La lettre juridique n°542 du 3 octobre 2013 : Bancaire

[Textes] Séparation et régulation des activités bancaires : commentaire de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013

Réf. : Loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013, de séparation et de régulation des activités bancaires (N° Lexbase : L9336IX3)

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par Karine Rodriguez, Maître de conférences HDR à l'Université de Pau et des pays de l'Adour, Responsable du M2 Droit de la consommation

le 03 Octobre 2013

L'origine de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013 est double. Elle résulte, d'une part, des soixante engagements du Président François Hollande, alors candidat à la présidentielle, qui, pour redresser les finances publiques, avait promis de séparer les activités des banques qui sont utiles à l'investissement et à l'emploi, de leurs opérations spéculatives (1). Elle s'inscrit, d'autre part, dans un mouvement communautaire de réponse à la crise financière de 2008 face à laquelle les autorités furent dans l'incapacité de réagir. Pour ce faire, elle prend en considération les accords de Bâle III (2). C'est d'ailleurs la place de la France dans l'Union européenne qui se joue dans ce contexte. Car plutôt que d'attendre les résultats des travaux européens, la France les devance, sûrement pour être un acteur moteur en la matière, au risque de devoir réformer ses propres textes lorsque les textes européens seront définitivement adoptés.
Sur le fond, la loi s'est enrichie au gré des discussions parlementaires. Il est vrai que les apports principaux de la loi, que sont la séparation des activités bancaires et financières à risque et la résolution bancaire, étaient prévus dés l'élaboration du projet de loi. Mais les discussions qui ont suivi ont permis l'adoption d'autres mesures extrêmement variées. Toutefois, malgré l'ampleur de la réforme, toutes les mesures adoptées ne sont pas d'égale importance. Dans le cadre de cette étude, l'analyse de la réforme sera donc centrée sur les mesures phares de la loi sans, toutefois, prétendre à une parfaite exhaustivité. Ceci étant précisé, les deux volets principaux du texte apparaissent dans l'intitulé même de la loi. Il s'agit de la séparation des activités bancaires (I) et de la régulation des activités bancaires (II). Leur analyse sera suivie de l'étude de différentes autres mesures qui relèvent de manière plus distendue de la régulation bancaire et qui complètent utilement les axes principaux de la réforme (III).

I - La séparation des activités bancaires et financières

Le nouveau texte crée les articles L. 511-47 (N° Lexbase : L5057IXL) à L. 511-50 du Code monétaire et financier, insérés dans une section intitulée "Dispositions prudentielles et contrôle interne", qui procèdent à la séparation des activités bancaire et financière des établissements de crédit. L'objectif est de "garantir la stabilité financière, leur solvabilité à l'égard des déposants, leur absence de conflits d'intérêt avec leurs clients et leur capacité à assurer le financement de l'économie". Plusieurs techniques étaient envisageables pour ce faire. Certaines reposent sur l'interdiction. Notamment, aux Etats-Unis, la "Volcker Rule" interdit aux banques de dépôt bénéficiant d'une garantie fédérale, d'avoir des activités de trading pour compte propre. La France a choisi une voie plus douce, en soumettant à une obligation de filialisation les activités financières risquées (3), conformément à ce que préconisait le rapport "Liikanen" remis le 2 octobre 2012 (4).

Certes, le dispositif de 2013 prévoit certaines interdictions pour les établissements de crédit, celle des opérations de négoce à haute fréquence taxables au titre de l'article 235 ter ZD bis du CGI (N° Lexbase : L4597IS3) et celle des opérations sur instruments financiers à terme dont l'élément sous-jacent est une matière première agricole (C. mon. fin., art. L. 511-48, II N° Lexbase : L5058IXM). Toutefois, il fonde la séparation des activités spéculatives les plus risquées et la banque de détail sur le cantonnement des activités spéculatives des banques non utiles à l'économie dans une filiale séparée. Bien entendu, seuls les établissements de crédit (compagnies financières et compagnies financières holding) dont les activités de négociation sur instruments financiers dépassent des seuils à définir par décret en Conseil d'Etat sont concernés. En revanche, la règle est établie sur une base consolidée qui intègre les éventuelles filiales établies à l'étranger.

Le principe est clair. L'article L. 511-47 du Code monétaire et financier interdit désormais aux établissements de crédit d'effectuer, autrement que par l'intermédiaire de filiales dédiées à ces activités, deux types d'opérations : les activités de négociation sur instruments financiers faisant intervenir leur compte propre et toutes les opérations conclues pour compte propre avec des organismes de placement collectif à effet de levier ou autres véhicules d'investissement similaires, lorsque les établissements ne sont pas garantis par une sûreté.

