Jurisprudence : TA Poitiers, du 21-12-2011, n° 1000453




TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE POITIERS

N°1000453

SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN

Commune de Royan

SCA Veolia eau

Le M. Campoy

Rapporteur

M. Bonnelle

Rapporteur public


er

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Tribunal administratif de Poitiers

(2ème chambre)


Audience du 8 décembre 2011

Lecture du 21 décembre 2011

39-02-02-01

39-08-03-02

C


Vu la requête, enregistrée le 24 février 2010 sous le n°1000453, présentée pour la société anonyme (SA) COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN, dont le siège social est 1 avenue de Valombre à Royan Cedex (17201), représentée par son président directeur général en exercice, par la SELARL d’avocats Cabanes - Cabanes Neveu associés ;

La SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN demande au tribunal :

1°) d’annuler le contrat d'affermage relatif au service public de production et de distribution d’eau potable conclu entre la commune de Royan et la société en commandite par actions (SCA) Véolia eau ;

2°) de condamner la commune de Royan à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 ;

Elle soutient :

- qu’elle a été victime d'une différence de traitement avec la SCA Véolia ;

- que les critères de choix retenus ont été irréguliers ;

- que ces critères ont été décomposés en sous critères qui n'ont jamais été portés à la connaissance des candidats ;


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- que les conditions de présentation des variantes ont été irrégulières ;

- que la commission de délégation a sollicité de manière irrégulière des compléments d'information auprès des candidats ;

- que le maire a entaché la procédure d’irrégularité en réclamant des précisions et compléments d’informations des candidats après avoir sollicité leurs offres ultimes ;

- que le vote du conseil municipal du 23 décembre 2009 devait porter soit exclusivement sur le retour en régie, soit sur une nouvelle proposition du maire ;

- que la procédure de choix du délégataire par le conseil municipal a été irrégulière ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juillet 2010, présenté pour la commune de Royan, représentée par son maire en exercice, qui conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge de la COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir :

- que la compagnie des eaux de Royan a bénéficié d'un traitement équitable, au même titre que les autres candidats à la délégation de service public ;

- que les critères de choix appliqués par la commune sont réguliers ;

- qu’il n’a pas été fait application de sous-critères ;

- que la requérante ne démontre pas en quoi la possibilité de présenter des variantes serait irrégulière ; qu’en tout état de cause, pour les délégations de service public, le principe d'exigences minimales pour les variantes ne s'applique pas comme en matière de marchés publics ;

- que si la commission n'avait pas qualité pour négocier avec les candidats, elle devait cependant fournir un avis éclairé ; qu’aucune disposition ne lui interdisait de procéder à des demandes d'informations complémentaires ;

- que la demande de complément d'informations du maire a été adressée à l'ensemble des candidats, la requérante comme les deux autres candidats ayant pu y répondre ; que, dans ces conditions, l'égalité de traitement des candidats a été respectée ;

- que la décision de saisir un cabinet conseil afin d’analyser à nouveau les offres résulte d'un souhait de l'ensemble des conseillers municipaux de Royan du 19 novembre 2009 ; qu’à aucun moment, cette initiative n'a eu pour effet d'entériner une reprise des négociations, mais seulement de répondre à la question d'une éventuelle mise en régie du service public d'eau potable plutôt qu'à une délégation de service public ; que le rapport de Service Public 2000 selon lequel l'offre de Veolia était la plus intéressante, même au regard d'une gestion en régie, a été présentée lors de deux séances du conseil municipal en date des 30 novembre et 4 décembre 2009 ; que c’est suite à ce rapport que le maire a soumis au conseil municipal son choix de retenir la SA Véolia comme délégataire de service public lors de la séance municipale du 23 décembre 2009 ; qu'aucune disposition législative n’imposait que le vote du 23 décembre 2009 ne porte que sur un retour en régie ou sur la proposition d'un autre choix de délégataire ;


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- que l'intervention de Service Public 2000 s'est déroulée dans des conditions de nature à ne pas porter atteinte à l'égalité de traitement des candidats, ni au principe de transparence ;

- que le moyen tiré de ce que le vote des conseillers municipaux ne serait pas régulier au motif que le maire aurait menacé ces derniers d’une mise en régie du service public de l'eau doit être écarté dès lors que cette proposition émanait en réalité d'une partie des conseillers municipaux d’opposition ;

