Jurisprudence : Cass. com., 16-10-2001, n° 98-12216, publié au bulletin, Rejet.



Chambre commerciale
Audience publique du 16 octobre 2001
Pourvoi n° 98-12.216
M. Richard Z ¢
compagnie Axa assurances Arrêt n° 1754 FS P
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant

Sur le pourvoi formé par M. Richard Z, demeurant Morlaix,
en cassation d'un arrêt rendu le 10 décembre 1997 par la cour d'appel de Rennes (7e Chambre civile), au profit

1°/ de la compagnie Axa assurances, dont le siège est Morlaix,

2°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Nord-Finistère, dont le siège est Brest,

3°/ de Mme Marie-Thérèse W, épouse W W, demeurant Locquirec,

4°/ de M. Jean V, demeurant Morlaix,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 10 juillet 2001, où étaient présents M. Dumas, président, Mme Besançon, conseiller rapporteur, MM. Tricot, Badi, Mmes Aubert, Tric, Lardennois, Pinot, M. Cahart, conseillers, Mme Graff, MM. de Monteynard, Delmotte, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Besançon, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Z, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la compagnie Axa assurances, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 décembre 1997), que M. Z a signé, devant notaire, le 14 avril 1993, une offre d'achat d'un immeuble dépendant de la liquidation judiciaire de l'entreprise artisanale de M. Le ... au prix de 150 000 francs sous la condition suspensive d'obtention, sous deux mois, de l'acceptation de l'offre par le vendeur, d'un prêt dont le montant, non précisé dans l'acte, avait été fixé à 150 000 francs dans la demande de prêt initialement formulée auprès de la banque; que M. ..., mandataire liquidateur de l'entreprise de M. Le ... étant favorable à cette vente a sollicité et obtenu du juge commissaire de la liquidation, par ordonnance du 13 juillet 1993, I'autorisation de signer l'acte de vente au prix de 150 000 francs offert, payable lors de la régularisation de l'acte authentique qui est intervenue les 21 septembre et 30 septembre 1993, le représentant de M. ... étant le dernier à intervenir ; que ce même acte a consacré au profit de M. Z un prêt de 270 000 francs sur offre de la banque du 7 septembre 1993 qu'il acceptait ; que le 26 août 1993, Mme Le ... avertie du fait que des travaux avaient été entrepris dans l'immeuble a visité les lieux et y a fait une chute ; que soutenant que la responsabilité de M. Z et de M. V, architecte chargé par lui d'étudier la rénovation du bien dès juillet 1993, était engagée à son égard, Mme ... ..., par acte du 31 août 1994, les a assignés, ainsi que la caisse primaire d'assurance maladie afin d'obtenir la consécration de la responsabilité commune et solidaire de M. Z et de M. V à son endroit et leur condamnation à l'indemniser de l'intégralité de son préjudice corporel ; que, le 18 janvier 1995, M. Z a appelé à la cause la société Axa assurances, auprès de laquelle il avait assuré l'immeuble au titre d'une police d'assurance "multirisque Immeuble" garantissant, notamment, sa responsabilité en qualité de propriétaire du bien, assuré avec effet du 27 juillet 1993 ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches
Attendu que M. Z reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui, tout en le déclarant responsable du préjudice subi par Mme Le ... le 26 août 1993 en application de l'article 1382 du Code civil, a rejeté ses demandes formées contre la société Axa assurances, alors, selon le moyen
1°/ que la cession d'un élément de l'actif d'un débiteur en liquidation judiciaire est parfaite dès l'ordonnance du juge commissaire, en l'espèce du 13 juillet 1993, autorisant la vente de gré à gré sous la condition que la décision acquière force de chose jugée, sans qu'il soit nécessaire que le liquidateur procède encore, à la suite de cette autorisation, à une manifestation de la volonté de lever l'option ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 154, alinéa 3 de la loi du 25 janvier 1985 ;
2°/ que la condition accomplie a un effet rétroactif au jour auquel l'engagement a été contracté ; qu'ainsi, et en l'absence de stipulation contraire dans l'offre de M. Z ou dans I'ordonnance du juge commissaire, le transfert de propriété s'est opéré, au plus tard, lors de la notification à M. Z de l'offre de prêt emportant accomplissement de la condition suspensive, et ce, rétroactivement au jour de l'ordonnance du juge commissaire autorisant la vente de gré à gré consacrant la vente ; qu'en décidant que M. Z n'aurait acquis la qualité de propriétaire que le 30 septembre 1993, date de l'acte notarié, la cour d'appel a violé l'article 1179 du Code civil ;

