La lettre juridique n°869 du 17 juin 2021 : Voies d'exécution

[Jurisprudence] Enchères immobilières : mise en garde sur la garantie de solvabilité de l’adjudicataire

Réf. : Cass. civ. 2, 20 mai 2021, n° 20-15.111, F-P (N° Lexbase : A25274SE)

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par Aude Alexandre Le Roux, avocat associé AARPI TRIANON Avocats, secrétaire-adjoint de l’AAPPE.

le 18 Juin 2021


Mots-clés : vente aux enchères publiques • séquestre • caisse des dépôts et consignation (CDC), adjudicataire •caution bancaire • irrévocable • chèque de banque • garantie autonome • ordonnance juge commissaire •vente sur liquidation judiciaire • adjudication • cahier des conditions de vente

Fidèle à sa stricte position en matière de justificatif de solvabilité de tout candidat adjudicataire, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation refuse de considérer que la garantie autonome telle que prévue à l’article 2321 du Code civil (N° Lexbase : L1145HIA) puisse s’assimiler aux garanties prévues à l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L2460ITB).


 

Par arrêt rendu en date du 20 mai 2021, la Cour de cassation apporte une précision complémentaire aux garanties de solvabilité dont peut justifier l’adjudicataire lors des ventes aux enchères publiques à la barre du tribunal judiciaire.

Le contexte de la vente aux enchères est particulier puisqu’il s’agit d’une vente aux enchères publiques intervenant sur liquidation judiciaire de la société Jean Caby. 

Ladite vente d’un ensemble immobilier ainsi que d’une partie d’immeuble à usage industriel a été autorisée par ordonnance du juge commissaire.

En dépit de son caractère juridictionnel, l’ordonnance autorisant la vente par adjudication rendue par le juge commissaire est soumise au délai de validité du commandement de saisie immobilière et ce par renvoi de l’article R. 642-27 du Code de commerce (N° Lexbase : L2658ITM) aux règles strictes du Code des procédures civiles d’exécution et plus spécialement à ses titres « Ier et II du livre III du Codes des procédures civiles d’exécution ».

Par avis rendu en date du 18 avril 2018, la Chambre commerciale a tranché la question de la compétence du juge pouvant connaître de la demande de prorogation des effets de ladite ordonnance à la faveur du juge de l’exécution (Cass. avis, 18 avril 2018, n°15009 N° Lexbase : A5577XL7).

Anciennement fixé à deux ans, ce délai de validité a été porté à cinq ans par le décret n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 (N° Lexbase : Z7419194), disposition entrée en vigueur au 1er janvier 2021. 

Cette nouvelle durée de validité est applicable aux instances en cours. Attention toutefois, concernant la prorogation des ordonnances ayant déjà fait l’objet d’une prorogation pour une durée de deux ans par jugement rendu par le juge de l’exécution, il convient de se référer aux observations formulées relatives au commandement de saisie [1].

L’audience d’adjudication se tient le 5 juin 2019. À l’issue de l’écoulement du chronomètre de 90 secondes suivant la dernière enchère, la société Sofim Promotion est déclarée adjudicataire au prix de 18 500 000 euros. 

L’avocat des liquidateurs soulève la nullité de la dernière enchère, et partant, de l’adjudication, au motif que la garantie produite n’est pas conforme à la lettre de l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L2460ITB), qui prévoit que l’adjudicataire remet à son avocat, avant de porter les enchères une caution bancaire irrévocable ou un chèque de banque représentant 10 % de la mise à prix avec un minimum de 3 000 euros. 

L’avocat des liquidateurs objecte notamment que la garantie produite n’a effet que jusqu’au 16 août 2019, soit dans un délai inférieur à celui laissé à l’adjudicataire par le cahier des conditions de vente pour s’acquitter du prix de vente.

Par jugement d’adjudication du même jour, le juge de l’exécution de Lille annule l’enchère portée par l’avocat de la société Sofim Promotion et constate la nullité de l’adjudication intervenue à son profit.

Sur les nouvelles enchères portées consécutivement, l’immeuble est adjugé au profit de la société Dubois Promotion au prix de 18 160 000 euros.

L’adjudicataire initial évincé interjette appel du jugement d’adjudication. 