- que si la requérante soutient que la décision contestée serait irrégulière, faute qu'il ait été procédé à un vote formel sur la demande, formée par un des conseillers municipaux, de vote à bulletins secrets, elle ne démontre pas que l'absence de vote formel l'aurait lésée ou aurait été susceptible de la léser ; que le contexte dans lequel s'est inscrite la séance du conseil municipal du 23 décembre 2009 justifiait le recours au scrutin secret ; que même s'il n’a pas été procédé à un vote formel, de par la répétition des demandes de votes à bulletin secret par le tiers des conseillers et du contexte houleux au sein du conseil municipal mais aussi au regard du dossier de délégation du service eau potable de la ville, il convient de considérer que ces éléments révèlent un accord implicite des conseillers municipaux pour la mise en œuvre d'un vote à scrutin secret ; qu’en tout état de cause, le défaut de vote formel sur le recours au scrutin secret n'a emporté aucune conséquence sur le sens du vote des conseillers municipaux quant à la délibération attaquée ;

- que si le tribunal était conduit à considérer que le recours au vote à scrutin secret nécessitait le recours à un vote formel, cette irrégularité ne saurait être de nature à conduire à une annulation de l'ensemble de la procédure de passation de la délégation de service public, l’absence de vote préalable sur le fait de recourir au scrutin secret n’étant pas constitutive d'une faute d'une particulière gravité justifiant la sanction extrême de l'annulation du contrat d'affermage et l’administration pouvant prendre un nouvel acte se substituant à l’acte détachable annulé ; qu’en outre, le vice affectant la délibération du 23 décembre 2009 est un vice propre à la délibération et non pas un vice tenant au contenu même de la convention ; que des motifs d'intérêt général s’opposent du reste à une telle annulation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2010, présenté pour la SCA Véolia eau qui conclut au rejet de la requête et demande au tribunal de mettre à la charge de la COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir :

- que la requérante ne démontre pas que ses intérêts auraient été lésés par les irrégularités qu’elle invoque ;

- que l'égalité de traitement entre candidats a été respectée ;

- que les critères de choix appliqués par la commune sont réguliers ;

- que la compagnie des eaux de Royan n’établit pas que les quatre premiers critères auraient été décomposés en sous-critères qui n'auraient jamais été portés à la connaissance des candidats ;


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- que le moyen tiré de ce que les spécifications minimales des variantes n'auraient pas été définies est inopérant ; qu’en toute hypothèse, la requérante n'explique en rien en quoi le manquement, à le supposer même établi, l'aurait lésée ;

- qu'aucune disposition n'interdisait à la commission de délégation de service public de formuler des demandes d'éclaircissements auprès des candidats ;

- qu’il est erroné de soutenir qu’il existe une notion juridique d'offre ultime, interdisant à l'autorité délégante qui s'y réfère de poursuivre ensuite la moindre relation avec les candidats ; que le régime juridique applicable aux délégations de service public repose sur le fait que la phase des négociations est régie par un principe de liberté, encadré uniquement par le principe d'égalité de traitement ; qu’en vertu de ce principe de liberté des négociations, l'autorité délégante pouvait parfaitement inviter les candidats, après avoir appelé la dernière offre, à répondre des demandes complémentaires ; que la seule limite étant de ne pas rouvrir les négociations avec un seul candidat ;

- que l'intervention de la société SP 2000 n’entache pas pour autant les négociations d’irrégularité ; que cette intervention ne constitue qu'un examen complémentaire des offres finales qui n’est ni interdit par aucun texte ni aucun principe ; qu’en toute hypothèse, la requérante ne démontre pas en quoi le recours à la société SP 2000 a eu une quelconque incidence sur la procédure dès lors que ni le principe d'égalité de traitement des candidats, ni le principe de transparence n'ont été affecté ;

- que l'absence de vote formel du conseil municipal sur le recours à un scrutin secret n’entraîne pas pour autant l'annulation du contrat ; qu’il ne ressort pas du compte-rendu du conseil municipal une quelconque opposition des élus de recourir à un vote à bulletin secret ; qu’au contraire, il apparaît clairement que tous les élus souhaitaient ne pas procéder à un scrutin public ; que compte tenu de la tension qui régnait alors, le scrutin secret apparaissait au demeurant de nature à éviter tout débordement ; qu’en outre, ce mode de vote permettait à chaque élu, au regard du contexte, de voter librement et sans aucune pression ; que, par suite, les exigences posées à l'article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales🏛 doivent être regardées comme ayant été respectées ; que le défaut de vote formel préalable au vote à bulletin secret n'a pas eu la moindre conséquence sur le sens du vote ;

