Cour de Cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 2 Avril 1997
Cassation.
N° de pourvoi 94-20.352
Président M. Lemontey .
Demandeur MX
Défendeur société Brasserie Heineken
Rapporteur M. ....
Avocat général Mme Le Foyer de Costil.
Avocats la SCP Defrénois et Levis, M. ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que la société Française de Brasserie (société FB), aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société Brasserie Heineken, a cautionné un prêt de 320 000 francs consenti par la société Uficodi à M. ..., ce dernier ayant signé avec elle une convention de fournitures exclusives et consenti à son profit un nantissement de premier rang sur son fonds de commerce ainsi qu'une hypothèque de second rang ; que M X, notaire, a été chargé par la société FB de l'établissement de l'acte, effectivement dressé le 24 novembre 1984, constatant la convention de fournitures exclusives et les sûretés qui l'accompagnaient ; qu'il a été également chargé de l'inscription du nantissement ; que, condamnée à payer au prêteur, en vertu de son engagement de caution, la somme de 435 264,31 francs en principal, à la suite de la défaillance de M. ..., ultérieurement déclaré en liquidation judiciaire pour l'exercice d'un autre commerce, la société FB a assigné MX en réparation de son dommage, lui reprochant d'avoir inscrit le nantissement sans s'assurer de l'identité du propriétaire du fonds, ce qui l'avait privé de tout recours contre M. ... ;
Attendu que, pour condamner M X, l'arrêt attaqué énonce que les fautes commises par le notaire sont directement à l'origine du préjudice subi par la société FB qui a dû payer, en qualité de caution, les sommes dues par M. ..., contre lequel aucune poursuite ne peut plus être engagée en raison de la liquidation judiciaire intervenue à son encontre ;
Attendu, cependant, que seul est sujet à réparation le préjudice direct, actuel et certain ; qu'en se déterminant comme elle a fait, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la garantie hypothécaire prise au profit de la société FB n'était pas susceptible de permettre un apurement au moins partiel de la dette, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé dans son élément de certitude le dommage réparé, n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 septembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.