Jurisprudence : CA Caen, 15-12-2022, n° 20/02720, Infirmation

CA Caen, 15-12-2022, n° 20/02720, Infirmation

A337383C

Référence

CA Caen, 15-12-2022, n° 20/02720, Infirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/90853454-ca-caen-15122022-n-2002720-infirmation
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AFFAIRE : N° RG 20/02720 -

N° Portalis DBVC-V-B7E-GUPO

 


ARRÊT N°


JB.


ORIGINE : DECISION du Juge commissaire de CAEN en date du 01 Décembre 2020

RG n° 2020000845


COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2022



APPELANTE :


S.A.S. BECOCY

N° SIRET : 391 911 575

[Adresse 6]

[Localité 3]

prise en la personne de son représentant légal


représentée et assistée de Me Stéphane PIEUCHOT, avocat au barreau de CAEN


INTIMES :


Maître [M] [Aa] mandataire judiciaire de la société BECOCY

[Adresse 1]

[Localité 2]


représenté et assisté de Me Stéphane PIEUCHOT, avocat au barreau de CAEN


S.A.S. ITM ALIMENTAIRE OUEST

N° SIRET : 452 534 415

[Adresse 4]

[Localité 5]

prise en la personne de son représentant légal


représentée par Me Jean-Jacques SALMON, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Bruno CRESSARD, avocat au barreau de RENNES


DEBATS : A l'audience publique du 03 octobre 2022, sans opposition du ou des avocats, Mme COURTADE, Conseillère, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré


GREFFIER : Mme COLLET, greffier



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :


Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

Mme VELMANS, Conseillère,


ARRÊT prononcé publiquement le 15 décembre 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile🏛 et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier


* * *


Par jugement du 11 avril 2018, le tribunal de commerce de Caen a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la SAS BECOCY.


Par lettre du 7 juin 2018, la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST a déclaré sa créance au passif de la procédure collective pour un montant de 141 771,41€ à titre chirographaire en vertu de factures impayées.


Ladite créance a été contestée dans son intégralité par la SAS BECOCY au motif qu'elle n'est pas justifiée.


Par ordonnance du 1er décembre 2020, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Caen a :

- ordonné l'admission définitive de la créance de la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST pour la somme de 141 771,71€ à titre chirographaire ;

- rejeté la demande formulée en dommages et intérêts par la SAS BECOCY ;

- passé les dépens en frais privilégiés de la procédure collective.



Par déclaration du 11 décembre 2020, la SAS BECOCY a interjeté appel de cette décision.


Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 juin 2022, la SAS BECOCY demande de :

- Infirmer l'ordonnance entreprise

Et statuant à nouveau,

A titre principal et avant toute défense au fond

Vu l'article R. 624-5 du code de commerce🏛

- Constater que les contestations soulevées et que la question de l'admission des créances déclarées au passif de la société BECOCY par la société ITM ALIMENTAIRE OUEST échappent au pouvoir juridictionnel de la cour d'appel statuant avec les mêmes attributions que celles du juge-commissaire

- Inviter les parties à mieux se pourvoir et à saisir le tribunal arbitral

- Prononcer un sursis à statuer jusqu'à l'aboutissement du procès au fond qui s'annonce

A titre subsidiaire

Vu les dispositions de l'article 1353 du code civil🏛,

- Rejeter du passif de la société BECOCY les créances déclarées par la société ITM ALIMENTAIRE OUEST

- Condamner la société ITM ALIMENTAIRE OUEST à lui payer des dommages-intérêts d'un montant équivalant à la créance déclarée au passif par la société ITM ALIMENTAIRE OUEST

En toute hypothèse,

- Condamner la société ITM ALIMENTAIRE OUEST à lui payer une indemnité de 4.500€ appréciée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile🏛.

- La condamner aux entiers dépens

- Accorder à la SELARL [E] ET ASSOCIES représentée par Maître [W] [E], le bénéfice du droit de recouvrement direct instauré par l'article 699 du Code de Procédure Civile🏛.


Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 16 juin 2022, la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST demande à la cour de :

Sur l'admission de créance

' Se déclarer compétente pour prononcer l'admission de sa créance

' Confirmer la décision du juge-commissaire et admettre sa créance au passif de la société BECOCY à hauteur de 141.771.71€

Sur la demande reconventionnelle

' A titre principal

Vu l'article 1448 du code de procédure civile🏛

Se déclarer incompétent pour traiter de la demande reconventionnelle et inviter la société BECOCY à mieux se pourvoir.

' A titre subsidiaire,

La déclarer irrecevable et infondée

' Condamner la société BECOCY à lui payer la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛

' Condamner la société BECOCY aux entiers dépens.



Par ordonnance du 8 octobre 2021, le conseiller de la mise en état a, au visa de l'article 909 du code de procédure civile🏛, déclaré Me [L], mandataire judiciaire de la société BECOCY irrecevable à conclure.


L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 septembre 2022.


Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.



MOTIFS


I. Sur la demande de réouverture des débats


Par une note en délibéré déposée le 12 octobre 2022, le conseil de la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST sollicite la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats pour permettre la communication officielle des pièces jointes à sa déclaration de créance.


