La lettre juridique n°331 du 18 décembre 2008 : Rémunération

[Textes] Quelles incidences pour la loi en faveur des revenus du travail ?

Réf. : Loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008, en faveur des revenus du travail (N° Lexbase : L9777IBQ)

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par Catherine Millet-Ursin, Avocat associée SCP Fromont, Briens & associés

le 07 Octobre 2010


La loi du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail vise, à nouveau, à renforcer le pouvoir d'achat des salariés et à améliorer les dispositions concernant l'épargne salariale. Elle fait suite à de nombreuses réformes déjà intervenues qui n'ont pas rencontré le succès espéré. Que faut-il attendre de la présente loi ?
I - Des incidences sur la politique de rémunération des entreprises ?

Si les mesures prises concernant le pouvoir d'achat devraient aboutir à une évolution du SMIC plus en relation avec le contexte économique du pays (et moins avec le contexte politique, sous réserve, cependant, du décret à paraître) et à une amélioration des salaires minima, elles ne devraient, cependant, pas avoir d'incidence sur les salaires réels.

En effet, seules les branches professionnelles dans lesquelles les grilles de salaires prévoient, pour les coefficients correspondant aux postes sans qualification, des salaires en-dessous du SMIC, devront revoir leur montant pour les augmenter et les porter, au moins, au niveau du SMIC à la date de la négociation.

Faute de pratiquer ainsi, les branches professionnelles concernées pénaliseront les entreprises de la branche dépourvues d'interlocuteurs syndicaux, qui ne pourront, désormais, appliquer les allégements bas salaires que sur les salaires minima de référence et non sur le SMIC, qu'elles auront, pourtant, dû verser à leurs salariés.

Ainsi, une entreprise qui n'aurait pas de délégué syndical, ni de section syndicale et de représentant syndical, ne pourra, faute d'une négociation au sein de la branche, procéder au calcul de ces allégements sur les salaires réels (et, notamment, le SMIC) qu'elle verse à ses salariés.

Les textes tels qu'ils sont rédigés ne sont, cependant, pas très clairs sur la portée à donner à la disposition prévoyant que "le salaire de référence est réputé égal au SMIC en vigueur lorsque le salaire minimum national professionnel des salariés sans qualification a été porté à un niveau égal ou supérieur au SMIC au cours des deux années civiles précédant celle du mois civil au titre duquel le montant de la réduction est calculé" (CSS, art. L. 241-13 N° Lexbase : L0921IC4).

Un décret devrait préciser la manière d'interpréter cette disposition et de vérifier, ainsi, son respect par l'entreprise. Une circulaire viendra certainement compléter le décret afin d'expliquer aux entreprises comment il convient d'appliquer les textes.

Nous ne pourrons, ici, que regretter la propension à expliquer les dispositions législatives et réglementaires par des circulaires dont la longueur et la complexité rendent, quelquefois, plus difficile la compréhension qu'elles sont, pourtant, censées faciliter.

Ces dispositions créent une distorsion entre les entreprises pourvues d'interlocuteurs syndicaux et celles qui ne le sont pas : en effet, les branches professionnelles ont une quasi obligation de résultat puisqu'il ne suffira pas de négocier, mais de conclure, alors que les entreprises n'ont qu'une obligation de négocier. Il est vrai, cependant, que, dans le premier cas, les négociations portent sur les salaires minima et, dans le second, sur les salaires réels.

Cela devrait donc obliger les branches à négocier et conclure rapidement des accords de salaires, elles veilleront, si elles le peuvent, à ne pas augmenter l'ensemble des salaires minima et donc à ne pas répercuter les augmentations "bas salaires" sur l'ensemble de la grille. De tels réaménagements nécessiteront, peut-être, une révision plus profonde des modes de fixation des salaires retenus.

Dès lors que les salaires réels sont supérieurs au SMIC, il est à craindre que la politique de rémunération n'évolue guère, surtout en ces temps difficiles, d'où l'idée d'augmenter le pouvoir d'achat en incitant massivement les entreprises à contribuer à l'épargne salariale.

II - De nouvelles incitations pour le développement de l'épargne salariale...

Pour ce faire, la loi, comme souvent, décide de renforcer les dispositifs accompagnant fiscalement et socialement la mise en place de l'intéressement dans les entreprises.

L'intéressement est, par nature, facultatif, l'entreprise pouvant, ou non, le proposer à ses salariés. Peu d'entreprises, notamment, les PME, en font bénéficier les salariés.

La loi entend favoriser sa mise en place par la création d'un crédit d'impôt dont la pérennité est garantie jusqu'au 31 décembre 2014 et par la possibilité de verser une prime exceptionnelle de 1 500 euros par salarié si le dispositif est mis en place ou amélioré avant le 30 juin 2009. Cela suffira-t-il ? Rien n'est moins certain, la multiplication des textes et leur évolution constante rendant, de fait, très difficile l'appropriation de ces dispositifs par les entreprises.

Or, n'est mis en place que ce qui est compris et facilement explicable. Les incitations financières n'ont aucune incidence sur cet aspect pédagogique, elles n'ont, éventuellement, pour seul effet (dont on ne peut, cependant, nier l'importance) que de pousser l'employeur (ou ses conseils) à tenter de comprendre l'intérêt que cela pourrait présenter pour l'entreprise et ses salariés.

Une mesure moins remarquable (et, pourtant, qui peut être tout aussi efficace pour développer l'intéressement au sein des PME) est celle autorisant les branches à négocier sur l'intéressement et à prévoir une adhésion des entreprises sur la base du dispositif ainsi négocié. Si les textes antérieurs n'interdisaient pas une telle négociation, elle est, désormais, expressément prévue et devrait inciter les branches professionnelles à s'en saisir, peut-être en parallèle à leurs négociations sur les salaires.

Enfin, avoir étendu la possibilité pour le chef d'entreprise de pouvoir bénéficier de l'intéressement dans les entreprises dont l'effectif est compris entre un et deux cent cinquante salariés (au lieu de cent) pourrait avoir un certain effet.

La loi entend, également, renforcer l'accès à l'épargne retraite. Le Perco doit être négocié dans les entreprises ayant mis en place un PEE depuis trois ans (depuis le 1er janvier 2007, c'était cinq ans) et une adhésion automatique des salariés au Perco peut être prévue. Une première alimentation du Perco par l'entreprise, sans même l'adhésion du salarié et un versement de sa part, est, désormais, possible, les sommes ainsi versées étant exonérées de charges sociales et d'impôt dans les mêmes conditions que l'abondement.

III - dont la portée sera peut être limitée...

En effet, les mesures destinées à développer l'intéressement ne peuvent porter plein effet que si la performance et les résultats sont au rendez vous. Quelles entreprises vont prendre le risque de négocier un accord d'intéressement ou de modifier, pour une plus large distribution, leur accord en cours, alors qu'elles n'ont que peu de visibilité sur leur activité et donc sur leurs résultats 2009 ?

Enfin, que penser de la création du forfait social par la loi de financement de la Sécurité Sociale pour 2009 dont la pérennité est assurée et dont le taux sera nécessairement évolutif au gré des besoins de financement qui ne devraient pas manquer d'évoluer ? Ce forfait est fixé, à compter du 1er janvier 2009, à 2 % des sommes versées au titre de l'épargne salariale et des contributions patronales aux régimes de retraite supplémentaire.

En termes d'affichage, annoncer que l'épargne salariale est exonérée de charges sociales, mais soumise au forfait social, et donne lieu à l'octroi d'un crédit d'impôt sous réserve de remplir certaines conditions et ce, jusqu'en 2014......sera difficile.

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