Jurisprudence : CA Aix-en-Provence, 28-05-2013, n° 12/02999, Confirmation

CA Aix-en-Provence, 28-05-2013, n° 12/02999, Confirmation

A0515KES

Référence

CA Aix-en-Provence, 28-05-2013, n° 12/02999, Confirmation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/8220391-ca-aixenprovence-28052013-n-1202999-confirmation
Copier

Abstract

Si les obligations du mariage ne cessent pas pendant la procédure de divorce, l'obligation de fidélité doit être interprétée au regard de la durée de cette procédure et de la cessation de la vie commune.



COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE 6e Chambre C
ARRÊT AU FOND DU 28 MAI 2013
N°2013/331
Rôle N° 12/02999
Lakhdar Z
C/
Karima YZ épouse YZ
Grosse délivrée
le
à
Me Clémence ..., avocat postulant et plaidant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE Me Elodie ..., avocat postulant et plaidant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
Décision déférée à la Cour
Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 13 Décembre 2011 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 09/10553.

APPELANT
Monsieur Lakhdar Z
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/002353 du 21/02/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
né le ..... à MOSTAGANEM (ALGÉRIE) de nationalité Française, demeurant GAP
représenté par Me Clémence BARBIER, avocat postulant et plaidant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉE
Madame Karima YZ épouse YZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2012/005602 du 15/06/2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)
1 née le ..... à MOSTAGANEM (ALGÉRIE) (99)
de nationalité Française, demeurant MARSEILLE
représentée par Me Elodie FONTAINE, avocat postulant et plaidant au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 12 Avril 2013, en Chambre du Conseil, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Alain VOGELWEITH, Conseiller Rapporteur, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Madame Annie DABOSVILLE, Présidente
Madame Chantal HUILLEMOT-FERRANDO, Conseiller
Monsieur Alain VOGELWEITH, Conseiller
Greffier présent lors des débats Madame Lydie BERENGUIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2013.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mai 2013
Signé par Madame Annie DABOSVILLE, Présidente et Madame Lydie BERENGUIER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA PROCÉDURE ET LES PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. Z Lakdar et Mme Y Karima se sont mariés le 18 mars 2005 devant l'officier d'état civil de Mostaganem (Algérie).
Un enfant est issu de cette union, Salah-Edddine, né 18 août 2005.
A la suite de la requête en divorce déposée par Mme Y, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Marseille, par ordonnance de non-conciliation en date du 29 juin 2010, a
- dit que l'autorité parentale sera exercée exclusivement par la mère,
- fixé la résidence de l'enfant chez la mère,
- réservé le droit de visite et d'hébergement du père,
2

- réservé la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant M. Z a interjeté appel de cette ordonnance.
Par arrêt en date du 24 janvier 2012, la cour d'appel d'Aix en Provence a confirmé l'ordonnance déférée et fixé un droit de visite s'exerçant une fois par mois au parloir de la maison d'arrêt de GAP, à charge pour la mère d'accompagner l'enfant et de le ramener.

Par jugement en date du 13 décembre 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Marseille a
- prononcé le divorce aux torts exclusifs du mari,
- ordonné la publicité prévue par l'article 1082 du code civil,
- dit n'y avoir lieu à liquidation du régime matrimonial,
- dit que l'autorité parentale sera exercée exclusivement par la mère à l'égard de l'enfant, avec résidence de l'enfant chez la mère,
- réservé le droit de visite et d'hébergement du père,
- réservé la contribution paternelle pour l'entretien de l'enfant,
- débouté Mme Y de sa demande de dommages et intérêts et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. Z aux entiers dépens.

Par déclaration au greffe de la Cour d'appel en date du 21 février 2012, M. Z a interjeté appel de cette décision.
Par conclusions notifiées le 20 mars 2013, M. Z sollicite la réformation du jugement entrepris et demande à la Cour de
- prononcer le divorce des époux aux torts exclusifs de Mme Y,
- ordonner que la décision à intervenir soit mentionnée en marge des actes d'état civil de chacun des époux,
- dire n'y avoir lieu à la liquidation du régime matrimonial,
- dire que l'autorité parentale sera exercée conjointement par les deux parents,
- fixer la résidence de l'enfant au domicile de la mère,
- fixer un droit de visite pour M. Z une fois par mois, dont les modalités devront être précisées par la maison d'arrêt de GAP, à charge pour Mme Y d'amener l'enfant,
- donner acte à M. Z de ce qu'il propose le paiement de la somme de 30 euros au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,
- statuer sur les dépens comme en matière d'aide juridictionnelle.
3

