Jurisprudence : TA Marseille, du 16-07-2013, n° 1301318

TA Marseille, du 16-07-2013, n° 1301318

A9561KIX

Référence

TA Marseille, du 16-07-2013, n° 1301318. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8899754-ta-marseille-du-16072013-n-1301318
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Abstract

Le tribunal administratif de Marseille précise la limite d'âge de droit commun requise pour l'exercice de la présidence d'un établissement public de l'Etat, dans un jugement rendu le 16 juillet 2013 (TA Marseille, 16 juillet 2013, n° 1301318).




TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MARSEILLE

N° 1301318

M. Didier Réault

M. Jorda

Rapporteur

M. Delvolvé

Rapporteur public

Audience du 2 juillet 2013

Lecture du 16 juillet 2013


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Marseille


44-04

28-005-03

Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés au greffe du Tribunal administratif de Marseille les 26 février, 5 et 18 juin 2013, présentés pour M. Aa Ab, demeurant … … … … … … … … … … (…), par Me Mabile, avocat ;

M. Réault demande au Tribunal :

- à titre principal, d’annuler la délibération du conseil d’administration du parc national des calanques et les opérations électorales en date du 14 janvier 2013 relatives à l’élection de Mme Ac comme présidente de ce conseil d’administration ;

- à titre subsidiaire, de déclarer nulle et non avenue la délibération du conseil d’administration du parc national des calanques du 14 janvier 2013 ;

- d’enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de convoquer un nouveau conseil d’administration pour organiser une nouvelle élection à la présidence du conseil d'administration du parc national des calanques, hors la présence de Mme Ac ;

- de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 ;

- de condamner au remboursement des dépens s’élevant à 75 euros de timbres ;

II soutient que :

- sa requête est recevable; en effet, les élections à la présidence du conseil d’administration d’un établissement public national sont de nature administrative ; la délibération proclamant les résultats ou, à défaut, la décision orale explicite prise par le préfet depuis le 14 janvier 2013 et notamment à l’occasion du conseil d’administration extraordinaire du 29 janvier 2013 de ne pas organiser de nouvelles élections constitue une décision prise d’office ; en toute


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hypothèse, une décision implicite de rejet qui a lié le contentieux en cours est née le … … … du silence gardé pendant plus de deux mois par le préfet sur sa demande de rapporter l’élection contestée en date du 13 mars 2013 ; sa contestation, bien que relative à une opération électorale, est soumise en l’absence de disposition spéciale dérogatoire au délai de recours de droit commun de deux mois en application de l’article R. 421-1 du code de justice administrative🏛 ; s’agissant de la délibération, le délai court à compter du 14 janvier 2013 à raison de sa participation à la délibération en vertu de la théorie de la connaissance acquise ; il a intérêt à agir en sa qualité notamment de candidat non élu ;

- la délibération est insuffisamment motivée dès lors qu’elle omet de viser l’arrêté préfectoral du 19 septembre 2012 par lequel il est constaté qu’ont adhéré à la charte du parc national des calanques les communes de Marseille, Cassis et La Penne-sur-Huveaune ;

- la délibération attaquée est entachée d'erreur de droit dès lors que Mme Ac, âgée de 65 ans et 11 mois lors de l’élection, ne pouvait être candidate à la présidence du conseil d’administration du parc national des calanques pour avoir atteint la limite d’âge de 65 ans qui lui demeurait applicable, en vertu des dispositions législatives des articles 1“ alinéa 1 et 7 de la loi du 13 septembre 1984🏛 modifiés par les articles 28 et 29 de la loi du 9 novembre 2010🏛🏛 ; en effet, la réforme des retraites de 2010 a porté de manière progressive la limite d’âge dans la fonction publique de 65 à 67 ans; le législateur a entendu soumettre les présidents d’établissements publics de l’Etat aux mêmes règles de progressivité d’élévation de la limite d’âge que celle désormais applicable aux fonctionnaires, ainsi qu’il résulte des débats parlementaires ; en particulier, l’article 29 susmentionné doit être lu en combinaison avec les autres dispositions de la loi qui ont prévu une progressivité du relèvement de la limite d’âge pour ne pas bouleverser la situation juridique des personnes les plus proches de cette limite ; ainsi, l’article 28 susmentionné a précisé les conditions du relèvement de la limite d’âge de 65 ans à 67 ans, selon un principe générationnel de relèvement progressif de 4 mois par an ; le décret d’application du 28 juin 2011 prévoit en son article 3 que pour les personnes nées avant le 1* juillet 1951, ce qui est le cas de Mme Ac, la limite d’âge est maintenue à 65 ans ; et la loi du 21 décembre 2011🏛 qui a accéléré le dispositif transitoire de progression en relevant les bornes d’âge de 4 à S mois à compter de 2012 n’a pas modifié la situation de Mme Ac ; qu’à défaut, un tel cas dérogerait à la pratique administrative relative à la survenance de la limite d’âge des présidents en exercice de conseils d'administration de parcs nationaux ;

