ARRÊT DU CONSEIL D'ETAT
CONSEIL D'ETAT
Statuant au contentieux
N° 240806
Mlle D'ALESIO et autres
M. Struillou, Rapporteur
Mme Roul, Commissaire du gouvernement
Séance du 21 juin 2002
Lecture du 29 juillet 2002
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Conseil d'Etat statuant au contentieux
(Section du contentieux, 4ème et 6ème sous-sections réunies)
Sur le rapport de la 4ème sous-section de la Section du contentieux
Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mlle Alexandra D'ALESIO, demeurant 13, avenue de Ponant à Villeneuve-La-Garenne (92390) ; Mme Karine ATTAL épouse ELKOUBI, demeurant 22, rue du Général Leclerc à Saint-Leu-La-Forêt (95540) ; Mlle Coralie BERELLE, demeurant 11, rue de l'Eglise à Saint-Leu-La-Forêt (95540) ; Mlle Christelle LOLLIOT, demeurant 50, rue Maurice Berteaux à Ermont (95120) ; Mlle Morgann LAURENT, demeurant 5 bis, rue Moreau à Saint-Denis (93200) ; Mlle Ludivine NATAF, demeurant 32, rue d'Orgemont à Epinay (93$00) ; Mlle Claire CHANUT, demeurant 33, avenue Louis Blanc à Livry-Gargan (93190) ; Mlle Frédérique DUCHEVEU, demeurant 1, rue des Doucettes à Garges-Les-Gonesses (95140) ; Mlle Fleur OUZILOU, demeurant 12, rue Alibert à Enghien (95280) et M. Koffi DJEMIS, demeurant 30, rue de Passy à Paris (75016) ; Mlle D'ALESIO et autres demandent que le Conseil d'Etat
1°) annule l'ordonnance en date du 4 décembre 2001 par laquelle le juge des référés du tribunal de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à ce que soit ordonnée, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension, d'une part, de la délibération, du 6 novembre 2001, par laquelle le jury de l'institut d'études judiciaires de l'Université Paris XIII a arrêté la liste des candidats admissibles à l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle d'avocats pour l'année 2001 et, d'autre part, de la délibération du 27 novembre 2001 par laquelle ce même jury a arrêté la liste des candidats admis audit examen;
2°) prononce la suspension des délibérations des 6 et 27 novembre 2000 précitées ;
3°) ordonne à l'Université Paris XIII d'organiser de nouvelles épreuves, de convoquer les étudiants inscrits à l'examen à ces épreuves et de les informer que les épreuves d'admissibilité et d'admission ont été suspendues ;
Vu les autres pièces du dossier;
Vu la note en délibéré présentée pour Mlle D'ALESIO et autres le 4 avril 2002 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales;
Vu la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique
- le rapport de M. Struillou, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Guinard, avocat de Mlle D'ALESIO et autres et de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de l'institut d'études judiciaires de l'Université Paris XIII,
- les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative: "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques : "La formation professionnelle exigée pour l'exercice de la profession d'avocat comprend (...) 1° Un examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle; 2° Une formation théorique et pratique d'une année dans un centre, sanctionnée par le certificat d'aptitude à la profession d'avocat ; 3° Un stage de deux années, sanctionné par un certificat de fin de stage" ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 14 de la même loi : "Les recours à l'encontre des décisions concernant la formation professionnelle sont soumis à la cour d'appel compétente" ; que ces dispositions législatives, qui ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, attribuent compétence à la juridiction judiciaire pour connaître de l'ensemble des litiges relatifs à la formation .professionnelle des avocats, y compris ceux qui sont relatifs à l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle ;
Considérant que les demandes dont a été saisi le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise tendaient à ce que soit ordonnée la suspension des délibérations par lesquelles le jury de l'institut d'études judiciaires de l'université Paris XIII a arrêté la liste des candidats admissibles et des candidats admis au centre régional de formation professionnelle d'avocats pour la session 2001 ; qu'il résulte des dispositions législatives rappelées ci-dessus que de telles demandes ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative ; que le juge des référés a, par suite, méconnu sa compétence en rejetant la demande dont il était saisi au motif que celle-ci était mal fondée ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler l'ordonnance attaquée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Considérant qu'il résulte de ce quia été dit ci-dessus que les demandes présentées par les requérants devant le juge des référés ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative; qu'il y a lieu, dès lors, de les rejeter;
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 4 décembre 2001 du juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.
Article 2 : Les demandes présentées par Mlle D'ALESIO et autres devant le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mlle Alexandra D'ALESIO, à Mme Karine ATTAL épouse ELKOUBI, à Mlle Coralie BERELLE, à Mlle Christelle LOLLIOT, à Mlle Morgann LAURENT, à Mlle Ludivine NATAF, à Mlle Claire CHAHUT, à Mlle Frédérique DUCHEVEU, à Mlle Fleur OUZILOU, à M. Koffi DJEMIS, à l'Université Paris XIII et au garde des sceaux, ministre de la justice.