La lettre juridique n°306 du 29 mai 2008 : Licenciement

[Jurisprudence] De la résolution judiciaire d'un contrat emploi jeune à la suite d'une inaptitude en cas d'impossibilité de reclassement

Réf. : Cass. soc., 18 avril 2008, n° 06-43.846, M. Sébastien Ravel, FS-P+B (N° Lexbase : A1735D8R)

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N9942BEX

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen

le 07 Octobre 2010

La question de la rupture du contrat de travail par l'employeur d'un salarié déclaré inapte à la suite d'un accident du travail, alors qu'il a satisfait à son obligation de reclassement, se pose-t-elle en des termes particuliers pour les titulaires de contrats de travail spéciaux, dont feu le contrat emploi jeune ? En l'espèce, M. R., engagé par l'Office national des forêts par contrat à durée déterminée emploi jeune pour une durée de 60 mois, en qualité d'ouvrier forestier adjoint au chef d'équipe, a été victime d'un accident du travail. Au terme de ses arrêts de travail consécutifs, le médecin du travail l'a déclaré inapte à son poste. Licencié pour inaptitude physique constatée par le médecin du travail et à la suite de laquelle un reclassement dans l'établissement s'est révélé impossible, l'intéressé a contesté le bien fondé de ce licenciement. Par arrêt rendu le 9 mai 2006, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a débouté le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité en raison de la rupture anticipée de son contrat emploi jeune. La cour d'appel, après avoir constaté que l'employeur avait loyalement exécuté son obligation de reclassement, a retenu que le motif tiré de l'inaptitude du salarié à tout poste de travail était avéré et constitutif (au sens des dispositions de l'article L. 322-4-20 du Code du travail N° Lexbase : L8956G7T, abrogé) d'une cause réelle et sérieuse fondant la rupture anticipée du contrat à durée déterminée emploi jeune. Mais, pour la Cour de cassation, il résulte de la combinaison des articles L. 322-4-20 et L. 122-32-5 alinéa 1 et 2, du Code du travail (N° Lexbase : L5523ACK, art. L. 1226-10 N° Lexbase : L9850HWQ et L. 1226-11, recod. N° Lexbase : L9851HWR), que lorsque le salarié titulaire d'un contrat emploi jeune est déclaré inapte à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, l'employeur qui est dans l'impossibilité de le reclasser et qui souhaite rompre le contrat, ne peut que demander la résiliation judiciaire du contrat de travail.
Résumé

Il résulte de la combinaison des articles L. 322-4-20 et L. 122-32-5, alinéa 1 et 2, du Code du travail, que lorsque le salarié titulaire d'un contrat emploi jeune est déclaré inapte à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, l'employeur, qui est dans l'impossibilité de le reclasser et qui souhaite rompre le contrat, ne peut que demander la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Avant d'analyser la qualification de la rupture du contrat de travail du salarié régi par un contrat de travail aidé, consécutive à un avis d'inaptitude et d'une impossibilité de reclassement, il convient de rappeler les solutions admises pour la qualification de la rupture du contrat de travail du salarié ordinaire, consécutive à un avis d'inaptitude et d'une impossibilité de reclassement.

Commentaire

I - Qualification de la rupture du contrat de travail du salarié ordinaire consécutive à un avis d'inaptitude et d'une impossibilité de reclassement