- à titre subsidiaire, la délibération est inexistante compte tenu de son adoption en méconnaissance d’une situation assimilée à celle de la survenance de la limite d’âge d’un fonctionnaire ;

«les trois défendeurs ont acquiescé aux faits ;

Vu les mises en demeure adressées le 17 mai 2013 au préfet des Bouches-du-Rhône, à la SELARL Grimaldi-Molina et associés et à Mme Ac en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative🏛 et les avis de réception de ces mises en demeure ;

Vu l'ordonnance en date du 3 juin 2013 fixant la clôture d'instruction au 25 juin 2013 en application de l’article R. 613-1 du code de justice administrative🏛 ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juin 2013, présenté pour le parc national des calanques, par Me Grimaldi, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. Ab d’une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable ; en effet, elle est dirigée contre une élection, et non contre une décision ; le requérant se borne à contester les résultats des opérations


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électorales sans faire état d’une décision préalable émanant soit de l’autorité qui a institué la représentation pour la désignation de laquelle l’opération électorale contestée a été organisée, soit de l’autorité responsable sur le plan local de l’organisation et du déroulement de cette opération, en l’occurrence le préfet des Bouches-du-Rhône pris en sa qualité de commissaire du gouvernement ; le contentieux est d’est moins lié que ce défaut de recours administratif préalable obligatoire n’est pas régularisable et, par ailleurs, que la requête est mal dirigée en tant qu’elle l’est contre le parc national des calanques défendeur et non contre le préfet ;

- à titre subsidiaire, la requête n’est pas fondée ;

- l’absence de mention de l’arrêté préfectoral du 19 septembre 2012 dans les visas de la délibération en cause est sans incidence sur la légalité de la décision ;

- l’élection n’est pas entachée d'erreur de droit dans la mesure où le décret 2011-757 du 28 juin 2011🏛 a été abrogé ;

- par ailleurs, le requérant opère une confusion entre les conditions d'éligibilité du président d’un établissement public, pour lesquelles aucun texte ne fixe de limite d’âge, et les conditions d’exercice du mandat du président, pour lesquelles une limite d’âge est prévue ; ainsi les articles 1 et 7 de la loi du 13 septembre 1984🏛 ne sont pas applicables aux candidats à une fonction élective ; l’article 6 de l’article L. 331-8 du code de l’environnement🏛 a trait uniquement au maintien en fonctions du président du conseil d'administration atteint par la limite d’âge et non aux conditions mises à son élection ;

- enfin, à supposer que le tribunal estime que les articles 1 et 7 de la loi du 13 septembre 1984 soient applicables à des candidats à une fonction élective, ces articles ne sont pas applicables aux personnes n’ayant ni la qualité de fonctionnaires, ni celle d’agent public, telles que Mme Ac, qui est élue locale, et l’assimilation par analogie n’est pas fondée ;

- l’article 1* et l’article 7 de la loi du 13 septembre 1984 fixent une limite d’âge à 67 ans sans distinguer selon un régime de progressivité de relèvement de la limite d’âge en fonction de l’année de naissance de l'intéressé ;

Vu l'ordonnance en date du 25 juin 2013 décidant la réouverture de l'instruction, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative🏛 ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2013, présenté par le préfet des Bouches-du- Rhône, qui demande au tribunal de rejeter la requête ;

IL fait valoir que :

- la délibération du 14 janvier 2013 ne constitue que la proclamation des résultats de l’élection formalisant les opérations y afférentes et non une décision ;

