Jurisprudence : CA Poitiers, 20-03-2015, n° 13/03616, Infirmation partielle

CA Poitiers, 20-03-2015, n° 13/03616, Infirmation partielle

A0287NED

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CA Poitiers, 20-03-2015, n° 13/03616, Infirmation partielle. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/23786976-ca-poitiers-20032015-n-1303616-infirmation-partielle
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Abstract

Lorsqu'un défaut s'analyse à la fois comme un vice caché et comme un manquement à l'obligation de délivrance, l'acquéreur peut agir sur le fondement de la garantie des vices cachés.



ARRÊT N° R.G 13/03616
Z
C/
Y METAY
X
X
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS 1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 20 MARS 2015
Numéro d'inscription au répertoire général 13/03616
Décision déférée à la Cour Jugement au fond du 24 juin 2013 rendu par le Tribunal d'Instance de LA ROCHELLE.

APPELANT
Monsieur Thierry Z
né le ..... à ROCHEFORT (17)

SALLES SUR MER
Ayant pour avocat Me Jean-hugues DESCUBES de la SCP DESCUBES BALLOTEAU LAPEGUE, avocat au barreau de LA ROCHELLE, substitué à l'audience par Me Raphaël CHERKROUN, avocat au barreau de LA ROCHELLE.
INTIMÉS
Madame Maud Lydie Y Y née le ..... à LA ROCHELLE (17) Monsieur Frédéric X
né le ..... à LA ROCHELLE (17)
Monsieur David Jacques X
né le ..... à LA ROCHELLE ) Domiciliés LA ROCHELLE
Ayant tous les trois pour avocat Me Vincent ... de la SCP LAGRAVE - JOUTEUX, avocat au barreau de LA ROCHELLE.

COMPOSITION DE LA COUR
En application des articles 907 et 786 du Code Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Février 2015, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant
Madame Odile CLEMENT, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de
Monsieur Roland POTEE, Président
Madame Marie-Jeanne CONTAL, Conseiller
Madame Odile CLEMENT, Conseiller
GREFFIER, lors des débats Monsieur Jérémy MATANO,
ARRÊT
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Monsieur Roland POTEE, Président, et par Monsieur Jérémy MATANO, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Suivant acte notarié du 25 juin 2010, Mme ... et MM ... et X X ont acquis de M. Z un bien immobilier sis à La Rochelle, 272 avenue Jean ..., comprenant une maison individuelle et une maison annexe, moyennant le prix de 150.000 euros. L'acte de vente précisait que l'immeuble était raccordé au réseau collectif d'assainissement public.
L'acte comprenait une clause d'exclusion de la garantie des vices cachés.
Par acte du 18 avril 2013, les acquéreurs ont saisi le tribunal d'instance de La Rochelle sur le fondement de l'article 1641 du code civil et subsidiairement 1147 du même code aux fins de voir notamment condamner leur vendeur au paiement de la somme de 5.482,95 euros représentant le coût des travaux de raccordement de l'assainissement de la maison annexe au réseau public, outre une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral.

Par jugement du 24 juin 2013, le tribunal, après avoir dit que le vendeur avait manqué à son obligation de délivrance conforme prévue à l'article 1603 du code civil, a
- condamné M. Z à verser aux acquéreurs une somme de 5.482,95 euros indexée sur l'indice BT01 à compter du mois d'août 2012 ;
- donné acte aux acquéreurs de ce que si la solution technique n°1, objet de la réclamation, ne pouvait être réalisée, ils saisiraient alors à nouveau la juridiction pour obtenir des dommages et intérêts complémentaires ;
- condamné M. Z à verser aux acquéreurs les sommes de 500 euros à titre de dommages et intérêts et 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. Z, qui n'a pas comparu devant le tribunal d'instance, a régulièrement relevé appel de cette décision.
Par conclusions signifiées le 20 mars 2014, M. Z sollicite l'entière réformation du jugement et demande à la cour de
A titre principal
- Juger que le juge d'instance ne pouvait changer le fondement juridique des demandes qui lui étaient soumises,
- Constater l'impossibilité pour les consorts ... de présenter des demandes sur le fondement de l'obligation de délivrance compte tenu du principe de concentrations des moyens.
A titre subsidiaire
- Juger que M. Z a délivré un bien conforme,
- Juger que la responsabilité de M. Z ne peut être engagée au titre de la garantie des vices cachés, de la responsabilité contractuelle pour inexécution ou de l'obligation de délivrance.
En tout état de cause
-Débouter les consorts ... de toutes demandes tendant à la prise en charge de travaux ou d'allocation de dommages et intérêts.
- Condamner les consorts ... à verser à M. Z une somme de 3.000euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
M. Z soutient que le tribunal d'instance n'avait pas à rechercher si les circonstances de la vente engageaient sa responsabilité au titre de l'obligation de délivrance alors qu'aucune demande n'était présentée sur ce fondement, qu'en vertu du principe de concentration des moyens, les intimés devaient présenter ce fondement dès leur assignation et ne sont plus recevables à le faire devant la cour.
Subsidiairement, il précise qu'il a bien délivré un bien conforme à ce qui était convenu, que l"immeuble' est bien raccordé au réseau collectif d'assainissement, que seule la maison annexe, non habitable, ne l'était pas mais que le raccordement de la maison annexe n'était pas dans le champ contractuel.
Par conclusions signifiées le 15 juillet 2014, Mme ... et MM X demandent à la cour de
- confirmer le jugement ;
- y ajoutant, condamner M. Z au paiement de la somme de 477,33 euros correspondant au préjudice financier consécutif au paiement de la majoration de la redevance assainissement ;
- le condamner au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
Ils soutiennent que le vendeur n'ignorait pas que la maison annexe n'était pas raccordée puisque les services de la CDA lui avaient demandé de se mettre en conformité avant le 31 décembre 2003 et qu'il a payé une majoration de la redevance d'assainissement.

