Jurisprudence : CA Paris, 5, 9, 02-02-2023, n° 22/16784, Prononce la nullité de l'assignation

CA Paris, 5, 9, 02-02-2023, n° 22/16784, Prononce la nullité de l'assignation

A89529B8

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 5 - Chambre 9


ARRET DU 02 FEVRIER 2023


(n° , 6 pages)


Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16784 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGO5C


Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2022 - Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2022P00860



APPELANTE


S.A.R.L. MACO

RCS de Bobigny sous le n° 489 697 235

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SCP NABOUDET - HATET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046, avocat postulant

Représentée par Me Fabienne BERNERON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0617, avocat plaidant


INTIMES


S.A.S. STANDARD TEXTILE

N° SIRET : 382 962 306

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représentée par Me Mathias BICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0850, avocat postulant

Représentée par Me Véronique BENTZ, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant


S.E.L.A.R.L. [T] MJ , en la personne de Me [W] [T]

en qualité de mandataire liquidateur de la SARL MACO

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Bernard CHEYSSON de la SELARL CHEYSSON MARCHADIER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0043, substituée par Me Agathe BOUREAU, avocat postulant et plaidant


Monsieur A B GENERAL - SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

[Adresse 1]

[Localité 4]



COMPOSITION DE LA COUR :


L'affaire a été débattue le 18 janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :


Madame Sophie MOLLAT, Présidente

Madame Isabelle ROHART, Conseillère

Madame Déborah CORICON, Conseillère


qui en ont délibéré


GREFFIERE : Madame C, lors des débats


ARRET :


- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛.

- signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière .


**********


La SARL Maco a été constituée le 25 mars 2006 et a pour activité l'achat et la distribution d'articles de textile et manufactures neufs et d'occasion. Le dirigeant de la société est M. [S] et elle emploie 5 salariés.


Par ordonnance de référé du 23 décembre 2020, le Président du tribunal de commerce de Bobigny a condamné la société Maco au paiement de 72.937,69 euros à titre provisionnel, outre intérêts de retards de 1% à compter du mois de mars 2020 et indemnités légales de recouvrement de 800 euros.


Le 10 mars 2021, en l'absence d'exécution de la société Maco, la société Standard Textile a mandaté un huissier de justice pour réaliser une saisie-attribution sur les comptes bancaires de la société Maco.


Le 22 avril 2021, un procès-verbal de saisie-attribution a été établi entre les mains de la Banque Populaire Rives de Paris constatant des comptes dépourvus d'actif.

Les mesures suivantes de recouvrement se sont révélées infructueuses.


Par acte du 20 juin 2022, la SAS Standard Textile, se prévalant d'une créance de 72.937,69 euros et de saisies infructueuses, a saisi le tribunal de commerce de Bobigny d'une demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire de la SARL Maco.


Par jugement du 28 septembre 2022, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Maco, désigné la SELARL Bailly MJ, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société et la date de cessation des paiements a été fixé provisoirement au 28 septembre 2021 soit 18 mois avant l'ouverture de la procédure collective.



Par déclaration du 4 octobre 2022, la société Maco a interjeté appel de cette décision.


Par ordonnance du 27 octobre 2022, l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 28 septembre 2022 a été ordonné.


* * *


Dans ses conclusions d'appelante signifiées par RPVA le 17 janvier 2023, la société Maco demande à la cour de':

Déclarer recevable et bien fondée la SARL MACO en son appel du jugement du 28 septembre 2022 du Tribunal de Commerce de Bobigny

Infirmer le jugement du 28 septembre 2022 du Tribunal de Commerce de Bobigny en toutes ses dispositions

Statuant à nouveau

A titre principal

Prononcer la nullité de l'assignation délivrée le 20 juin 2022 sous la forme d'un PV 659 du CPC et le jugement subséquent du 28 septembre 2022 du Tribunal de Commerce de Bobigny

A titre subsidiaire

Débouter la société STANDARD TEXTILE de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions

Dire n'y avoir lieu à ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SARL MACO

En tout état de cause

Condamner la société STANDARD TEXTILE à payer à la société MACO la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du CPC🏛 et aux entiers dépens de la procédure.


* * *


Dans ses conclusions d'intimée signifiées par RPVA le 11 janvier 2023, la société Standard Textile demande à la cour de':

A titre liminaire,

DECLARER l'acte d'assignation en date du 20 juin 2022 recevable et bien fondé,

A titre principal et incident,

DECLARER recevable mais mal fondé l'appel principal interjeté par la SARL MACO,

DECLARER recevable et fondé l'appel partiel incident formé par la SAS STANDARD TEXTILE,

INFIRMER la décision du Tribunal de commerce de BOBIGNY du 28 septembre 2022, sous le numéro RG 2022P00860, en ce qu'il a ouvert une procédure liquidation judiciaire sans maintien de l'activité à l'égard de la SARL MACO,

CONFIRMER la décision entreprise en ses autres dispositions,

Et, statuant à nouveau :

PRONONCER l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SARL MACO assorti d'une poursuite d'activité,

A titre subsidiaire et à défaut de preuve des sommes perçues par la société MACO,

CONFIRMER purement et simplement le jugement de première instance en toutes ses dispositions

En tout état de cause,

DEBOUTER la SARL MACO de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

ORDONNER à la SARL MACO de communiquer aux parties à l'instance le(s) justificatif(s) du versement de l'indemnité d'assurance de 450.000 € sur les comptes en banque de la société MACO et l'attestation de l'expert-comptable à jour du versement de l'indemnité d'assurance,

CONDAMNER la SARL MACO à verser à la SAS STANDARD TEXTILE la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛,

CONDAMNER la SARL MACO aux entiers dépens de l'instance.