- les opérations électorales ont été régulières ;

- le requérant n’a pas contesté dans les délais ia délibération en vue d’une seconde délibération en application des dispositions de l’article R. 331-44 du code de l’environnement🏛 ;

- il existe une autre interprétation qui a le mérite de prendre en compte la spécificité des fonctions de président de parc en vertu de laquelle la limite d’âge posée par la loi est de soixante- sept ans ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 juin 2013, présenté pour Mme Ac, par Me Sindres, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. Ab de la somme de 3000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l’acquiescement aux quatre faits en litige est avéré en tant que de besoin ;


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- la requête en annulation est irrecevable ; en matière d’élections dites administratives, la proclamation des résultats d’une opération électorale n’est pas en soit une décision, au sens des dispositions de l’article R. 421-1 du code de justice administrative ; seule la décision prise par l'autorité ayant organisé l’élection, soit d’office, soit sur réclamation préalable, est susceptible d’être déférée au juge administratif ; en l’occurrence, la réclamation préalable formée en cours d’instance auprès de l’autorité ayant organisé une élection administrative n’est pas susceptible de régulariser une requête dirigée antérieurement contre le scrutin ;

- l’omission d’un visa est sans influence sur la légalité de la décision contestée ;

- une question prioritaire de constitutionnalité est posée par mémoire distinct ;

- à la date de l'élection de Mme Ac, à laquelle doit s’apprécier son éligibilité, soit le 14 janvier 2013, le décret du 28 juin 2011🏛 dont le requérant se prévaut avait été abrogé par le décret 2011-2103 du 30 décembre 2011🏛 ;

-le décret du 28 juin 2011 ne règle que la question de la période transitoire afférente au relèvement de la limite d’âge des fonctionnaires et ouvriers de l’Etat, et non la question de la limite d’âge des présidents d’établissements publics ;

- le décret 2011-2103 du 30 décembre 2011 n’est pas un décret d’application de l’article 29 II de loi du 9 novembre 2010 ;

- à supposer qu’il s’agisse d’un décret d’application de l’article 29 IT de la loi de 2010, l’article 8 du nouveau décret ne règle, à titre transitoire, que la question de la progressivité d'application de la nouvelle limite d’âge de 67 ans aux agents atteignant l’âge d’ouverture des droits à la retraite entre le 1” janvier 2012 et le 31 décembre 2014 et à ceux atteignant cet âge entre le 1“ juillet et le 31 décembre 2011 ; ce décret ne règle en rien la question de la limite d’âge des agents ayant atteint l’âge de 60 ans avant le 1” juillet 2011 ; or, tel est le cas de Mme Ac, née en 1947, qui a été admise à faire valoir ses droits à la retraite en 2009 ; sa situation demeurait donc régie par le droit commun ; dès lors, à la date de l’élection, aucun décret ne venait diminuer à titre transitoire la limite d’âge de droit commun requise pour l’exercice de sa présidence d’un établissement public de l’Etat, à savoir 67 ans, telle qu’elle résulte de l’article 1“ alinéa 1 de la loi 84-834 du 13 septembre 1984 modifiée ;

- le moyen tiré de l’inexistence de l’acte est inopérant en ce qu’il se réfère à des règles distinctes ;

Vu, enregistré le 25 juin 2013, le mémoire distinct présenté pour Mme Ac, par Me Sindres, qui demande au tribunal, à l’appui de son mémoire en défense de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité visant à savoir si les dispositions de l'article 29 II de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites portent atteinte aux droits et libertés fondamentales de la personne garantis par la Constitution s’agissant du principe de clarté de la loi découlant de l’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 en ce qu’elles imposent au titre de la détermination de la limite d’âge d’accès aux fonctions de dirigeants des établissements publics de l’Etat les mêmes conditions que celles posées par l’article 28 II de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 au titre du dispositif transitoire de progressivité d’application du relèvement des bornes d’âge des fonctionnaires civils régis par le statut général des fonctionnaires de l’Etat et des collectivités territoriales ;

Il soutient que :

- l’article 29 II de la loi n° 2010-1330 est applicable au litige ;

