Jurisprudence : CE 3/8 SSR, 26-09-2012, n° 340490

CE 3/8 SSR, 26-09-2012, n° 340490

A4349ITA

Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2012:340490.20120926

Identifiant Legifrance : CETATEXT000026420313

Référence

CE 3/8 SSR, 26-09-2012, n° 340490. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/6844785-ce-38-ssr-26092012-n-340490
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Abstract

Aux termes d'une décision rendue le 26 septembre 2012, le Conseil d'Etat retient que l'administration peut établir la valeur locative d'un immeuble par comparaison avec un immeuble situé dans une autre commune qui comporterait une situation économique équivalente ; toutefois, en omettant de saisir la commission communale des impôts directs (CCID), l'administration conduit le juge à faire application de la valeur locative retenue l'année précédente (CE 8° et 3° s-s-r., 26 septembre 2012, n° 340432, publié au recueil Lebon et n° 340489 et n° 340490, inédits au recueil Lebon).



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

340490

MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT
c/ SA Généfim

M. Jean-Marc Vié, Rapporteur
Mme Nathalie Escaut, Rapporteur public

Séance du 7 septembre 2012

Lecture du 26 septembre 2012

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 8ème sous-section de la section du contentieux


Vu le pourvoi, enregistré le 11 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; il demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0806165-0904740 du 15 avril 2010 par lesquels le tribunal administratif de Versailles, statuant sur les demandes de la SA Généfim tendant à la décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006 et 2007 pour l'hôtel exploité sous l'enseigne Mercure situé 29 rue Barbès à Montrouge ainsi qu'à la restitution des sommes correspondantes, a déchargé cette société des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2006 et 2007 et mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes de la SA Généfim ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet avocat de la société Généfim,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet avocat de la société Généfim ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, la valeur locative des immeubles commerciaux " est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / . 2° a) Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b) La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée / : dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe ; " ; qu'il résulte du 2° de cet article que, lorsqu'il est impossible de trouver un local-type pertinent dans la commune de l'immeuble à évaluer, peut être retenu comme terme de comparaison un local-type situé hors de la commune et qui a, lui-même, fait l'objet d'une évaluation par voie de comparaison avec des immeubles similaires, loués à des conditions de prix normales à la date de la révision, quelle que soit sa commune d'implantation, pourvu que, du point de vue économique, cette dernière commune présente une analogie suffisante avec la commune de l'immeuble à évaluer ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties (.) est déterminée conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destiné à une utilisation distincte (.) " ; qu'aux termes de l'article 1505 du même code : " Le représentant de l'administration et la commission communale des impôts directs procèdent à l'évaluation des propriétés bâties. / Après harmonisation avec les autres communes du département, les évaluations sont arrêtées par le service des impôts. Il en est de même en cas de désaccord entre le représentant de l'administration et la commission ou lorsque celle-ci refuse de prêter son concours.(.)" ; qu'en vertu des dispositions de l'article 1650 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, la commission comprend le maire de la commune et, selon la taille de celle-ci, six à huit commissaires désignés par le directeur des services fiscaux sur une liste de contribuables ; que cet organisme est présidé par le maire ; qu'en application des dispositions de l'article 345 de l'annexe III au code général des impôts, la commission se réunit à la demande du directeur des services fiscaux ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1505 du code général des impôts que la commission communale des impôts directs doit être saisie lors de chaque modification par l'administration de l'évaluation des propriétés bâties relevant de l'article 1498 de ce code, en dehors du cas où cette modification résulte exclusivement de l'actualisation de la valeur locative par application des coefficients annuels de majoration prévus à l'article 1518 bis de ce code ; que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat n'est pas fondé à soutenir que cette saisine ne serait requise que dans les cas énumérés par le 1 du I de l'article 1517 du même code, limités aux constructions nouvelles, aux changements de consistance ou d'affectation des propriétés bâties et non bâties, et aux changements de caractéristiques physiques ou d'environnement lorsqu'ils entraînent une modification de plus d'un dixième de la valeur locative ;

4. Considérant que l'omission par l'administration de la saisine préalable obligatoire de cette commission, qui a pour effet de priver les contribuables d'une garantie, constitue une irrégularité devant conduire le juge de l'impôt à écarter définitivement la valeur locative retenue par l'administration ;

5. Considérant, toutefois, que la méconnaissance de cette procédure ne saurait avoir pour effet, en raison de la nature d'impôt réel de cette taxe, de libérer le bien de toute imposition ; que, lorsque le juge de l'impôt constate que la commission n'a pas été consultée en violation des dispositions de l'article 1505 du code, il doit fixer, au vu de l'instruction, une nouvelle valeur locative ;

6. Considérant, d'une part, qu'il lui appartient à ce titre de retenir, si elle n'est pas contestée, la valeur locative ayant servi au calcul de l'imposition de l'année précédente, que cette valeur résulte de cette imposition ou d'une décision juridictionnelle ayant statué sur la contestation de cette imposition ; qu'il doit alors, en raison de l'irrégularité de procédure ainsi constatée, prononcer la réduction de l'imposition mise à la charge du contribuable dans la mesure où elle excède le montant résultant de la prise en compte de cette valeur locative, déterminée après application à l'année d'imposition en litige du coefficient annuel de majoration prévu à l'article 1518 bis du code général des impôts ;

7. Considérant, d'autre part, que, dans le cas où la valeur locative ayant servi au calcul de l'imposition de l'année précédente est contestée, le juge de l'impôt doit statuer sur cette contestation et, s'il y fait droit déterminer, au vu de l'instruction, la valeur locative du bien au titre de l'année d'imposition en litige ; que si cette valeur est inférieure à celle qui a été fixée pour établir l'imposition de l'année précédente, il doit la retenir et prononcer la réduction de l'imposition mise à la charge du contribuable, dans les limites des conclusions de la requête ; que si cette valeur est supérieure, il lui appartient, en raison de l'irrégularité ainsi commise, de prononcer la réduction de l'imposition dans la même mesure que celle mentionnée au considérant 6 ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration a retenu au titre des années 2006 et 2007 le local-type n° 43 du procès-verbal des opérations de révision foncière de la commune de Villejuif pour évaluer la valeur locative de l'immeuble exploité sous l'enseigne Mercure à Montrouge dont est propriétaire la société Généfim ; qu'estimant inappropriée la référence au local-type déterminée par le tribunal administratif de Versailles pour des années précédentes sur le fondement des énonciations du procès-verbal des opérations de révision foncière de 1970, elle a rehaussé la valeur locative appliquée antérieurement à cet immeuble en retenant celle résultant des mentions du procès-verbal de 1979 ; que, par l'article 1er du jugement attaqué, le tribunal a déchargé la société Généfim des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre de ces années au motif qu'elles avaient été établies au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'administration avait retenu un nouveau local-type et une nouvelle valeur locative pour l'immeuble à évaluer en omettant de saisir la commission communale des impôts directs ; qu'en statuant ainsi, sans déterminer la valeur locative qui devait être retenue, le tribunal a commis une erreur de droit ; que, par suite, le ministre est fondé à demander l'annulation de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Versailles ainsi que de son article 2 qui met à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à la société Généfim sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement en date du 15 avril 2010 du tribunal administratif de Versailles sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure précisée à l'article 1er, au tribunal administratif de Versailles.

Article 3 : Les conclusions de la société Généfim présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société Généfim.

Délibéré dans la séance du 7 septembre 2012 où siégeaient : M. Gilles Bachelier, Président de sous-section, présidant ; Mme Marie-Hélène Mitjavile, Mme Caroline Martin, M. Jean Courtial, M. Stéphane Gervasoni, M. Philippe Josse, Conseillers d'Etat et M. Jean-Marc Vié, Maître des Requêtes-rapporteur.

Article, L761-1, CJA Article, 1517, CGI Article, 1494, CGI Article, 1518 bis, CGI Article, 1498, CGI Article, 1505, CGI Article, 1650, CGI Article, 345, annexe iii, CGI Cotisations de taxe foncière Restitution d'une somme Valeur locative d'un immeuble Location consentie Prix normal Biens passibles Évaluations des propriétés bâties Service des impôts Prêt du concours Directeur Changement d'affectation Privation du contribuable des garanties Valeurs locatives retenues Valeur retenue par l'administration Calcul d'une imposition Majoration Imposition Dossier soumis aux juges du fond Procédure irrégulière

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