonération est acquis dans le cas où l'effectif d'une entreprise passe au-dessous de onze salariés.
(5) Assurant la liaison entre la métropole et la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon ou Mayotte ; La liaison entre ces départements ou collectivités ; la desserte intérieure de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique, de La Réunion, de Saint-Barthélemy ou de Saint-Martin. Seuls sont pris en compte les personnels de ces entreprises concourant exclusivement à ces dessertes et affectés dans des établissements situés dans l'un de ces départements, à Saint-Barthélemy ou à Saint-Martin.
(6) 1° Employer moins de deux cent cinquante salariés et avoir réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros ; 2° Avoir une activité principale relevant de l'un des secteurs d'activité éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du Code général des impôts (N° Lexbase : L3571HLT) ou correspondant à l'une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques à destination des entreprises, recherche et développement ou technologies de l'information et de la communication ; 3° Etre soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition ; 4° A l'exception des entreprises situées en Guyane, dans les îles des Saintes, à Marie-Galante et à la Désirade, exercer leur activité principale dans l'un des secteurs suivants : tourisme, environnement ou énergies renouvelables pour les entreprises situées en Martinique et en Guadeloupe ou tourisme, agro-nutrition ou énergies renouvelables pour les entreprises situées à La Réunion ; 5° Ou avoir signé avec un organisme public de recherche ou une université une convention, agréée par l'autorité administrative, portant sur un programme de recherche dans le cadre d'un projet de développement sur l'un de ces territoires si les dépenses de recherche, définies aux a à g du II de l'article 244 quater B du Code général des impôts (N° Lexbase : L3718ICP), engagées dans le cadre de cette convention représentent au moins 5 % des charges totales engagées par l'entreprise au titre de l'exercice écoulé ; avoir réalisé des opérations sous le bénéfice du régime de transformation sous douane, défini aux articles 130 à 136 du Règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le Code des douanes communautaire (N° Lexbase : L6102AUK), si le chiffre d'affaires provenant de ces opérations représente, au moins, un tiers du chiffre d'affaires de l'exploitation au titre de l'exercice écoulé.
(7) B. Pavy, Rapport Assemblée nationale n° 1198, 16 octobre 2008, annexe 27, Immigration, Asile et Intégration.
(8) L'allocation de fin de formation (AFF) a été créée par la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001, portant diverses dispositions d''ordre social, éducatif et culturel (N° Lexbase : L1823ATP) (C. trav., art. L. 5423-7 N° Lexbase : L2828H9M). L'AFF prolonge l'indemnisation des demandeurs d'emploi au-delà de la durée de leurs droits à l'assurance chômage, si la formation qualifiante qu'ils ont engagée sur prescription de l'ANPE n'est pas terminée. Le régime de l'AFF a été réformé par le décret n° 2006-1631 du 19 décembre 2006. L'objectif était de recentrer l'AFF sur les formations inscrites sur les listes régionales de métiers en fonction des besoins locaux, donc ayant une forte probabilité de déboucher sur un emploi. Désormais, l'AFF est accordée pour une durée maximale de 4 mois aux demandeurs d'emploi ayant des durées d'indemnisation inférieures ou égales à 7 mois relevant des filières courtes et qui entreprennent une action de formation permettant d'accéder à un emploi pour lequel sont identifiées des difficultés de recrutement au niveau régional. Le montant journalier de l'AFF est égal au dernier montant journalier de l'allocation d'aide au retour à l'emploi formation (AREF) perçu par l'intéressé à la date de l'expiration de ses droits à cette allocation. Son coût unitaire mensuel est de 730 euros.
(9) F. Lefebvre, Rapport Assemblée nationale n° 1198, 16 octobre 2008, annexe 45, Politiques du travail et de l'emploi ; v., aussi, S. Dassault, Rapport spécial Sénat n° 99 (2008/2009), Tome III, annexe 31, Travail et emploi, p. 42.
(10) G. Cherpion, Avis Assemblée Nationale n° 1199, 16 octobre 2008, tome XIII, Travail et emploi ; v., aussi, A. Gournac, Avis Sénat n° 103 (2008/2009), Tome VII, Travail et emploi, p. 41.
(11) Nos obs., LFSS 2009 : de quelques réformes des branches maladie, accident du travail/maladie professionnelle et famille, préc.. Lexbase Hebdo n° 332 du 8 janvier 2009 - édition sociale (N° Lexbase : N2160BIT).
(12) Un tel cas peut se retrouver, notamment, en cas d'impossibilité ou de refus par un des parents d'assurer le versement d'une pension alimentaire mise à sa charge par décision de justice. L'ASF concerne, également, les enfants qui n'ont pas été reconnus par leur père ou dont les parents sont décédés ou sont dans l'incapacité de subvenir à leurs besoins. L'allocation de soutien familial s'établit à 85 euros par mois pour un enfant privé de l'aide de l'un de ses parents.
(13) J.-M. Binetruy, Rapport Assemblée nationale n° 1198, 16 octobre 2008, annexe 43, Solidarité, insertion et égalité des chances ; v., aussi, A. Cazalet et A.-L. de Montgolfier, Rapport spécial Sénat n° 99 (2008/2009), Tome III, annexe 29, Solidarité, insertion et égalité des chances, p. 40 ; P. Blanc, Rapport spécial Sénat n° 103 (2008/2009), Tome VI, Solidarité, insertion et égalité des chances, p. 73.
(14) Les CDAPH, mentionnées à l'article L. 241-5 du Code de l'action sociale et des familles, sont issues de la fusion, prévue par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) et des commissions départementales d'éducation spéciale (CDES).
(15) J.-M. Binetruy, Rapport Assemblée Nationale n° 1198, 16 octobre 2008, annexe 43. V., aussi, A. Gournac, Avis Sénat n° 103 (2008/2009), Tome VII, Travail et emploi, p. 39 ; A. Cazalet et A.-L. de Montgolfier, Rapport spécial Sénat n° 99 (2008/2009), Tome III, annexe 29, Solidarité, insertion et égalité des chances, p. 43 ; P. Blanc, Rapport spécial Sénat n° 103 (2008/2009), Tome VI, Solidarité, insertion et égalité des chances, p. 76.

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