Par conclusions notifiées le 4 mars 2013, Mme Y sollicite la confirmation de la décision entreprise à l'exception des dispositions relatives à la contribution paternelle réservée et au débouté de la demande de dommages et intérêts. Mme Y demande à la Cour de
- condamner M. Z à lui verser la somme de 100 euros par mois au titre de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant commun, et ce, avec indexation,
- condamner M. Z à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 266 du code civil,
A titre subsidiaire,
- dire que M. Z rencontrera l'enfant au centre Archipel de Marseille un samedi après-midi par mois de 14H à 17H, afin qu'une prise de contact progressive ait lieu au titre du droit de visite,
En tout état de cause,
- condamner M. Z au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle,
- statuer sur les dépens comme en matière d'aide juridictionnelle.
Par ordonnance de clôture en date 2 avril 2013, le magistrat de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction de l'affaire.

MOTIFS DE LA DÉCISION
EN LA FORME
Aucun élément soumis à l'appréciation de la Cour ne permet de remettre en cause la régularité de l'appel, au demeurant non contestée par l'autre partie. Cet appel sera, en conséquence, déclaré recevable.
AU FOND
Sur le prononcé du divorce
Il résulte des dispositions de l'article 242 du code civil que le divorce peut être demandé par un époux pour des faits imputables à l'autre époux lorsque ces faits constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérable le maintien de la vie commune.
A l'appui de sa demande tendant à voir prononcer le divorce aux torts exclusifs de Mme Y, M. Z soutient que cette dernière a entretenu une relation adultère avec le gérant de l'hôtel où le couple résidait. Il ajoute que de cette relation adultère est issu un enfant.
Mme Y conteste l'existence de cette relation adultère au moment où elle vivait avec M. Z. Elle précise qu'elle a eu un deuxième enfant au mois de mars 2011 après être tombée enceinte en juillet 2010 alors même que M. Z était incarcéré depuis 2 ans et 9 mois, que la requête en divorce était déposée depuis 10 mois et que l'ordonnance de non conciliation avait donné acte de ce que le domicile conjugal n'existait plus.
A l'exception d'une attestation de sa soeur, Nadia Z, qui ne fait que rapporter des 4

rumeurs dont elle aurait eu connaissance, M. Z ne verse aux débats aucun élément de nature à établir que Mme Y aurait entretenu une relation adultère pendant la vie commune des époux.
Si les obligations du mariage ne cessent pas pendant la procédure de divorce, l'obligation de fidélité doit être interprétée au regard de la durée de cette procédure et de la cessation de la vie commune. La relation de Mme Y, plus de deux ans après l'incarcération de M. ..., alors même que l'ordonnance de non conciliation avait constaté qu'il n'existait plus de domicile conjugal ne peut constituer une violation grave ou renouvelée des obligations et devoirs du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune, celle-ci ayant cessé avant que Mme Y ne commence une nouvelle relation.
M. Z ne conteste pas avoir commis des violences conjugales à l'encontre de Mme Y, violences pour lesquelles il a fait l'objet d'une condamnation par le tribunal correctionnel de Marseille le 20 octobre 2008. Il ne saurait justifier, en tout état de cause, ces violences par une relation adultère de Mme Y, qui, au demeurant, n'est nullement établie avant la commission des dites violences.
Ces derniers faits constituent une violation grave des obligations et devoirs du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune au sens de l'article 242 du code civil.
Le jugement entrepris sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de M. Z.
Sur la demande de dommages et intérêts
Des dommages et intérêts peuvent être accordés à l'un des conjoints sur le fondement des dispositions de l'article 266 du code cil en réparation des conséquences d'une particulière gravité qu'il subit du fait de la dissolution du mariage lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint.
A l'appui de sa demande de dommages et intérêts, Mme Y évoque les violences dont elle a fait l'objet. Si ces faits sont de nature à permettre l'attribution de dommages et intérêts dans le cadre d'une procédure pénale ou sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil, Mme Y n'établit nullement les conséquences d'une particulière gravité résultant de la dissolution du mariage ouvrant droit à réparation au titre de l'article 266 du code civil.
Le jugement entrepris sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a débouté Mme Y de sa demande de dommages et intérêts.
Sur la liquidation du régime matrimonial
Il résulte des dispositions de l'article 267 du code civil qu'à défaut de règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux.
M. Z et Mme Y n'ayant pas établi de règlement conventionnel, il convient d'ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux.
Le jugement entrepris sera, en conséquence, infirmé en ce sens.
Sur l'exercice de l'autorité parentale,
M. Z est sorti de prison le 25 novembre 2011. Il indique dans ses écritures qu'il est à 5

