MARSEILLE
N° 09MA04738
COMMUNE DU CASTELLET
M. Massin, Rapporteur
M. Bachoffer, Rapporteur public
Audience du 24 novembre 2011
Lecture du 8 décembre 2011
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
La cour administrative d'appel de Marseille
(1ère chambre)
Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2009, présentée pour la COMMUNE DU CASTELLET représentée par son maire, par Me Blein ; la COMMUNE DU CASTELLET demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 novembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulon a annulé, à la demande de Mlle Stéphanie Ginestou, l'arrêté en date du 16 juillet 2007, notifié le 31 juillet 2007 par lequel le maire de la COMMUNE DU CASTELLET a retiré le permis de construire tacite né le 26 juillet 2007 au bénéfice de Mlle Stéphanie Ginestou et a refusé le permis de construire qu'elle avait demandé ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle Stéphanie Ginestou devant le tribunal administratif de Toulon ;
3°) de mettre à la charge de Mlle Stéphanie Ginestou la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
............................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2011 :
- le rapport de M. Massin, rapporteur ;
- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;
- et les observations de Me Faure-Bonaccorsi pour Mme Aveillan née Ginestou ;
Considérant que par un jugement du 6 novembre 2009, le tribunal administratif de Toulon a annulé, à la demande de Mlle Stéphanie Ginestou, l'arrêté en date du 16 juillet 2007, notifié le 31 juillet 2007 par lequel le maire de la COMMUNE DU CASTELLET a retiré le permis de construire tacite né le 26 juillet 2007 au bénéfice de Mlle Stéphanie Ginestou et a refusé le permis de construire qu'elle avait demandé le 25 mai 2007 ; que la COMMUNE DU CASTELLET interjette appel de ce jugement ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.421-9 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse, : " Tous les exemplaires de la demande et du dossier de permis de construire sont adressés, par pli recommandé avec demande d'accusé de réception postal, au maire de la commune dans laquelle la construction est envisagée, ou déposés contre décharge à la mairie. " ; qu'aux termes de l'article R.421-12 du même code : " Si le dossier est complet, l'autorité compétente pour statuer fait connaître au demandeur dans les quinze jours de la réception de la demande en mairie, par une lettre de notification adressée par pli recommandé avec demande d'avis de réception postal (...) la date avant laquelle, compte tenu des délais réglementaires d'instruction, la décision devra lui être notifiée. Le délai d'instruction part de la date de la décharge ou de l'avis de réception postal prévus à l'article R.421-9. (...)/ L'autorité compétente pour statuer avise en outre le demandeur que si aucune décision ne lui a été adressée avant la date mentionnée au premier alinéa (...) la lettre de notification des délais d'instruction vaudra permis de construire (...) ; qu'aux termes de l'article R.421-18 du même code : " (...) le délai d'instruction (...) est fixé à deux mois. " ; qu'en application de ces dispositions le demandeur d'un permis de construire n'est réputé être titulaire d'un permis tacite que lorsque aucune décision ne lui a été notifiée avant l'expiration du délai réglementaire d'instruction de son dossier ;
Considérant que, Mlle Stéphanie Ginestou a déposé le 25 mai 2007 une demande de permis de construire pour édifier une maison d'habitation ; que le 13 juillet 2007, le maire de la COMMUNE DU CASTELLET a notifié à la pétitionnaire le délai d'instruction de sa demande de permis de construire ; qu'en application des principes énoncés ci-dessus, Mlle Stéphanie Ginestou est devenue titulaire le 26 juillet 2007 d'un permis de construire tacite ; que par suite, l'arrêté du maire de la COMMUNE DU CASTELLET du 16 juillet 2007 refusant de délivrer à Mlle Stéphanie Ginestou le permis de construire demandé le 25 mai 2007, et qui ne lui a été notifié que le 31 juillet 2007, a procédé au retrait du permis de construire tacitement délivré le 26 juillet 2007 ; que la circonstance, à la supposer établie, que Mlle Stéphanie Ginestou se serait volontairement abstenue de venir à la mairie retirer l'arrêté du 16 juillet 2007 est sans incidence sur les conditions dans lesquelles celle-ci est devenue titulaire le 26 juillet 2007 d'un permis de construire tacite ; que pour empêcher la naissance d'un permis de construire tacite, il appartenait à la COMMUNE DU CASTELLET de notifier à Mlle Stéphanie Ginestou le refus de permis de construire avant l'expiration du délai d'instruction fixée au 25 juillet 2007 à minuit ;
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-589 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) // Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : 1° en cas d'urgence ou de circonstances exceptionnelles ; 2° Lorsque leur mise en uvre serait de nature à compromettre l'ordre public ou la conduite des relations internationales ; 3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (...) "; que la décision portant retrait d'un permis de construire est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant que selon les propres écritures de la COMMUNE DU CASTELLET, la procédure contradictoire exigée par les dispositions citées ci-dessus n'a été engagée que le 5 septembre 2007, soit postérieurement à l'arrêté du 16 juillet 2007, notifié le 31 juillet 2007, retirant le permis de construire tacitement délivré le 26 juillet 2007 ; que la COMMUNE DU CASTELLET n'invoque aucune situation d'urgence ni aucune autre circonstance qui aurait pu justifier que cette procédure ne soit pas engagée préalablement au retrait du permis de construire du 26 juillet 2007 ; que, dés lors, c'est en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 que le maire de la COMMUNE DU CASTELLET a procédé au retrait du permis de construire tacitement délivré le 26 juillet 2007 ;
Considérant, en second lieu, que l'arrêté du 16 juillet 2007, qui se fonde sur les articles UC3 du règlement du plan d'occupation des sols et R.111-4 du code de l'urbanisme, est motivé par des conditions de desserte insuffisantes ;
Considérant que le terrain d'assiette étant situé en zone INB, le maire de la COMMUNE DU CASTELLET ne pouvait se fonder sur une disposition du règlement du plan d'occupation des sols applicable en zone UC pour motiver son arrêté ; que, toutefois, les dispositions de l'article UC3 et de l'article NB3 étant identiques, l'erreur de plume entachant l'arrêté en litige est sans incidence sur sa légalité ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de nature et de l'intensité du trafic. (...) " ;
Considérant qu'aux termes de l'article NB3 du règlement du plan d'occupation des sols relatif aux accès et à la voirie : " (...) Les caractéristiques des accès doivent permettre de satisfaire aux règles minimales de desserte : défense contre l'incendie (...). " ;
Considérant que la notice de présentation du projet de permis de construire fait état d'une double desserte du terrain d'assiette, la première, la plus courte mais comprenant des passages étroits impraticables par les engins de lutte contre l'incendie, serait empruntée par les véhicules légers, tandis que, la seconde, légèrement plus longue et traversant des lotissements, devrait être empruntée par les engins de lutte contre l'incendie en raison de l'étroitesse de l'autre voie de circulation ;
Considérant que, alors même que Mlle Stéphanie Ginestou ne justifie pas disposer d'une autorisation pour que les véhicules empruntant la desserte prévue pour les engins de secours par la notice de présentation du projet soient autorisés à traverser le lotissement Lis Oulivie, la COMMUNE DU CASTELLET ne démontre toutefois pas une incapacité matérielle pour les pompiers d'accéder en cas de sinistre au terrain d'assiette en litige en empruntant, le cas échéant des voies privées qui ne seraient pas ouvertes à la circulation publique ; que, dès lors, c'est à tort que le maire de la COMMUNE DU CASTELLET s'est fondé sur les conditions de desserte insuffisantes pour retirer le permis de construire en litige ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le maire de la COMMUNE DU CASTELLET n'est pas fondé soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a annulé l'arrêté en date du 16 juillet 2007, notifié le 31 juillet 2007 par lequel il a retiré le permis de construire tacite né le 26 juillet 2007 au bénéfice de Mlle Stéphanie Ginestou et a refusé le permis de construire qu'elle avait demandé le 25 mai 2007 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mlle Stéphanie Ginestou, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande la COMMUNE DU CASTELLET au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mlle Stéphanie Ginestou présentées sur ce fondement ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DU CASTELLET est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Mlle Stéphanie Ginestou tendant à l'application des dispositions de l'article L.761- 1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DU CASTELLET et à Mlle Stéphanie Ginestou.
Copie en sera adressée à l'Association Syndicale Lis Oulivie.