3°/ que les actes accomplis par M. Z alors que la condition était pendante se sont trouvés validés à la date de la réalisation de la condition, par l'effet rétroactif, au jour de l'ordonnance autorisant la cession du transtert de propriété, de cette condition ; qu'en qualifiant ces mêmes actes ainsi validés de fautifs, la cour d'appel a encore violé les articles 1179 et 1382 du Code civil ;

Mais attendu que lorsque le juge-commissaire autorise, en application de l'article 154, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 622-16, alinéa 3, du Code de commerce, la cession amiable de biens immobiliers compris dans l'actif de la procédure collective, il résulte de l'article 138, alinéa 3, du décret du 27 décembre 1985 que le liquidateur passe les actes nécessaires à la réalisation de la vente ; que, dès lors, et s'il n'en est autrement décidé par l'ordonnance du juge-commissaire, le transfert de la propriété des biens s'opère à la date de la passation des actes précités ; qu'ayant constaté que l'acte avait été signé devant notaire les 21 et 30 septembre 1993, la cour d'appel, qui en a déduit que M. Z n'avait acquis la qualité de propriétaire qu'à cette dernière date, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur les deuxième et troisième moyens, réunis
Attendu que M. Z reproche encore à l'arrêt par le moyen reproduit en annexe tiré de la violation des articles 1179 et 1382 du Code civil d'avoir statué comme il a fait ;
Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit que le 26 août 1993 M. Z était dépourvu de tout droit d'occupation de l'immeuble, constaté que simple détenteur précaire des clés, il avait abusé de la situation en y entreprenant d'importants travaux de démolition sans autorisation de quiconque et qu'il n'avait pris sur place aucune précaution pour avertir d'éventuels visiteurs du danger encouru, la cour d'appel, sans inverser la charge de la preuve, a pu déduire que M. Z, qui ne discutait pas le lien de causalité pouvant exister entre la chute de Mme Le ... et l'exécution des démolitions des cloisons, avait commis une faute directement à l'origine de l'accident survenu à cette dernière et qu'il ne pouvait lui imputer une quelconque faute de nature à justifier le rejet de ses demandes ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches
Attendu que M. Z fait enfin grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande formée contre son assureur, la compagnie Axa assurances, alors, selon le moyen
1°/ que le caractère rétroactif de la condition suspensive réalisée entraîne la validité des actes accomplis avant ladite réalisation ; qu'ainsi le contrat d'assurance souscrit par M. Z en qualité de propriétaire de l'immeuble, avec effet au 27 juillet 1993, devait couvrir les conséquences dommageables de la chute de Mme Le ... postérieure à cette date d'effet, sur le fondement du risque "responsabilité en qualité de propriétaire", peu important que le contrat d'assurance ait été conclu à une date à laquelle la condition et, partant, le transfert de propriété ne se trouvaient pas encore réalisés ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 1179 du Code civil ;
2°/ que loin de limiter la garantie responsabilité civile de l'assuré à sa responsabilité en qualifé de gardien de la chose, au sens de l'article 1384, alinéa 1er du Code civil, la police souscrite par M. Z auprès de la compagnie Axa assurances stipule, sans distinction entre les fondements de cette responsabilité, que la garantie responsabilité civile en qualité de propriétaire couvre "les dommages causés aux tiers, lorsqu'ils entraînent la responsabilité de l'assuré et qu'ils résultent directement du fait des biens immobiliers et du contenu ainsi que des cours, jardins, plantations, et de toutes les installations intérieures ou extérieures" ; qu'ilrésulte desconstatations de la cour d'appel que la chute de Mme Le ... aurait été provoquée par des gravats provenant de la démolition d'un mur de l'immeuble assuré ; que, dès lors, le dommage résultait bien du fait du bien immobilier ou de son contenu, et la garantie devait jouer, peu important que la responsabilité de M. Z résultant du dommage ait été retenue sur le fondement de la faute personnelle ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé à bon droit que M. Z n'était devenu propriétaire de l'immeuble qu'après le 26 août 1993, et constaté que l'assureur n'était pas tenu contractuellement de lui accorder la garantie pour un risque réalisé à une date où sa qualité de propriétaire de l'immeuble, condition de base de la couverture du risque n'était pas acquise et où sa responsabilité civile en qualité de propriétaire ne pouvait donc être engagée, la cour d'appel a pu en déduire que M. Z ne pouvait obtenir la garantie de la société Axa assurances ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille un.

Agir sur cette sélection :

Cookies juridiques

Considérant en premier lieu que le site requiert le consentement de l'utilisateur pour l'usage des cookies; Considérant en second lieu qu'une navigation sans cookies, c'est comme naviguer sans boussole; Considérant enfin que lesdits cookies n'ont d'autre utilité que l'optimisation de votre expérience en ligne; Par ces motifs, la Cour vous invite à les autoriser pour votre propre confort en ligne.

En savoir plus