- que les irrégularités dont se prévaut la requérante ne sont pas de nature à entrainer l’annulation du contrat ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2011, présenté pour la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN qui conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que dans son mémoire introductif d’instance ;

Elle soutient, en outre :

- que la commission de délégation de service public était irrégulièrement composée faute pour la commune d’avoir désigné les membres de cette commission représentant les associations locales ;

- que l’avis rendu par cette commission est irrégulier dans la mesure où cet organisme s’est borné à suivre les conclusions du rapport fourni par un cabinet d’audit sans elle-même procéder à une analyse critique des offres et où il n’a pas procédé à un classement des offres ;


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- que la commune n’a pas donné aux candidats une information complète et sincère en ce qui concerne la reprise des salariés du précédent délégataire qui constituait l’un des critères de choix du délégataire ;

- que le rapport d’expertise établi au mois de février 2010 qu’elle fournit démontre que l’information transmise aux élus a été insuffisante, un manque d’objectivité du maire, le non- respect par Véolia de l’objectif de reprise des personnels, une sous-évaluation de certaines charges et une baisse inexpliquée de certains investissements prévus dans son offre ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 décembre 2011, présenté pour la SCA Véolia eau qui conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que dans son précédent mémoire ;

Elle soutient, en outre :

- que, par une délibération n° 08082 du 23 juin 2008, la commune a procédé à la désignation des membres de la commission de délégation de service public et notamment de ceux représentant les associations locales ;

- que l’avis rendu par cette commission est parfaitement régulier ; qu’il ressort des pièces du dossier que la commission a pris connaissance du rapport établi par le cabinet Service Public 2000 et que, sans s’estimer liée par les conclusions de ce rapport, elle a procédé à une analyse complémentaire des offres, laquelle a aboutit à la proposition d’engager une négociation avec les trois candidats qui avaient été précédemment retenus ;

- qu’aucune disposition n’imposait à la commission, à ce stade de la procédure, de marquer une préférence pour une offre ;

- que le rapport du cabinet Grant Thornton ne présente aucune garantie d’objectivité ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 décembre 2011, présenté pour la commune de Royan qui conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que dans son précédent mémoire ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 décembre 2011, présenté pour la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN ;

Vu le contrat litigieux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu l’arrêté du Vice-président du Conseil d’Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l’article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009🏛 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;


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Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2011 :

- le rapport de M. Campoy, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Bonnelle, rapporteur public ;

- et les observations de :

- Me Pezin, avocat au barreau de Paris, collaborateur de la Selarl cabinet Cabanes- Cabanes Neveu associés, représentant la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN ;

- Me Capiaux, avocat au barreau de Paris, représentant la commune de Royan ;

- Me Marchand, avocat au barreau de Nantes, associé de la SCP Cornet-Vincent- Segurel, représentant la société Véolia eau ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

Considérant que la commune de Royan a lancé à la fin de l’année 2008 une consultation en vue de la délégation par affermage du service public de production et de distribution d’eau potable de la ville, précédemment confié à la société anonyme (SA) COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN ; que le 4 mai 2009, au vu du rapport d'analyse des offres remis par les cabinets d'études DE Conseil et Oxena, la commission de délégation de service public a proposé au maire de Royan d’entamer des négociations avec la société en commandite par actions (SCA) Véolia eau, la SA Lyonnaise des Eaux et la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN ; que le conseil municipal de Royan a rejeté le 8 octobre 2009 la proposition du maire tendant à retenir l’offre de la SCA Véolia Eau et l’a invité le 19 novembre 2009 à procéder à une audition des trois candidats pour des clarifications ainsi qu’à une nouvelle analyse de leurs offres au regard, notamment, de la possibilité d’une mise en régie du service public de l’eau de la commune ; que le cabinet Service Public 2000 ayant établi un rapport concluant à ce que l'offre de Veolia était la plus intéressante, même au regard d'une gestion en régie, le conseil municipal de Royan a décidé le 23 décembre 2009 de retenir comme délégataire du service public de production et de distribution d’eau potable de la commune la SCA Veolia eau, d’approuver le contrat de délégation du service public pour une durée de douze ans et d’autoriser le maire à conclure ledit contrat avec cette société ; que ce contrat de délégation du service public a été signé le 31 décembre 2009 ; que la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN demande son annulation en sa qualité de candidate évincée à cette consultation ;