Toutefois, le texte instaure des exceptions parmi les activités a priori concernées par la filialisation. Il permet aux établissements de crédit d'exercer directement certaines activités, que le législateur prend d'ailleurs la peine de définir, sans avoir recours à la filialisation. Il en est ainsi de :

- la fourniture de services d'investissement, dans le but de répondre aux besoins de couverture, de financement ou d'investissement des clients, dont la rentabilité attendue résulte des revenus tirés des services fournis à la clientèle et de la gestion saine et prudente des risques associés à ces services. Les risques associés doivent répondre au strict besoin de gestion de l'activité, dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'Economie ;

- la compensation d'instruments financiers ;

- la couverture des risques de l'établissement de crédit ou du groupe, en se portant partie à des opérations sur des instruments financiers dans le but de réduire ses expositions aux risques de toute nature liés aux activités de crédit et de marché, à condition que ces instruments présentent une relation économique avec les risques identifiés ;

- la tenue de marché. L'établissement peut se porte partie, en tant qu'intermédiaire, à des opérations sur des instruments financiers soit consistant en la communication simultanée de prix d'achat et de vente fermes et concurrentiels pour des volumes de taille comparable, avec pour résultat d'apporter de la liquidité aux marchés sur une base régulière et continue, soit nécessaires, dans le cadre de son activité habituelle, à l'exécution d'ordres d'achat ou de vente de clients ou en réponse à des demandes d'achat ou de vente de leur part.

Les deux dernières exceptions concernent spécifiquement les groupes. Ainsi, n'ont pas à être filialisées :

- les activités liées à la gestion saine et prudente de la trésorerie du groupe et aux opérations financières entre les établissements de crédit et leurs filiales ;

- les activités liées aux opérations d'investissement du groupe (opérations d'achat ou de vente de titres financiers acquis dans l'intention de les conserver durablement ou de titres émis par les entités du groupe).

Ces exceptions sont nombreuses. En particulier, celle concernant la tenue de marché interroge, avec cette crainte qu'elle pourrait mettre à mal le principe de séparation des activités et surtout son efficacité au regard des objectifs poursuivis, c'est-à-dire, la stabilité financière et la protection des clients. C'est d'ailleurs le point de divergence entre la loi française et le rapport "Liikanen" qui préconise la filialisation d'une partie de l'activité de tenue de marché. En France, l'activité de tenue de marché est apparue "consubstantielle aux activités de financement des banques" et "essentielle au bon fonctionnement des marchés" (5). Aussi, parce que cette activité non filialisée reste spéculative, elle doit a minima être contrôlée. C'est pourquoi l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) doit contrôler l'activité de tenue de marché afin de vérifier qu'elle est véritablement distincte de celle qui doit être filialisée. De plus, le ministre de l'Economie pourra décider par arrêté qu'au-delà d'un certain seuil, les activités relatives à la tenue de marché ne bénéficieront plus de cette exception et devront être filialisées. Ce seuil peut viser tous les établissements ou seulement un établissement en particulier, ce qui, dans le second cas, irait à l'encontre de l'égalité de traitement entre les établissements.

L'efficacité du système repose donc sur l'autonomie de la filiale dédiée aux activités risquées. Un régime spécifique applicable aux établissements et à leurs filiales dédiées a été instauré afin de garantir cette autonomie.

En premier lieu, elle résulte de la nécessité d'un agrément. En effet, les filiales dédiées sont agréées par l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution comme entreprises d'investissement (C. mon. fin., art. L. 511-48, I). Elles peuvent également l'être comme établissements de crédit mais à condition de ne pas recevoir des dépôts garantis au sens de l'article L. 312-4 (N° Lexbase : L5410IXN) et de ne pas fournir des services de paiement aux clients.

En second lieu, l'établissement et la filiale dédiée sont soumis au respect d'un certain nombre de règles qui permettent d'éviter toute confusion (C. mon. fin., art. L. 511-48, I) :

- les filiales dédiées doivent respecter, individuellement ou de manière sous-consolidée, les normes de gestion prévues à l'article L. 511-41 (N° Lexbase : L6868IXN) et, sans préjudice des dispositions de l'article L. 511-41-2 (N° Lexbase : L3609HZP), les établissements qui contrôlent les filiales dédiées sont tenus de respecter ces normes de gestion sur la base de leur situation financière consolidée en excluant de celle-ci les filiales dédiées ;

- pour l'application du ratio de division des risques, les filiales dédiées sont considérées comme un même bénéficiaire, distinct du reste du groupe. Pour l'application du règlement relatif au contrôle des grands risques par les établissements n'appartenant pas au groupe, les filiales et le groupe auquel elles appartiennent sont considérés comme un même bénéficiaire ;

- la souscription par les établissements qui contrôlent les filiales dédiées à une augmentation de capital de ces filiales est soumise à autorisation préalable de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;

- les filiales dédiées doivent utiliser des raisons sociales et des noms commerciaux distincts de ceux des établissements de crédit du groupe qui les contrôlent, de manière à n'entretenir aucune confusion dans l'esprit de leurs créanciers et cocontractants ;

- les dirigeants des filiales ne peuvent assurer la direction de l'établissement qui les contrôlent, ou de leurs autres filiales.

En troisième lieu, divers moyens de contrôles sont prévus. L'établissement et sa filiale dédiée imposent aux unités chargées d'opérations sur les instruments financiers des règles d'organisation et de fonctionnement permettant d'assurer le respect du dispositif (C. mon. fin., art. L. 511-49 N° Lexbase : L5059IXN). L'agrément peut leur être refusé si tel n'est pas le cas (C. mon. fin., art. L.511-50 N° Lexbase : L5060IXP). L'établissement et la filiale dédiée doivent également s'assurer que le contrôle du respect des règles est assuré de manière adéquate par le système de contrôle interne. Quant à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, elle s'assure que les règles d'organisation et de fonctionnement comportent des limites de risques fixées aux unités internes réalisant des opérations sur instruments financiers et que les rémunérations des personnels chargés de ces opérations sont fixées de façon cohérente et n'encouragent pas la prise de risque sans lien avec leurs objectifs.

