Réf. : Loi du 26 juillet 2005, n° 2005-845, de sauvegarde des entreprises (N° Lexbase : L0828HDZ)
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par Julien Prigent, Avocat à la cour d'appel de Paris
le 07 Octobre 2010
"L'administrateur a seul la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur. Le contrat est résilié de plein droit après une mise en demeure adressée à l'administrateur restée plus d'un mois sans réponse. Avant l'expiration de ce délai, le juge-commissaire peut impartir à l'administrateur un délai plus court ou lui accorder une prolongation, qui ne peut excéder deux mois, pour prendre parti.
Lorsque la prestation porte sur le paiement d'une somme d'argent, celui-ci doit se faire au comptant, sauf pour l'administrateur à obtenir l'acceptation, par le cocontractant du débiteur, de délais de paiement. Au vu des documents prévisionnels dont il dispose, l'administrateur s'assure, au moment où il demande l'exécution, qu 'il disposera des fonds nécessaires à cet effet. S'il s'agit d'un contrat à exécution ou paiement échelonnés dans le temps, l'administrateur y met fin s'il lui apparaît qu'il ne disposera pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations du terme suivant.
A défaut de paiement dans les conditions définies à l'alinéa précédent et d'accord du cocontractant pour poursuivre les relations contractuelles, le contrat est résilié de plein droit et le parquet, l'administrateur, le représentant des créanciers ou un contrôleur peut saisir le tribunal aux fins de mettre fin à la période d'observation.
Le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture. Le défaut d'exécution de ces engagements n'ouvre droit au profit des créanciers qu'à déclaration au passif.
Si l'administrateur n'use pas de la faculté de poursuivre le contrat, l'inexécution peut donner lieu à des dommages-intérêts dont le montant sera déclaré au passif au profit de l'autre partie. Celle-ci peut néanmoins différer la restitution des sommes versées en excédent par le débiteur en exécution du contrat jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les dommages-intérêts.
Nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution du contrat ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire.
Les dispositions du présent article ne concernent pas les contrats de travail".
"L'administrateur a seul la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur. Le contrat est résilié de plein droit après une mise en demeure adressée à l'administrateur restée plus d'un mois sans réponse. Avant l'expiration de ce délai, le juge-commissaire peut impartir à l'administrateur un délai plus court ou lui accorder une prolongation, qui ne peut excéder deux mois, pour prendre parti.
Lorsque la prestation porte sur le paiement d'une somme d'argent, celui-ci doit se faire au comptant, sauf pour l'administrateur à obtenir l'acceptation, par le cocontractant du débiteur, de délais de paiement. Au vu des documents prévisionnels dont il dispose, l'administrateur s'assure, au moment où il demande l'exécution, qu 'il disposera des fonds nécessaires à cet effet. S'il s'agit d'un contrat à exécution ou paiement échelonnés dans le temps, l'administrateur y met fin s'il lui apparaît qu'il ne disposera pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations du terme suivant.
A défaut de paiement dans les conditions définies à l'alinéa précédent et d'accord du cocontractant pour poursuivre les relations contractuelles, le contrat est résilié de plein droit et le parquet, l'administrateur, le représentant des créanciers ou un contrôleur peut saisir le tribunal aux fins de mettre fin à la période d'observation.
Le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture. Le défaut d'exécution de ces engagements n'ouvre droit au profit des créanciers qu'à déclaration au passif.
Si l'administrateur n'use pas de la faculté de poursuivre le contrat ou y met fin dans les conditions du deuxième alinéa, l'inexécution peut donner lieu à des dommages et intérêts dont le montant doit être déclaré au passif au profit de l'autre partie contractante. Celle-ci peut néanmoins différer la restitution des sommes versées en excédent par le débiteur en exécution du contrat jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les dommages et intérêts.
Nonobstant toute disposition légale ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution du contrat ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde.
Les dispositions du présent article ne concernent pas les contrats de travail".
