Jurisprudence : Cass. com., 02-07-2002, n° 01-12.685, FS-P, Cassation.

Cass. com., 02-07-2002, n° 01-12.685, FS-P, Cassation.

A0661AZI

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COMM.
M.F.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 2 juillet 2002
Cassation
M. DUMAS, président
Pourvoi n° J 01-12.685
Arrêt n° 1312 FS P
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par la société Opel France, société anonyme, nouvellement dénommée Général Motors France, dont le siège est Argenteuil,
en cassation d'un arrêt rendu le 17 mai 2001 par la cour d'appel de Lyon (3e Chambre civile), au profit

1°/ de la société Automobile France Finance, société à responsabilité limitée, venant aux droits de la société Sofco Automobiles, dont le siège est Annemasse,

2°/ de la société GM2R, société à responsabilité limitée, dont le siège est Ecully,
défenderesses à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 22 mai 2002, où étaient présents M. V, président, Mme U, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, Mmes Garnier, Collomp, Favre, Betch, conseillers, M. Boinot, Mmes Champalaune, Gueguen, MM. Sémériva, Truchot, conseillers référendaires, M. T, avocat général, Mme S, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme U, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Opel France nouvellement dénommée Général Motors France, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Automobile France Finance, venant aux droits de la société Sofco Automobiles et de la société GM2R, les conclusions de M. T, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Sofco automobiles (société Sofco) exploitait par le biais de ses filiales un réseau de vingt-deux concessions automobiles ; que le 26 février 1997, la société Sonauto s'est engagée à lui reprendre quatorze de ces concessions, par acquisition du capital des sociétés concessionnaires, en précisant que l'acte définitif devrait intervenir le 15 avril 1997 au plus tard, afin de permettre à la société Sofco de recueillir l'agrément des concédants, mais que cet engagement serait remis en cause si deux concessions sur les quatorze ne pouvaient être cédées ; que le 27 mars 1997, la société Opel France a notifié son refus d'agrément pour quatre des concessions visées par le plan de reprise ; que l'opération n'ayant pu aboutir, la société Sofco a assigné la société Opel France en paiement de dommages-intérêts, en lui reprochant un refus abusif d'agrément ; que sa filiale, la société GM2R, est intervenue à l'instance pour demander l'indemnisation de son préjudice ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches
Attendu que la société Opel France fait grief à l'arrêt de sa condamnation alors, selon le moyen
1°) que le droit du concédant automobile de traiter avec le concessionnaire de son choix étant discrétionnaire, il n'est pas tenu de justifier a priori des raisons qui l'ont conduit à refuser d'agréer, au lieu et place du concessionnaire qu'il a choisi, un autre que celui-ci entend se substituer dans la poursuite du contrat, de sorte qu'en estimant que la société Opel France s'était rendue coupable d'abus dans l'exercice de son droit, de ne pas agréer le successeur présenté par la société Sofco pour la substituer dans le capital des sociétés concessionnaires, au seul motif qu'elle n'avait pas motivé a priori ce refus et permis à la société Sofco d'en vérifier le bien-fondé, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1382 du Code civil ;
2°) que l'engagement pris par le concédant, aux termes de l'article 2-2 de l'annexe au contrat de concession, d'examiner "équitablement et consciencieusement" tout candidat proposé par le concessionnaire pour le substituer dans la poursuite du contrat, n'étant que le rappel du principe général d'exécution de bonne foi des contrats, viole cette clause et les articles 1134 et 1315 du Code civil, la cour d'appel qui, se fondant sur ladite clause, met à la charge du concédant l'obligation contractuelle d'énoncer, a priori, les motifs pour lesquels il a refusé son agrément et d'établir la légitimité de ceux-ci ;
Mais attendu qu'ayant relevé que le contrat de concession, expressément conclu intuitu personae, prévoyait que son transfert au profit d'un tiers était subordonné à l'agrément du concédant et que ce dernier s'était engagé à "examiner équitablement et avec tout le soin requis le changement proposé et communiquer rapidement sa décision au concessionnaire", la cour d'appel a pu en déduire que le refus d'agrément par le concédant devait être justifié par des impératifs tenant à la sauvegarde de ses intérêts commerciaux légitimes et que, pour éviter tout arbitraire, il lui appartenait de le motiver, à seule fin de permettre au concessionnaire de vérifier que sa décision était fondée sur un examen équitable et soigneux, conforme à ses engagements contractuels ; que les griefs ne sont pas fondés ;
Mais sur le même moyen, pris en sa troisième branche
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour décider que le refus d'agrément était abusif, l'arrêt se borne à retenir que la société Opel France, qui connaissait parfaitement le contenu des activités de la société Sonauto, sa solidité financière et le caractère sérieux de son offre, a opposé à la société Sofco un refus d'agrément non motivé, mettant ainsi son cocontractant dans l'impossibilité de vérifier qu'elle avait examiné sa proposition équitablement et avec soin, et que ce n'est qu'au cours de l'instance qu'elle a motivé sa décision par l'importance des liens entre la société Sonauto et la société Volkswagen, de telles motivations, fournies a posteriori, ne permettant pas de justifier un refus qui devait s'apprécier au moment de la présentation du repreneur ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si les motifs avancés par le concédant, même tardivement, n'étaient pas de nature à justifier son refus d'agrément, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mai 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société Automobile France Finance et la société GM2R aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille deux.

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