Les établissements ont jusqu'au 1er juillet 2014 pour identifier les activités à transférer à la filiale, le transfert effectif de ces activités intervenant au plus tard le 1er juillet 2015. Il s'agit d'une transmission universelle de patrimoine. Le transfert des biens, droits, obligations et accessoires liés aux activités s'opère de plein droit, sans qu'il soit besoin d'aucune formalité. Tous les contrats en cours d'exécution sont également transférés.

En somme, la filialisation des activités les plus risquées devrait favoriser la stabilité du système, la solvabilité des établissements de crédit et leur capacité à assurer le financement de l'économie. On constate que cette filialisation porte atteinte au modèle désormais classique de la banque universelle posé par la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 (N° Lexbase : L7223AGM) (6), sauf à considérer qu'au contraire, la filialisation constitue un moyen de conserver les avantages de la banque universelle en isolant leurs seules activités spéculatives (7). La démarche est opportune dans le contexte actuel. Il n'est toutefois pas certain qu'elle suffise à assurer la stabilité du système financier. Les parlementaires semblent toutefois prêts à remettre "le pain sur la planche" s'il en était besoin. Pour preuve, le Gouvernement devra remettre avant le 31 décembre 2014 un rapport sur l'impact de la loi sur la compétitivité du secteur bancaire français par rapport aux établissements de crédit américains et européens ainsi que les conséquences sur la taille et la nature des opérations des filiales dédiées, sur les volumes des opérations de négoce à haute fréquence et la spéculation sur les matières premières agricoles au Parlement.

II - La régulation des activités bancaires

La régulation des activités bancaire, entendue au sens strict, s'opère par la mise en place d'un régime de résolution bancaire, par le renforcement des pouvoirs des autorités bancaire, et par l'amélioration de la transparence et de la lutte contre les dérives financières.

A - Mise en place d'un régime de résolution bancaire

Face à l'insuffisance des pouvoirs de l'Autorité de contrôle prudentiel pour redresser des établissements de crédit en difficulté en période de crise (8), un nouveau cadre juridique a été mis en place par le titre IV de la loi, qui s'inspire de la proposition de Directive du Parlement européen et du Conseil établissant un cadre pour le redressement la résolution des défaillance des établissements de crédit et d'entreprises d'investissement présenté par la commission le 6 juin 2012 (9). En effet, l'Autorité de contrôle prudentiel "et de résolution" ainsi qu'elle s'appelle désormais (ACPR), est chargée d'élaborer et d'appliquer des mesures de prévention et de résolution des crises bancaires (C. mon. fin. art. L. 612-1 N° Lexbase : L5387IXS et s.).

1° Les mesures de prévention

Les établissements de crédit et les entreprises d'investissement (10) qui dépassent un seuil de bilan fixé par décret et qui ne font pas l'objet d'une surveillance sur une base consolidée, doivent élaborer et communiquer à l'ACPR un plan préventif de rétablissement (C. mon. fin., art. L. 613-31-11 N° Lexbase : L5081IXH). Lorsque ces établissements appartiennent à un groupe dont le total de bilan dépasse un seuil fixé par décret et font l'objet d'une surveillance sur une base consolidée, le plan préventif de rétablissement est élaboré sur une base consolidée. L'ACPR peut également demander un plan préventif de rétablissement aux établissements non concernés mais dont l'activité viendrait à présenter un risque spécifique au regard de la stabilité financière. Sans que la loi en fixe précisément le contenu, il est prévu que ce plan prévoie les mesures à adopter en cas de détérioration significative de la situation financière de l'établissement. En revanche, il ne doit pas envisager de soutien financier de l'Etat ou du fonds de garantie des dépôts et de résolution. Ce plan est actualisé annuellement ainsi qu'après chaque modification significative de l'organisation ou des activités de l'établissement. En cas d'insuffisance, l'ACPR peut en exiger la modification de ce plan.

Par ailleurs, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution établit pour ces établissements un plan préventif de résolution prévoyant les modalités spécifiques d'application des mesures de résolution (C. mon. fin., art. L. 613-31-12 N° Lexbase : L5082IXI). Là encore, la loi n'en détaille pas le contenu mais il semble que ce plan envisage les mesures à adopter si les conditions de déclenchement d'une procédure de résolution venaient à être remplies. Lorsque ces établissements appartiennent à un groupe dont le total de bilan dépasse un seuil fixé par décret et font l'objet d'une surveillance sur une base consolidée, le plan préventif de résolution est élaboré sur une base consolidée et comporte des sections spécifiques pour chacune des entités de taille significative.

Enfin, au regard des plans précédents, l'ACPR contrôle l'organisation et le fonctionnement des établissements de manière à ce qu'ils ne fassent pas obstacle à la mise en oeuvre efficace des mesures de résolution. Le cas échéant, elle peut leur demander de prendre des mesures visant à réduire ou à supprimer ces obstacles et si ces mesures sont insuffisantes, elle peut, après que l'établissement ait présenté ses observations, lui enjoindre de prendre, dans un délai déterminé, les mesures nécessaires, notamment la modification de ses activités ou de sa structure juridique et opérationnelle (C. mon. fin., art. L. 613-31-13 N° Lexbase : L5083IXK).