A - L'impossibilité de reclassement

  • Etendue de l'obligation de reclassement

Le principe a été clairement posé par le législateur : si l'employeur ne peut proposer un autre emploi au salarié déclaré inapte à son emploi à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, il est tenu de faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement (C. trav., art. L. 122-32-5, alinéa 1 et 2, art. L. 1226-10 et L. 1226-11, recod.) (1). La jurisprudence en a déduit que la preuve de l'impossibilité de reclassement incombe à l'employeur (Cass. soc., 7 juillet 2004, n° 02-47.686, F-P N° Lexbase : A0441DDP) (2). A défaut, le salarié a droit à l'indemnité minimum de 12 mois de salaires prévue par l'article L. 122-32-7 du Code du travail (N° Lexbase : L5525ACM, art. L. 1226-15, recod. N° Lexbase : L9855HWW) (Cass. soc., 20 octobre 1993, n° 90-41.661, Société Compagnie Maritime d'affrètement c/ M. Christian Jensen inédit N° Lexbase : A6809AHN ; Cass. soc., 5 décembre 1995, n° 92-45.043, Société Périgord distribution, société à responsabilité limitée c/ M. Bernard Brunet, inédit N° Lexbase : A2468AGI, Dr. soc., 1996, p. 425, obs. A. Mazeaud). Il n'appartient pas au salarié d'indiquer l'emploi qui aurait pu correspondre à son aptitude physique (Cass. soc., 5 juillet 1995, n° 92-40.202, M. Rémond Tartière c/ Société anonyme Générale de mécanique N° Lexbase : A6848AH4).

Mais il ne suffit pas de faire référence à l'avis du médecin du travail qui n'indique pas quel poste pourrait convenir au salarié déclaré inapte, pour justifier de l'impossibilité de reclassement dans l'entreprise (Cass. soc., 10 janvier 2001, n° 98-43.970, Société Le garage Paris-Brest, inédit N° Lexbase : A4365AR4). Et si l'employeur ne dispose d'aucun poste conforme aux préconisations du médecin du travail, le seul poste de magasinier ayant été supprimé et l'unique poste de gardien étant pourvu, est rapportée la preuve de l'impossibilité du reclassement (Cass. soc., 12 juillet 2006, n° 05-43.813, F-D N° Lexbase : A4679DQD).

  • Sanctions

L'absence de signification des motifs s'opposant au reclassement ouvre droit à des dommages et intérêts réparant le préjudice nécessairement subi par le salarié devenu inapte et non à l'indemnité de l'article L. 122-32-7 du Code du travail (art. L. 1226-15, recod.) (Cass. soc., 6 mai 1998, n° 95-40.579, M. Patrick Lard c/ Société Caillette, société à responsabilité limitée N° Lexbase : A6911AHG ; Cass. soc., 12 novembre 2002, n° 00-45.560, F-D N° Lexbase : A7346A3H). Mais, la notification des motifs qui s'opposent au reclassement du salarié inapte doit être faite par écrit avant que la procédure de licenciement ne soit engagée, à défaut, la Cour de cassation décide que la procédure est irrégulière et ouvre droit à dommages et intérêts pour le salarié (Cass. soc., 7 juillet 1988, n° 85-44.828, M. Saarinen c/ Société anonyme Normet N° Lexbase : A1615AHB).

L'absence de notification écrite des motifs s'opposant au reclassement n'expose pas l'employeur aux sanctions de l'article L. 122-32-7, mais le rend redevable d'une indemnité réparant le préjudice subi non-cumulable avec l'indemnité de licenciement injustifié (Cass. soc., 18 novembre 2003, n° 01-43.710, FS+P N° Lexbase : A1988DAU et les obs. de S. Martin-Cuenot, L'option reconnue au salarié déclaré inapte entre licenciement et poursuite du contrat, Lexbase Hebdo n° 97 du 3 décembre 2003 - édition sociale N° Lexbase : N9607AA3).

B - La rupture du contrat de travail, suite logique de l'impossibilité de reclassement

La règle, codifiée, est que l'employeur ne peut prononcer le licenciement que s'il justifie de l'impossibilité où il se trouve de proposer un emploi au besoin après la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail (C. trav., art. L. 122-32-5, alinéa 1 et 2, art. L. 1226-10 et L. 1226-11, recod.).

Aussi, selon la jurisprudence, ne peut constituer, en soi, une cause réelle et sérieuse de licenciement le refus du poste de reclassement proposé en application de l'article L. 122-24-4 du Code du travail (N° Lexbase : L1401G9R, art. L. 1226-2, recod. N° Lexbase : L9842HWG), lorsque la proposition de reclassement emporte modification du contrat de travail (Cass. soc., 9 avril 2002, n° 99-44.678, FS-P+B N° Lexbase : A4958AYB).

