Jurisprudence : CE Contentieux, 21-03-2001, n° 211461


CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

N°s 211461, 211582

- ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AEROPORT DE LYON SATOLAS

- M. LACARELLE

M. Mary, Rapporteur
Mme Prada Bordenave, Commissaire du Gouvernement

Séance du 28 février 2001
Lecture du 21 mars 2001

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 2e et 1ère sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 2e sous-section de la Section du contentieux

Vu 1°/, sous le n° 211461, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 août et 28 décembre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AEROPORT DE LYON SATOLAS, dont le siège est â la mairie d'Heyrieux (38540) ; l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AEROPORT DE LYON SATOLAS demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 15 juin 1999 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de l'autoroute A 432 entre Pusignan et Saint-Laurent-de-Mure, portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes de Pusignan, Colombier-Saugnieu et Saint-Laurent-de-Mure dans le département du Rhône, Villette-d'Anthon et Janneyrias dans le département de l'Isère, déclassant en route express nationale la section de l'autoroute de l'A 432 existante comprise entre le point de branchement de la future A 432 et le carrefour avec les RD 517 et RD 517 E et conférant le caractère de route express nationale à la liaison entre le point de jonction de la section nouvelle A 432 et le carrefour entre les RD 517 et RD 517E ;

Vu 2°/, sous le n° 211582, la requête, enregistrée le 16 août 1999, présentée par M. Bernard LACARELLE, demeurant 20, rue de l'Aquilon à Saint-Laurent-de-Mure (69720) ; M. LACARELLE demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 15 juin 1999 déclarant d'utilité publique et urgents les travaux de construction de l'autoroute A 432 entre Pusignan et SaintLaurent-de-Mure, portant mise en compatibilité des plans d'occupation des sols des communes de Pusignan, Colombier-Saugnieu-et Saint-Laurent-de-Mure dans le département du Rhône, Villette-d'Anthon et Janneyrias dans le département de l'Isère, déclassant en route express nationale la section de l'autoroute de l'A 432 existante comprise entre le point de branchement de la future A 432- et le carrefour avec les RD 517 et RD 517 E et conférant le caractère de route express nationale à la liaison entre le point de jonction de la section nouvelle A 432 et le carrefour entre les RD 517 et RD 517E ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, notamment son article 14 ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Choucroy, avocat de l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AEROPORT DE LYON-SATOLAS,
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 211461 et 211582 sont dirigées contre le même décret ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme ;

Sur légalité externe décret attaqué :

Considérant que le moyen tiré de ce que toutes les formalités de publicité de l'enquête n'auraient pas été respectées n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation : « L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I -Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : 1° Une notice explicative (...) La notice explicative indique l'objet de l'opération et les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de l'insertion du projet dans l'environnement, le projet soumis à l'enquête a été retenu (...) » ; qu'il ressort des pièces du dossier que la notice explicative figurant dans le dossier d'enquête publique décrit les principaux partis envisagés, au nombre desquels ne figurait pas le simple aménagement des voies existantes, et expose notamment les raisons pour lesquelles le tracé à l'ouest de l'aéroport n'a pas été retenu ; que la notice a pu faire état, sans irrégularité, du projet de création de deux nouvelles pistes à l'ouest de l'aéroport, pour écarter ce dernier tracé, alors même que ce projet n'avait pas encore fait l'objet d'une décision ; qu'enfin, à supposer même qu'un déplacement du tracé ait été étudié, ce tracé, dont l'association requérante ne prétend pas qu'il présentait de différence significative avec celui qu'indique le dossier d'enquête, ne constituait pas un parti distinct du tracé retenu et n'avait pas à être mentionné dans la notice explicative ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977 modifié : « Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. / L'étude d'impact présente successivement : 1 ° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires-et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et les paysages, le `sol, l'eau, l'air ; le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, (...) et le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la sécurité ou la salubrité publique (...) ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement (...) / Lorsque la totalité des travaux prévus au programme est réalisée de manière simultanée, l'étude d'impact doit porter sur l'ensemble du programme. Lorsque la réalisation est échelonnée dans le temps, l'étude d'impact de chacune des phases de l'opération doit comporter une appréciation des impacts de l'ensemble du programme » ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact, qui comprend une analyse de l'état initial du site retenu et de son environnement, comportait des indications suffisantes sur les incidences de l'ouvrage sur la faune, la flore ainsi que sur le régime des eaux, et notamment, sur les risques de pollution des eaux souterraines ; que l'étude d'impact a suffisamment exposé les risques de pollution atmosphérique résultant du trafic aérien à proximité de l'aéroport ; que l'appréciation des nuisances sonores a été réalisée en fonction d'hypothèses de flux de véhicules cohérentes avec l'ouverture du tronçon litigieux ; que l'étude a pu, sans irrégularité, ne pas comporter l'appréciation des impacts sur l'environnement de l'augmentation prévisible du trafic à long terme ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les travaux faisant l'objet de la déclaration d'utilité publique litigieuse, portent sur la construction de la section de l'autoroute A432 entre Pusignan et Saint-Laurent-de-Mure, destinée à achever la liaison entre les autoroutes A42 à A43 ; que cette opération, prévue par le schéma directeur routier national approuvé par le décret susvisé du 1er avril 1992, est distincte de celle, non encore arrêtée, consistant à prolonger l'autoroute A432 vers le Nord en vue d'assurer la jonction des autoroutes A42 et A46 ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le dossier d'enquête publique, en ne mentionnant pas et en n'étudiant pas les effets de cette prolongation, a méconnu l'article R. 11-3 du code de l'expropriation publique, l'article 2 du décret du 2 octobre 1977 et l'article 14 de la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs ;

Sur la légalité interne du décret attaqué :

Considérant qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant que le projet déclaré d'utilité publique a pour objet, d'une part, de répondre à l'accroissement du trafic routier venant du nord et de l'est en direction du Sud de la France, d'autre part, de contribuer à une meilleure desserte de l'aéroport de Lyon-Satolas et d'améliorer la circulation entre les communes situées à l'est de Lyon, ainsi qu'entre ces communes et l'agglomération lyonnaise ; que cette opération présente un caractère d'utilité publique ; que la seule circonstance que le prolongement de l'autoroute A432 vers l'autoroute A46 donnerait au projet une meilleure rentabilité n'est pas de nature à ôter à ce dernier son caractère d'utilité publique ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'eu égard à l'importance de l'opération et aux précautions prises, les inconvénients que cette opération comporte soient excessifs par rapport à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant que si la requérante soutient qu'un autre tracé était possible et aurait entraîné moins d'inconvénients, il n'appartient pas au Conseil d'État statuant au contentieux de se prononcer sur l'opportunité dû choix opéré, à cet égard, par l'administration ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article R. 15-1 du code de l'expropriation que lorsqu'il y a urgence à prendre possession des biens expropriés, cette urgence est constatée par l'acte déclaratif d'utilité publique ; que les travaux projetés justifient la mise en oeuvre de la procédure d'urgence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES. NUISANCES DE L'AÉROPORT DE LYON-SATOLAS et M. LACARELLE ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret attaquée ;

Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AÉROPORT DE LYON-SATOLAS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AÉROPORT DE LYON-SATOLAS et de M. LACARELLE sont rejetées.

Articles 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION CONTRE L'EXTENSION ET LES NUISANCES DE L'AÉROPORT DE LYON-SATOLAS, à M. Bernard LACARELLE et au ministre de l'équipement, des transports et du logement.


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