- la disposition contestée n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dès lors que si le Conseil constitutionnel a déclaré conforme l’article 29 de ladite loi dans le dispositif de la décision rendue dans le cadre de son contrôle préventif, il n’a envisagé que son I dans les motifs de celle-ci ;

- la question posée présente un caractère sérieux ;


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Vu le nouveau mémoire, enregistré le 27 juin 2013, présenté pour M. Ab, par Me Mabile, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens en faisant valoir notamment la recevabilité de son recours ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 28 juin 2013, présenté pour le parc national des calanques, par Me Grimaldi, non communiqué en application de l’article R. 611-1 du code de justice administrative🏛, qui maintient ses précédentes écritures notamment au titre de l’irrecevabilité de la requête ;

Vu l’arrêté attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son article 61-1 ;

Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le

Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979🏛 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée🏛 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée🏛 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984🏛 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ;

Vu la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 modifiée🏛 portant réforme des retraites ;

Vu la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011🏛 de financement de la sécurité sociale pour 2012, notamment son article 88 ;

Vu le décret n° 2011-2020 du 29 décembre 2011 relatif aux parcs nationaux ;

Vu le décret n° 2011-2103 du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d’âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l’Etat ;

Vu le décret n° 2012-507 du 18 avril 2012🏛 créant le parc national des calanques ;

Vu le code de justice administrative ;


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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juillet 2013 :

- le rapport de M. Jorda, rapporteur ;

- les conclusions de M. Delvolvé, rapporteur public ;

- les observations de Me Mabile, pour M. Ab, celles de Me Grimaldi, pour le parc national des calanques, de Me Sindres pour Mme Ac, et celles de M. Ad, représentant le préfet des Bouches-du-Rhône ;

1. Considérant que M. Ab demande à titre principal l’annulation des opérations électorales en date du 14 janvier 2013 par lesquelles le conseil d’administration du parc national des calanques a procédé à l’élection de son président ;

Sur la recevabilité de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : ‘Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours contre une décision (.)" ; qu'en vertu de cette disposition, à laquelle aucune disposition réglementaire n'a dérogé pour l'élection en cause, la juridiction administrative ne peut connaître de cette opération électorale que par la voie d'un recours formé contre une décision prise d'office ou sur réclamation préalable, suivant les cas, soit par l'autorité qui a institué la représentation pour la désignation de laquelle l'opération électorale contestée a été organisée, soit par l'autorité responsable, sur le plan local, de l'organisation et du déroulement de cette opération ; qu’il s'ensuit que la requête de M. Ab ne peut être regardée comme dirigée contre la délibération du 14 janvier 2013, dès lors que la proclamation des résultats ne constitue pas une décision au sens des dispositions précitées, ni contre les propos du préfet pris en sa qualité de commissaire du gouvernement tendant précisément à relever l’impossibilité pour lui de prendre une décision postérieurement à cette proclamation ;

3. Considérant, pour autant, qu’en l’absence en l’occurrence de disposition spéciale instituant un recours administratif préalable obligatoire, aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un recours de plein contentieux à une date où il n’avait présenté aucune demande en ce sens devant l’administration lorsqu’il a formé, postérieurement à l’introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l’administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, et ce quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration ; que lorsque ce mémoire en défense conclut à titre principal, à l’irrecevabilité faute de décision préalable et, à titre subsidiaire seulement, au rejet au fond, ces conclusions font seulement obstacle à ce que le contentieux soit lié par ce mémoire lui-même ;

4. Considérant qu’une fin de non-recevoir est opposée à la recevabilité de la requête de M. Ab tirée ce que celle-ci n’aurait été précédée d’aucune demande préalable à l’administration susceptible d’avoir fait naître une décision contre laquelle seraient dirigées ses conclusions ; qu’il ressort toutefois des pièces jointes au mémoire complémentaire de M. Ab que ce dernier a adressé le 13 mars 2013 à l’administration compétente une demande visant à rapporter l’élection contestée et, par voie de conséquence, à en organiser une nouvelle ; que le silence gardé par l’administration, défenderesse en la cause, a fait naître une décision de rejet à l’issue d’un délai de deux mois, avant que le tribunal de céans ne statue ; que, dès lors, aucune


