Le Quotidien du 1 novembre 2023 : Propriété intellectuelle

[Brèves] Contrefaçon de marque : une peine minimale de cinq ans d’emprisonnement peut s’avérer disproportionnée

Réf. : CJUE, 19 octobre 2023, aff. C-655/21 N° Lexbase : A70191NB

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N7189BZB

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par Vincent Téchené

le 24 Octobre 2023

► Le principe de légalité des délits et des peines ne s’oppose pas à une législation nationale qui prévoit que la contrefaçon de marque puisse être qualifiée tant comme infraction administrative que comme infraction pénale ;

En revanche, l’article 49 § 3 de la Charte des droits fondamentaux s’oppose à une disposition législative nationale qui prévoit que la contrefaçon de marque est sanctionnée par une peine plancher de cinq ans d’emprisonnement.

Faits et procédure. Une procédure pénale pour contrefaçon de marques est engagée en Bulgarie. Les autorités bulgares ont effectué un contrôle dans un local commercial loué par l’entreprise. Elles ont constaté que les signes apposés sur les produits étaient similaires à des marques déjà enregistrées. Le commerçant a alors été renvoyé devant le tribunal bulgare compétent pour utilisation des marques sans le consentement de leurs titulaires. La législation bulgare prévoit des dispositions définissant le même comportement tant comme infraction pénale que comme infraction administrative.

Ce tribunal a demandé à la CJUE des éclaircissements sur la compatibilité du droit bulgare réprimant la contrefaçon de marques avec le droit de l’Union, étant donné que les sanctions prévues sont sévères et que l’absence de critère clair et précis de qualification en tant qu’infraction pénale ou administrative conduit à des pratiques contradictoires et à un traitement inégal entre personnes ayant commis pratiquement les mêmes actes.

Décision. En premier lieu, la Cour rappelle que la contrefaçon d’une marque peut être qualifiée par le droit national d’infraction tant administrative que pénale. À cet égard, elle souligne que, selon le principe de légalité des délits et des peines, les dispositions pénales doivent être accessibles, prévisibles et claires en ce qui concerne la définition de l’infraction et la détermination de la peine. Ainsi, chaque citoyen doit comprendre quel comportement engage sa responsabilité pénale. Le fait que la contrefaçon de marques peut également donner lieu à des sanctions administratives en Bulgarie n’implique pas une violation de ce principe.

En second lieu, la Cour considère qu’une disposition nationale qui, en cas de contrefaçon d’une marque à plusieurs reprises ou qui entraîne des conséquences préjudiciables importantes, prévoit une peine minimale de cinq ans d’emprisonnement est contraire au droit de l’Union. La Cour précise que, même si la Directive relative au respect des droits de propriété intellectuelle (Directive n° 2004/48/CE du 29 avril 2004 N° Lexbase : L2091DY4) l’accord ADPIC/TRIPS, qui lie tant l’Union que ses États membres, ceux-ci peuvent imposer une peine d’emprisonnement pour certains actes de contrefaçon de marques. Certes, en l’absence de législation au niveau européen, les États membres sont compétents pour déterminer la nature et le niveau des sanctions applicables. Toutefois, ces mesures répressives doivent être proportionnelles. Or, prévoir une peine minimale de cinq ans d’emprisonnement pour l’ensemble des cas d’usage non consenti d’une marque dans la vie des affaires ne satisfait pas à cet impératif. En effet, une telle réglementation ne tient pas compte des spécificités éventuelles des circonstances de la commission de ces infractions.

En France, le délit de contrefaçon est sanctionné, selon les actes contrefaisants, de quatre ans d'emprisonnement et  400 000 euros d'amende ou de trois ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende (CPI, art. L. 716-9 N° Lexbase : L5918LTD, L. 716-10 N° Lexbase : L5920LTG et L. 716-11 N° Lexbase : L5921LTH).

 

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