1. L'absence de résiliation de plein droit du bail à la suite de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire
L'ouverture d'une procédure de redressement (C. com. art L. 621-28, al. 6) ou de liquidation (Cass. com., 17 octobre 1989, n° 88-12.261, Société financière Locabanque c/ M. Ayache, publié N° Lexbase : A7813AGH, Bull. civ. IV, n° 251) judiciaire ne saurait entraîner la résiliation ou la résolution d'un contrat en cours, nonobstant toute clause contraire, même si, dans le cadre d'une liquidation, l'activité n'est pas poursuivie (Cass. com., 22 janvier 2002, n° 99-20.003, FS-D N° Lexbase : A8187AXI ; lire E. Le Corre-Broly, La liquidation judiciaire et les contrats en cours, Lexbase Hebdo n° 139 du 21 octobre 2004 - édition affaires N° Lexbase : N3161ABP).
Le bail commercial en cours, en tant que contrat, n'est donc pas résilié du simple fait de l'ouverture d'une procédure collective. L'ancien article L. 622-13, alinéa 1er, le prévoit, d'ailleurs, expressément, pour les baux des immeubles affectés à l'activité de l'entreprise.
La solution a été reprise au nouvel article L. 622-13, alinéa 5, du Code de commerce. Ce dernier vise la nouvelle procédure de sauvegarde mais il sera, également, applicable à la procédure de redressement en raison du renvoi opéré par le nouvel article L. 631-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L4025HBP). Elle est, également, expressément prévue en phase de liquidation judiciaire en ce qui concerne les baux des immeubles affectés à l'activité de l'entreprise, le premier alinéa de l'ancien article L. 622-13 ayant été repris au premier alinéa de l'article L. 641-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L3905HBA).
Il est à noter que le statut des baux commerciaux prévoit lui-même que le redressement ou la liquidation judiciaire n'entraîne pas la résiliation de plein droit du bail des immeubles affectés à l'industrie, au commerce ou à l'artisanat du débiteur, toute clause contraire étant réputée non écrite (C. com., art. L. 145-45 N° Lexbase : L5773AIN).
2. L'option de l'organe compétent sur la continuation du bail
2.1 Régime actuel
Aux termes de l'article L. 621-28 du Code de commerce, l'administrateur a seul la faculté d'exiger l'exécution d'un contrat en cours. En cas de procédure de redressement simplifiée sans administrateur, l'article L. 621-137 du Code de commerce (N° Lexbase : L6989AIP) accorde cette faculté au débiteur, sous réserve de l'autorisation du juge-commissaire, à défaut de laquelle l'option pour la continuation ne produit aucun effet (Cass. com., 6 mai 1997, n° 95-10.933, M. Laroppe, ès qualités de liquidateurde la société Le Stingray c/ Epoux Renault, publié N° Lexbase : A1714ACH). Le débiteur peut, néanmoins, renoncer seul à la continuation (Cass. com., 9 janvier 1996, n° 93-21.719, Mme Poincheval, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de c/ M. Leclaire, publié N° Lexbase : A9515ABZ). Lorsqu'une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte, le liquidateur est titulaire de ce droit d'exiger la poursuite du contrat en cours (C. com. art. L. 622-12, al. 2 N° Lexbase : L7007AID).
Lorsque l'administrateur, le débiteur autorisé par le juge-commissaire ou le liquidateur, décide de poursuivre l'exécution du contrat en cours, il doit fournir au cocontractant la prestation promise. Lorsqu'elle porte sur le paiement d'une somme d'argent, ce qui est le cas de l'obligation d'un locataire, plus rarement du bailleur, ce paiement doit intervenir au comptant. Avant de demander l'exécution, l'organe compétent doit s'assurer qu'il dispose des fonds nécessaires et, lorsque le contrat est à exécution successive ou paiement échelonné, il doit y mettre fin s'il pense ne pas disposer des fonds nécessaires (C. com. art. L. 621-28, al. 1 et 2). Dans ce dernier cas, le contrat est résilié de plein droit.
