COMM.
LM
COUR DE CASSATION
Audience publique du 11 mars 2003
Cassation partielle
M. TRICOT, président
Pourvoi n° Y 00-22.722
Arrêt n° 478 FS P
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), association constituée et déclarée sous le régime de la loi du 1er juillet 1901 reconnue comme établissement d'utilité publique par décret du 6 avril 1922, dont le siège est Paris ,
en cassation d'un arrêt rendu le 8 novembre 2000 par la cour d'appel de Paris (1re chambre, section G), au profit de la société Groupement d'achat Édouard Leclerc (Galec), société anonyme, dont le siège est Issy-les-Moulineaux,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 janvier 2003, où étaient présents M. Y, président, M. X, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, Mmes Garnier, Tric, Collomp, Favre, Betch, M. Petit, Mme Cohen-Branche, conseillers, M. Boinot, Mme Champalaune, M. Truchot, conseillers référendaires, M. W, avocat général, Mme V, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. X, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thomas-Raquin et Benabent, avocat du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), de la SCP Tiffreau, avocat de la société Galec, les conclusions de M. W, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, financière et économique, 29 juin 1999, n° 1331 P), que la société Groupement d'achat des centres Leclerc (la société Galec), titulaire, depuis 1993, de deux marques "Olymprix", utilise ce terme pour l'organisation et la publicité d'une campagne annuelle de promotion à prix réduits dans les magasins à l'enseigne E. ... ; que le Comité national olympique et sportif français (le CNOSF) l'a assignée en responsabilité, en se fondant notamment sur l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, afin qu'il lui soit fait interdiction de faire usage de ce terme et qu'elle soit condamnée au paiement de dommages-intérêts pour avoir exploité sans autorisation les marques notoires appartenant au Comité olympique international ; que la cour d'appel a accueilli cette demande par application de l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle ; que cette décision a été cassée en toutes ses dispositions ; que l'arrêt a rejeté les prétentions du CNOSF, au regard, tant du texte précité, que de l'article 1382 du Code civil ;
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que le CNOSF faisant valoir que l'usage de la dénomination Olymprix par la société Galec portait atteinte à l'élément essentiel de la marque Jeux olympiques ainsi qu'à la notoriété de l'événement ainsi désigné et engageait la responsabilité de son auteur, l'arrêt retient que l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle instaurant une action spécifique en responsabilité, les dispositions de l'article 1382 du Code civil ne peuvent être invoqués utilement, s'agissant des mêmes faits ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'imitation d'une marque notoirement connue ne constituant pas le même fait que son emploi, seul visé par l'article L. 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, le dépositaire d'une telle marque est recevable à agir, quant à une telle imitation, dans les termes du droit commun, la cour d'appel a violé le texte susvisé par refus d'application ;
Sur le même moyen, pris en sa cinquième branche
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande du CNOSF, l'arrêt retient que la seule association par contraction des termes Olympe et prix ne saurait suffire pour caractériser un avilissement de la marque antérieure, qui n'est au demeurant pas reproduite ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que la société Galec avait imité la marque dans le cadre d'une campagne promotionnelle en usant d'un néologisme Olymprix, de nature à évoquer dans l'esprit du public la manifestation sportive de renom organisée tous les quatre ans par le CNOSF, ce dont résultait une atteinte à la valeur de cette marque, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;
Sur le même moyen, pris en sa sixième branche
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande fondée sur les agissements de la société Galec, l'arrêt retient que le CNOSF ne peut revendiquer l'usage exclusif de l'expression "transporteur officiel" ;
Attendu qu'en se déterminant pas de tels motifs, sans répondre aux conclusions par lesquelles le CNOSF, qui ne revendiquait pas une telle exclusivité, soutenait que l'emploi de l'expression "transporteur officiel Olymprix" avait pour objet de faire référence à une expression bien connue du grand public à laquelle celui-ci n'a pu manquer de se reporter en l'assimilant par association d'idée à l'expression "transporteur officiel des Jeux olympiques", la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le second moyen
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, pour rejeter l'action du CNOSF en responsabilité civile fondée sur les agissements parasitaires de la société Galec, l'arrêt retient que la dénomination est protégée contre toute usurpation de nature à créer, dans l'esprit de la clientèle, un risque de confusion et que si le terme "Olympique" constitue l'élément essentiel de sa dénomination, le CNOSF ne rapporte pas la preuve que sa seule évocation dans le slogan "Les Olymprix" soit de nature à créer un risque de confusion entre les deux personnes morales ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs inopérants, dès lors que le CNOSF fondait son action, non sur l'article L. 711-4 b) du Code de la propriété industrielle, mais sur l'article 1382 du Code civil, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes fondées par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) sur l'imitation des marques dont il est dépositaire, sur l'imitation de sa dénomination sociale et sur l'usage de la dénomination "transporteur officiel Olymprix", l'arrêt rendu le 8 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne la société Galec aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille trois.