2° - Les mesures de résolution

Les mesures de résolution visent les établissements de crédit, les compagnies financières, les compagnies financières holding mixtes ou les entreprises d'investissement, à l'exception des sociétés de gestion de portefeuille (C. mon. fin., art. L. 613-31-14 N° Lexbase : L5084IXL). Aucune condition de seuil n'est ici prévue.

Pour déclencher la procédure, l'établissement doit remplir cumulativement deux conditions (C. mon. fin., art. L. 613-31-15 N° Lexbase : L5085IXM).
Il doit, d'abord, être est défaillant. C'est le cas, précise la loi, s'il se trouve ou s'il est susceptible de se trouver, à terme rapproché, dans l'une des situations suivantes : il ne respecte plus les exigences de fonds propres qui conditionnent le maintien de l'agrément ; il n'est pas en mesure d'assurer ses paiements, immédiatement ou à terme rapproché ; il requiert un soutien financier exceptionnel des pouvoirs publics.
Il ne doit, ensuite, exister aucune perspective que cette défaillance puisse être évitée dans un délai raisonnable autrement que par la mise en oeuvre d'une mesure de résolution.

Le gouverneur de la banque de France et le directeur général du Trésor peuvent, dans ce cas, saisir le collège de résolution, seul le second étant d'ailleurs compétent pour le faire si l'état de l'établissement requiert un soutien financier exceptionnel des pouvoirs publics.

Une fois saisi, le collège de résolution de l'ACPR adopte des mesures de résolution. En cas d'urgence, les mesures peuvent être prises à titre provisoire sans procédure contradictoire (C. mon. fin., art. L. 613-31-17, I N° Lexbase : L5087IXP), mais une procédure contradictoire est alors engagée dès que possible aux fins de lever, d'adapter ou de confirmer ces mesures. Sur le fond, ces mesures doivent être proportionnées aux objectifs poursuivis. La loi précise qu'il s'agit de préserver la stabilité financière, d'assurer la continuité des activités, des services et des opérations des établissements dont la défaillance aurait de graves conséquences pour l'économie, de protéger les déposants, d'éviter ou de limiter au maximum le recours au soutien financier public. Pour permettre une telle adaptation, le panel des mesures à la disposition du collège est extrêmement diversifié (C. mon. fin., art. L. 613-31-16 N° Lexbase : L5086IXN). Le collège peut : exiger des informations utiles à la mise en oeuvre de la procédure ; nommer un administrateur provisoire ; révoquer un dirigeant ; transférer tout ou partie d'une ou plusieurs branches d'activité, éventuellement au bénéfice d'un établissement-relais chargé de la recevoir ; faire intervenir le fonds de garantie des dépôts et de résolution, en veillant à ce que cette intervention ne provoque pas de contagion des difficultés aux autres adhérents du fonds ; transférer au fonds de garantie des dépôts et de résolution ou à un établissement-relais les actions et les parts sociales émises par la personne défaillante ; imposer l'émission de nouvelles actions ou parts sociales ou d'autres instruments de fonds propre ; prononcer, l'interdiction de payer tout ou partie des dettes antérieures ; limiter ou interdire temporairement l'exercice de certaines opérations ; limiter ou interdire la distribution d'un dividende ; imposer la réduction du capital, l'annulation des titres de capital ou des éléments de passif ou la conversion des éléments de passif afin d'absorber le montant des dépréciations...

L'observation des mesures de résolution proposées invite à dresser deux constats.

D'une part, le sauvetage de l'établissement de crédit se fait désormais au détriment des créanciers et des actionnaires plutôt que par injection de fonds publics. C'est pourquoi quelques garanties sont formulées en leur faveur : aucun actionnaire, sociétaire ou créancier ne doit subir de pertes plus importantes que celles qu'il aurait subies si la personne avait été liquidée selon la procédure de liquidation judiciaire (C. mon. fin., art. L. 613-31-16, II) ; les valorisations (prix d'émission de titres, taux de conversion, prix de cessions...), qui se doivent d'être "justes et réalistes", sont déterminées selon des méthodes objectives par l'ACPR sur proposition d'un expert indépendant désigné par le premier président de la Cour de cassation, voire seule en cas d'urgence (C. mon. fin., art. L. 613-31-16, III).

D'autre part, le fonds de garantie des dépôts, qui prend désormais le nom de "fonds de garantie des dépôts et de résolution", joue un rôle important dans la procédure de résolution. Plus généralement, l'ACP peut le saisir de la situation d'un établissement défaillant (C. mon. fin., art. L. 312-4 et s.). Elle peut lui demander notamment de reprendre ou poursuivre les activités cédées ou transférées, d'acquérir tout ou partie des titres de l'établissement, de souscrire au capital de l'établissement-relais, de souscrire à une augmentation du capital de l'établissement concerné ou de l'établissement-relais ou encore de consentir des financements à l'établissement concerné ou à l'établissement-relais.

B - Renforcement du pouvoir des autorités bancaires

Les pouvoirs des autorités bancaires ont été élargis et renforcées. Un titre VIII de la loi porte sur le "Renforcement des pouvoirs de l'autorité des marchés financiers et de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution". Les articles 29 et 30 de la loi, sur la "surveillance marcoprudentielle" créent le Haut conseil de stabilité financière qui remplace le Conseil de régulation financière et du risque systémique.