Lorsque le contrat est continué, le cocontractant doit également remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs (C. com. art. L. 621-28, al. 5) : il ne peut, donc, se prévaloir d'une exception d'inexécution.
Afin d'éviter de laisser le cocontractant trop longtemps dans l'incertitude, l'article L. 621-28 du Code de commerce lui permet de mettre l'organe compétent en demeure d'opter sur la poursuite du contrat en cours. Le défaut de réponse dans le délai d'un mois, courant à compter de cette mise en demeure, entraîne la résiliation de plein droit du contrat. En cas de réponse négative dans ce même délai, le contrat sera également résilié de plein droit (Cass. com., 18 mars 2003, n° 00-12.693, Société immobilière du Palais des congrès (SIPAC) c/ Société Bel, FS-P N° Lexbase : A5489A7G ; lire E. Le Corre-Broly, Le délai de déclaration de la créance d'indemnité de résiliation, Lexbase Hebdo n° 71 du 15 mai 2003 - édition affaires N° Lexbase : N7189AAI).
A défaut de mise en demeure, la décision de l'organe compétent de ne pas poursuivre le contrat n'entraîne pas la résiliation de plein droit mais, selon la formule de la Cour de cassation, "confère au seul cocontractant le droit de la faire prononcer en justice" (Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-13.542, FS-P+B+I N° Lexbase : A2479DCS ; Cass. com., 7 décembre 2004, n° 03-15 .164, M. Raymond Brun, F-D N° Lexbase : A3625DEY ; et Cass. com., 5 juillet 2005, n° 04-13 .834, Société SCE c/ M. Cosme Rogeau, F-P+B N° Lexbase : A8998DI4).
Ces règles générales sont, également, applicables aux baux commerciaux objet, cependant, d'un régime spécifique en ce qui concerne leur résiliation pour défaut de paiement de loyers postérieurs au jugement d'ouverture.
2.2 Nouveau régime
2.2.1 Règles générales
Les dispositions de l'article L. 621-28 du Code de commerce ont été reprises au nouvel article L. 622-13 du même code et partiellement modifiées. Les solutions antérieures, en ce qu'elles ne sont pas incompatibles avec ces modifications, devront être reconduites.
Tout d'abord, le nouvel article L. 622-13 du Code de commerce est relatif à la procédure de sauvegarde. Il est également rendu applicable à la procédure de redressement judiciaire, en application de l'article L. 631-14 (N° Lexbase : L4025HBP). En cas de liquidation judiciaire, le nouvel article L. 641-10 (N° Lexbase : L3952HBY) confie au liquidateur, à l'instar de l'ancien article L. 622-10 (N° Lexbase : L7005AIB), la faculté d'exiger la continuation des contrats en cours et renvoie, s'agissant de ses prérogatives, à celles de l'administrateur telles qu'elles lui sont conférées par le nouvel article L. 622-13.
Ensuite, le nouveau texte a ajouté un nouveau cas dans lequel l'inexécution du contrat en cours pourra donner lieu à des dommages et intérêts dont le montant devra être déclaré au passif. En effet, l'ancien alinéa 5 de l'article L. 621-28 du Code de commerce n'envisageait cette solution que pour l'hypothèse d'un contrat non continué dès l'origine. Désormais, elle est également applicable lorsque le contrat est résilié, alors qu'il a été initialement continué mais que l'organe compétent y a mis fin en raison du fait qu'il ne disposait pas des fonds nécessaires pour remplir les obligations du terme suivant.
Il est probable que le délai de la déclaration de créance de l'indemnité de résiliation du contrat en cours actuellement applicable soit maintenu et étendu à cette nouvelle hypothèse. Ce délai, aux termes de l'article 66 du décret n° 85-1388 (décret du 27 décembre 1985 N° Lexbase : L5358A49), est d'un mois et court à compter de la date de la résiliation de plein droit ou de la notification de la date de la décision prononçant la résiliation.