En ce qui concerne la régularité de la composition de la commission de délégation de service public :

Considérant qu’il résulte des pièces versées au dossier que, par une délibération du 23 juin 2008, la commune a procédé à la désignation des membres de la commission de délégation de service public et notamment de ceux représentant les associations locales ; que le moyen tiré de l’irrégularité de la composition de cette commission manque donc en fait ;

En ce qui concerne le moyen tiré d’une atteinte au principe d’égalité de traitement des candidats :


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Considérant, en premier lieu, que la seule circonstance que le rapport du bureau d’études Oxena, supposé être plus favorable à l’offre de la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN qu’à celle de la SCA Véolia eau, n'ait pas été spontanément transmis aux élus, ne traduit pas forcément la volonté délibérée du maire de censurer un document défavorable à l'offre de la SCA Véolia ; que ce document a d’ailleurs été transmis aux élus préalablement à la délibération autorisant la conclusion du contrat ce qui implique qu’à supposer même que l’autorité municipale souhaitait occulter les conclusions de ce rapport, cette tentative qui s’est soldée par un échec, n’a, en toute hypothèse, pu porter aucune atteinte au principe d’égalité de traitement des candidats ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales🏛 en vertu desquelles l'autorité habilitée à signer la convention saisit l'assemblée délibérante du choix de l'entreprise auquel elle a procédé et présente les motifs du choix d’un candidat, impliquaient, dès lors que le maire estimait que la SCA Véolia eau devait être choisie en tant que délégataire, qu’il prenne parti pour la candidature de cette société au cours de la séance municipale du 23 décembre 2009 et qu’il y développe les raisons pour lesquelles il privilégiait cette offre plutôt qu’une autre ; que les autres propos tenus par le maire lors de cette même séance à l’égard de la société requérante en réponse aux propos volontairement polémiques de certains conseillers municipaux d’opposition, ne dénotent, nonobstant leur caractère eux-mêmes polémiques, aucun parti pris de cette autorité contre la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN ;

Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte des pièce versées au dossier que, contrairement à ce que soutient la société requérante, le maire s’est, au cours de ladite séance, opposé à la solution consistant à mettre en régie le service public de production et de distribution d’eau potable qui avait été préconisée, non par l’autorité municipale, mais par certains conseillers municipaux ; que l’argument tiré de ce que le maire aurait menacé le conseil municipal de recourir à un tel mode de gestion manque donc en fait ;

Considérant, en quatrième et dernier lieu, que la société requérante n’apporte aucun élément permettant d’établir que le complément d’étude demandé au cabinet d’études SP 2000 qui portait sur une analyse complémentaire des offres finales des trois candidats, qui a donné lieu à audition de chacun de ces candidats et dont il n’est pas contesté qu’elle leur a permis d’apporter toutes précisions utiles sur le contenu de leur offre, se serait déroulé dans des conditions de nature à rompre à son détriment l’égalité de traitement entre les candidats et n’aurait eu d’autre objet que de conforter le choix initial de la société Véolia eau ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN n’est pas fondée à soutenir qu’elle aurait été victime d’une quelconque discrimination au cours de la procédure d’attribution du contrat d’affermage du service public de production et de distribution d’eau potable de la commune de Royan ;

En ce qui concerne les critères de choix du délégataire :

Considérant, en premier lieu, qu’il est constant que l’article 7 du règlement de consultation de la délégation de service public stipulait que « pour l’appréciation des offres seront retenus, de manière interdépendante et sans hiérarchisation, les critères suivants : -valeur technique de l’offre, appréciée notamment au regard du mémoire explicatif ; - compréhension des obligations de service public, notamment de continuité du service public et de qualité du service rendu à l’usager ; - moyens humains et techniques internes à l’entreprise et engagements