nouveau incarcéré jusqu'en 2014.
Mme Y fait observer que M. Z n'a nullement souhaité voir son fils depuis sa sortie de prison. M. Z ne conteste pas cette assertion et n'explique pas les raisons pour lesquelles il n'a pas rencontré son fils alors même qu'il disposait, selon les éléments qu'il verse aux débats, d'un domicile et d'un emploi, donc d'une stabilité lui permettant d'exercer ses responsabilités parentales.
Mme Y rappelle également les violences dont elle a fait l'objet de la part de son conjoint alors que son fils Salah-Eddine se trouvait dans une pièce voisine de celle où ces violences se commettaient.
Il résulte des dispositions de l'article 373-2-1 du code civil qu'en cas de séparation des parents, le juge peut confier l'exercice de l'autorité parentale à l'un des deux parents si l'intérêt de l'enfant le commande.
Compte tenu du désintérêt dont M. Z a fait preuve à l'égard de son fils, de la situation carcérale durable du père de l'enfant, des relations conflictuelles des parents liées, au moins en partie, à la violence dont M. Z a fait preuve à l'encontre de Mme Y, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que l'autorité parentale à l'égard de l'enfant commun sera exercée exclusivement par la mère.
Sur le droit de visite du père
M. Z, étant à nouveau incarcéré, sollicite la mise en place d'un droit de visite, à raison d'une fois par mois, à la maison d'arrêt de Gap où il est actuellement incarcéré.
Mme Y demande à la Cour de confirmer la décision du premier juge qui a réservé le droit de visite du père et, à titre subsidiaire, d'accorder à M. Z un droit de visite dans un point rencontre.
Mme Y n'a pas pris de nouvelles conclusions pour s'opposer à la demande du père résultant de sa nouvelle incarcération ou évoquer des éléments qui feraient obstacle à cette demande.
En l'absence de tels éléments, il convient de dire que M. Z exercera une fois par mois un droit de visite à l'égard de son fils à la maison d'arrêt de Gap, selon des modalités définies en lien avec la maison d'arrêt, à charge pour Mme Y d'amener et de ramener l'enfant.
Le jugement entrepris sera, en conséquence, réformé en ce sens. Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant
M. Z propose de verser 30 euros par mois pour l'entretien et l'éducation de son fils Salah-Eddine. Il produit une attestation en date du 8 mars 2013 de l'administration pénitentiaire indiquant qu'il n'aà ce jour perçu aucune indemnité relative à la formation professionnelle dispensée au sein de l'établissement pénitentiaire. Il indique avoir un livret A sur lequel il verse 30 euros par mois.
Au vu de ces éléments, il échet de dire que M. Z versera une contribution de 30 euros par mois pour l'entretien et l'éducation de l'enfant Salah-Eddine, et ce, avec indexation.
Le jugement entrepris sera, en conséquence, réformé en ce sens.
Les autres dispositions du jugement entrepris n'étant contestées par aucune des deux parties seront 6

confirmées.
Sur l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et les dépens
M. Z étant bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne sauraient être appliquées à son encontre. Mme Y sera, en conséquence, déboutée de sa demande à ce titre.
M. Z, qui succombe dans l'essentiel de ses demandes, sera condamné aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux règles de l'aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, les débats étant non publics,
LA COUR,
Reçoit l'appel,
Confirme le jugement entrepris à l'exception des dispositions concernant la liquidation du régime matrimonial des époux, le droit de visite du père et les dispositions relatives à la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,
Le réformant de ces chefs et statuant à nouveau,
Ordonne la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,
Dit que M. Z Lakhdar exercera un droit de visite à l'égard de l'enfant commun Sahah-Eddine à raison d'une fois par mois selon des modalités définies en lien avec la maison d'arrêt de Gap, à charge pour Mme Y Karima de conduire l'enfant à la Maison d'arrêt et de le ramener,
Fixe à la somme de 30 euros par mois le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant Salah-Eddine que M.. Z Lakhdar devra verser à Mme Y Karima, et au besoin l'y condamne,
Dit que ladite contribution sera payable le 5 de chaque mois et d'avance par le débiteur au domicile du créancier, et sans frais pour celui-ci,
Dit que cette contribution sera indexée sur l'indice des prix à la consommation des ménages urbains, hors tabac, dont le chef est ouvrier ou employé (poste de dépense295, série France entière, publiée par l'INSEE), la revalorisation devant intervenir à la diligence du débiteur entre le 1er janvier et le 1er juillet de chaque année respectivement sur les indices de novembre et de mai précédents, l'indice de référence étant celui de la présente décision selon la formule montant initial pension x nouvel indice/indice initial,
Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et déboute Mme Y Karima de sa demande à ce titre,
Condamne M..Z Lakhdar aux entiers dépens qui seront recouvrés selon les règles de l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
7

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus