N°s 07LY02364, 07LY02916
COMMUNE DE VALMEINIER SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES.
M. Bézard, Président
M. Chenevey, Rapporteur
M. Besson, Commissaire du gouvernement
Audience du 17 juin 2008
Lecture du 1er juillet 2008
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
La Cour administrative d'appel de Lyon
(1ère chambre)
Vu, I, sous le n° 07LY02364, la requête, enregistrée le 22 octobre 2007, présentée pour la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES, dont le siège est Hôtel du département de la Savoie à Chambéry (73000) ;
La COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0603904 du Tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2007 qui, à la demande de M. Pigalle, d'une part, a annulé l'arrêté du 31 mars 2006 par lequel le maire de la COMMUNE DE VALMEINIER a délivré un permis de construire un parc de stationnement au SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES, d'autre part, a ordonné la démolition des parties du bâtiment déjà réalisées, dans un délai d'un an à compter de la date de notification du jugement ;
2°) de rejeter la demande de M. Pigalle devant le Tribunal administratif ;
3°) subsidiairement, en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, de prononcer une annulation partielle du permis de construire attaqué et, en conséquence, d'autoriser le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES à déposer une nouvelle demande de permis de construire ;
4°) de condamner M. Pigalle à leur verser une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, II, sous le n° 07LY02916, la requête, enregistrée le 24 décembre 2007, présentée pour la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES, dont le siège est Hôtel du département de la Savoie à Chambéry (73000) ;
La COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES demandent à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0603904 du Tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2007 en tant que, par ce jugement, à la demande de M. Pigalle, le Tribunal a ordonné la démolition des parties du parc de stationnement réalisées sur la base de l'arrêté du 31 mars 2006 par lequel le maire de la COMMUNE DE VALMEINIER a délivré un permis de construire au SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2008 :
- le rapport de M. Chenevey ;
- les observations de Me Roche pour la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES ;
- et les conclusions de M. Besson, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées tendent à l'annulation et au sursis à exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;
Considérant que, dans son mémoire introductif d'instance, M. Pigalle a demandé au Tribunal " d'ordonner la démolition de l'ensemble des travaux achevés à la date de sa décision " ; que, dans son mémoire en réplique, il a sollicité du Tribunal la " démolition de la totalité des constructions édifiées illégalement " ; que, même si M. Pigalle n'a pas mentionné l'article L. 911-1 précité du code de justice administrative à l'appui de sa demande de démolition, le Tribunal a pu, à bon droit, regarder lesdites conclusions comme tendant à la mise en uvre des dispositions de cet article ; que, par ailleurs, M. Pigalle n'avait pas à particulièrement motiver ses conclusions aux fins de démolition, qui découlaient de sa demande d'annulation du permis de construire attaqué ;
Sur la légalité du permis de construire attaqué :
Considérant que, pour annuler le permis de construire délivré le 31 mars 2006 au SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES, le Tribunal administratif de Grenoble s'est fondé sur la méconnaissance de l'article Za 10 du règlement du plan d'aménagement de zone de la zone d'aménagement concerté des Islettes et de la Saucette et de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article Za 10 du règlement du plan d'aménagement de zone de ladite zone d'aménagement concerté : " La hauteur maximum des constructions est de 6 niveaux plus combles dans les terrains de plus grande pente. Pour des raisons architecturales ou techniques, un niveau supplémentaire pourra être accordé sur une partie limitée du bâtiment " ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'accès au terrain d'assiette du projet ne serait pas possible par la partie basse de ce terrain, par la route départementale n° 215 c ; que cet accès aurait permis d'éviter la construction d'un septième niveau ; qu'au surplus, en tout état de cause, contrairement à ce que soutiennent la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES, l'accès par la partie haute du terrain n'imposait nullement la création d'un septième niveau, lequel pouvait être évité par une limitation de la largeur du bâtiment ou une augmentation modérée de la hauteur de chacun des six niveaux de la construction ; qu'il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a retenu la méconnaissance des dispositions précitées de l'article Za 10 du règlement du plan d'aménagement de zone ;
Considérant, en deuxième lieu, que pour demander à la Cour l'annulation du jugement attaqué, la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES soutiennent en appel que les premiers juges ont à tort estimé que le projet méconnaissait les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Tribunal a, par les motifs qu'il a retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en estimant que le maire avait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions ;
Considérant, en troisième lieu, qu'au termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, dont les requérants demandent la mise en uvre : " Lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation. / L'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive " ; que les motifs précités d'illégalité du permis de construire attaqué, qui mettent en cause la conception de l'ensemble de l'ouvrage, ne permettent pas l'application de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a prononcé l'annulation du permis de construire que le maire de cette commune a délivré le 31 mars 2006 à ce syndicat mixte pour la construction d'un parc de stationnement ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que lorsque le juge administratif est saisi, en application des dispositions précitées de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'une demande tendant à ce qu'il ordonne la démolition d'un ouvrage public implanté de façon irrégulière, il lui appartient, pour déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si l'exécution de cette décision implique qu'il ordonne la démolition de cet ouvrage, de rechercher, d'abord, si, eu égard notamment aux motifs de la décision, une régularisation appropriée est possible ; que, dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part, les inconvénients que la présence de l'ouvrage entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'ouvrage, d'autre part, les conséquences de la démolition pour l'intérêt général, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général ;
Considérant, en premier lieu, qu'eu égard aux motifs précités d'annulation du permis de construire litigieux, il ne résulte pas de l'instruction qu'une régularisation de cette décision soit possible ;
Considérant, en second lieu, que le présent arrêt confirmant l'annulation du permis de construire du 31 mars 2006 prononcée par le Tribunal administratif de Grenoble, le bâtiment litigieux, qui est inachevé, ne pourra être terminé ; que, par suite, quel que soit le coût des travaux qui ont déjà été réalisés, ce bâtiment ne peut présenter aucune utilité, notamment pour permettre de contribuer à résoudre les problèmes de stationnement qui, selon la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES, existeraient dans la station de Valmeinier 1 800 ; que la présence de l'ouvrage entraîne des inconvénients particulièrement importants, notamment du fait de l'atteinte au caractère et à l'intérêt du site générée par les caractéristiques de la construction qu'aggrave encore son état d'inachèvement ; que, dans ces conditions, compte tenu du coût de la démolition de l'ouvrage et de la remise en état du site, estimés en défense à la somme non contestée d'environ 700 000 euros, il ne résulte pas de l'instruction que cette démolition entraînerait une atteinte excessive à l'intérêt général ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a ordonné la démolition des parties déjà réalisés du bâtiment dans un délai d'un an à compter de la notification de ce jugement ;
Sur la demande de sursis à exécution du jugement attaqué :
Considérant que, dès lors qu'il est statué au fond par le présent arrêt sur les conclusions à fin d'annulation du jugement attaqué, les conclusions tendant à ce que la Cour prononce le sursis à exécution dudit jugement en tant qu'il ordonne la démolition des parties déjà réalisées du bâtiment sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. Pigalle, qui n'est pas partie perdante, soit condamné à payer aux requérants la somme que ceux-ci demandent dans l'instance n° 07LY02364 au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, au titre des deux requêtes, il y a lieu de mettre à la charge de la COMMUNE DE VALMEINIER et du SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES le versement d'une somme globale de 2 000 euros au bénéfice de M. Pigalle sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête n° 07LY02364 de la COMMUNE DE VALMEINIER et du SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu à statuer sur la requête n° 07LY02916 à fin de sursis à exécution du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 12 juillet 2007 en tant qu'il ordonne la démolition des parties déjà réalisées du bâtiment.
Article 3 : La COMMUNE DE VALMEINIER et le SYNDICAT MIXTE DES ISLETTES verseront à M. Pigalle une somme globale de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.