Réf. : Cass. crim., 22 octobre 2024, n° 23-82.531, F-D N° Lexbase : A21876CY
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N0821B3S
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par Pauline Le Guen
le 26 Novembre 2024
► La Haute juridiction souligne que le délit d’outrage à personne dépositaire de l’autorité publique, prévue par l’article 433-5 du Code pénal, est constitué seulement lorsqu’il est établi que l’auteur a souhaité que ses propos soient rapportés à la personne visée. Elle rappelle par ailleurs que la procédure de convocation par procès-verbal n’est pas applicable en matière de délit de presse.
Rappel des faits et de la procédure. Au cours d’une manifestation, des fonctionnaires de police encadrant l’évènement ont rapporté qu’un homme avait pris la parole au micro en les qualifiant « d’éborgneurs » et incitant à la violence. Placé en garde à vue pour ces propos, l’intéressé a refusé de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques.
Il fut déféré devant le procureur, puis convoqué devant le tribunal correctionnel en application de l’article 394 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L1545MAH (convocation par procès-verbal), afin d’être jugé des chefs de provocation non suivie d’effet à des atteintes à la vie et à l’intégrité de la personne, outrage envers une personne dépositaire de l’autorité publique et refus de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques. Il fut déclaré coupable et condamné à deux mois d’emprisonnement. Le prévenu ainsi que le procureur de la République ont relevé appel de cette décision.
En cause d’appel. L’intéressé a formé un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel confirmant le jugement.
Moyens du pourvoi. Il est reproché à l’arrêt de déclarer le prévenu coupable et de le condamner du chef d’outrage à PDAP, alors que la cour d’appel n’a pas recherché si ses propos avaient été adressés aux policiers participant à la manifestation, ce qui n’était pas le cas selon l’intéressé, peu important que ces derniers aient entendu ses paroles.
Décision. Dans un premier temps, au visa de l’article 397-6 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7499L7U, la Chambre criminelle rappelle que la procédure de convocation par procès-verbal prévue par l’article 394 du même code n’est pas applicable en matière de délit de presse. Elle prononce dès lors la nullité de la poursuite pour provocation non suivie d’effet à des atteintes à la vie et à l’intégrité de la personne.
Par ailleurs, au visa de l’article 433-5 du Code pénal N° Lexbase : L9090MLA, la Haute juridiction rappelle qu’est constitutif d’un outrage toute parole, gestes, menaces, image ou envoie d’objet, adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou respect dû à sa fonction. En l’espèce, la cour d’appel, pour dire établi le délit, retenait simplement que les policiers étaient tous formels sur les termes employés par le prévenu, la publicité des propos étant sans incidence sur la caractérisation de l’infraction.
En ne recherchant pas en quoi les propos, s’ils n’avaient pas été directement adressés aux fonctionnaires, avaient été nécessairement rapportés à ces derniers, alors que le délit d’outrage envers personne dépositaire de l’autorité publique n’est constitué que lorsqu’il est établi que l’auteur a voulu que ses propos soient rapportés à la personne visée, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision, de sorte que la cassation doit être prononcée.
Pour aller plus loin : v. E. Raschel et T. Besse, ÉTUDE : Les responsabilités en droit de la presse, Les outrages, in Droit de la presse (Dir. E. Raschel), Lexbase N° Lexbase : E6329Z8W |
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