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proposés pour l’exécution du contrat ; - pertinence du compte d’exploitation prévisionnel détaillé et de ses hypothèses d’évolution, - niveau des tarifs proposés ; - niveau des prix du bordereau » ; que, compte tenu de ces renseignements, les candidats à l’attribution de la délégation de service public du service de l’eau potable de la commune de Royan étaient suffisamment informés des critères de sélection des offres que cette commune entendait mettre en œuvre ; qu’il ne résulte ni de ces stipulations, ni des autres documents de la consultation que la commune aurait entendu mettre en œuvre des sous-critères de sélection des offres ; que, s’agissant d’une procédure de délégation de service public et non d’attribution d’un marché public, la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN ne saurait utilement se prévaloir de ce que certains de ces critères qui n’ont aucun caractère subjectif, n’étaient pas assortis des précisions permettant de comprendre comment ils seraient appréciés, ni de ce que la collectivité délégante n’aurait pas procédé à une pondération ou à une hiérarchisation de ces critères ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’il ne résulte d’aucune des pièces versées au dossier que la reprise du personnel du précédent délégataire aurait été retenue comme l’un des critères de choix du nouveau délégataire ; que la société requérante ne saurait, à cet égard, se prévaloir utilement des propos tenus par le maire de Royan en marge de la procédure de délégation de service public qui ne visaient qu’à répondre, sur ce point, aux inquiétudes du personnel de la société requérante, relayées par certaines campagnes de presse au niveau local ; que la reprise du personnel du précédent délégataire ne constituant pas l’un des critères de choix du nouveau délégataire, la commune n’avait, par définition, pas à informer les candidats de l’existence de ce prétendu critère, ni, en tout état de cause, à préciser comment celui-ci serait mis en œuvre ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, que le moyen tiré de ce que la définition du mémoire explicatif prévu à l'article 4.2.VI du règlement de consultation permettrait de constater que ce document fait doublon avec le critère relatif aux « moyens humains et techniques internes à l'entreprise et engagements proposés pour l'exécution du contrat » n’est pas assorti des précisions permettant d’en apprécier le bien-fondé, ni même la portée exacte en l’absence de production par les parties dudit règlement de la consultation ;

Considérant, par suite, que la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN n’est pas fondée à se prévaloir de ce que les critères de choix du délégataire auraient été irréguliers ;

En ce qui concerne la possibilité donnée aux candidats de présenter des offres variantes ou complémentaires :

Considérant, d’une part, que, s’agissant d’une procédure de délégation de service public et non d’attribution d’un marché public, aucun texte ne faisait obligation à la commune de Royan de déterminer des exigences techniques minimales pour les offres variantes ou complémentaires que les candidats étaient autorisés à présenter en plus de leur offre de base ;

Considérant, d’autre part, qu’il ne résulte d’aucune des pièces du dossier que la possibilité donnée aux candidats par l’article 4.2 du règlement de consultation, de présenter ces variantes sous réserve d’une présentation claire et précise des modifications proposées, aurait été de nature à porter atteinte aux principes d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ;

Considérant que le moyen tiré de ce que la commune ne pouvait permettre aux candidats à cette consultation de présenter des offres variantes ou complémentaires sans fixer des exigences techniques minimales, doit, par conséquent, être écarté ;


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En ce qui concerne l’avis de la commission de délégation de service public :

Considérant, d’une part, qu’en se bornant à faire état du rapport du maire au conseil municipal selon lequel la commission de délégation de service public réunie le 20 avril 2009 « a souhaité qu’il soit demandé aux candidats de compléter leurs offres pour mieux les comparer entre elles», la société requérante n’établit pas que ce complément d’information visait à régulariser des offres non conformes à la consultation, ni, en toute hypothèse, que cette demande portait sur des éléments faisant obstacle à ce que soit appréciée la conformité de ses offres aux exigences du cahier des charges de la consultation ou ayant une influence sur la comparaison entre les offres et le choix des candidats invités à négocier ;

Considérant, d’autre part, qu’il ne résulte d’aucune des pièces versées au dossier que la commission de délégation de service public aurait elle-même demandé la production de ces informations ; qu’aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait d’ailleurs obstacle à ce que, postérieurement à l'ouverture des plis, et dans le respect du principe de liberté de négociation propre à la procédure d'attribution des délégations de service public, les candidats fournissent, sur demande de la commission et avant que cette dernière n'ait formulé son avis, des informations précisant leur offre antérieure ;

Considérant, enfin, qu’il ne résulte d’aucune des pièces versées au dossier que la commission se serait estimée liée par les conclusions du rapport établi par le cabinet Service Public 2000 ; qu’il résulte en revanche des mêmes pièces que cette commission a bien procédé à une analyse complémentaire des offres, laquelle a aboutit à la proposition d’engager une négociation avec les trois candidats qui avaient été précédemment retenus ; qu'aucune disposition n'imposait à la commission de marquer une préférence pour une offre ;