1° - L'Autorité de contrôle prudentiel et de régulation

L'Autorité de contrôle prudentiel devient l' "Autorité de contrôle prudentiel et de résolution" dès lors que sa mission s'étend désormais à la prévention et à la résolution des défaillances d'établissements (v. supra). Pour cela, un "collège de résolution" est créé à côté du collège de supervision (C. mon. fin., art. L. 612-4 N° Lexbase : L5388IXT). Il est composé de six membres : le gouverneur de la Banque de France ou son représentant qui en est le président ; le directeur général du Trésor ou son représentant ; le président de l'Autorité des marchés financiers ou son représentant ; le sous-gouverneur désigné par le gouverneur de la Banque de France, ou son représentant ; le président de la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, ou son représentant ; le président du directoire du fonds de garantie des dépôts et de résolution ou son représentant. Les décisions du collège de résolution sont prises à la majorité des voix, le président ayant voix prépondérante. Toutefois, dans le but de protéger les finances publiques, le directeur général du Trésor ou son représentant dispose d'un droit de veto sur toute décision pouvant entraîner, immédiatement ou à terme, l'appel à des concours publics. Des services sont chargés de préparer les travaux du collège de résolution.

On notera, par ailleurs, que la nouvelle loi permet à l'ACPR de suspendre les dirigeants d'établissements de crédit et d'entreprise d'investissement qui ne remplissent plus les conditions d'honorabilité, de compétence ou d'expérience requises par leur fonction lorsque l'urgence justifie cette mesure en vue d'assurer une gestion saine et prudente (C. mon. fin., art. L. 612-33 N° Lexbase : L5405IXH). De même, lorsque l'activité d'une personne soumise à son contrôle est susceptible de porter atteinte à la stabilité financière ainsi que dans les situations d'urgence, l'ACPR peut décider de limiter ou de suspendre l'exercice de certaines opérations par cette personne (C. mon. fin., art. L. 612-33-1 N° Lexbase : L5061IXQ).

2° L'Autorité des marchés financiers

Outre que le président doit désigner un membre du collège chargé d'assurer sa suppléance en cas de vacance ou d'empêchement, l'Autorité des marchés financiers (AMF) voit ses pouvoirs élargis afin de renforcer l'efficacité de sa mission de contrôle des acteurs bancaires. En premier lieu, son information est améliorée. Notamment, elle peut se faire communiquer par les professionnels qu'elle contrôle tous les documents et informations utiles à l'exercice de sa mission de veille et de surveillance (C. mon. fin., art. L. 621-8-4 N° Lexbase : L5068IXY). Ce faisant, le législateur consacre le droit à l'information général de l'AMF, conformément à ce qu'exige son rôle de surveillance continue mis en avant par les Directives communautaires "MIF", (Directive 2004/39/CE du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers N° Lexbase : L2056DYS) "Abus de marché" (Directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 3 décembre 2002, sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché N° Lexbase : L8022BBQ) et "OPCVM IV" (Directive 2009/65 du 13 juillet 2009, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières N° Lexbase : L9148IEK), (11). En second lieu, ses pouvoirs de contrôle et d'enquête sont renforcés. Pour ne prendre que quelques exemples, en cas de services sur internet, les enquêteurs et les contrôleurs peuvent faire usage d'une identité d'emprunt sans en être pénalement responsables (C. mon. fin., art. L. 621-10-1 N° Lexbase : L5069IXZ). Par ailleurs, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut autoriser les enquêteurs à effectuer des visites en tous lieux ainsi qu'à procéder à la saisie de documents et au recueil des explications des personnes sollicitées sur place. Cela n'est pas nouveau. Mais alors que cette possibilité était limitée à la recherche des infractions définies aux articles L. 465-1 (N° Lexbase : L5192IXL) et L. 465-2 (N° Lexbase : L5188IXG), elle est désormais étendue aux faits susceptibles d'être qualifiés de délit contre les biens et d'être sanctionnés par la commission des sanctions de l'AMF.

3° - Le Haut conseil de stabilité financière

La loi du 22 octobre 2010 (loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010, de régulation bancaire et financière N° Lexbase : L2090INQ) avait créé le Corefris (le Conseil de régulation financière et du risque systémique (12)). Aujourd'hui, le Corefris devient le Haut conseil de stabilité financière (C. mon. fin., art. L. 631-2 N° Lexbase : L5199IXT), autorité désignée pour exercer un rôle macroprudentiel conformément aux exigences de la Directive CRD IV (13) et des accords de Bâle III (14). Ce changement de dénomination n'est pas anodin puisqu'il s'accompagne d'une modification de son régime.

Le Haut conseil veille à la stabilité du système financier : "le Haut conseil de stabilité financière exerce la surveillance du système financier dans son ensemble, dans le but d'en préserver la stabilité et la capacité à assurer une contribution soutenable à la croissance économique. A ce titre, il définit la politique macroprudentielle" (C. mon. fin., art. L. 631-2-1 N° Lexbase : L5198IXS). Il bénéficie de l'aide de la Banque de France qui veille, conjointement avec lui, à la stabilité du système financier et contribue à la mise en oeuvre de ses décisions (C. mon. fin., art. L. 141-5-1 N° Lexbase : L5093IXW).