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fin de non-recevoir, tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée aux conclusions relatives à cette demande de M. Ab, qui doit donc être regardé comme sollicitant à titre principal l’annulation des opérations en date du 14 janvier 2013 relatives à l’élection de Mme Ac comme présidente du conseil d'administration du parc national des calanques ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

5. Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que le tribunal administratif saisi d’un moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d’Etat et procède à cette transmission si est remplie la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux ; que le second alinéa de l’article 23-2 de la même ordonnance précise que : « En tout état de cause, la juridiction doit, lorsqu'elle est saisie de moyens contestant la conformité d’une disposition législative, d'une part, aux droits et libertés garantis par la Constitution et, d'autre part, aux engagements internationaux de la France, se prononcer par priorité sur la transmission de la question de constitutionnalité au Conseil d'Etat

6. Considérant que Mme Ac soutient que les dispositions de l'article 29 II de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 sont contraires au principe à valeur constitutionnelle de clarté de la loi issue de l’article 34 de la Constitution en assimilant la limite d’âge d’accès aux fonctions de dirigeants des établissements publics de l’Etat à celle applicable aux fonctionnaires dans le cadre du dispositif transitoire du relèvement progressif des bornes d’âge posé par l’article 28 II de la même loi ; que, toutefois, la méconnaissance des objectifs de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi imposant au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques, qui découle au demeurant des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et dont il est indissociable, ne peut en elle-même, être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution ; que, dès lors, le principe invoqué n’est pas au nombre, au sens et pour l’application de l’article 23-1 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, des droits et libertés garantis par la Constitution ;

Sur les conclusions en annulation et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

7. Considérant qu’aux termes, d’une part, des dispositions de l’article L. 331-8 du code de l’environnement : « L'établissement public national créé par le décret en Conseil d'État prévu à l'article L. 331-2 assure la gestion et l'aménagement du parc national. / Cet établissement est administré par un conseil d'administration composé de représentants de l'État, de représentants des collectivités territoriales intéressées et de leurs groupements, d'un représentant du personnel de cet établissement ainsi que de membres choisis pour partie pour leur compétence nationale et pour l'autre partie pour leur compétence locale dans le domaine d'activité de l'établissement. Les membres choisis en fonction de leur compétence comprennent notamment des représentants des associations de protection de l'environnement, des propriétaires, des habitants et des exploitants, des professionnels et des usagers. Le nombre et le mode de désignation des membres


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du conseil sont fixés par le décret de création de l'établissement. / Les présidents de conseils régionaux et généraux intéressés ou leurs représentants, les maires des communes dont la surface de territoire comprise dans le coeur du parc national est supérieure à 10 % de la superficie totale du coeur de ce parc ainsi que le président du conseil scientifique de l'établissement public du parc national sont membres de droit du conseil d'administration. / Les administrateurs représentant les collectivités territoriales intéressées et leurs groupements, y compris les membres de droit, et les membres choisis pour leur compétence locale détiennent la moitié au moins des sièges du conseil d'administration. / Un président est élu au sein du conseil d'administration. Il anime et préside les travaux d'élaboration, de suivi et d'évaluation de la charte du parc national, Il représente, avec le directeur, l'établissement dans la mise en oeuvre de la politique de communication, de partenariat et de relations internationales définie par le conseil d'administration. / La limite d'âge prévue à l'article 7 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ne fait pas obstacle à ce que le président soit maintenu en fonction au-delà de cette limite, jusqu'au terme de son mandat. (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 331-29 du même code🏛 : « Le conseil d'administration élit en son sein le président du conseil d'administration et deux vice-présidents. / Le président du conseil d'administration anime et coordonne les activités du conseil d'administration et du bureau ainsi que les travaux de suivi, d'évaluation, de modification et de révision de la charte du parc national. / Il assure la mise en oeuvre de la charte dans l'aire d'adhésion. » ; et qu’aux termes de l’article R. 331-30 dudit code : « Le président du conseil d'administration est élu pour une durée de six ans renouvelable. »; qu’il résulte de ces dispositions que l'organisation des élections à la présidence du conseil d'administration du parc national des calanques relève des autorités de cet établissement public administratif ;

8. Considérant, d’autre part, que l’alinéa premier de l’article 1” de la loi n° 84-834 modifiée susvisée dispose que : « Sous réserve des reculs de limite d'âge pouvant résulter des textes applicables à l'ensemble des agents de l'Etat, la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'Etat est fixée à soixante-sept ans lorsqu'elle était, avant l'intervention de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010🏛 portant réforme des retraites, fixée à soixante-cing ans. (….) » ; qu’aux termes de l’article 7 de la même loi : « En l'absence de dispositions particulières prévues par les textes législatifs ou réglementaires régissant l'établissement, la limite d'âge des présidents de conseil d'administration, directeurs généraux et directeurs des établissements publics de l'Etat est fixée conformément au premier alinéa de l'article 1”. Toutefois, les fonctionnaires ou magistrats dont la limite d'âge est fixée à soixante-huit ans en application de l'article Ier continuent à présider, jusqu'à ce qu'ils atteignent cette limite, les établissements publics dont les statuts leur confèrent de droit la présidence. / Les règles relatives à la limite d'âge ne font pas obstacle à ce que les titulaires des fonctions mentionnées à l'alinéa précédent soient maintenus en fonction, au-delà de cette limite, pour continuer à les exercer à titre intérimaire. (...) » ; que l’article 28 de la loi n° 2010-1330 modifiée susvisée prévoit que : « /. - Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge était de soixante-cing ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi et nés à compter du 1” janvier 1955, la limite d'âge est fixée à soixante-sept ans. / JT. - Cette limite d'âge est fixée par décret dans la limite de l'âge mentionné au I pour les fonctionnaires atteignant avant le 1” janvier 2015 l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite applicable antérieurement à la présente loi et, pour ceux atteignant cet âge entre le 1” juillet 2011 et le 31 décembre 2014, de manière croissante à raison : / 1° De quatre mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le ler juillet et le 31 décembre 2011 ; / 2° De cinq mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le ler janvier 2012 et le 31 décembre 2014. II. - Pour les fonctionnaires nés entre le 1” juillet 1951 et le 31 décembre 1955 dont la limite d'âge était fixée à soixante-cing ans avant l'entrée en vigueur de la présente loi et qui remplissent les conditions prévues aux 1° à 3° du IV de l'article 20, l'âge


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auquel s'annule le coefficient de minoration prévu à l'article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite🏛 ne peut être supérieur à soixante-cing ans, par dérogation au III de l'article 66 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003🏛 précitée. Pour l'application aux fonctionnaires du 1° du IV de l'article 20, les enfants sont ceux énumérés au II de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite🏛. (…..) » ; et qu’aux termes de l’article 29 de la même loi : « L - À modifié les dispositions suivantes : / - Loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 / Art. 1, Art. 1-2, Art. 7 / IL. — L'évolution de la limite d'âge mentionnée aux 1° à 3° du I est fixée par décret dans les conditions définies au II de l'article 28 de la présente loi. » ;

9. Considérant que M. Ab soutient que le résultat de l’élection à la présidence du conseil d’administration du parc national des calanques en faveur de Mme Ac est entaché d’erreur de droit à raison de l’inéligibilité de Mme Ac dès lors que celle-ci ne pouvait faire acte de candidature pour avoir atteint la limite d’âge qui lui demeurait applicable, en vertu des dispositions législatives des articles 1” alinéa 1 et 7 de la loi du 13 septembre 1984 modifiés par les articles 28 et 29 de la loi du 9 novembre 2010 précités ; qu’en l’absence de dispositions particulières prévues par les textes législatifs ou réglementaires régissant le parc national des calanques, il résulte des dispositions précitées applicables aux présidents de conseil d'administration des établissements publics de l'Etat que pour les personnes nées avant le 1” juillet 1951, la limite d’âge demeure fixée à soixante-cinq ans ; qu’il est constant qu’à la date de l’élection du président du conseil d’administration du parc national des calanques, Mme Ac était dans ce cas ; qu’atteinte par la limite d’âge, elle était donc inéligible ; que dès lors, sans qu’il soit besoin de statuer sur les conclusions présentées à titre subsidiaire, M. Ab est fondé à demander l'annulation des opérations en date du 14 janvier 2013 relatives à l’élection de Mme Ac comme présidente du conseil d’administration du parc national des calanques ;

Sur les conclusions en injonction :

10. Considérant que le présent jugement implique nécessairement compte tenu du motif d'annulation retenu qu’il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder à l’organisation d’une nouvelle élection à la présidence du conseil d’administration du parc national des calanques ; que dans les circonstances particulières de l’espèce, il y a lieu de lui enjoindre d’y procéder dans les meilleurs délais à compter de la notification du présent jugement ; qu’en revanche, compte tenu de sa qualité de membre, il n’y à pas lieu de convoquer à cet effet un conseil d’administration sans Mme Ac ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article R. 761-1 du code de justice administrative🏛 :

11. Considérant qu’aux termes de l’article R. 761-1 du code de justice administrative : « Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens. » ;

12. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l’Etat, partie perdante, le paiement au requérant d’une somme de 35 euros au titre des dépens exposés par M. Ab dans le cadre de la contribution pour l’aide juridique ; qu’en revanche, la partie requérante n’établissant pas avoir engagé d’autres dépens dans la présente instance, sa demande de versement à ce titre ne peut donc qu’être rejetée ;


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Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie Pperdante, à payer à l'autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

14. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. Ab et non compris dans les dépens ; qu’en revanche, le parc national des calanques et Mme Ac étant parties perdantes, leurs conclusions fondées sur les dispositions précitées ne peuvent qu’être rejetées ;


DÉCIDE:

Article 1” : Il n’y a pas lieu de transmettre au Conseil d’Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme Ac.

Article 2 : Les opérations du 14 janvier 2013 relatives à l’élection de Mme Ac comme présidente du conseil d’administration du parc national des calanques sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder à l’organisation d’une nouvelle élection à la présidence du conseil d'administration du parc national des calanques dans les meilleurs délais à compter de la notification du présent jugement.

Article 4 : L’Etat versera à M. Ab la somme de 35 (trente-cinq) euros sur le fondement des dispositions de l’article R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : L’Etat versera la somme de mille cinq cents (1 500) euros à M. Ab en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7: Les conclusions présentées par le parc national des calanques et Mme Ac au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


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Article 8 : Le présent jugement sera notifié à M. Aa Ab, au ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, au parc national des calanques et à Mme Ae Ac.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.


Délibéré après l'audience du 2 juillet 2013, où siégeaient :

- M. Portail, président de chambre,

- M. Jorda, premier conseiller,

- Mme Gougot, premier conseiller.

Assistés de M. Camolli, greffier.

Lu en audience publique, le 16 juillet 2013.

Le rapporteur, Le président,

SIGNE SIGNE

Af A Ag B

Le greffier,

SIGNE

Ah C

La République mande et ordonne au ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Loi, 2003-775, 21-08-2003 Ordonnance, 58-1067, 07-11-1958 Article, L761-1, CJA Loi, 2011-1906, 21-12-2011 Loi, 83-634, 13-07-1983 Loi, 2010-1330, 09-11-2010 Article, R421-1, CJA Loi, 2010-1330 Loi, 84-834, 13-09-1984 Article, R761-1, CJA Loi, 79-587 Article, R613-1, CJA Article, R613-4, CJA Décret, 2011-2103, 30-12-2011 Article, L331-8, C. envir. Loi, 84-16 Décret, 2011-757 Article, R331-44, C. envir. Décret, 2011-2020, 29-12-2011 Décret, 2012-507, 18-04-2012 Parc national Établissement public Disposition spéciale Connaissance acquise Délibération motivée Atteinte de la limite d'âge Pratiques administratives Avis de réception Décision préalable Autorité responsable Plan local Conditions d'éligibilité Régularisation d'une requête Question prioritaire de constitutionnalité (qpc) Nouveau décret Établissement public de l'etat Moyen inopérant Libertés fondamentales Dispositif transitoire Fonctionnaires des collectivités territoriales Nouveau mémoire Acte administratif Dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'etat Travaux publics Déroulement des opérations Décision implicite de rejet Demande préalable Valeur constitutionnelle Aménagement d'un parc Activité d'un établissement Association de protection Mode de désignation Siège du conseil Coordination des travaux Directeur d'un établissement public Pension de retraite Texte législatif ou réglementaire Meilleurs délais Contribution pour l'aide juridique Délai à compter de la notification du jugement

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