COMM.
CC
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 décembre 2024
Cassation partielle
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 740 F-D
Pourvoi n° D 23-18.564
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 DÉCEMBRE 2024
La société E. Aa Ab & Co, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 23-18.564 contre l'
arrêt n° RG 22/02442 rendu le 6 juin 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile⚖️), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Consulting gestion privée ingénierie & Cie (CGPI), société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société E. Aa Ab & Co, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Consulting gestion privée ingénierie & Cie (CGPI), après débats en l'audience publique du 15 octobre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 6 juin 2023, n° RG 22/02442), la société E. Aa Ab & Co (la société Aa Ab) a formé devant le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) une demande en nullité de la marque verbale « Institut [4] » déposée le 20 juin 2019 par la société Consulting gestion privée ingénierie & Cie (la société CGPI) pour divers produits et services visés en classes 35, 36, 41, 42 et 45, en invoquant le dépôt de mauvaise foi, l'imitation de ses marques antérieures française verbale n° 1299702 et semi-figurative n° 1424010 « [4] » et l'atteinte à la renommée de ces marques.
2. Le directeur général de l'INPI a rejeté cette demande.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen relevé d'office
4. Après avis donné aux parties conformément à l'
article 1015 du code de procédure civile🏛, il est fait application de l'
article 620, alinéa 2, du même code🏛.
Vu l'
article 15, I, alinéa 1er, de l'ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019🏛 et les
articles L. 716-2, II, 1°, et L. 711-3, I, 2°, du code de la propriété intellectuelle🏛, dans leur rédaction issue de cette ordonnance :
5. Selon le premier de ces textes, sauf dérogations énumérées en ses 1° et 2°, les dispositions de l'ordonnance précitée entrent en vigueur à la date d'entrée en vigueur du décret pris pour son application et au plus tard le 15 décembre 2019.
6. Il ressort des deux derniers textes que le titulaire d'une marque antérieure renommée peut agir en nullité contre une marque postérieure lorsque cette dernière est identique ou similaire à la marque antérieure, que les produits ou les services qu'elle désigne soient ou non identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée ou demandée et que son usage sans juste motif tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou qu'il leur porterait préjudice.
7. En l'absence de disposition transitoire dérogatoire prévue à l'article 15 de l'ordonnance du 13 novembre 2019, ces dispositions sont applicables à la demande en nullité d'une marque enregistrée, introduite devant le directeur général de l'INPI, postérieurement au 11 décembre 2019, date de l'entrée en vigueur de ladite ordonnance.
8. Pour écarter la demande en nullité de la marque « Institut [4] », enregistrée le 20 mars 2020, fondée sur l'atteinte aux marques renommées antérieures « [4] », l'arrêt, après avoir écarté toute similitude entre les produits et services concernés, retient que la société Aa Ab ne peut fonder sa demande en nullité sur les dispositions du code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction issue de l'
ordonnance n° 2019-1169 du 13 novembre 2019🏛, dans la mesure où la marque contestée a été déposée le 20 juin 2019, avant l'entrée en vigueur de cette ordonnance, de sorte que le régime de nullité applicable au recours est soumis aux dispositions des
articles L. 711-4 et L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle🏛🏛, dans leurs versions applicables au jour du dépôt.
9. En statuant ainsi, alors que les articles L. 716-2, II, 1°, et L. 711-3, I, 2°, du code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 13 novembre 2019, étaient applicables à la demande en nullité de la marque litigieuse formée le 17 mai 2021 par la société Aa Ab, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette le recours formé par la société E. Aa Ab contre la décision du directeur général de l'INPI du 20 avril 2022 en ce qu'elle rejetait la demande en nullité fondée sur le dépôt de mauvaise foi de la marque « [4] Investissements », l'arrêt rendu (n° RG 22/02442) le 6 juin 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;
Condamne la société Consulting gestion privée ingénierie & Cie aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société Consulting gestion privée ingénierie & Cie et la condamne à payer à la société E. Aa Ab & Co la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille vingt-quatre.