Pour ce faire, le Haut conseil acquiert de nouvelles compétences. Auparavant organe consultatif, il est désormais doté de pouvoirs contraignants, ses décisions étant susceptibles de faire l'objet d'un recours en annulation devant le Conseil d'Etat. En particulier, il peut prendre deux types de décisions sur proposition du gouverneur de la Banque de France (C. mon. fin. art. L.631-2-1, 4° et 5°). Le Haut conseil de stabilité financière peut, d'une part, imposer des obligations en matière de fonds propres plus contraignantes que les normes de gestion arrêtées par le ministre chargé de l'Economie, en vue d'éviter une croissance excessive du crédit ou de prévenir un risque aggravé de déstabilisation du système financier. Il peut, d'autre part, fixer des conditions d'octroi de crédit par les personnes soumises au contrôle de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, en vue de prévenir l'apparition de mouvements de hausses excessives sur le prix des actifs de toute nature ou d'un endettement excessif des agents économiques.

Par ailleurs, la nouvelle loi précise le statut des membres du Haut conseil. Elle prévient les conflits d'intérêts des membres qui le composent en soumettant les personnes qualifiées à une obligation de déclaration sur les intérêts qu'ils détiennent ainsi que sur leurs fonctions et mandats (C. mon. fin., art. L. 631-2-3, I N° Lexbase : L5096IXZ) ; elle instaure des cas d'incompatibilité (C. mon. fin., art. L. 631-2-3, I) ; elle soumet les personnes qui participent à sa mission au secret professionnel (C. mon. fin., art. L. 631-2-3, II) et elle organise la parité homme/femme parmi les personnes qualifiées (CMF, art. L.631-2).

C - Amélioration de la transparence et de la lutte contre les dérives financières

Lutte contre les paradis fiscaux. Afin de lutter contre la fraude fiscale, la nouvelle loi renforce les obligations de transparence. Sous la contrôle de l'AMF, les établissements de crédit devront publier dans les 6 mois de la clôture de l'exercice, en annexe à leurs comptes annuels consolidés, des informations sur leurs implantations et leurs activités, incluses dans le périmètre de consolidation, dans chaque Etat ou territoire (nom des implantations et nature d'activité ; produit net bancaire et chiffre d'affaires ; effectifs ; bénéfice ou perte avant impôt ; montant des impôts sur les bénéfices ; subventions publiques reçues). Les sociétés dont le total de bilan ou le chiffre d'affaires et le nombre de salariés excèdent des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat publient ces mêmes informations concernant leurs implantations, incluses dans le périmètre de consolidation dans chaque Etat ou territoire, au plus tard six mois après la clôture de l'exercice ; à défaut, toute personne intéressée peut demander au président du tribunal compétent statuant en référé d'enjoindre, le cas échéant sous astreinte, à la société concernée de se conformer à ces obligations. Ces informations sont mises à disposition du public. Enfin, la loi prévoit l'instauration d'un débat parlementaire pour déterminer la liste des paradis fiscaux avec objectivité.

Lutte contre le blanchiment des capitaux. La loi élargit les obligations de déclaration à la charge des établissements de crédit. Notamment, la tentative de blanchiment doit désormais faire l'objet d'une déclaration de soupçon (C. mon. fin., art. L. 561-15 N° Lexbase : L5187IXE). De même, la loi élargit les informations que les assujettis doivent transmettre automatiquement à TRACFIN : ce sont "les éléments d'information relatifs aux opérations financières présentant un risque élevé de blanchiment ou de financement du terrorisme en raison du pays ou du territoire d'origine ou de destination des fonds, du type d'opération ou des structures juridiques concernées" (C. mon. fin., art. L. 561-15-1, II). Les mesures de vigilance complémentaires auxquels les établissements sont tenus à l'égard de leur client, et qui concernent les opérations effectuées avec des personnes physiques ou morales établies dans des Etats déterminés, concernent désormais les Etat ou un territoire figurant "sur les listes publiées par le Groupe d'action financière parmi ceux dont la législation ou les pratiques font obstacle à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme".

Encadrement du négoce à haute fréquence. Devançant la refonte de la Directive "MIF" (15), la loi encadre le négoce à haute fréquence en renforçant l'obligation d'information des traders, qui doivent se faire connaître de l'AMF et assurer la traçabilité de leurs ordres afin que l'AMF puisse identifier les abus de marché. Par ailleurs, les prestataires de services d'investissement qui fournissent à une autre personne un accès direct à une plate-forme de négociation, doivent signer un accord écrit stipulant que le prestataire garantit la conformité des négociations effectuées par son intermédiaire et doivent mettre en place des systèmes leur permettant de vérifier le respect des engagements de l'accord relatifs à la prévention de toute perturbation du marché ou des abus de marché (C. mon. fin., art. L. 533-10 N° Lexbase : L5191IXK). Enfin, la loi impose aux gérants de plateformes boursières de mettre en place trois types de procédures : des procédures assurant que les systèmes possèdent une capacité suffisante de gestion de volumes élevés d'ordres ; des mécanismes, soumis à des tests, permettant de rejeter les ordres dépassant des seuils de volume et de prix préalablement établis ou des ordres manifestement erronés, de suspendre ou d'annuler des transactions ; des mesure de nature à garantir que les utilisateurs des dispositifs de traitement automatisé ne créent pas des conditions de nature à perturber le bon ordre du marché, notamment par des mesures tarifaires destinées à limiter le nombre d'ordres non exécutés.