Le jugement d’adjudication déroge au principe posé par le premier alinéa de l’article R. 311-7 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L7260LEM) selon lequel les jugements rendus en matière de saisie immobilière sont susceptibles d’appel. Le jugement d’adjudication ne peut donc être frappé d’appel. Exception est toutefois faite par le deuxième alinéa de l’article R. 322-60 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L2479ITY) lorsqu’il tranche une contestation. Dans cette hypothèse, appel peut en être interjeté de ce chef dans un délai de 15 jours suivant sa notification.

La cour d’appel de Douai confirme le jugement déféré.

Sofim Promotion se pourvoit en cassation. À l’appui de son pourvoi, elle fait grief à la cour d’appel d’avoir confirmé le jugement d’adjudication du juge de l’exécution de Lille en retenant notamment, pour annuler son enchère, que la garantie présentée n’était pas conforme dès lors qu’elle prenait fin le 17 août 2019, soit avant l’expiration du délai prévu pour le paiement du prix par l’adjudicataire, alors qu’aucune disposition du Code des procédures civiles d’exécution, ni davantage le cahier des conditions de vente n’imposait cette condition de durée.

Le demandeur au pourvoi souligne ainsi la violation des articles R. 322-41 et R. 322-56 (N° Lexbase : L2475ITT) du Code des procédures civiles d’exécution. Il objecte en outre que la sanction prononcée par la cour d’appel est disproportionnée comparativement à la légère défaillance de la consignation et à la privation de la propriété devant en résulter au visa des articles R. 322-48 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L2467ITK) et de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

La Cour de cassation n’est pas sensible à cette argumentation et, par un motif de pur droit substitué à ceux critiqués, rappelle les dispositions de l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution ; partant elle constate que la garantie fournie en l’espèce s’intitule « garantie autonome (article 2321 du Code civil paiement à terme) paiement à terme » et n’est donc pas un cautionnement bancaire irrévocable. 

En conséquence, elle rejette le pourvoi.

I.L’incidence de la validité de la garantie de solvabilité de l’adjudicataire sur la validité de l’adjudication ou de la surenchère 

Les garanties permettant au candidat de porter les enchères sont énumérées à l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution (A), l‘irrespect de ces exigences pourra entraîner la nullité de l’adjudication (B).

A.Les garanties actuelles

Afin de participer à une vente aux enchères à la barre du tribunal judiciaire, tout amateur doit justifier de sa solvabilité. Ainsi, l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution dispose qu’avant de porter les enchères, l’avocat se fait remettre par son client un chèque de banque correspondant à 10 % du montant de la mise à prix, avec un minimum de 3 000 euros ou une caution bancaire irrévocable.

Cette disposition est pleinement applicable aux ventes sur liquidation judiciaire par renvoi de l’article R. 642-27 du Code de commerce.

En pratique, l’enchère portée au profit d’un amateur dont la garantie de solvabilité ne respecterait pas le formalisme visé à cet article encourt la nullité.

A cet égard, par un mécanisme qui permet d’alléger incontestablement le nombre d’incidents qui pourraient survenir lors de l’audience d’adjudication la lettre de l’article R. 322-48 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit qu’une enchère régulièrement portée couvre la nullité des enchères précédentes.

Toutefois, la nullité de la dernière enchère entraîne de plein droit la nullité de l’adjudication (CPCEx, art. R. 322-48 al.3).

Toujours dans un souci de célérité et compte tenu des enjeux et du coût que représente la tenue de l’audience d’adjudication, les contestations relatives à la validité des enchères sont formées verbalement à l’audience. Le juge de l’exécution doit donc statuer sur le champ et le cas échéant reprendre la tenue des enchères ab initio (CPCEx, art. R. 322-49 (N° Lexbase : L2468ITL).

C’est précisément dans ces conditions que l’avocat des liquidateurs de la société Jean Caby fut amené à émettre une contestation à l’encontre de la garantie produite par Sofim Promotion s’apercevant que cette dernière contenait une limite de validité au 16 août 2019, date à laquelle sa défaillance n’aurait pas pu être constatée et la garantie autonome actionnée. En effet, la vente étant intervenue le 5 juin 2019, l’adjudicataire détenait la possibilité de payer le prix jusqu’au 17 septembre 2019. 

Les délais de paiement du prix de vente sur liquidation judiciaire dérogent en effet aux délais de paiement applicables aux ventes sur adjudication sur licitation ou sur saisie immobilière.

L’adjudicataire dispose d’un délai de trois mois à compter de la date de vente définitive pour s’acquitter du prix de vente et ce, à peine de réitération des enchères.

(Article 12 du cahier des conditions de vente en matière de vente des actifs immobiliers dependant d'une liquidation judiciaire).

Outre les délais, les modalités de paiement du prix diffèrent également. Ainsi à l’occasion d’une vente sur liquidation judiciaire, le prix de vente est versé entre les mains du liquidateur qui en délivrera reçu. A la différence des ventes sur licitation ou sur saisie immobilières lors desquelles le prix est consigné entre les mains du séquestre désigné au cahier des conditions de vente.

En outre, le prix d’une vente sur liquidation judiciaire produit intérêts à compter de la date d’adjudication définitive, ces intérêts seront en outre majorés de cinq mois à compter d’un délai de cinqmois suivant la date d’adjudication définitive conformément aux dispositions de l’article L. 313-3 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L7599HIB) (article 10 du cahier des conditions de vente). Ce mode de calcul des intérêts diffère grandement des ventes sur licitation ou sur saisie immobilière à l’occasion desquelles le cours des intérêts ne commence à courir que dans un délai de deux mois suivant la date d’adjudication définitive (article 15 du cahier des conditions de vente sur saisie immobilière et article 13 du cahier des conditions de vente sur licitation).

L’avocat intervenant en matière de vente aux enchères judiciaires devra ainsi prendre garde à alerter son client sur l’impact de ces intérêts, qui n’est pas neutre dans la fixation du prix d’adjudication et de l’enveloppe globale destinée à l’acquisition. Il devra également se libérer valablement du prix de vente entre les mains du liquidateur et non pas du séquestre. En effet, dans cette hypothèse, à défaut de règlement dans le délai de trois mois précité, la réitération des enchères pourrait être poursuivie. 

L’avocat devra en outre alerter son client sur le fait que par analogie avec les ventes sur saisie immobilière, l’adjudicataire défaillant d’une vente sur liquidation judiciaire ne peut prétendre répéter les sommes déjà versées. Sa défaillance est donc lourdement sanctionnée.

Le juge de l’exécution faisait droit à cette analyse annulait l’enchère portée par Sofim Promotion au prix de 18 500 000 euros, et s’agissant de la dernière enchère, prononçait la nullité de l’adjudication.

Au surplus, devant la cour d’appel les liquidateurs soutiennent que ladite garantie contrevenait aux dispositions de l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution et ne constituait pas une caution bancaire irrévocable, la banque l’ayant justement révoquée afin d’en émettre une nouvelle dans les minutes ayant suivi l’adjudication.

Le juge de l’exécution fait droit à cette analyse annulait l’enchère portée par Sofim Promotion au prix de 18 500 000 euros et s’agissant de la dernière enchère prononçait la nullité de l’adjudication.

B.Des garanties similaires lors de l’audience d’adjudication initiale ou de surenchère 

La Cour de cassation fait preuve d’un rigorisme certain concernant l’application de l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution et des justificatifs de solvabilité admis afin de porter les enchères. Diverses tentatives de substitution à ces garanties ont surgi à l’occasion de surenchères. En effet, à l’occasion de celles-ci l’avocat atteste seulement s’être fait remettre de son mandant une caution bancaire irrévocable ou un chèque de banque du dixième du prix principal de la vente (CPCEx, art. R. 322-51 N° Lexbase : L2470ITN) à la différence de l’audience d’adjudication initiale lors de laquelle la garantie remise fait l’objet d’une consignation (CPCEx, art. R. 322-41).

Ainsi, par arrêt en date du 10 mars 2011, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation refuse d’assimiler à une caution bancaire irrévocable, l’attestation de nantissement émise au profit de la CARPA. Dans ces conditions, la surenchère formée à l’appui de laquelle l’avocat du surenchérisseur attestait s’être fait remettre à la fois des chèques de banque et de ce nantissement à titre de garantie est irrecevable (Cass. civ. 2, 10 mars 2011, n° 10-15.486, F-P+B N° Lexbase : A1736HDN).

En l’état des textes, le virement fait sur le compte CARPA de l’avocat ne saurait davantage constituer la caution bancaire irrévocable attendue. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation en juge ainsi même dans l’hypothèse où les publicités annonçant la vente sur surenchère mentionnaient qu’une telle garantie pouvait être constituée pour l’audience de surenchère (Cass. civ. 2, 18 février 2016, n° 14-29.052, F-P+B N° Lexbase : A4563PZZ).

Il est vrai qu’un solde de compte CARPA peut toujours faire l’objet d’une saisie attribution et que dans une telle situation la garantie fournie se verrait purement et simplement anéantie.

II. Vers une nécessaire modernisation des garanties

À l’heure des crypto-monnaies, le recours au chèque de banque et à la caution bancaire irrévocable peut paraître pour le moins obsolète. Si une modernisation doit incontestablement être envisagée, elle devra l’être dans un cadre strict (A). L’avocat intervenant en matière de ventes aux enchères publiques immobilières verra son rôle renforcé (B).

A. Dans un cadre strict

Les ventes aux enchères publiques immobilières suscitent un intérêt croissant et drainent un public important. Des garanties financières strictes doivent donc s’appliquer compte tenu tout d’abord du coût et des enjeux de ces procédures.

En l’espèce, la cour d’appel de Douai distinguait dans cette affaire précisément les pourtours de la caution bancaire irrévocable en opposition à la garantie financière autonome, instruments de garantie fréquemment assimilés à tort, tout en distinguant la principale faiblesse de la seconde :la date de son terme et ses conséquences.

La différence fondamentale entre ces deux sûretés personnelles réside principalement dans le caractère accessoire de la caution qui suit ainsi l’obligation principale alors que la garantie autonome, par nature indépendante de l’obligation principale, comporte son propre terme extinctif. La nuance est d’importance : si la caution est toujours tenue après l’arrivée du terme par son obligation de règlement au titre des dettes nées antérieurement bien que son obligation de couverture ait pris fin, le garant sera définitivement libéré par l’arriéré du terme.

La difficulté posée par la garantie produite en l’espèce résidait dans le fait que le terme fixé était inférieur aux délais impartis à l’adjudicataire pour payer le prix, à savoir trois mois à compter de la date d’adjudication définitive (article 12 du cahier des conditions de vente) comme il l’a été évoqué supra. Dans ces conditions la garantie n’aurait pas pu être valablement actionnée dès lors qu’elle n’aurait pas été mise en œuvre avant l’écoulement de ce délai de trois mois.

Le demandeur au pourvoi tentait de résoudre cette difficulté en opposant l’alinéa 3 de l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d'éxécution dont la rédaction actuelle prêterait à « la somme encaissée par le séquestre ou la Caisse des dépôts et consignations est restituée dès l'issue de l'audience d'adjudication à l'enchérisseur qui n'a pas été déclaré adjudicataire »À la faveur de ces dispositions, il soutient ainsi que la garantie autonome devait faire l’objet d’un encaissement immédiat de la somme garantie dans les mêmes conditions qu’un chèque de banque. Cette appréciation erronée desdites dispositions, seul le chèque de banque faisant l’objet d’un encaissement, dénuait en outre de tout intérêt le recours à la caution bancaire au détriment du chèque de banque.

Si la question du terme de la garantie apparaît incontestablement cruciale en matière de vente aux enchères immobilières judiciaires, il n’en demeure pas moins que celle-ci pourrait sans doute être envisagée comme autre alternative aux garanties habituelles à condition toutefois de couvrir un laps de temps suffisamment important et en tout cas jusqu’à l’issue d’une éventuelle vente sur réitération.

B. La place centrale de l’avocat en matière de ventes aux enchères

L’importance des actes passés en matière de vente aux enchères immobilières et le rôle crucial de l’avocat intervenant en cette matière ont rendu nécessaire le recours au pouvoir écrit remis par son client, par dérogation au mandat général dont dispose l’avocat en toutes matières. Cette exigence était gravée à l’article 707 du Code de procédure civile ancien (N° Lexbase : L6912H77). À l’occasion du dépôt au greffe de la déclaration d’adjudicataire l’avocat devait en outre déposer une acceptation, ou présenter son pouvoir. Cette nécessité était encore accrue par l’article 12-2 alinéa 4 du Règlement Intérieur Harmonisé (RIH), (issu de la décision à caractère normatif des 26 et 27 mars 1999) « Même en présence de son client à l’audience, il doit être muni d’un pouvoir spécial de ce dernier pour enchérir et d’instructions écrites précisant le montant maximum en lettre et en chiffres de l’enchère autorisée… ».

Si ces dispositions n’ont pas été reprises au sein du Règlement Intérieur National (RIN) tel qu’issu de la décision à caractère normatif n° 2005-003 du Conseil National des Barreaux, il n’en demeure pas moins que le rôle de l’avocat intervenant en matière de ventes aux enchères publiques à la barre du tribunal est prépondérant.

Après avoir vérifié l’identité de son client, il devra s’assurer que ce dernier ne fait l’objet d’aucune interdiction d’enchérir qui frappe le débiteur saisi, les auxiliaires de justice intervenus dans la procédure, les magistrats de la juridiction devant laquelle la vente est poursuivie ou de toute personne interposée (CPCEx, art. R. 322-39 N° Lexbase : L2458IT9).

Dans un temps très restreint, il devra encore faire preuve d’un devoir de conseil quant aux différentes sommes à acquitter, quant aux conditions d’occupation du bien et leurs conséquences, quant aux interrogations résultant des renseignements figurant au cahier (copropriété le cas échéant, urbanisme…).

Il devra encore vérifier que son client n’a pas fait l’objet d’une condamnation à une peine visée à l’article L. 322-7-1 du Code des procédures civiles d’exécution (N° Lexbase : L9882LMX) et devra se faire remettre l’attestation sur l’honneur exigée (CPCEx, art. R. 322-41-1 N° Lexbase : L8428LQ9).

Enfin, il devra vérifier la validité et la conformité de la garantie de solvabilité produite.

Les garanties limitativement énumérées à l’article R. 322-41 du Code des procédures civiles d’exécution peuvent sembler quelque peu dissuasives pour tout candidat à l’adjudication.

En effet, en pratique, les visites se tiennent quelques jours avant la date fixée pour l’audience d’adjudication. L’amateur qui souhaite porter les enchères ne se préoccupera bien souvent de l’obtention de son chèque de banque qu’à l’issue de celles-ci. Si certaines banques émettent le précieux sésame dans la journée, d’autres opposent des délais impressionnants : de 48 heures jusqu’à parfois près de dix jours. L’erreur du client ou de la banque quant à son libellé n’est pas occasionnelle mais prive de la possibilité de porter les enchères.

Dans ces conditions, certains candidats se verront d’office éliminés comptetenu de ces délais importants. S’il reste toujours la caution bancaire irrévocable, son strict formalisme évincera les non-initiés, à la faveur des professionnels marchands de biens et autres filiales.

En outre, le chèque de banque peut toujours faire l’objet d’une falsification.

Le virement bancaire constitue aujourd’hui un moyen de paiement rapide et efficace. Si la Cour de cassation refuse à ce jour de retenir comme preuve de solvabilité un virement effectué sur le compte CARPA de l’avocat, une évolution des dispositions réglementaires semble souhaitable. L’avocat justifierait ainsi avoir réceptionné de son client les 10 % de la mise à prix, somme qui pourrait, immédiatement à l’issue de l’audience d’adjudication, être remise au séquestre.

Une question d’importance mériterait également sans doute d’être étudiée à l’occasion d’une prochaine réforme. Si les garanties produites par les adjudicataires qui ne paieraient pas le prix dans les délais impartis sont acquises aux créanciers participant à la distribution, et le cas échéant au débiteur (CPCEx, art. R. 322-41) lors des ventes aux enchères publiques sur saisie immobilière, licitation ou liquidation judiciaire, la question de la garantie des frais de procédure exposés demeure également cruciale. Elle demeure bien souvent réglée par les règlements intérieurs des barreaux, bien qu’aucun texte légal ou règlementaire ne dise un mot de cette question pourtant d’importance. Certains règlements se contentent de prévoir la remise d’un chèque personnel couvrant le montant des frais préalables lorsque d’autres exigeront un chèque de banque couvrant à la fois les frais préalables, émoluments, allant même jusqu’à solliciter jusqu’à dix pour cent de l’enchère maximale. En la matière, prudence est, à n’en pas douter, mère de sûreté.

Les frais préalables d’un montant incompressible représentent pour les adjudications à prix faibles ou modérés une part de dépense non négligeable pour l’adjudicataire mais également pour le poursuivant qui doit en faire l’avance. Si la charge de ces frais demeure celle de l’adjudicataire initial en cas de défaillance de sa part (CPCEx, art. R. 322-72 N° Lexbase : L2491ITG), la difficulté de leur recouvrement par le créancier poursuivant à l’encontre de ce tiers défaillant en cas de réitération des enchères, permet de s’interroger. Une harmonisation des pratiques semble souhaitable afin de sécuriser davantage les intérêts des parties en cause.


[1] A. Alexandre Leroux, Janus ou la notion de caducité en matière de saisie immobilière, Lexbase Droit privé, février 2021, n° 854 (N° Lexbase : N6403BYS).

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