Jurisprudence : CE 3/8 SSR, 07-12-2015, n° 371403, mentionné aux tables du recueil Lebon

CE 3/8 SSR, 07-12-2015, n° 371403, mentionné aux tables du recueil Lebon

A0409NZ8

Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2015:371403.20151207

Identifiant Legifrance : CETATEXT000031587352

Référence

CE 3/8 SSR, 07-12-2015, n° 371403, mentionné aux tables du recueil Lebon. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/27781600-ce-38-ssr-07122015-n-371403-mentionne-aux-tables-du-recueil-lebon
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Abstract

Le Conseil d'Etat, dans un arrêt rendu le 7 décembre 2015, a décidé que le régime particulier de TVA prévu pour les agences de voyages et pour les organisateurs de circuits touristiques (CGI, art. 266) s'applique aux opérateurs économiques qui, même s'ils ne bénéficient pas formellement de la qualité d'agent de voyages ou d'organisateur de circuits touristiques, organisent en leur nom propre une ou des prestations de services généralement attachées à la réalisation d'un voyage et qui, pour fournir ces prestations, recourent à des tiers assujettis (CE 3° et 8° s-s-r., 7 décembre 2015, n° 371403, mentionné aux tables du recueil Lebon). Le régime particulier de TVA prévu pour les agences de voyages et pour les organisateurs de circuits touristiques (CGI, art. 266) s'applique aux opérateurs économiques qui, même s'ils ne bénéficient pas formellement de la qualité d'agent de voyages ou d'organisateur de circuits touristiques, organisent en leur nom propre une ou des prestations de services généralement attachées à la réalisation d'un voyage et qui, pour fournir ces prestations, recourent à des tiers assujettis.



CONSEIL D'ETAT

Statuant au contentieux

371403

SOCIETE HOLIDAY AUTOS UK AND IRELAND

M. Mathieu Herondart, Rapporteur
Mme Nathalie Escaut, Rapporteur public

Séance du 18 novembre 2015

Lecture du 7 décembre 2015

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Le Conseil d'Etat statuant au contentieux

(Section du contentieux, 8ème et 3ème sous-sections réunies)

Sur le rapport de la 8ème sous-section de la section du contentieux


Vu la procédure suivante :

La société Holiday Autos UK and Ireland a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée déductible dont elle disposait à l'expiration de l'année 2007, assorti des intérêts moratoires. Par une ordonnance du 15 septembre 2009, le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a transféré cette requête au tribunal administratif de Montreuil, Par un jugement n°0908564 du 21 janvier 2011, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 11VE01119 du 18 juin 2013, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé contre ce jugement du tribunal administratif de Montreuil par la société Holiday Autos UK and Ireland.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 août et 19 novembre 2013 et le 28 novembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Holiday Autos UK and Ireland demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

-la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Mathieu Herondart, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la société Holiday Autos Uk and Ireland ;





1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Holiday Autos UK and Ireland est membre avec les sociétés Holiday Autos Group Ltd et Holiday Autos International Ltd d'un " groupement TVA " au sens de l'article 11 de la directive du 26 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, établi au Royaume-Uni ; que ces sociétés exploitent un site internet permettant à leurs clients de comparer les tarifs de différents loueurs de voitures, avec lesquelles elles sont liées par contrat, de réserver leur véhicule et de bénéficier d'un service de conseil téléphonique ; que la société Holiday Autos UK and Ireland a sollicité le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 2 611 042 euros, dont elle estimait disposer à l'expiration de l'année 2007, correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée grevant les dépenses qu'elle a acquittées auprès de sociétés de location qui mettaient à disposition des clients britanniques de ce site internet, en France, les véhicules ainsi réservés ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 juin 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel contre le jugement du 21 janvier 2011 du tribunal administratif de Montreuil rejetant sa demande de remboursement du crédit de taxe litigieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 306 de la directive du 28 novembre 2006 : " Les Etats membres appliquent un régime particulier de la taxe sur la valeur ajoutée aux opérations des agences de voyages conformément au présent chapitre, dans la mesure où ces agences agissent en leur nom propre à l'égard du voyageur et lorsqu'elles utilisent, pour la réalisation du voyage, des livraisons de biens et des prestations de services d'autres assujettis. Le présent régime particulier n'est pas applicable aux agences de voyages qui agissent uniquement en qualité d'intermédiaire et auxquelles s'applique, pour calculer la base d'imposition, l'article 79, premier alinéa, point c) " ; qu'aux termes de l'article 307 de cette même directive : " Les opérations effectuées, dans les conditions prévues à l'article 306, par l'agence de voyages pour la réalisation du voyage sont considérées comme une prestation de services unique de l'agence de voyages au voyageur. / La prestation unique est imposée dans l'Etat membre dans lequel l'agence de voyages a établi le siège de son activité économique ou un établissement stable à partir duquel elle a fourni la prestation de services." ; qu'aux termes de l'article 308 de cette même directive : " Pour la prestation de services unique fournie par l'agence de voyages, est considérée comme base d'imposition et comme prix hors TVA, au sens de l'article 226, point 8), la marge de l'agence de voyages, c'est-à-dire la différence entre le montant total, hors TVA, à payer par le voyageur et le coût effectif supporté par l'agence de voyages pour les livraisons de biens et les prestations de services d'autres assujettis, dans la mesure où ces opérations profitent directement au voyageur. " ; que cette disposition a été transposée au e du 1 de l'article 266 du code général des impôts, selon lequel la base d'imposition est constituée " Pour les opérations d'entremise effectuées par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques, par la différence entre le prix total payé par le client et le prix effectif facturé à l'agence ou à l'organisateur par les entrepreneurs de transports, les hôteliers, les restaurateurs, les entrepreneurs de spectacles et les autres assujettis qui exécutent matériellement les services utilisés par le client " ; qu'aux termes du 2. de l'article 231 de l'annexe II au code, alors en vigueur : " Les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques désignés au e du 1 de l'article 266 du même code ne peuvent pas déduire la taxe afférente au prix payé aux entrepreneurs de transports, aux hôteliers, aux restaurateurs, aux entrepreneurs de spectacles et aux autres assujettis qui exécutent matériellement les services utilisés par le client " ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, que le régime particulier de taxe sur la valeur ajoutée prévu pour les agences de voyages et pour les organisateurs de circuits touristiques s'applique aux opérateurs économiques qui, même s'ils ne bénéficient pas formellement de la qualité d'agent de voyages ou d'organisateur de circuits touristiques, organisent en leur nom propre une ou des prestations de services généralement attachées à la réalisation d'un voyage et qui, pour fournir ces prestations, recourent à des tiers assujettis ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les services fournis par la société requérante comportaient, outre la location de véhicules, pour laquelle elle avait recours aux prestations de sous-traitants assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée en France, des prestations d'information et de conseil portant sur un éventail de choix pour la réservation de ces véhicules ; que, dans ces conditions, la cour n'a pas commis que d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique en jugeant que les opérations effectuées par cette société pour l'organisation de voyages effectués en France étaient constitutives d'une activité d'agences de voyages au sens des dispositions citées au point 2 ;

4. Considérant, deuxième lieu, qu'il ressort des pièces de la procédure que, devant la cour, l'administration soutenait qu'il ressortait d'un certificat délivré par l'administration fiscale britannique que le groupement TVA exerçait l'activité de " tour operator " et que la société n'a pas contesté cette qualification pour la période concernée, se bornant à soutenir que cette qualification n'avait pas d'incidence sur les opérations réalisées en France ; que, par suite, la société n'est pas fondée, en tout état de cause, à soutenir que la cour aurait dû rechercher si son activité était également une activité d'agences de voyages soumise au régime de la marge au Royaume-Uni ;

5. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. (.) " ;

6. Considérant que la cour ne s'est pas méprise sur la portée des écritures de la société Holiday Autos UK & Ireland en jugeant qu'elle entendait se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, de l'instruction fiscale référencée 3 L-3-86 du 18 mars 1986 ; qu'en jugeant que le rejet par l'administration d'une demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée ne constitue pas un rehaussement d'impositions permettant à un contribuable de se prévaloir, sur leur fondement, de l'interprétation administrative de la loi fiscale, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de remboursement présentée par la société Holiday Autos UK & Ireland, celle-ci, qui est recevable à se pourvoir en cassation contre l'arrêt qu'elle attaque dès lors qu'elle était partie à l'instance d'appel, n'est pas fondée à demander l'annulation de cet arrêt ; que ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;



D E C I D E :

Article 1er : Le pourvoi de la société Holiday Autos UK and Ireland est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Holiday Autos UK and Ireland et au ministre des finances et des comptes publics.


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