Jurisprudence : TA Nantes, du 16-10-2024, n° 2104026

TA Nantes, du 16-10-2024, n° 2104026

A82876A8

Référence

TA Nantes, du 16-10-2024, n° 2104026. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/112099244-ta-nantes-du-16102024-n-2104026
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Références

Tribunal Administratif de Nantes

N° 2104026

5ème Chambre
lecture du 16 octobre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires complémentaires enregistrés le 10 avril 2021, le 27 avril 2022 et le 30 aout 2024, M. C D demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler la décision par laquelle la maire de Nantes a pavoisé la cour d'honneur de l'hôtel de ville d'un drapeau breton, ensemble la décision du 12 février 2021 par laquelle la maire de Nantes a rejeté son recours gracieux et refusé d'abroger la décision ;

2°) d'enjoindre à la commune de Nantes de retirer le pavoisement du drapeau breton de la cour d'honneur de l'hôtel de ville dès la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nantes, une somme de 100 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛.

Il soutient que :

- les décisions attaquées méconnaissent le principe de neutralité du service public ;

- le refus d'abroger la décision de pavoisement est illégal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2022, la commune de Nantes conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que l'ensemble des moyens de la requête ne sont pas fondés.

La clôture d'instruction a été prononcée le 30 mai 2024 par une ordonnance du 14 mai 2024.

Les parties ont été informées, par un courrier du 26 aout 2024, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative🏛, que le jugement était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'incompétence de l'auteure de la décision attaquée, révélée le 17 décembre 2020, en l'absence de délibération ou de délégation de l'organe délibérant l'y habilitant expressément.

Un mémoire, présenté par la commune de Nantes, a été enregistré le 30 aout 2024 et a été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique qui s'est tenue le 11 septembre 2024 à 10h :

- le rapport de Mme B,

- les conclusions de M. E,

- les observations de M. D et les observations de M. A, représentant la commune de Nantes.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision " révélée " par l'organisation d'une cérémonie le 17 décembre 2020, la maire de Nantes a pavoisé la cour d'honneur de l'hôtel de ville de Nantes d'un drapeau aux couleurs de la Bretagne, composé de neuf bandes horizontales noires et blanches et d'un canton supérieur de couleur blanche parsemé d'une multitude de mouchetures d'hermine. Par un courrier du 28 décembre 2020, M. C D a demandé à la maire de Nantes de procéder au retrait de ce drapeau. Par un courrier du 12 février 2021, la maire de Nantes a rejeté sa demande. Par la présente requête, M. D demande l'annulation de la décision " révélée " de pavoisement de la maire de Nantes du 17 décembre 2020 et de la décision de rejet de son recours gracieux du 12 février 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales🏛 : " Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. / Il donne son avis toutes les fois que cet avis est requis par les lois et règlements, ou qu'il est demandé par le représentant de l'État dans le département () ". Aux termes de l'article L. 2122-21 du même code : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'État dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : / 1° de conserver et d'administrer les propriétés de la commune et de faire, en conséquence, tous actes conservatoires de ses droits ; / () 4° De diriger les travaux communaux () ".

3. Il est constant que la décision, révélée au cours d'une cérémonie qui s'est tenue le 17 décembre 2020, de pavoiser la cour d'honneur de l'hôtel de ville d'un drapeau breton aux couleurs noires et blanches, n'a été précédée d'aucune délibération du conseil municipal et doit, dès lors, être regardée comme ayant été prise par la maire de Nantes. Si la commune de Nantes justifie la compétence de sa maire en se fondant sur les dispositions précitées de l'article L.2122-21 du code général des collectivités territoriales🏛 pour en déduire qu'elle avait une compétence propre l'y habilitant, il résulte toutefois de ces dispositions, combinées avec celles de l'article L.2121-29 également précité du même code, que l'exercice des compétences qui ne sont pas dévolues expressément à une autre autorité revient au conseil municipal, qui est compétent de plein droit pour régler par ses délibérations les affaires de la commune. Au demeurant, la décision de pavoiser la cour d'honneur de l'hôtel de ville d'un drapeau breton, ne se rattache ni à la conservation et l'administration des propriétés de la commune, ni à la direction des travaux communaux au sens des dispositions de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales. Dans ces conditions, en l'absence d'une délibération ou d'une délégation du conseil municipal autorisant la maire à faire flotter ce drapeau dans la cour d'honneur de l'hôtel de ville de la commune de Nantes, la décision " révélée " le 17 décembre 2020 a été édictée par une autorité incompétente.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, qu'il y a lieu d'annuler la décision " révélée " du 17 décembre 2020 par laquelle la maire de Nantes a pavoisé l'hôtel de ville de la commune de Nantes d'un drapeau breton et la décision rejetant le recours gracieux de M. D du 12 février 2021.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Le présent jugement implique nécessairement que le drapeau breton soit retiré de de la cour d'honneur de l'hôtel de ville. Par suite, il y a lieu, en application des dispositions de 1'article L. 911-1 du code de justice administrative🏛, d'enjoindre à la commune de Nantes de procéder à ce retrait dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

Sur les frais du litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de Nantes la somme de 100 euros au titre des frais exposés par M. D et non compris dans les dépens.

D E C I D E:

Article 1er : Les décisions attaquées de la maire de Nantes du 17 décembre 2020 et du 12 février 2021 sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint à la commune de Nantes de retirer le drapeau breton dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : la commune de Nantes versera à M. D une somme de 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. C D et à la commune de Nantes.

Délibéré après l'audience du 11 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Luc Martin, président,

Mme Claire Martel, première conseillère,

Mme Justine-Kozue Kubota, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 octobre 2024.

La rapporteure,

J-K. B

Le président,

L. MARTIN

La greffière,

V. MALINGRE

La République mande et ordonne au Préfet de Loire-Atlantique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

V. MALINGRE

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