Aggravation de la répression des abus de marché (16). La loi retouche les articles L. 465-1 et L. 465-2 du Code monétaire et financier qui prohibent le délit d'initié, de communication d'information privilégiées et de diffusion d'informations inexactes. Notamment, les tentatives de tels délits sont désormais également sanctionnées et ces délits ne concernent plus seulement les titres admis aux négociations sur les marchés réglementés, mais également ceux admis aux négociations sur un système multilatéral de négociation. Le délit de manipulation de cours ne vise plus seulement le fait d'entraver le fonctionnement régulier d'un marché règlementé, mais également le fait d'entraver le fonctionnement d'un système multilatéral de négociation comme Alternext. Enfin, une nouvelle infraction est créée pour sanctionner les acteurs du marché dont les interventions ont pour effet de fausser l'évolution d'indices de référence pour la fixation des taux de produits financiers (C. mon. fin., art. L. 465-2-1 N° Lexbase : L5064IXT).

III - Les autres mesures

Nous développerons, dans le cadre de cette étude, les trois apports complémentaires qui nous paraissent les plus importants : l'encadrement des conditions d'emprunt des collectivités, l'encadrement des rémunérations des dirigeants d'établissements bancaires et traders et les mesures de protection du consommateur.

A - Encadrement des conditions d'emprunt des collectivités territoriales

La nouvelle loi crée deux nouveaux articles dans le Code général des collectivités territoriales, les articles L. 1611-3-1 (N° Lexbase : L5062IXR) et L. 1611-3-2 (N° Lexbase : L5066IXW), afin de répondre aux problèmes de financement des collectivités confrontées notamment à la crise des emprunts toxiques qu'elles ont souscrits.

Après avoir posé le principe d'autorisation pour les collectivités d'emprunter auprès des établissements de crédit, l'article L. 1611-3-1 du Code général des collectivités territoriales impose des limites et réserves. D'une part, il prévoit que l'emprunt peut être libellé en euros ou en devises étrangères, mais que dans ce dernier cas, afin d'assurer une couverture intégrale du risque de change, un contrat d'échange de devises contre euros doit être conclu lors de la souscription de l'emprunt pour le montant total et la durée totale de l'emprunt. D'autre part, il précise que le taux d'intérêt peut être fixe ou variable mais il encadre le taux variable. Un décret en Conseil d'Etat doit déterminer les indices et les écarts d'indices autorisés pour les clauses d'indexation des taux d'intérêt variables. De plus, l'indexation doit répondre à des critères de simplicité ou de prévisibilité des charges financières des collectivités territoriales. Toutefois, les collectivités peuvent déroger à ces règles lorsque la souscription d'un emprunt ou d'un contrat financier, par la voie d'un avenant ou d'un nouveau contrat, a pour effet de réduire le risque associé à un emprunt ou un contrat financier non conforme aux exigences nouvelles parce que conclu avant l'adoption de la loi. L'objectif, louable, est ici de favoriser le remplacement des emprunts toxiques qui asphyxient de nombreuses collectivités depuis quelques années.

L'article L. 1611-3-2 du Code général des collectivités territoriales permet, par ailleurs, aux collectivités territoriale et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de créer une société publique sous forme de société anonyme au capital entièrement détenu par eux, afin de contribuer, par l'intermédiaire d'une filiale, à leur financement. Le financement sera effectué par la filiale à partir de ressources provenant principalement d'émissions de titres financiers, à l'exclusion de ressources directes de l'Etat ou de ressources garanties par l'Etat. Les collectivités territoriales bénéficient là d'un mode de financement nouveau par la création d'un nouvel acteur dans le financement des collectivités territoriales (17), ce qui leur permet d'échapper à l'emprunt bancaire.

B - Encadrement des rémunérations des dirigeants et des traders

La loi prévoit la consultation des actionnaires concernant la rémunération des dirigeants et traders. Mais l'assemblée ne se prononce que sur une enveloppe globale et n'a aucun pouvoir décisionnel ce qui réduit considérablement son rôle.

La loi prévoit également le plafonnement des rémunérations variables des dirigeants de banque et des traders, à déterminer en fonction de leur rémunération fixe. Ce plafonnement, à fixer par décret, devrait être de une fois la rémunération fixe, voire deux si l'assemblée l'autorise.

C - Mesures protectrices du consommateur

Diverses mesures protectrices du consommateur ont été adoptées.

Inclusion bancaire. Une "Charte d'inclusion bancaire et de prévention du surendettement" doit être adoptée dont l'AMF assurera le respect (C. mon. fin., art. L. 312-1-1 A N° Lexbase : L5099IX7). Son objet est de renforcer l'accès aux services bancaires, notamment aux moyens de paiement pour les consommateurs, et de prévenir le surendettement des particuliers.

Plafonnement des commissions d'intervention. La loi plafonne par mois et par opération les commissions bancaires perçues en cas d'irrégularité de fonctionnement d'un compte non professionnel (C. mon. fin., art. L. 312-1-3, al.1er N° Lexbase : L5235IX8). Elles devraient être de 8 euros par opération et 80 euros par mois, et de 4 euros et 20 euros pour les clients les plus fragiles parce qu'ils bénéficient d'une offre différenciée de services bancaires ou de services bancaires de base.