Elle fait valoir qu'elle n'a pas communiqué ces pièces devant la cour par suite d'une erreur matérielle et que cette difficulté a été soulevée seulement oralement par la SAS BECOCY.


Par courrier déposé le 14 octobre 2022, le conseil de la SAS BECOCY s'oppose à cette demande, indiquant qu'il appartenait à son confrère de communiquer ses factures avant la clôture de l'instruction.


L'article 132 du code de procédure civile🏛 dispose que la partie qui fait état d'une pièce s'oblige à la communiquer à toute autre partie à l'instance et que cette communication doit être spontanée.


Par ailleurs, la cour ne peut statuer que sur les pièces produites en appel conformément aux dispositions de l'article 906 du code de procédure civile🏛.


La SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST ne justifie d'aucun motif légitime l'ayant empêchée de communiquer l'ensemble de ses pièces, étant rappelé qu'elle a disposé d'un délai de 18 mois pour y procéder avant la clôture.


En conséquence, sa demande de rabat de l'ordonnance de clôture et de réouverture des débats est rejetée.


II. Sur la demande de sursis à statuer sur l'admission de la créance liée à l'existence d'une contestation sérieuse


La cour d'appel, saisie d'un recours contre une décision du juge-commissaire statuant en matière de vérification des créances, statue avec les pouvoirs de celui-ci.


La cour considère que la discussion soulevée par la SAS BECOCY relativement à la preuve de la créance invoquée par la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST ne constitue pas une contestation sérieuse au sens de l'article L 624-2 du code de commerce🏛 nécessitant un débat devant le juge du fond et qu'elle relève donc du pouvoir juridictionnel du juge-commissaire.


Quant à l'allégation par la SAS BECOCY d'une créance réciproque de dommages et intérêts, liée à un manque de bonne foi de l'intimée dans l'exécution de la convention, susceptible de se compenser avec la créance déclarée, elle ne s'analyse pas en une contestation dès lors qu'elle ne porte pas sur l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée par la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST.


Au vu de ces éléments, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer sur l'admission de la créance ni de renvoyer les parties à saisir le tribunal arbitral.


III. Sur le fond


Selon l'article L 110-3 du code de commerce🏛, à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi.


Il incombe à la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST de justifier de l'existence et du montant de sa créance, cette preuve conditionnant l'admission de sa créance.


La SAS BECOCY étant une société commerciale, la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST peut librement prouver que les marchandises dont elle réclame le paiement ont bien été commandées et livrées.


L'appelante soutient que la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST est défaillante pour démontrer la réalité des livraisons invoquées, en l'absence de justificatifs sur le processus commande/livraison/facturation.


A l'appui de sa demande d'admission, la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST se fonde notamment sur les relations d'affaires qui existent entre les parties depuis plusieurs années, les factures qu'elle a émises et l'absence de protestation de l'appelante à leur réception.


Faute de production des factures en appel, la cour n'est pas en mesure de les analyser ni de les retenir comme élément de preuve, peu important qu'elles aient été communiquées en première instance ainsi qu'au mandataire judiciaire.


C'est encore vainement que l'intimée se prévaut de la liste des créanciers et dettes remise par la SAS BECOCY lors du dépôt de sa demande de sauvegarde, mentionnant notamment une créance à échoir de la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST pour un montant de 96 375€.


Cette liste ne s'analyse pas en une reconnaissance de dette.


Elle constitue, en vertu de l'article L 622-24 al 3 du code de commerce, seulement une présomption de déclaration en faveur du créancier mais ne saurait dispenser celui-ci de la preuve de sa créance.


La relation d'affaires entre les parties n'empêche pas l'appelante de contester la facturation litigieuse.


Quant aux documents comptables relatifs à la SAS BECOCY, ils sont insuffisants à établir le bien-fondé de la créance alléguée.


Aucun élément ne permet de déterminer les dates de livraison, la nature, la quantité et le montant des marchandises prétendûment fournies.


Au vu de ces observations, il convient de rejeter la demande d'admission de la créance déclarée par la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST, le jugement étant infirmé de ce chef.


Il ne relève pas de la compétence juridictionnelle du juge-commissaire dans le cadre de l'admission des créances, ni de la cour statuant sur appel d'une ordonnance du juge-commissaire, de statuer au fond sur des demandes reconventionnelles de dommages et intérêts.


Par suite, la demande subsidiaire de dommages et intérêts présentée par la SAS BECOCY est déclarée irrecevable.


IV. Sur les demandes accessoires


La SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST succombant, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.


L'équité commande de débouter les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛.



PAR CES MOTIFS


La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,


DEBOUTE la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST de sa demande de révocation de l'ordonnance de clôture et de réouverture des débats ;


INFIRME l'ordonnance entreprise ;


DIT n'y avoir lieu à surseoir à statuer sur l'admission de la créance ni à renvoyer les parties à saisir le tribunal arbitral ;


REJETTE la créance déclarée par la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST à hauteur de 141 771,41€ à titre chirographaire en vertu de factures impayées ;


DECLARE irrecevable la demande de dommages et intérêts formée par la SAS BECOCY ;


DEBOUTE les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile🏛 ;


CONDAMNE la SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct au profit des avocats constitués en la cause qui en ont fait la demande, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile🏛.


LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


N. LE GALL F. EMILY

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