* * *


Dans ses conclusions d'intimée, signifiées par RPVA, le 17 janvier 2023, la SELARL [T] MJ, prise en la personne de Me [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MACO, demande à la cour de :

1. SUR LA REGULARITE DE L'ASSIGNATION DU 20 JUIN 2022 A L'ENCONTRE DE LA SOCIETE MACO:

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de commerce de BOBIGNY le 28 septembre 2022 en ce qu'il a jugé régulière l'assignation du 20 juin 2022 délivrée par la société STANDARD TEXTILE à l'encontre de la société MACO.

2. SUR LA CESSATION DES PAIEMENTS DE LA SOCIETE MACO :

A titre principal :

INFIRMER le jugement du 28 septembre 2022 rendu par le Tribunal de commerce de BOBIGNY en ce qu'il a constaté l'état de cessation des paiements de la société MACO ;

A titre subsidiaire :

CONFIRMER le jugement du 28 septembre 2022 rendu par le Tribunal de commerce de BOBIGNY mais seulement en ce qu'il a constaté l'état de cessation des paiements de la société MACO ;

L'INFIRMER pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

PRONONCER l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société MACO ;

RENVOYER l'affaire devant le Tribunal de commerce de BOBIGNY pour désignation des organes de la procédure ;

En tout état de cause :

CONDAMNER la partie succombante aux droits fixes du liquidateur judiciaire et aux entiers dépens qui seront employés en frais de procédure, outre une indemnité d'un montant de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile🏛.


* * *


Par avis signifié par RPVA le 14 décembre 2022, le ministère public estime que la cour devra rejeter le moyen d'annulation du jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 28 septembre 2022 et infirmer ce même jugement si la société Maco démontre, pour l'audience, que le versement des indemnités alléguées constitue bien une somme disponible. Au cas où il ne serait pas justifié du paiement des sommes reçues de l'assurance, il considère que la cour devrait confirmer l'état de cessation des paiements et ouvrir une procédure de redressement judiciaire en renvoyant au tribunal de commerce de Bobigny pour désignation des organes de la procédure.



SUR CE,


La société Maco demande que soit prononcée la nullité de l'assignation délivrée le 20 juin 2022 selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile🏛.

Elle rappelle que le principe est que les assignations doivent être délivrées à personne, que les huissiers ne peuvent délivrer un acte selon les modalités de l'article 659 que si l'adresse est inconnue, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, l'adresse de son siège social figurant au RCS ainsi que dans les pages jaunes de l'annuaire.

Elle indique avoir toujours été en activité au [Adresse 7] [Localité 6] et considère qu'aucun voisin n'aurait pu affirmer qu'elle était partie sans laisser d'adresse comme mentionné dans le procès-verbal. Elle fait valoir une attestation de la présidente de l'association syndicale des Chanoux et les photographies de Google Maps pour démontrer la réalité de son siège social.

Elle ajoute être répertoriée dans les pages jaunes et souligne que l'extrait de K-bis mentionne le nom du dirigeant et son adresse personnelle. Elle constate qu'aucun acte ne lui a été délivré. Elle conteste la lettre recommandée avec accusé de réception dont la signature n'est pas celle du dirigeant, communiquée par la société Standard Textile avec la mention «'pli avisé et non réclamé'» et indique que M. [S] n'a jamais été avisé de l'existence de cette lettre. Elle fait valoir que si le clerc assermenté s'était déplacé le vendredi 17 juin 2022 comment indiqué dans l'attestation, tous les salariés étaient présents sur le site de l'entreprise, le clerc aurait pu délivrer son assignation.

Par ailleurs, elle fait valoir que cette irrégularité lui cause un grief. Elle indique qu'à compter du 28 septembre 2022, elle ne pouvait plus exercer son activité commerciale et qu'elle a été privée du double degré de juridiction.


La société Standard Textile répond que le procès-verbal du 20 juin 2022 constatant l'absence du destinataire de l'acte, dresse également l'ensemble des diligences accomplies pour le rechercher : notamment la constatation du nom SARLU Maco sur l'enseigne, les informations acquises auprès d'un voisin indiquant que la société était partie sans laisser d'adresse, la consultation des pages jaunes et pages blanches sans trouver de nouvelle adresse, la demande d'information au correspondant ignorant l'adresse du nouveau siège social de la société et la consultation de l'extrait de K-bis ne comportant pas de modification d'adresse de siège social.

Elle ajoute que l'huissier de justice a envoyé une copie du procès-verbal et de l'acte d'assignation par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, présentée le 22 juin 2022 et signée de la main du dirigeant de la société Maco, M. [S]. Elle considère que la signification de l'assignation a été régulièrement faite.

Elle soutient que la société Maco n'établit pas l'existence d'un grief consécutif à la nullité, qu'elle n'a pas été privée du double degré de juridiction car elle a pris connaissance de l'acte d'assignation à travers la lettre recommandée et a pris la décision de ne pas se présenter à l'audience.


Le liquidateur judiciaire souligne que le procès-verbal de l'huissier de justice du 20 juin 2022 mentionne ses diligences. Il considère que l'assignation a été régulièrement délivrée et demande la confirmation du jugement.


Le ministère public constate que la société Maco avait bien pour adresse, le 20 juin 2022, jour de la visite de l'huissier de justice, [Adresse 7] [Localité 6], comme indiqué sur le RCS. Il considère que le procès-verbal mentionne bien les diligences accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte, soit en l'espèce l'interrogation d'un voisin, qu'il a constaté que l'enseigne portait le nom de la société, qu'il a consulté les pages jaunes et les pages blanches en vain ainsi que l'extrait de K-bis ne comportant aucune modification de siège social. Il considère que l'assignation a été régulièrement signifiée.


Selon l'article 659 du Code de procédure civile🏛': «'Lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.

Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.

Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité.

Les dispositions du présent article sont applicables à la signification d'un acte concernant une personne morale qui n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le registre du commerce et des sociétés.'»


La cour rappelle que les significations d'actes doivent, en application de l'article 654 du code de procédure civile🏛, être faites à personne et que ce n'est que lorsque la personne morale n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le RCS que l'huissier peut dresser un procès verbal de recherches selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile🏛.

Or, en l'espèce, la société Maco avait toujours son siège social sur la [Adresse 7] à [Localité 6], ainsi qu'il résulte de l'attestation de M. [R], président des ASL de la [Adresse 7] du 6 octobre 2022, qui précise que passant plusieurs fois par jour devant la société Maco, [Adresse 7], il témoigne que cette société «' a été en activité continue dans son local du RdC du bâtiment [Adresse 7]». Il ajoute qu'un «'simple appel téléphonique au numéro de l'entreprise figurant sur son panneau de façade l'aurait mis en rapport avec l'accueil de l'entreprise'».

Il résulte du procès verbal de recherches du 20 juin 2022, qui ne mentionne pas l'heure de passage de l'huissier, que ce dernier n'a même pas appelé le numéro figurant sur l'enseigne extérieure et qu'il ne s'est fondé que sur les affirmations d'un seul «'voisin'», dont l'identité n'est pas indiquée, pour considérer qu'il ne s'agissait plus de l'adresse de la société Maco.

La société Maco, ayant toujours à cette date son activité sur la [Adresse 7] à [Localité 6], [Adresse 7], et le liquidateur judiciaire ne contestant pas dans ses conclusions, la réalité du siège social, c'est de façon erronée que l'huissier a dressé un procès verbal de recherches infructueuses selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile🏛, étant précisé que l'envoi d'un courrier recommandé, dont la signature est contestée par la société Maco n'est pas de nature à régulariser la signification ainsi délivrée'.

Il sera de surcroît relevé que les actes d'huissier antérieurement délivrés à la société Maco n'ont jamais fait l'objet de procès verbaux de recherches infructueuses et l'ont été au [Adresse 7]. Ainsi l'ordonnance de référé a été signifiée par acte du 17 février 2021 à Mme [S], secrétaire, la dénonciation de saisie-attribution a été notifiée le 12 mars 2021 à M [S], gérant, un commandement de payer du 22 avril 2021 avait été notifié à M. [S], gérant, une dénonciation d'un procès verbal d'indisponibilité du 26 avril 2021 avait été notifiée à Mme [S], une dénonciation de saisie attribution du 18 février 2022 a été signifiée selon les modalités de l'article 655 du code de procédure civile🏛, l'huissier ayant noté la présence d'une enseigne et le fait que le nom figurait sur le boîte aux lettres et enfin un procès-verbal de saisie-vente du 13 avril 2022 a été notifié à M [S].

Il s'ensuit que tous les actes délivrés précédemment démontrent la réalité du siège social, que l'assignation n'a donc pas été valablement signifiée et il y a lieu de prononcer la nullité de l'assignation et donc du jugement, le tribunal n'ayant pas été valablement saisi.


La société Standard Textile sera condamnée aux dépens.

Aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile🏛.



PAR CES MOTIFS


Prononce la nullité de l'assignation du 20 juin 2022 et du jugement du 28 septembre 2022,


Condamne la société Standard Textile aux dépens,


Rejette les demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile🏛.


La greffière La présidente

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