Réf. : Cass. civ. 1, 24 avril 2024, n° 22-24.667, FS-B N° Lexbase : A7822289
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N9132BZA
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par Marie Le Guerroué
le 25 Avril 2024
►Seuls les associés d'une association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle (AARPI) peuvent participer aux décisions collectives, la participation d'une personne n'ayant pas cette qualité à une assemblée générale au cours de laquelle a été prise une telle décision constitue une cause de nullité de cette assemblée générale ;
L'associé d'une AARPI peut consentir des avances de fonds au profit de l'indivision des associés de l'AARPI.
Faits et procédure. Le 26 septembre 2018, une avocate au sein d’une association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle (AARPI), avait notifié son retrait aux deux autres membres de l'association. Le 6 novembre 2018, l'assemblée générale extraordinaire de l'AARPI a pris acte de son retrait au 31 décembre 2018. Le 13 mars 2019, l’un des deux autres avocats de l’AARPI a saisi le Bâtonnier d'une réclamation déontologique et d'une demande d'arbitrage à l'égard de l’avocate. Le 21 mai 2019, l'assemblée générale de l'AARPI s'est réunie afin d'arrêter les comptes de l'association au 31 décembre 2018. Le 23 mai 2019, l’avocate a formé des demandes reconventionnelles relatives à ses droits financiers et à la désignation d'un expert-comptable afin qu'il établisse le bilan au 31 décembre 2018 de l'AARPI. Une sentence arbitrale du 29 janvier 2021 a fixé les « créances de l'AARPI à l'encontre de l’avocate » et celles de cette dernière « à l'encontre de l'AARPI », sursis à statuer sur les demandes en paiement, désigné un expert aux fins de déterminer, conformément aux dispositions des statuts de l'AARPI, les « droits sociaux » de l’avocate et rejeté les autres demandes des parties. L’avocate forme un pourvoi en cassation contre l’arrêt rendu le 11 octobre 2022 par la cour d'appel de Versailles.
Sur le rejet de la demande d'annulation des délibérations prises lors de l'assemblée générale de l'AARPI. L’avocate fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'annulation des délibérations prises lors de l'assemblée générale de l'AARPI du 21 mai 2019, et de confirmer la sentence arbitrale du 29 janvier 2021 en ce qu'elle a fixé « les créances de l'AARPI » à son encontre et en ce qu'elle a rejeté les autres demandes.
Réponse de la Cour. En premier lieu, il résulte des articles 1844 N° Lexbase : L2412LRR, 1844-10, alinéa 3 N° Lexbase : L8683LQN, et 1871-1 N° Lexbase : L2070ABB du Code civil et 124 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991, organisant la profession d'avocat N° Lexbase : L8168AID que seuls les associés d'une AARPI peuvent participer aux décisions collectives et que la participation d'une personne n'ayant pas cette qualité à une assemblée générale au cours de laquelle a été prise une telle décision constitue une cause de nullité de cette assemblée générale. Pour les Juges du droit, c'est donc à tort que la cour d'appel a retenu qu'était justifiée la convocation de l’avocate associée jusqu'au 31 décembre 2018, à l'assemblée générale du 21 mai 2019, ayant pour objet d'arrêter les comptes au 31 décembre 2018, et qu'elle lui a opposé son choix de ne pas y participer et de ne pas exercer son droit de vote. Cependant l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure. En effet, l’avocate est sans intérêt à critiquer le rejet de sa demande d'annulation des délibérations prises lors de cette assemblée générale, dès lors que les créances ont été fixées par le Bâtonnier au vu des éléments soumis par les parties et qu'une expertise a été ordonnée pour analyser les factures, établir les comptes entre les parties et, le cas échéant, aboutir à une régularisation de ceux approuvés par les délibérations de cette assemblée générale que les associés ont accepté de remettre en cause. Pour les Juges du droit, en second lieu, en retenant que l’avocate ne soumettait aucun élément objectif de nature à démontrer la fraude alléguée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de s'expliquer sur les pièces qu'elle décidait d'écarter, a répondu aux conclusions prétendument délaissées. Le moyen n’est donc pas accueilli.
Sur la confirmation de la sentence arbitrale. L’avocate fait grief à l'arrêt de confirmer la sentence arbitrale du 29 janvier 2021 en ce qu'elle a fixé « les créances de l'AARPI » à son encontre et en ce qu'elle a rejeté les autres demandes des parties.
Réponse de la Cour. Il résulte des articles 1871 à 1873 N° Lexbase : L0121LTN du Code civil et 124 du décret n° 91-1197, du 27 novembre 1991, qu'une AARPI est une société créée de fait qui est soumise au régime des sociétés en participation et qui n'a pas la personnalité morale. Aux termes de l'article 1871-1 du même code, à moins qu'une organisation différente n'ait été prévue, les rapports entre associés sont régis, en tant que de raison, par les dispositions applicables aux sociétés civiles, si la société a un caractère civil. Pour la Haute Cour, il s'en déduit que l'associé d'une AARPI peut consentir des avances de fonds au profit de l'indivision des associés de l'AARPI. En retenant que l'association était dépourvue de personnalité juridique et de trésorerie propre et que l’un des deux autres avocats avait mis à disposition de l'indivision des associés de l'AARPI des sommes qu'il avait facturées, la cour d'appel n'a pas admis l'existence d'un patrimoine propre de l'association.
Pour la Cour de cassation, le moyen, qui critique en réalité une simple impropriété de termes, n'est donc pas fondé.
Rejet. La Cour rejette par conséquent le pourvoi.
Pour aller plus loin : le présent arrêt fera l'objet d'un commentaire approfondi du Professeur Bruno Dondero, à paraître dans la revue Lexbase Avocats du mois de juin 2024. |
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