Par ailleurs, selon l'alinéa 5 du nouvel article L. 622-13, l'indemnité de résiliation ne "sera" plus seulement déclarée mais "doit" l'être. Cette modification ne semble pas emporter d'effets particuliers, la sanction résidant dans l'extinction de la créance. Elle a, peut-être, pour mérite d'attirer l'attention du cocontractant.
Il est également précisé que la partie au profit de laquelle cette déclaration doit être effectuée est la partie contractante, ce qui ne faisait guère de doute.
Enfin, l'avant-dernier alinéa du nouveau texte prévoit, désormais, que c'est l'ouverture de la procédure de sauvegarde qui n'entraîne pas la résiliation de plein droit. Par renvoi, il s'applique également en phase de redressement.
2.2.2 Règles spécifiques au bail commercial
Article L. 621-29 du Code de commerce (N° Lexbase : L6881AIP) abrogé et remplacé par le nouvel article L. 622-14 du Code de commerce (N° Lexbase : L3873HB3) (loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, art. 30)
"A compter du jugement d'ouverture, le bailleur peut demander la résiliation judiciaire ou la résiliation de plein droit du bail des immeubles affectés à l'activité de l 'entreprise pour défaut de paiement des loyers et des charges afférents à une occupation postérieure audit jugement. Cette action ne peut être introduite moins de deux mois après le jugement d'ouverture.
Nonobstant toute clause contraire, le défaut d'exploitation pendant la période d'observation dans un ou plusieurs immeubles loués par l'entreprise n'entraîne pas résiliation du bail".
"La résiliation du bail des immeubles donnés à bail au débiteur et affectés à l'activité de l'entreprise est constatée ou prononcée :
1° Lorsque l'administrateur décide de ne pas continuer le bail et demande la résiliation de celui-ci. Dans ce cas, la résiliation prend effet au jour de cette demande ;
2° Lorsque le bailleur demande la résiliation ou fait constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu'au terme d'un délai de trois mois à compter dudit jugement.
Si le paiement des sommes dues intervient avant l'expiration de ce délai, il n 'y a pas lieu à résiliation.
Nonobstant toute clause contraire, le défaut d'exploitation pendant la période d'observation dans un ou plusieurs immeubles loués par l'entreprise n'entraîne pas résiliation du bail".
2.2.2.1 Sauvegarde et redressement
Le nouvel article L. 622-14 du Code de commerce prévoit les conditions dans lesquelles la résiliation d'un bail commercial pourra intervenir en cas de procédure de sauvegarde ou de redressement par renvoi opéré par l'article L. 631-14 du Code de commerce.
Il convient, tout d'abord, de préciser que seul le débiteur locataire est concerné par ces nouvelles dispositions. Si le bailleur est en faillite, il y aura lieu, en principe, d'appliquer le nouvel article L. 622-13 du Code de commerce. Le problème de l'application de ce dernier texte, dont les dispositions ont été reprises pour l'essentiel de l'ancien article L. 621-28 du Code de commerce, dans l'hypothèse où la procédure collective a été ouverte à l'égard du bailleur, n'est donc pas résolu (sur cette question, voir, par exemple, Thierry Grundler, La résiliation du bail commercial en vertu des articles 37 et 153-3 de la loi du 25 janvier 1985 en cas de redressement ou de liquidation du bailleur, Administrer novembre 1998, p. 10 et Fabien Kendérian, Le bail commercial relève-t-il du régime des contrats en cours en cas de procédure collective du bailleur ?, D. 2003, Cahier droit des affaires, chron. p. 610).
Désormais, la résiliation du bail commercial affecté à l'activité du preneur en faillite pourra intervenir lorsque l'administrateur demandera la résiliation de celui-ci, la résiliation prenant, alors, effet au jour de cette demande, ou lorsque le bailleur demandera la résiliation ou la fera constater pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture.