Considérant, par suite, que la société requérante n’est pas fondée à contester la régularité de l’avis rendu par cette commission ;

En ce qui concerne le réexamen des offres :

Considérant que les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 1411-5 du code général des collectivités territoriales ne font pas obstacle à ce que l’assemblée délibérante, après avoir rejeté la proposition de l’autorité exécutive, invite celle-ci à poursuivre les discussions qu’elle avait engagées avec les entreprises de son choix ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la réouverture des négociations avec les trois entreprises candidates à laquelle a procédé le maire de Royan, ait revêtu un caractère discriminatoire ; que la société requérante ne peut, par suite, se prévaloir utilement ni de ce que le cabinet Service Public 2000 mandaté par la commune de Royan aurait réclamé des précisions et compléments d’informations aux trois candidats, ni de ce que la commune s’est prononcée le 23 décembre 2009 par un nouveau vote sur l'offre de la Société Véolia qu’elle avait rejetée le 8 octobre 2009 ;

En ce qui concerne le rapport du cabinet Grant Thornton :

Considérant que le contenu de ce rapport par lequel la requérante entend notamment démontrer l’insincérité de l’offre de la SCA Véolia eau, ne peut être retenu dès lors qu’il ne revêt aucun caractère contradictoire et qu’en outre, son commanditaire étant inconnu, il ne peut être exclu qu’il ait été réalisé à la demande de la société requérante pour les seuls besoins de la cause ;


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En ce qui concerne la régularité de la procédure de vote :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 2121-21 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable en l’espèce : « (.…) Il est voté au scrutin secret : / 1° Soit lorsqu'un tiers des membres présents le réclame ; / 2° Soit lorsqu'il y a lieu de procéder à une nomination ou à une présentation. / (.…) » ;

Considérant que, lors de la séance du conseil municipal du 23 décembre 2009, un conseiller municipal a demandé un vote à bulletins secrets ; qu’il ne ressort pas du procès-verbal de cette séance que d’autres conseillers municipaux auraient demandé un tel vote ; que si la commune fait valoir, en défense, que le scrutin secret était inévitable au regard des tensions persistantes au sein du conseil municipal depuis plusieurs mois et qu’aucune opposition ne s’est manifestée lorsque ledit conseiller a demandé un vote au scrutin secret, cette double circonstance ne suffit pas à établir qu’un tiers des membres du conseil municipal aurait réclamé ce mode de scrutin ; que, dans ces conditions, la société requérante est fondée à soutenir que les dispositions précitées de l’article L. 2121-21 du code général des Collectivités territoriales ont été méconnues ; que, par un jugement n° 1000315 du 23 juin 2011 non frappé d’appel, le tribunal de céans a d’ailleurs déjà annulé cette délibération pour le même motif ;

Considérant toutefois qu’il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences ; qu’il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat ;

Considérant que l’irrégularité purement formelle dont est entachée la délibération du 2 décembre 2009 et qui est d’ailleurs régularisable par la commune, ne vicie pas l’accord de volonté des parties au contrat ; qu’elle n’a pas, dans les circonstances de l’espèce, porté préjudice aux intérêts des candidats à cette consultation ; que, compte tenu de l’atteinte excessive à l’intérêt général et aux droits des cocontractants qu’entrainerait la remise en cause de ce contrat, une telle irrégularité n’est, par suite, pas de nature à entrainer l’annulation dudit contrat ;

Considérant que les conclusions aux fins d’annulation de la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Royan, qui n’est pas la partie perdante, le versement à la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN de la somme que celle- ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN le versement à la commune de Royan et à la SCA Véolia eau, chacune, d’une somme de 800 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


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DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN est rejetée.

Article 2: La SA COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN versera à la commune de Royan et à la SCA Véolia eau, chacune, une somme de 800 euros (huit cents euros) en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société anonyme COMPAGNIE DES EAUX DE ROYAN, à la société en commandite par actions Véolia eau et à la commune de Royan.


Délibéré après l'audience du 8 décembre 2011, à laquelle siégeaient :

M. Bousquet, président,

M. le Mehaute et M. Campoy, premiers conseillers.

Lu en audience publique le 21 décembre 2011.

Le rapporteur, Le président,

Signé Signé

Aa A Ab B

Le greffier,

Signé

D. GERVIER

La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme, Pour le greffier en chef, Le greffier,

D. GERVIER

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