La présente décision est rédigée dans sa version originale en lettres majuscule. Pour faciliter votre lecture, nous avons tout rédigé en minuscule sauf les premiers lettres de phrase. Il se peut que certains caractères spéciaux ou accents n’aient pas pu être retranscrits.
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : attendu qu'il resulte de l'arret attaque qu'a la suite de condamnations penales prononcees, du chef de degradation de momunent public, contre trois militants independantistes qui avaient peint des inscriptions sur le batiment du conseil general du departement de la guadeloupe, une manifestation a ete organisee le 12 fevrier 1983 par les mouvements independantistes pour protester contre ces condamnations ;
Que M. X..., avocat au barreau de la guadeloupe et vice-president du syndicat des avocats de la guadeloupe, a participe a cette manifestation autorisee porteur d'une pancarte faisant apparaitre sa qualite d'avocat ;
Que certains manifestants, en passant devant le commissariat de police, ont profere des outrages envers les policiers ;
Que, devant le palais de justice, des injures ont ete proferees contre les magistrats et des inscriptions outrageantes ont ete portees sur les murs du batiment visant nommement certains magistrats de la cour d'appel et une personnalite officielle du departement exercant la profession d'avocat ;
Qu'a la suite de ces faits, une information contre x a ete ouverte des chefs de degradation de monument public, outrages a magistrats et complicite ;
Que, convoque par le juge d'instruction en qualite de temoin, M. X... S'est borne a repondre au magistrat instructeur : "je n'ai rien a dire sur cette affaire" ;
Que l'information a ete cloturee par une ordonnance de non-lieu, faute d'identification des auteurs des faits delictueux ;
Que le procureur general a saisi le batonnier de l'ordre des avocats en vue de poursuites disciplinaires contre M. X..., en faisant observer que celui-ci avait participe a une manifestation publique dirigee contre l'institution judiciaire et avait refuse, en contravention a l'article 109 du code de procedure penale, de faire une deposition devant le juge d'instruction ;
Que le conseil de l'ordre, tout en decidant qu'il n'y avait pas lieu a sanction disciplinaire, a recommande au batonnier de "rappeler, tant a M. X... Qu'a l'ensemble des avocats, les regles traditionnelles de rigueur et de discernement dans toutes les activites ou leur qualite d'avocat peut etre engagee" ;
Que, sur appel du procureur general, qui requerait contre M. X... La peine de l'avertissement, la cour d'appel a estime que le comportement de l'avocat au cours de la manifestation, ainsi que son refus de deposer devant le juge d'instruction, constituaient des fautes disciplinaires ;
Qu'elle a condamne M. X... A la peine du blame ;
Attendu que M. X... Fait grief a la cour d'appel d'avoir decide que son comportement lors de la manifestation constituait une faute disciplinaire, alors que, selon le moyen, d'une part, l'exercice d'une liberte publique reconnue par la constitution ne peut caracteriser un manquement a la discipline ;
Que la participation d'un avocat a une manifestation autorisee contre la loi "securite et liberte", en sa qualite de responsable d'un syndicat d'avocat, n'est qu'une forme de la liberte d'expression et de l'exercice du droit syndical de sorte qu'une telle participation, sans que l'on puisse imputer a l'avocat aucune part dans les incidents survenus, ne peut constituer une faute disciplinaire ;
Alors que, d'autre part, en reprochant a l'avocat de n'avoir pas abandonne le cortege pour se desolidariser de la manifestation, la cour d'appel a apporte une restriction illegale a l'exercice de la liberte de manifestation et du droit syndical ;
Alors que, enfin, la faute disciplinaire ne peut consister qu'en un fait personnel reprochable a son auteur, et qu'en retenant contre l'avocat un manquement disciplinaire pour des faits auxquels il n'a pas participe, la cour d'appel a instaure une responsabilite disciplinaire collective, en violation de l'article 106 du decret du 9 juin 1972" ;