Offre bancaire différenciée. Les établissements de crédit doivent désormais proposer aux personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels qui se trouvent en situation de fragilité, eu égard notamment au montant de leurs ressources, une offre spécifique qui comprend des moyens de paiement, dont au moins deux chèques de banque par mois, et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas d'incident (C. mon. fin., art. L. 312-1-3, al. 2).

Droit au compte. La loi apporte différentes précisions. L'établissement qui refuse d'ouvrir un compte doit transmettre systématiquement et sans délai au demandeur une attestation de refus. L'établissement désigné par la Banque de France pour ouvrir le compte doit le faire dans les trois jours ouvrés à compter de la réception des documents. Le droit au compte bénéficie aux personnes inscrites sur le FNCI et le FICP. La procédure peut désormais être enclenchée par des institutions telles que le département, les CAF, une association...

Information sur les frais bancaire. Le client, personne physique n'agissant pas pour des besoins professionnels, est informé gratuitement, par le biais de son relevé de compte mensuel, du montant et de la dénomination des frais bancaires liés à des irrégularités et incidents que l'établissement entend débiter sur son compte de dépôt (C. mon. fin., art. L. 312-1-5 N° Lexbase : L5098IX4). Ce débit a lieu au minimum quatorze jours après la date d'arrêté du relevé de compte.

Frais funéraires. La personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt peut obtenir, sur présentation de la facture des obsèques, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite du solde créditeur de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des frais funéraires, auprès des banques teneuses desdits comptes, dans la limite d'un montant fixé par arrêté du ministre chargé de l'économie (C. mon. fin., art. L. 312-1-4 N° Lexbase : L5252IXS).

Crédit immobilier. Les emprunteurs, personnes physiques n'agissant pas pour des besoins professionnels, ne peuvent contracter de prêts libellés dans une devise étrangère à l'Union européenne remboursables en monnaie nationale que s'ils déclarent percevoir principalement leurs revenus ou détenir un patrimoine dans cette devise au moment de la signature du contrat de prêt, excepté si le risque de change n'est pas supporté par l'emprunteur. Ils doivent être informés des risques.

Assurance-emprunteur. La loi a pour objectif de lever les obstacles au choix par l'emprunteur d'assurances autres que celle proposées par le banquier dispensateur d'un crédit immobilier. Dans ce contexte, le banquier ne pourra pas modifier le taux du crédit, les conditions du crédit ni exiger des frais supplémentaires (C. consom., art. L. 312-9 N° Lexbase : L6658IMK). Et lorsqu'une modification de l'offre doit être effectuée, les délais continueront de courir. La loi renforce, par ailleurs, l'information de l'emprunteur dans le cadre d'un crédit immobilier mais aussi d'un crédit à la consommation. Notamment, le prêteur doit l'informer sur le coût de l'assurance (taux effectif annuel de l'assurance, montant total, en euros par mois ou par période).

***

Les réformes opérées par la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 sont vastes. Pour autant, certaines sont contestées dans leur utilité et dans leur efficacité. En particulier, la séparation des activités ne fait pas l'unanimité. C'est donc une loi en demi-teinte qui a été adoptée. D'évidence, le législateur a fait preuve de bonne volonté. Mais la réforme adoptée ne bouleverse pas l'existant et ne suffira probablement pas à enrayer les symptômes de la crise.


(1) Engagement n° 7.
(2) V. notamment le projet de Directive européenne sur le redressement et la résolution des défaillances des établissements de crédit et des entreprises d'investissement.
(3) On notera l'approche comparable mais inverse du modèle anglais, qui prône la filialisation de la banque de détail (cf. rapport "Vickers", septembre 2011).
(4) V. L. Abadie, LPA, La loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 : paradigme français d'un modèle de séparation bancaire, 2013, n° 194, p.14.
(5) Projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, Etude d'impact, ministère de l'Economie et des finances, décembre 2012, p.14.
(6) En ce sens, v. Th. Bonneau, Séparation et régulation des activités bancaires, JCP éd. E, 2013, 1483.
(7) En ce sens, v. A. Maymont, La séparation des activités bancaires, LPA, 2013, n° 194, p. 7.
(8) Sur les pouvoirs actuels de l'ACP, v. C. mon. fin., art. L. 612-32 (N° Lexbase : L7484IXH) et s.
(9) V. J.-Ph. Kovar, Le nouveau régime de résolution des crises bancaires, LPA, 2013, n° 194, p. 39.
(10) A l'exception des sociétés de gestion de portefeuille.
(11) En ce sens, V. F. Dannenberger, Renforcement des pouvoirs de l'AMF, LPA, 2013, n° 194, p. 67.
(12) Nos obs., Création du Conseil de régulation financière et du risque systémique, LPA, 16 décembre 2010, p.12.
(13) Directive 2013/36/UE du 26 juin 2013 (N° Lexbase : L0428IWR).
(14) V. Th. De Ravel d'Esclapon, Le Haut Conseil de stabilité financière. Un nouvel acteur de la surveillance macroprudentielle, LPA, 2013, n° 194, p. 44.
(15) V. M. Storck, L'encadrement du négoce à haute fréquence, LPA, 2013, n° 194, p. 29.
(16) V. Mesures boursières de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires, BRDA, 17/13, n° 24.
(17) En ce sens, v. G. Eckert, La réforme des conditions d'emprunt des collectivités territoriales, LPA, 2013, n° 194, p. 17.

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