Le licenciement est validé dès lors que l'intéressé n'aurait pu être occupé que pour des tâches ponctuelles de faible rentabilité, ce qui ne pouvait permettre de l'employer à longueur d'années sans faire supporter de lourdes charges à l'entreprise (Cass. soc., 28 mars 2006, n° 04-44.790, F-D N° Lexbase : A8626DNS).

La rédaction des textes indique que la qualification de la rupture du contrat de travail sera celle du licenciement, lorsque l'employeur justifie de l'impossibilité où il se trouve de proposer un emploi de reclassement au salarié inapte suite à un accident du travail, contrairement au salarié inapte à la suite d'un accident du travail, dont la relation contractuelle est celle d'un contrat de travail à durée déterminée.

II - Qualification de la rupture du contrat de travail du salarié régi par un contrat de travail aidé, consécutive à un avis d'inaptitude et d'une impossibilité de reclassement

A - La rupture du contrat de travail à durée déterminée face à l'impossibilité du reclassement

  • Résiliation judiciaire

Lorsque le reclassement d'un salarié en contrat à durée déterminée devenu inapte s'avère impossible, l'employeur peut demander la résolution judiciaire du contrat. La juridiction saisie vérifiera les motifs et fixera l'indemnisation du salarié. En effet, en application de l'article L. 122-32-9 du Code du travail (N° Lexbase : L5527ACP, art. L. 1226-20, recod. N° Lexbase : L9860HW4), les dispositions des deux derniers alinéas de l'article L. 122-32-5 (selon lesquels lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi) et des articles L. 122-32-6 (N° Lexbase : L5524ACL, art. L. 1226-14, recod. N° Lexbase : L9854HWU) à L. 122-32-8 (N° Lexbase : L5526ACN, art. L. 1226-16, recod. N° Lexbase : L9856HWX) ne sont pas applicables lorsque le salarié est titulaire d'un contrat à durée déterminée.

Si l'employeur justifie qu'il se trouve dans l'impossibilité de proposer un emploi (dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 122-32-5, art. L 1226-10, 1226-11 et 1226-12, recod.), au salarié titulaire d'un contrat à durée déterminée ou si le salarié refuse un emploi offert dans ces conditions, l'employeur est en droit de demander la résolution judiciaire du contrat. La juridiction saisie prononce la résolution après vérification des motifs invoqués et fixe le montant de la compensation financière due au salarié (C. trav., art. L. 122-32-9, al. 2 N° Lexbase : L5527ACP, art. L. 1226-20, recod. N° Lexbase : L9860HW4).

La loi du 31 décembre 1992, relative à l'inaptitude des salariés à leur emploi (loi n° 92-1446, relative à l'emploi, au développement du travail à temps partiel et à l'assurance-chômage N° Lexbase : L0944AIS), ne mentionne que le licenciement comme mode de rupture du contrat de travail et ne saurait donc s'appliquer aux salariés sous CDD (circ. DRT, n° 93-11, du 17 mars 1993 N° Lexbase : L7489AI9).

Dans une telle situation, la Cour de cassation a précisé que l'inaptitude physique du salarié constatée au cours de l'exécution du contrat ne constituait pas un cas de rupture par l'employeur du contrat avant l'échéance de son terme (Cass. soc., 13 novembre 1986, Mme Martin c/ M. Formosa).

Les textes (C. trav., art. L. 122-32-1 N° Lexbase : L1371G9N, art. L. 1226-7, recod. N° Lexbase : L9847HWM) prévoient seulement que le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie, ainsi que pendant le délai d'attente et la durée du stage de réadaptation, de rééducation ou de formation professionnelle (que, conformément à l'avis de la commission mentionnée à l'article L. 146-9 du Code de l'action sociale et des familles N° Lexbase : L8832G8M, doit suivre l'intéressé). Le salarié sous CDD, déclaré inapte à la suite d'un accident ou une maladie non professionnels, ne peut pas exercer l'action en résolution judiciaire, une telle action exigeant que l'inaptitude ait une origine professionnelle (Cass. avis, 29 avril 2002, n° 00-20.003, Société Chepar c/ Mademoiselle Crespo N° Lexbase : A2153A4I).

  • Contrôle judiciaire et sanctions

En cas de rupture du contrat par l'employeur en méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-32-4 du Code du travail (N° Lexbase : L5520ACG, art. L. 1226-8, recod. N° Lexbase : L9848HWN) (selon lequel, les conséquences de l'accident ou de la maladie professionnelle ne peuvent entraîner pour l'intéressé aucun retard de promotion ou d'avancement au sein de l'entreprise), du premier alinéa de l'article L. 122-32-5 (selon lequel si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre, l'employeur est tenu de lui proposer, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise et après avis des délégués du personnel, un autre emploi) ou du second alinéa de l'article L 122-32-9 (art. L. 1226-20, recod.) (selon lequel, si l'employeur justifie qu'il se trouve dans l'impossibilité de proposer un emploi au salarié titulaire d'un tel contrat, ou si le salarié refuse un emploi offert dans ces conditions, l'employeur est en droit de demander la résolution judiciaire du contrat), le salarié a droit à une indemnité correspondant au préjudice subi. Cette indemnité ne peut être inférieure au montant des salaires et avantages qu'il aurait reçus jusqu'au terme de la période en cours de validité de son contrat. La juridiction saisie prononce la résolution après vérification des motifs invoqués et fixe le montant de la compensation financière due au salarié), le salarié a droit à une indemnité correspondant au préjudice subi .

L'inaptitude physique du salarié ne constitue pas un cas de force majeure autorisant la rupture anticipée du contrat à durée déterminée. Une telle inaptitude et l'impossibilité du reclassement de l'intéressé n'ouvrent pas droit au paiement des salaires restant à courir jusqu'au terme du contrat ni à l'attribution de dommages-intérêts compensant la perte de ceux-ci. Si c'est à tort que l'employeur a rompu le contrat de travail à durée déterminée le liant à sa salariée, celle-ci n'ayant pas droit à une rémunération dès lors qu'elle ne pouvait exercer effectivement ses fonctions ne peut prétendre qu'à l'attribution de dommages-intérêts résultant du préjudice subi (Cass. soc., 18 novembre 2003, n° 01-44.280, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A1843DAI, Bull. n° 285). Dans le même sens, la Cour de cassation a décidé que, lorsque le médecin du travail déclare un salarié en CDD inapte, le contrat ne peut, toutefois, pas être rompu de manière anticipée dans la mesure où il ne s'agit pas d'un cas de force majeure (Cass. soc., 17 mai 2000, n° 98-41.388, Mme Mina Hassani c/ Société hôtel restaurant La Gentilhommière, société à responsabilité limitée N° Lexbase : A9400ATC).

Si les dispositions de l'article L. 122-24-4, alinéa 1er, du Code du travail, relatives à l'obligation de reclassement, sont applicables au contrat à durée déterminée, celles de l'alinéa 2 du même article, instituant l'obligation pour l'employeur de reprendre le paiement du salaire du salarié déclaré inapte consécutivement à une maladie ou un accident et ni reclassé, ni licencié, à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'examen médical de reprise du travail, ne sont pas applicables (l'employeur ne pouvait ni rompre le contrat à durée déterminée, ni, s'agissant d'une inaptitude d'origine non professionnelle, saisir le juge d'une demande de résiliation judiciaire), le contrat à durée déterminée ne pouvant pas être rompu par l'employeur en raison de l'inaptitude physique et de l'impossibilité du reclassement (Cass. soc., 8 juin 2005, n° 03-44.913, FS-P+B N° Lexbase : A6518DIA, Bull. civ. V, n° 193 et les obs. de S. Martin-Cuenot, Inaptitude : exclusion partielle du salarié sous CDD du bénéfice de la protection, Lexbase Hebdo n° 173 du 22 juin 2005 - édition sociale N° Lexbase : N5635AIK).

Dans son rapport 2005, la Cour de cassation relève que, selon les dispositions de l'article L. 122-3-8 du Code du travail (N° Lexbase : L5457AC4, art. L. 1243-1, recod. N° Lexbase : L0055HXC), sauf accord des parties, le contrat à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave et de force majeure. La Chambre sociale énonce de manière constante que l'inaptitude définitive d'un salarié ne constitue pas un cas de force majeure (Cass. soc., 12 juillet 1999, n° 97-41.131, M. Bonard c/ Société Transports Gelin N° Lexbase : A4760AGE, Bull. civ. V, n° 344 ; Cass. soc., 12 février 2003, n° 00-46.660, F-P+B N° Lexbase : A0129A7W, Bull. civ. V, n° 50). En outre, les dispositions de l'article L. 122-32-9 du Code du travail (art. L. 1226-20, recod.), qui permettent à l'employeur d'un salarié sous contrat à durée déterminée d'exercer une action en résolution judiciaire, ne sont pas applicables à une inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnels (Cass. avis, 29 avril 2002, préc., Bull. n° 3), ce qui a, d'ailleurs, conduit la Cour à suggérer dans son rapport annuel 2002 une modification de l'article L. 122-32-9 du Code de travail (art. L. 1226-20, recod.), en ce sens que la possibilité de résiliation judiciaire devrait être étendue à l'inaptitude d'origine non professionnelle.

L'intérêt de l'arrêt du 8 juin 2005 est d'affirmer explicitement que les dispositions de l'article L. 122-24-4, alinéa 1er, du Code du travail (art. L. 1226-2, recod.), relatives à l'obligation de reclassement, s'appliquent au contrat à durée déterminée, ce qui, jusqu'alors, ne résultait qu'implicitement de la jurisprudence de la chambre. On peut noter, néanmoins, que l'obligation de reclassement s'appréciera, nécessairement, d'une manière particulière, eu égard à la limitation des cas de recours au contrat à durée déterminée.

B - La rupture du contrat de travail aidé face à l'impossibilité du reclassement

  • Contrat emploi jeune

Le contrat emploi jeune (programme "Nouveaux services / Emplois Jeunes" (3)) ne portait que sur des activités présentant un caractère d'utilité sociale et des activités créatrices d'emplois, qui répondent à des besoins émergents ou non satisfaits (C. trav., art. L. 322-4-18, dans sa rédaction antérieure à la loi du 18 janvier 2005 N° Lexbase : L6160AC7). Les employeurs appartenaient au monde associatif (organismes privés à but non lucratif) ou aux services de l'Etat (C. trav., art. L. 322-4-18, al. 1er, dans sa rédaction antérieure à la loi du 18 janvier 2005). Le programme était ouvert aux jeunes de moins de 26 ans et aux jeunes de 26 à moins de 30 ans n'ayant jamais, ou peu, travaillé depuis la fin de la scolarité. Les contrats de travail étaient de droit privé, y compris lorsque l'employeur était un organisme de droit public. La rémunération minimale était le SMIC (C. trav., art. L. 322-4-19, al. 2, dans sa rédaction antérieure à la loi du 18 janvier 2005 N° Lexbase : L6155ACX). Le dispositif des emplois-jeunes est en voie progressive d'extinction, car les financements ont seulement été maintenus pour les programmes en cours (4). Le dispositif est progressivement remplacé par d'autres formules, dont le contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS).

