CONSEIL D'ETAT
Statuant au Contentieux
N° 74418
Ministre de l'intérieur et de la décentralisation
contre
Melki
Lecture du 01 Juillet 1987
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux)
Vu le recours du ministre de l'intérieur et de la décentralisation enregistré le 27 décembre 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement n° 84-669 en date du 7 novembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé pour excès de pouvoir la décision du préfet, commissaire de la République du département d'Ille-et-Vilaine, en date du 16 novembre 1983, rejetant la demande d'autorisation de détention d'une arme de 4ème catégorie présentée par M. Gérard MELKI ; 2°) rejette la demande présentée par M. MELKI devant le tribunal administratif de Rennes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret du 18 avril 1939 modifié par l'ordonnance du 7 avril 1958 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 73-364 du 12 mars 1973 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu : - le rapport de M. Durand-Viel, Maître des requêtes, - les conclusions de Mme Laroque, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il ressort des termes mêmes de sa décision en date du 16 novembre 1983 que, pour rejeter la demande d'autorisation d'acquisition et de détention d'une arme de 4ème catégorie présentée par M. MELKI, le préfet, commissaire de la République d'Ille-et-Vilaine, a rappelé à l'intéressé qu'une telle autorisation ne pouvait être accordée qu'à titre exceptionnel aux personnes dont la situation nécessite la mise en oeuvre de mesures particulières de sécurité pour leur défense personnelle ; qu'après avoir exposé ce motif de droit, il a fait connaître à M. MELKI que l'examen de son dossier et le raccordement à son domicile au réseau téléphonique ne permettaient pas de regarder ces conditions comme remplies ; que cette décision comportait ainsi l'énoncé des considérations de fait qui en constituent le fondement ; que, par suite, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler ladite décision, le tribunal administratif de Rennes a accueilli un moyen tiré de ce qu'elle ne contenait pas la motivation exigée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de la demande de M. MELKI ;
Sur la légalité interne : Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 15 du décret du 18 avril 1939 pris en vertu de la loi d'habilitation du 19 mars 1939 et dans la rédaction que lui a donnée l'ordonnance n° 58-917 du 7 octobre 1958 "l'acquisition ou la détention d'armes ou de munition de la 4ème catégorie sont interdites, sauf autorisation. Les conditions d'autorisation seront fixées par décret" ; qu'après avoir rappelé ce principe général d'interdiction, le décret n° 73-364 du 12 mars 1973 mentionne, dans son article 16, les différentes catégories de personnes auxquelles aucuneautorisation ne peut être délivrée et dispose, en son article 22, que peuvent être autorisées à acquérir ou à détenir des armes de la 4ème catégorie les personnes âgées de 21 ans au moins à raison d'une seule arme ; qu'eu égard à l'interdiction générale posée par le législateur, une autorisation prise sur la base dudit article 22 ne peut légalement être autorisée qu'aux personnes sur lesquelles pèsent des risques sérieux pour leur sécurité personnelle ; qu'il suit de là que M. MELKI n'est pas fondé à invoquer un droit général des citoyens à détenir une arme de défense ; que la circonstance qu'il n'entre dans aucune des catégories de personnes mentionnées à l'article 16 du décret du 12 mars 1973 ne saurait davantage lui ouvrir un tel droit ; Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée ne repose pas sur des faits matériellement inexacts ; Considérant, enfin, qu'en estimant que les faits invoqués par M. MELKI ne justifiaient pas la délivrance de l'autorisation demandée au titre de l'article 22 du décret du 12 mars 1973, le préfet, commissaire de la République d'Ille-et-Vilaine, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ; que la demande présentée par M. MELKI devant le tribunal administratif de Rennes doit être rejetée ;
Article ler : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Rennes en date du 7 novembre 1985 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. MELKI devant le tribunaladministratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. MELKI.