Réf. : Cons. const., décision n° 2024-1109 QPC, du 18 octobre 2024 N° Lexbase : A87716A4
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par Yann Le Foll
le 24 Octobre 2024
► Sont conformes à la Constitution, les dispositions législatives encadrant l’implantation des clôtures dans les espaces naturels, afin de permettre la circulation de la faune sauvage.
Objet QPC. Selon les dispositions contestées des première, deuxième, quatrième, cinquième, sixième et dernière phrases du premier alinéa de l’article L. 372-1 du Code de l’environnement N° Lexbase : L7389MGR, dans sa rédaction issue de la loi n° 2023-54, du 2 février 2023, visant à limiter l’engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée N° Lexbase : L7097MGX, les clôtures implantées dans certaines zones délimitées par le règlement du plan local d’urbanisme ou dans les espaces naturels doivent permettre en tout temps la libre circulation des animaux sauvages. À cet effet, ces dispositions prévoient que ces clôtures doivent respecter certaines caractéristiques, notamment de hauteur et de distance par rapport au sol. Toute réfection ou rénovation de clôtures doit, en outre, être réalisée selon ces caractéristiques.
Ces mêmes dispositions imposent, sous certaines limites et exceptions, aux propriétaires de mettre en conformité leurs clôtures avant le 1er janvier 2027. Cette obligation s’applique aux clôtures qui ont été édifiées moins de trente ans avant la publication de la loi du 2 février 2023.
Droit de propriété. S’agissant de la première branche des critiques tirées de la méconnaissance du droit de propriété, le Conseil constitutionnel juge qu’il résulte du droit de propriété, le droit pour le propriétaire de clore son bien foncier. Il relève que les dispositions contestées visent uniquement à soumettre l’implantation, la réfection ou la rénovation de clôtures dans les espaces naturels au respect de certaines caractéristiques, notamment de hauteur et de distance par rapport au sol. Il en résulte que, si cette obligation peut conduire à la destruction d’une clôture, elle n’entraîne pas une privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789 N° Lexbase : L1364A9E, mais une limitation à l’exercice du droit de propriété.
Garantie des droits. S’agissant de la seconde branche des critiques, tirées de la méconnaissance de la garantie des droits, le Conseil constitutionnel rappelle que, selon l’article 16 de la Déclaration de 1789 N° Lexbase : L1363A9D : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ». Il juge que, en imposant la mise en conformité des clôtures existantes, y compris lorsque celles-ci ont été régulièrement implantées, ces dispositions portent atteinte à des situations légalement acquises.
Toutefois, le Conseil relève, en premier lieu, qu’il ressort des travaux préparatoires que, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu réduire le nombre des enclos étanches en milieu naturel eu égard aux conséquences sur l’environnement de leur multiplication au cours des trente dernières années. Ce faisant, il a poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement, ainsi que les objectifs d’intérêt général précités.
En deuxième lieu, d’une part, les propriétaires ont jusqu’au 1er janvier 2027 pour mettre en conformité leurs clôtures. D’autre part, l’obligation de mise en conformité des clôtures existantes ne s’applique pas aux clôtures réalisées depuis plus de trente ans avant la publication de la loi du 2 février 2023.
En dernier lieu, ces dispositions n’empêchent pas les propriétaires de maintenir des clôtures existantes, afin de matérialiser physiquement leur propriété pour en interdire l’accès aux tiers, à la condition qu’elles respectent les caractéristiques qu’elles prévoient. En outre, elles s’appliquent sous réserve de plusieurs exceptions.
De l’ensemble de ces motifs, le Conseil constitutionnel déduit que l’atteinte portée aux situations légalement acquises est, en l’espèce, justifiée par des motifs d’intérêt général suffisants et proportionnée aux buts poursuivis. Il écarte ainsi le grief tiré de la méconnaissance de la garantie des droits proclamée par l’article 16 de la Déclaration de 1789.
Décision. Les dispositions contestées de l’article L. 372-1 du Code de l’environnement sont conformes à la Constitution.
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