COUR DE CASSATION
Première chambre civile
Audience publique du 4 avril 2001
Pourvoi n° 98-19.925
société civile immobilière (SCI) Marie-Françoise
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société civile professionnelle (SCP) Serre et Guilbaud
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la société civile immobilière (SCI) Marie-Françoise, dont le siège est Noisy le Grand,
en cassation d'un arrêt rendu le 4 juin 1998 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre civile, section A), au profit de la société civile professionnelle (SCP) Serre et Guilbaud, notaires associés, dont le siège est Paris,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 mars 2001, où étaient présents M. Lemontey, président, M. Pluyette, conseiller rapporteur, M. Sargos, conseiller, Mme Petit, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Pluyette, conseiller, les observations de Me Bouthors, avocat de la SCI Marie-Françoise, de LA SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de la SCP Serre et Guilbaud, les conclusions de Mme Petit, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que la société civile immobilière "Marie-Françoise" (la SCI) a fait assigner la SCP de notaires Serre et Guilbaud en paiement de la somme de 269 848 francs à titre de dommages-intérêts en faisant grief à M. ... d'avoir manqué à son obligation de conseil pour avoir omis de lui signaler qu'elle aurait été contrainte de rembourser la TVA à concurrence des 6/10e et en ne prévoyant dans l'acte notarié du 30 juillet 1992 une clause par laquelle l'acquereur aurait été engagé à prendre en charge le montant correspondant à ce remboursement ; que l'arrêt attaqué a rejeté ses demandes ;
Attendu que pour estimer que le notaire n'avait commis aucune faute en n'avertissant pas spécialement le représentant de la SCI des conséquences de l'absence, dans l'acte, d'une clause par laquelle l'acquéreur aurait opté formellement pour le régime de la TVA, l'arrêt, après avoir relevé que le gérant de la SCI, marchand de biens et administrateur de biens, avait une connaissance de ce mécanisme fiscal pour avoir demandé le remboursement de la TVA, énonce qu'"en professionnels avisés, ils n'ont pu alors ne pas s'enquérir des obligations auxquelles le choix de ce régime les assujétissait" ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs inopérants alors que le notaire est tenu d'un devoir de conseil envers son client dont il ne peut être déchargé par les compétences de celui-ci, la cour d'appel a violé les dispositions du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 juin 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la SCP Serre et Guilbaud aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Serre et Guilbaud, la condamne à payer à la SCI "Marie-Françoise" la somme de 10 000 francs ou 1524,49 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille un.