  • Autres contrats aidés à durée déterminée

La solution retenue par la Cour de cassation d'une résolution judiciaire du contrat de travail à durée déterminée, consécutive à une impossibilité de reclassement d'un salarié inapte suite à un accident du travail, a vocation à s'appliquer aux contrats aidés, par application de l'arrêt rapporté, autres que les emplois-jeunes (qui n'existent plus, en tout état de cause, depuis la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, de programmation pour la cohésion sociale N° Lexbase : L6384G49), pour autant qu'ils soient conclus pour une durée déterminée : feu les contrat de qualification, contrat d'orientation, contrat emploi-solidarité et contrat emploi consolidé, contrats emploi-jeune conclus dans le cadre du programme "NS/EJ" et le contrat d'avenir, le contrat d'accompagnement dans l'emploi, le CDD senior, si les parties choisissent le CDD, le contrat de professionnalisation, le contrat initiative-emploi rénové, là aussi si les parties choisissent pour le contrat une durée déterminée.


(1) J.-Y. Frouin, La protection de l'emploi des salariés victimes d'une maladie ou d'un accident, RJS, 12/95, p. 773.
(2) Lire les obs. de G. Auzero, La preuve de l'impossibilité de reclasser un salarié inapte incombe à l'employeur, Lexbase Hebdo n° 130 du 21 juillet 2004 - édition sociale (N° Lexbase : N2399ABH).
(3) B. Allibert, Commentaire de la loi du 16 octobre 1997, relative au développement d'activité pour l'emploi des jeunes et du décret d'application du 17 octobre 1997, Petites affiches n° 28, 6 mars 1998, p. 8 ; J.-C. Boulard, Rapport d'information, Assemblée Nationale n° 337, 17 octobre 1997 ; Rapport d'information, Assemblée nationale, n° 1211, 18 novembre 1998 ; J. Chaumette et J.-Y. Kerbourc'h, L'accès des jeunes à l'emploi : l'apport du droit, in Ministère du Travail et de l'emploi, Les jeunes et l'emploi : recherches pluridisciplinaires, Cahier Travail et emploi, 1996 ; F. Duquesne, Les contrats "emplois-jeunes", SSL, 1999, n° 923, p. 41 ; D. Gelot et J.-L. Meyer, Le programme "Nouveaux services/emplois-jeunes", Dr. soc., 2001. 1062 ; A. Gournac, Rapport d'information, Doc. Sénat, 2000-2001, n° 25 ; C. Guitton, Emplois-jeunes - La professionnalisation en débat, Céreq Bref n° 158, novembre 1999 ; Y. Robineau (président), Rapport de l'instance d'évaluation des mesures d'aide aux premiers emplois du secteur non marchand, Conseil national de l'évaluation et Commissariat général du Plan, 2002 ; S. Salon et J.-C. Savignac, Emploi des jeunes, AJDA 1998. 54 ; J. Savatier, L'aide aux emplois-jeunes, Dr. soc., 1997, 908 ; G. Seraud, Le contrat jeune : l'invention du contrat à durée indéterminée affecté d'un terme, Dr. ouvrier, 1999, 179 ; S. Traoré, Les contrats emploi jeune de la loi du 16 octobre 1997 et les critères jurisprudentiels des contrats de l'Administration, RD publ., 1998, 225 ; Les contrats emploi-jeune de la loi du 16 octobre 1997, Nature juridique, Dr. adm., 1998, chron. n° 2, p. 6.
(4) S. Casaux, Que sont devenus les emplois jeunes des collectivités locales, des établissements publics et associations ?, DARES, 1ères informations, 1ères synthèses, novembre 2006, n° 44.1.

Décision

Cass. soc., 18 avril 2008, n° 06-43.846, M. Sébastien Ravel, FS-P+B (N° Lexbase : A1735D8R)

Cassation ( )

Textes visés : C. trav., art. L. 322-4-20 (N° Lexbase : L8956G7T, abrogé) et L. 122-32-5, alinéa 1 et 2 (N° Lexbase : L5523ACK, art. L. 1226-10 N° Lexbase : L9850HWQ et L. 1226-11, recod. N° Lexbase : L9851HWR)

Mots-clefs : contrat emploi-jeune ; accident du travail ; avis d'inaptitude ; impossibilité de reclassement ; mode de rupture du contrat de travail ; licenciement ; cause réelle et sérieuse (non) ; résiliation judiciaire (oui).

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