Cet article offre à l'administrateur la faculté de résilier de plein droit le bail commercial consenti au preneur en faillite. Il s'agit d'une nouveauté dans la mesure où, sous l'empire de l'ancien article L. 621-28 du Code de commerce, tel que l'avait interprété la jurisprudence, l'organe compétent ne disposait d'un pouvoir de résiliation unilatérale seulement lorsque le créancier l'avait mis au préalable en demeure d'opter pour la continuation du bail. A défaut, seul le cocontractant avait la faculté de faire prononcer la résiliation en justice (Cass. com., 19 mai 2004, n° 01-13.542, précité ; Cass. com., 7 décembre 2004, n° 03-15.164, précité ; et Cass. com., 5 juillet 2005, n° 04-13.834, précité). Si cette dernière solution devrait être maintenue pour l'ensemble des contrats, elle n'aura plus cours en présence d'un bail commercial lorsque le preneur sera en faillite puisque, dans ce cas, l'administrateur aura le pouvoir de résilier le bail de sa propre initiative.
La question se pose de l'articulation du nouvel article L. 622-13 du Code de commerce avec le nouvel article L. 622-14 de ce code, notamment, des effets d'une mise en demeure : le nouvel article L. 622-14 du Code de commerce est-il autonome et les cas de résiliation du bail qu'il énumère sont-ils limitatifs, ou son application doit-elle être conciliée avec celle de l'article L. 622-13 du Code de commerce ? En d'autres termes, la mise en demeure de l'administrateur laissée sans réponse plus d'un mois entraînera-t-elle la résiliation de plein droit du bail ? Les travaux préparatoires ne sont pas, sur ce point, d'un grand secours. Ils ne permettent pas d'affirmer avec certitude que le législateur ait souhaité que le nouvel article L. 622-14 du Code de commerce soit exclusif de l'application de l'article L. 622-13 (Rapp. Xavier de Roux, au nom de la commission des lois de l'Assemblée Nationale, Doc. Ass. Nat . 2005, n° 2095, p. 231 et Rapp. J.-J. Hyest, au nom de la Commission des lois du Sénat, Doc. Sénat 2005, n° 335, p. 45). En outre, au cours du processus législatif ayant conduit au vote de l'article L. 622-14 du Code de commerce, la mention "par dérogation aux dispositions de l'article L. 622-13" placée en tête de cet article a disparu, ainsi que celle indiquant que la résiliation ne pourrait intervenir qu'à l'initiative de l'administrateur. Il est donc difficile d'affirmer avec certitude que l'article L. 622-13 du Code de commerce ne trouvera pas à s'appliquer. Dans le cas contraire, la mise en demeure de l'administrateur n'entraînerait aucun effet juridique.
Il est certain, néanmoins, que l'alinéa 3 du nouvel article L. 622-13 du Code de commerce, qui prévoit une résiliation de plein droit en cas de non-paiement des sommes d'argent à leur échéance, dans la mesure où elle contrarie l'alinéa 1er, 2°, du nouvel article L. 622-14 du Code de commerce qui interdit au bailleur d'agir en résiliation du bail pour non-paiement des loyers avant l'expiration d'un délai de trois mois courant à compter du jugement d'ouverture.
2.2.2.2 Liquidation
Article L. 622-13 du Code de commerce (N° Lexbase : L7008AIE) remplacé par le nouvel article L. 641-12 du Code de commerce (N° Lexbase : L3905HBA) (loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005, art. 107)
"La liquidation judiciaire n'entraîne pas de plein droit la résiliation du bail des immeubles affectés à l'activité de l'entreprise.
Le liquidateur ou l'administrateur peut continuer le bail ou le céder dans les conditions prévues au contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent.
Si le liquidateur ou l'administrateur décide de ne pas continuer le bail, celui -ci est résilié sur sa simple demande. La résiliation prend effet au jour de cette demande.