MOTIFS
Sur la demande principale
Les intimés invoquent la possibilité pour le juge de restituer aux faits leur exacte qualification sans s'arrêter à celle que les parties ont proposée, dans le but de voir désormais retenir à la charge de M. Z un manquement à l'obligation de délivrance conforme, fondement retenu par le premier juge, alors qu'ils avaient fondé leur demande initialement sur la garantie des vices cachés.
Or, lorsqu'un défaut s'analyse à la fois comme un vice caché et comme un manquement à l'obligation de délivrance, l'acquéreur ne peut agir que sur le fondement de la garantie des vices cachés.
En l'espèce, le jugement n'a pas exposé en quoi le défaut ne constituait pas un vice caché et n'a retenu que la non conformité du bien.
Par ailleurs, le principe de concentration des moyens ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce étant observé qu'une partie peut modifier en appel le fondement de sa demande.
Le bien vendu est, aux termes de l'acte de vente, désigné ainsi
-une maison individuelle à rénover comprenant entrée, séjour cuisine, deux chambres, salle d'eau, wc, véranda, cave en sous-sol, jardin avec dépendances,
- une maison annexe comprenant entré, séjour cuisine, chambre, salle d'eau, wc.
'Tel que le tout existe sans exception ni réserve et tel qu'il sera dénommé dans le cours de l'acte par le terme 'l'immeuble'.
L'acte de vente précise en page 12 ' Assainissement- eaux usées Concernant l'évacuation des eaux usées, le vendeur déclare que l'immeuble est raccordé au réseau collectif d'assainissement public'.
Il se déduit de cette mention et du fait que ' l'immeuble' désignait la maison principale et la maison annexe, que l'une et l'autre des maisons étaient raccordées.
Or, par courrier du 10 août 2011 adressé à Mme ..., le service assainissement de la communauté d'agglomération de La Rochelle lui a demandé, après avoir réalisé un diagnostic le 4 août 2011 révélant des anomalies, de procéder au raccordement au réseau d'assainissement du logement du fond.
Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu à la garantie à raison des défauts cachés de la chose qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
En l'espèce, les acquéreurs ont constaté en 2011 que la maison annexe n'était pas raccordée contrairement aux stipulations de l'acte de vente. Ce défaut de raccordement constitue un vice caché rendant une partie de l'immeuble acquis impropre à l'usage auquel il est destiné, à savoir l'habitation des 2 maisons le composant, étant observé qu'en ville le raccordement au réseau collectif d'assainissement public est obligatoire et qu' aucun autre moyen d'évacuation des eaux usées n'est possible, la superficie acquise étant en l'espèce de 3a12 ca.
Le vendeur ne saurait soutenir que la maison annexe n'étant pas habitée depuis plusieurs années, les parties n'avaient pas inclus dans le champ contractuel la possibilité pour ladite maison d'être raccordée. Au contraire, les deux maisons étaient à rénover et avaient vocation à être habitées.
L'absence de raccordement au réseau collectif d'assainissement de la maison annexe constitue par conséquent un vice caché rendant l'immeuble impropre à l'usage auquel il est destiné.
Il ressort des pièces produites et notamment d'un courrier du service d'assainissement de la CDA de La Rochelle du 8 juin 2012 que ce service a constaté le 18 septembre 2003 que ' le bâtiment au fond du jardin ainsi que la machine à laver de l'habitation principale n'étaient pas raccordées' et a demandé au propriétaire de réaliser les travaux de mise en conformité avant le 31 décembre 2003. A cette date, M. Z était propriétaire ( et ce depuis le 9 août 2002). En page 11 de ses conclusions, M. Z indique avoir procédé au raccordement de la machine à laver mais non à celui de la maison annexe, non habitable. La preuve est ainsi rapportée de la connaissance par le vendeur du vice caché.
La clause d'exclusion des vices cachés doit de ce fait être écartée et M. Z, condamné à garantir les acquéreurs des conséquences du vice.
Le jugement sera par conséquent confirmé par substitution de motifs. Sur les dommages et intérêts
Mme ... a fait réaliser les travaux fin 2013. Il y a lieu de faire droit à sa demande en paiement des devis établis les 22 novembre 2012 par la CDA de La Rochelle et le 16 avril 2012 par la Sotrap, sans toutefois prévoir une indexation des sommes compte tenu de la réalisation des travaux dans l'année des devis et de l'absence de production des factures effectivement acquittées.
Les travaux ayant été déclarés conformes par courrier du 7 novembre 2013, il n'y a plus lieu de maintenir les dispositions du jugement donnant acte aux consorts ... de ce qu'ils se réservent la possibilité de solliciter l'indemnisation de dommages et intérêts supplémentaires dans le cas où les travaux, objet de la demande, seraient insuffisants sur le plan technique.
Concernant la demande de remboursement de la majoration d'assainissement, les consorts ... produisent les factures desdites majorations et sont bien fondés à solliciter la somme de 477,13 euros en vertu de l'article 1645 du code civil aux termes duquel le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.
Les intimés ont subi un préjudice dû à la faute de M. Z resté taisant sur le défaut de raccordement d'une des maisons. Le jugement sera confirmé en ce qu'il leur a alloué une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.
Il est par ailleurs équitable de leur accorder une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement seulement en ce qu'il a dit que la somme de 5.482,95euros serait indexée à compter du mois d'août 2012 sur l'indice BT01 et en ce qu'il a donné acte à Mme ... et à MM X de ce qu'ils se réservaient la possibilité de ressaisir la juridiction aux fins d'indemnisation d'un préjudice supplémentaire dans le cas où les travaux, objet des devis, seraient insuffisants sur le plan technique ;
Confirme le jugement pour le surplus par motifs substitués ; Y ajoutant
Condamne M. Z à payer à Mme ... et MM X la somme de 477,13 euros au titre de la majoration de la redevance assainissement ;
Condamne M. Z à verser à Mme ... et à MM X une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. Z aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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