SOC.
C.F
COUR DE CASSATION
Audience publique du 29 janvier 2003
Cassation sans renvoi
M. SARGOS, président
Pourvoi n° D 00-22.290
Arrêt n° 224 FS D
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par l'Union départementale CGT de la Sarthe, dont le siège est Le Mans,
en cassation d'un arrêt rendu le 9 octobre 2000 par la cour d'appel d'Angers (chambre commerciale), au profit de la société ambulances Mancelles, société à responsabilité limitée, dont le siège est Le Mans,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 3 décembre 2002, où étaient présents M. Y, président, M. X, conseiller rapporteur, MM. Boubli, Ransac, Bouret, Bailly, Chauviré, Gillet, conseillers, Mmes Lebée, Andrich, MM. Funck-Brentano, Leblanc, Mmes Slove, Farthouat-Danon, Bobin-Bertrand, conseillers référendaires, Mme W, avocat général, Mme V, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. X, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de l'Union départementale CGT de la Sarthe, les conclusions de Mme W, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que la responsabilité civile d'un syndicat, même s'il a soutenu une grève, ne peut être engagée que s'il a activement participé aux actes illicites commis à l'occasion de cette grève ou s'il en a été l'instigateur ;
Attendu que pour retenir la responsabilité de l'Union départementale CGT de la Sarthe dans les agissements illicites commis au cours d'une grève au sein de la société Ambulances Mancelles et pour la condamner au paiement de la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt attaqué énonce essentiellement que le 15 janvier 1999, une ambulance obstruait l'entrée de l'entreprise en présence d'un groupe d'environ dix personnes composé de salariés grévistes et de M. U, secrétaire de l'Union départementale - CGT ; qu'en obstruant l'accès de l'entreprise pendant tout le mois de janvier 1999 et en interdisant aux non-grévistes de travailler, les grévistes ont commis des agissements illicites ; que des violences et détériorations matérielles ont également été perpétrées ; que M. U, secrétaire de l'Union départementale - CGT ne s'est pas contenté d'un simple rôle d'observation puisqu'il s'est présenté dès le 30 décembre 1998 à l'huissier de justice comme secrétaire de l'Union départementale - CGT, assistant à ce titre à la première libération des locaux ; que le 15 janvier, M. U était toujours présent sur les lieux ; que, sur la demande de l'huissier s'adressant aux grévistes qui l'accompagnaient, M. U n'a rien répondu, cautionnant par là même l'attitude des salariés ; que par sa seule présence physique au sein du piquet de grève, en sa qualité de secrétaire de l'Union départementale -CGT, M. U a incontestablement apporté une participation active au mouvement des grévistes qui empêchaient l'accès à l'entreprise, s'associant à une action dont il ne pouvait ignorer le caractère illicite ; que M. U en sa qualité de représentant CGT dans le département a suivi d'un bout à l'autre l'évolution de ce conflit social et représenté les grévistes devant le juge des référés ; qu'ayant une parfaite connaissance des modalités de déroulement du mouvement de grève et des décisions de justice rendues il a, en agissant de concert avec ceux qui ont commis des actes illicites, participé concrètement et délibérément à la résistance opposée aux ordonnances d'expulsion ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que les seuls faits constatés par les juges du fond sont insusceptibles de caractériser une faute du syndicat en l'absence de tout agissement positif de son représentant, de toute incitation active à commettre un acte illicite et de toute participation délibérée à un tel acte et alors que la seule présence du secrétaire de l'Union départementale - CGT le jour de l'obstruction des locaux ne caractérise pas un tel agissement fautif du syndicat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu à renvoi devant une autre cour d'appel, la Cour de Cassation pouvant donner au litige la solution appropriée par application de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 octobre 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que l'Union départementale CGT de la Sarthe n'a pas commis de faute et déboute la société ambulances Mancelles de ses demandes ;
Condamne la société ambulances Mancelles aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille trois.