Si l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce (
N° Lexbase : L7923IZH) institue une responsabilité d'ordre public à laquelle les parties ne peuvent renoncer par anticipation, il ne leur interdit pas de convenir des modalités de la rupture de leur relation commerciale, ou de transiger sur l'indemnisation du préjudice subi par suite de la brutalité de cette rupture. Tel est le principe énoncé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 16 décembre 2014 (Cass. com., 16 décembre 2014, n° 13-21.363, FS-P+B
N° Lexbase : A2657M8W). En l'espèce, un fabricant de sièges et canapés, entretenait des relations commerciales depuis 1993 avec un important distributeur, multinationale suédoise de la vente de mobilier. Le 5 janvier 2009, celui-ci a lancé un appel d'offres pour la production de ses gammes de canapés et fauteuils, auquel son fournisseur a répondu. Dans le même temps, le distributeur a informé son fournisseur que, compte tenu de la crise et de la baisse de ses ventes, ses achats allaient diminuer du 1er septembre 2009 au 31 août 2010, à la suite de quoi les parties ont conclu un protocole d'accord, le 13 juillet 2009, prévoyant le versement d'une indemnité par le distributeur. Le fournisseur ayant été retenu à l'issue de l'appel d'offres, mais pour des volumes et un chiffre d'affaires prévisionnels inférieurs, le distributeur a consenti, le 9 décembre 2009, à reporter l'application du résultat de l'appel d'offres et à poursuivre les relations aux mêmes conditions de prix et de volume jusqu'à la fin du mois d'août 2010, date à laquelle les négociations seraient reprises. Le 24 août 2010, les parties ont conclu un accord prévoyant la fin de leur collaboration pour le 31 décembre 2012, assorti d'un engagement d'approvisionnement en diminution progressive. Le fournisseur a, toutefois, assigné le distributeur en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale d'une relation commerciale établie. C'est dans ces circonstances plutôt complexes que la Cour de cassation, énonçant le principe précité, censure l'arrêt d'appel au visa des articles L. 442-6, I, 5° du Code de commerce, 1134 (
N° Lexbase : L1234ABC), 2044 (
N° Lexbase : L2289ABE) et 2046 (
N° Lexbase : L2291ABH) du Code civil, en ce qu'il avait retenu, pour écarter l'accord du 24 août 2010, retenir la responsabilité du distributeur pour avoir réduit ses commandes et le condamner à payer des dommages-intérêts, que s'il y a eu un accord entre les sociétés pour un dénouement progressif des relations commerciales litigieuses du 1er septembre 2010 au 31 décembre 2012, cette circonstance ne saurait empêcher un contrôle juridictionnel du respect de la réalité du préavis au travers des volumes d'échanges pendant sa durée, l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce étant une disposition d'ordre public économique qui n'accepte pas de dérogation conventionnelle.
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