Le bailleur qui entend demander ou faire constater la résiliation pour des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire doit, s'il ne l'a déjà fait, introduire sa demande dans les trois mois du jugement. Les dispositions de l'article L. 621-29 sont applicables, que l'activité soit ou non poursuivie.
Le privilège du bailleur est déterminé conformément aux trois premiers alinéas de l'article L. 621-31".
"La liquidation judiciaire n'entraîne pas de plein droit la résiliation du bail des immeubles affectés à l'activité de l'entreprise.
Le liquidateur ou l'administrateur peut continuer le bail ou le céder dans les conditions prévues au contrat conclu avec le bailleur avec tous les droits et obligations qui s'y rattachent. En cas de cession du bail, les dispositions de l'article 622-15 sont applicables.
Si le liquidateur ou l'administrateur décide de ne pas continuer le bail, celui-ci est résilié sur sa simple demande. La résiliation prend effet au jour de cette demande.
Le bailleur peut demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire ou, lorsque ce dernier a été prononcé après une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, au jugement d'ouverture de la procédure qui l'a précédé. Il doit, s'il ne l'a déjà fait, introduire sa demande dans les trois mois de la publication du jugement de liquidation judiciaire.
Le bailleur peut également demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, dans les conditions prévues aux troisième à cinquième alinéas de l'article L. 622-14.
Le privilège du bailleur est déterminé conformément aux trois premiers alinéas de l'article L. 621-31".
Si l'article L. 641-10 du Code de commerce renvoie aux dispositions de celles de l'article L. 622-13 du même code en ce qui concerne le pouvoir du liquidateur d'opter pour la continuation des contrats en cours, il n'est pas effectué de renvoi à l'article L. 622-14. Par conséquent, soit l'article L. 622-13 du Code de commerce s'appliquera faute de sa mise à l'écart expresse, soit il y aura lieu d'appliquer le seul nouvel article L. 641-12 du Code de commerce traitant du sort du bail dans le cadre d'une liquidation. Actuellement, la jurisprudence applique l'ancien article L. 621-28 du Code de commerce en cas de liquidation. Cependant, si l'autonomisation des dispositions propres au bail affecté à l'activité du preneur en faillite en cas de sauvegarde ou de redressement était confirmée, elle conduirait à penser que celles relatives à la liquidation pourraient, désormais, être également exclusives de l'application du régime général.
L'article L. 641-12 du Code de commerce comporte peu de modifications par rapport à l'ancien article L. 622-13 de ce code en ce qui concerne la résiliation demandée par le liquidateur.
Il prévoit toujours que le liquidateur ou l'administrateur peut continuer le bail ou le céder et que la résiliation du bail est constatée sur sa simple demande. Il semble, toutefois, que sous l'empire de l'ancien texte, la renonciation du liquidateur à continuer un bail n'entraîne pas sa résiliation de plein droit (Cass. com., 5 juillet 2005, n° 04-13.834, précité : cependant, l'application de l'ancien article L. 622-13, alinéa 3, n'avait pas été soulevée au moyen).
3. La résiliation du bail à l'initiative du bailleur pour non paiement des loyers
3.1 Sauvegarde et redressement
L'alinéa 1, 2°, du nouvel article L. 622-14 du Code de commerce reprend les dispositions de l'alinéa 1 de l'ancien article L. 621-29 du même code qui permettent au bailleur de demander ou faire constater la résiliation du bail pour non-paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture.
Toutefois, le délai dans lequel le bailleur ne peut agir a été allongé et passe de deux à trois mois. Cette modification trouve son origine dans la volonté du législateur d'aligner ce délai avec celui dans lequel l'action en revendication peut être exercée (C. com. nouv., art. L. 624-9 N° Lexbase : L3777HBI, anc. art. L. 621-115 N° Lexbase : L6967AIU). En pratique, le débiteur était, en effet, tenu de louer de nouveaux locaux pour entreposer le matériel pouvant être revendiqué (Rapp. J.-J. Hyest, au nom de la Commission des lois du Sénat, Doc. Sénat 2005, n° 335, p. 45).
En outre, une nouvelle disposition interdit au bailleur de poursuivre son action en résiliation si des paiements interviennent dans le délai de trois mois.
Enfin, la prohibition de la résiliation du bail pour défaut d'exploitation pendant la période d'observation est reprise.
3.2 Liquidation
Le régime de la résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers est clarifié.
L'alinéa 4 de l'ancien article L. 622-13 du Code de commerce reconnaissait in fine au bailleur le droit de demander la résiliation du bail pour des causes antérieures au jugement de liquidation. La question s'était posée de savoir si cette disposition mettait à l'écart l'application de l'ancien article L. 621-40, I, 2°, du Code de commerce (C. com. nouv., art. L. 622-21 N° Lexbase : L3741HB8) qui interdit, après l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation, toute action en justice tendant à la résiliation d'un contrat pour défaut de paiement d'une créance qui a son origine antérieurement au jugement d'ouverture.
La Cour de cassation a répondu par la négative et a limité la possibilité de demander la résiliation pour des causes antérieures à l'hypothèse des obligations ne portant pas sur le paiement d'une somme d'argent (Cass. com., 28 mai 2002, n° 98-14.259, FS-P N° Lexbase : A7930AYD et Cass. com., 30 mars 2005, n° 02-10.422, F-D N° Lexbase : A4440DHW). Elle avait, toutefois, réservé l'application de l'ancien article L. 621-29 du Code de commerce (C. com. nouv. art. L. 622-14). Un auteur en avait conclu que la résiliation du bail était possible pour le non-paiement de loyers ayant leur origine entre le jugement d'ouverture d'un redressement et celui procédant à sa conversion en liquidation (Pierre-Michel Le Corre, AJDI 2002, p. 686, obs. sous Cass. com., 28 mai 2002, n ° 98-14.259, précité).
La nouvelle rédaction des dispositions de l'ancien article L. 622-13 du Code de commerce semble ne plus permettre une telle approche.
L'alinéa 4 du nouvel article L. 641-12 du Code de commerce reconnaît toujours au bailleur la faculté de demander la résiliation du bail pour des causes antérieures au jugement de liquidation mais, également, lorsque ce jugement est de conversion, pour des causes antérieures au jugement d'ouverture de sauvegarde ou de redressement qui l'a précédé. Il doit, alors, toujours former sa demande dans les trois mois. Il est, toutefois, nouvellement précisé que ce délai de trois mois courra à compter de la date de publication du jugement.
L'alinéa 5 de ce texte reconnaît explicitement au bailleur le droit de demander la résiliation pour non-paiement des loyers et charges postérieurs au jugement de liquidation. Cette faculté découlait dans la précédente rédaction du renvoi à l'article L. 621-29 du Code de commerce (C. com. nouv., art. L. 622-14). Le bailleur devra, alors, agir dans les conditions prévues aux alinéas 3 à 5 de l'article L. 622-14 du Code de commerce, à savoir, le respect du délai de trois mois durant lequel le bailleur ne peut agir et l'impossibilité d'obtenir la résiliation du bail si des sommes interviennent dans ce délai.
La référence à l'alinéa 5 est ici inappropriée car ce dernier ne concerne pas la résiliation pour non-paiement des loyers, mais interdit la résiliation du bail pour défaut d'exploitation pendant la période d'observation.
Le renvoi au nouvel article L. 622-14 du Code de commerce ne concernant que les modalités selon lesquelles la résiliation pourra intervenir pour défaut de paiement de loyers postérieurs à la liquidation, il faut en conclure que la possibilité d'une résiliation pour défaut de paiement de loyers antérieurs au jugement de liquidation mais postérieurs au jugement de sauvegarde ou de redressement l'ayant précédé est compromise, ce d'autant que sont visées les causes antérieures aux jugements d'ouverture ayant pu précéder la liquidation.
Julien Prigent
Avocat au barreau de Paris
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