Mais attendu que sans retenir contre l'avocat une responsabilite collective pour des faits delictueux commis par d'autres manifestants, la cour d'appel a enonce qu'au cours de la manifestation, qui avait pour objet de protester avec eclat contre de recentes condamnations penales, des outrages avaient ete proferes et des expressions injurieuses inscrites sur tous les murs du palais de justice, visant le corps des magistrats, ainsi qu'un conseiller a la cour d'appel nommement designe et une personnalite du departement exercant la profession d'avocat ;
Que la juridiction du second degre ajoute que M. X..., qui se presentait a la manifestation en qualite d'avocat, qui avait entendu les menaces et outrages et qui avait vu les inscriptions injurieuses inscrites sur les murs du palais de justice, lieu de travail commun des magistrats et avocats, n'a, a aucun moment, exprime sa desaprobation de ces exces, ni abandonne le cortege pour se desolidariser de ces actes delictueux ;
Qu'elle a pu en deduire que ce comportement constituait un manquement a la delicatesse caracterisant une faute disciplinaire ;
Qu'ainsi, le moyen ne peut etre accueilli en aucune de ses branches ;
Sur le deuxieme moyen, pris en ses quatre branches : attendu que M. X... Reproche encore a la cour d'appel d'avoir retenu que son comportement devant le juge d'instruction constituait egalement une faute disciplinaire, alors que, selon le moyen, d'une part, aux termes de l'article 109 du code de procedure penale, seul le juge d'instruction est competent pour sanctionner par une amende l'infraction a l'obligation imposee au temoin de faire une deposition, de sorte que la cour d'appel a excede ses pouvoirs ;
Alors que, d'autre part, le fait, par un temoin, de declarer qu'il n'a rien a dire ne constitue pas un refus de temoigner, lequel suppose une volonte deliberee d'entraver le cours de la justice ;
Alors que, encore, faute par la cour d'appel d'avoir recherche si le silence de M. X... Devant le magistrat n'etait pas justifie, comme l'avait admis le conseil de l'ordre, par l'article 105 du code de procedure penale qui interdit au juge d'instruction d'entendre comme temoin des personnes contre lesquelles il existe des indices graves et concordants de culpabilite, la cour d'appel n'a pas donne de base legale a sa decision ;
Alors que, enfin, faute d'avoir recherche si le silence de M. X... N'etait pas justifie par le secret professionnel auquel est tenu l'avocat, la cour d'appel aurait encore prive sa decision de base legale ;
Mais attendu que l'article 109 du code de procedure penale fait obligation a toute personne entendue comme temoin de faire une deposition, et qu'aux termes de l'article 106 du decret du 9 juin 1972, toute contravention aux lois ou aux reglements constitue une faute disciplinaire, independamment de la faculte qu'a le juge d'instruction de prononcer une amende contre le temoin qui refuse de deposer ;
Que la cour d'appel a constate qu'aux questions posees par le magistrat instructeur, et notamment a la question :"etiez-vous present a la manifestation qui s'est deroulee le 12 fevrier 1983 dans les rues de basse-terre", M. X... S'est borne a repondre :
"je n'ai rien a dire sur cette affaire" ;
Qu'elle ajoute que l'avocat n'a, pour expliquer cette attitude, allegue aucun motif ;
Qu'elle a pu en deduire que M. X..., qui avait ainsi refuse de faire une deposition sans invoquer aucune justification de ce refus tenant a l'article 105 du code de procedure penale ou au secret professionnel avait commis une contravention a la loi et un manquement a la delicatesse envers le juge d'instruction, constitutifs d'une faute disciplinaire ;
Que la juridiction du second degre a ainsi legalement justifie sa decision et que le moyen n'est fonde en aucune de ses branches ;
Sur le troisieme moyen : attendu que M. X... Reproche enfin a la cour d'appel d'avoir prononce contre lui la peine disciplinaire du blame, plus severe que celle de l'avertissement qu'avait requise le procureur general, et d'avoir ainsi commis un exces de pouvoir au regard des articles 106 et 107 du decret du 9 juin 1972 ;
Mais attendu que la juridiction du second degre saisie par l'effet devolutif de l'appel du procureur general, et sans etre tenue par les conclusions de ce magistrat, n'a pas excede ses pouvoirs en sanctionnant un comportement fautif par le prononce de l'une des peines prevues par l'article 107 du decret du 9 juin 1972 ;
Qu'ainsi le moyen ne peut etre accueilli ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi ;