ARRÊT
N°
SA CRÉDIT LYONNAIS
C/
SELARL GRAVE-RANDOUX
SCP BERKOWICZ-HENNEAU
SAS LEFRANC VINOLUX
MTP/GB
COUR D'APPEL D'AMIENS
CHAMBRE ECONOMIQUE
ARRÊT DU 26 SEPTEMBRE 2013
RG 12/05024
ORDONNANCE du JUGE-COMMISSAIRE du TRIBUNAL DE COMMERCE de SAINT-QUENTIN en date du 25 octobre 2012 (créance n°100)
APRES COMMUNICATION DU DOSSIER ET AVIS DE LA DATE D'AUDIENCE AU MINISTÈRE PUBLIC
EN PRÉSENCE DU SUBSTITUT DE M. ... ... ...
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE
La SA CRÉDIT LYONNAIS
PARIS
Représentée et plaidant par Me Vanessa COLLIN, avocat au barreau de LAON
ET
INTIMÉES
La SELARL GRAVE-RANDOUX ès-qualités de Mandataire Judiciaire de la SAS LEFRANC VINOLUX
SAINT QUENTIN
Représentée et plaidant par Me Nathalie COLIGNON, de la SELARL COLIGNON-MANGEL, avocat au barreau de SOISSONS
La SCP BERKOWICZ-HENNEAU ès-qualités d'Administrateur Judiciaire de la SAS LEFRANC VINOLUX
SAINT QUENTIN
Représentée et plaidant par Me Nathalie COLIGNON, de la SELARL COLIGNON-MANGEL, avocat au barreau de SOISSONS
La SAS LEFRANC VINOLUX agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
GAUCHY
Représentée et plaidant par Me Nathalie COLIGNON, de la SELARL COLIGNON-MANGEL, avocat au barreau de SOISSONS
DÉBATS
A l'audience publique du 2 Mai 2013 devant
M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président de Chambre,
M. ..., entendu en son rapport, et Mme BOUSQUEL, Conseillers,
qui en ont délibéré conformément à la loi, le Président a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2013.
GREFFIER LORS DES DÉBATS M. DELATTRE
MINISTÈRE PUBLIC M. BRUNEL, Avocat Général
PRONONCE
Le 26 Septembre 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; M. Brieuc de MORDANT de MASSIAC, Président étant empêché, M. Gérard BOUGON, Conseiller qui en a délibéré, a signé la minute avec M. DELATTRE, Greffier.
DÉCISION
Vu l'ordonnance (créance n°100) rendu le 25 octobre 2012 par le Juge Commissaire à la procédure de redressement Judiciaire de la Société LEFRANC-VINOLUX ouverte devant le Tribunal de Commerce de SAINT-QUENTIN qui a admis au passif la créance de la Société LE CRÉDIT LYONNAIS pour la somme de 51 727,98 euros à titre chirographaire ;
Vu l'appel de cette décision interjeté par la Société LE CRÉDIT LYONNAIS le 9 novembre 2012 par voie électronique ;
Vu les conclusions de l'appelante sollicitant l'infirmation de l'ordonnance déféré en ce qu'elle n'a pas reconnu le caractère privilégié de sa créance et demandant à la Cour d'admettre celle-ci au passif à titre privilégié pour un montant de 51 727,98 euros outre indemnité contractuelle et intérêts de retard au taux de 7,60 % et de condamner les intimés à lui payer une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu les écritures de la SELARL 'GRAVE-RANDOUX', ès-qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SAS LEFRANC-VINOLUX, fonctions auxquelles elle a été commise en la personne de Me Michel ... par le jugement du Tribunal de Commerce de SAINT-QUENTIN prononçant la liquidation judiciaire de la débitrice, demandant à la Cour, à titre principal, constatant l'absence de convention écrite de gage commercial au sens des articles 2333 et 2336 du Code Civil, de confirmer l'ordonnance querellée en ce qu'elle a rejeté le caractère privilégié de la créance, à titre subsidiaire, constatant que la société LE CRÉDIT LYONNAIS ne justifie pas de l'assiette du gage prétendu, de confirmer de même la décision du premier Juge et, en tout état de cause, de condamner la Société LE CRÉDIT LYONNAIS à lui verser la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Vu l'avis du Ministère Public du 24 avril 2013 s'en rapportant à Justice;
SUR CE
Attendu que par jugement du 16 septembre 2011 le Tribunal de Commerce de SAINT-QUENTIN a ouvert la procédure de redressement judiciaire de la SAS LEFRANC-VINOLUX en commettant la SELARL 'GRAVE-RANDOUX', en la personne de Me Michel ..., aux fonctions de mandataire judiciaire ;
Attendu que pacte en date du 4 novembre 2011 la Société LE CRÉDIT LYONNAIS (la Société LCL) a déclaré une créance de 51 727,98 euros outre indemnité contractuelle de 5 % et intérêts de retard au taux de 7,60 % l'an à titre privilégié en vertu d'un gage sur stock ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 11 mai 2012 Me ..., es-qualités, a informé la Société LCL de ce qu'il proposerait le rejet de la créance déclarée pour sa totalité en excipant du défaut de pouvoir du signataire de l'acte du 4 novembre 2011, moyen qui sera ultérieurement abandonné et a contesté le caractère privilégié invoqué ;
Attendu que par l'ordonnance frappée d'appel le Juge Commissaire considérant que la Société LCL et la Société LEFRANC VINOLUX n'avaient régularisé aucune convention écrite de gage commercial au sens des articles 2333 et 2336 du Code Civil, a admis la créance au passif de la Société LEFRANC-VINOLUX pour un montant de 51 727,98 euros mais a écarté le caractère privilégié invoqué par la créancière ;
Attendu qu'en cours d'instance d'appel le Tribunal de Commerce de SAINT-QUENTIN a par jugement du 17 décembre 2012, prononcé la liquidation judiciaire de la Société LEFRANC-VINOLUX en désignant la SELARL 'GRAVE-RANDOUX', en le personne de Me Michel ..., aux fonctions de liquidateur ; que la SELARL 'GRAVE-RANDOUX' est régulièrement intervenue à l'instance en cette dernière qualité ;
Attendu que par acte sous seing privé du 17 août 2009 la Société LCL a consenti à la Société LEFRANC-VINOLUX dans le cadre d'une opération de financement sur stocks avec gage AUXIGA pour accompagner la baisse du stock un prêt d'un montant de 200 000 euros d'une durée de vingt quatre mois à compter du 3 août 2009 remboursable en huit échéances trimestrielles de 26 311,01 euros comprenant les intérêts au taux de 4,60% l'an, la première payable le 3 novembre 2009 et la dernière le 3 août 2011 ; qu'il était stipulé au 3 des conditions générales qu'au cas de défaut de règlement à leur échéance les sommes dues porteraient intérêts à compter de celle-ci au taux de 7,60 % l'an et qu'au cas où l'organisme prêteur devrait produire à une procédure d'ordre amiable ou judiciaire la Société emprunteuses serait redevable d'une indemnité forfaitaire de 5 % du capital restant dû ;
Attendu qu'antérieurement à la régularisation de ce contrat de prêt la Société LEFRANC-VINOLUX avait par courrier du 17 juin 2009, adressé tant à la Société LCL qu'à la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE DU NORD EST, cette dernière devant également lui accorder un financement de 200 000 euros, déclaré 'affecter en gage au sens des articles 2333 et suivants du Code Civil et L 21-1 et suivants du Code de Commerce au profit de la ou des banques, pour leur valeur entière actuelle et futures, les marchandises remises à la Société AUXILIAIRE DE GARANTIE 'AUXIA' qui est désignée comme Tiers convenu au sens de l'article 2337 du Code Civil et agissant au nom et pour compte de la ou des banques' ; que la Société LCL, faisant valoir que le gage constitué par un commerçant pour un acte de commerce se constate à l'égard des tiers, comme à l'égard des parties contractantes conformément aux dispositions de l'article L 110-3 du même code et que selon ces dernières, à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi, se prévaut de ce courrier qui constituerait l'écrit prévu par l'article 2336 du Code Civil pour prétendre au bénéfice du gage qu'elle revendique ;
Attendu que s'agissant d'un gage portant sur un stock de matières premières et d'approvisionnements, éléments visés à l'article L 527-3 du Code de Commerce, la convention des parties dont l'une est un établissement de crédit ne peut être soumise au droit commun des articles 2333 et suivants du Code Civil et L 521-1 et suivants du Code de Commerce mais nécessairement au régime spécial du gage des stocks prévu par les articles L 527-11 de ce dernier code ;
Attendu que selon l'article L 527-1 du Code de Commerce le gage des stocks est constitué par un acte sous seing privé devant, à peine de nullité comporter sept mentions particulières, cette exigence légale écartant, conformément aux prévisions de l'article L 110-3 du même code le principe de la liberté de la preuve des actes de commerce à l'égard des commerçants énoncé par ce même texte ; que l'acte constitutif d'un gage des stocks doit notamment comporter la dénomination 'acte de gage des stocks' (1°), la désignation des 'parties' (2°), l'emploi de ce dernier terme impliquant la participation de l'acte constitutif du gage du créancier, la mention qu'il est soumis aux dispositions des articles L 527-1 à L 527-11 (3°), le nom de l'assureur qui garantit contre l'incendie et la destruction (4°), une description permettant d'identifier les biens présents ou futurs engagés en nature, qualité, quantité et valeur ainsi que l'indication du lieu de leur conservation (6°), étant relevé que si courrier invoqué par l'appelante évoque quant à cette obligation un certificat devant lui être annexé et en faisant partie intégrante ce document n'est pas produit aux débats, et la durée de l'engagement (7°) ; que le courrier de la Société LEFRANC-VINOLUX du 17 juin 2009 que l'appelante présente comme l'acte constitutif du gage qu'elle revendique ne comportant pas les mentions visées ci-avant, lesquelles sont cumulativement exigées par la loi, ne peut valoir constitution de gage des stocks et il y a lieu de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a admis la créance déclarée par la Société LCL à titre chirographaire ;
Attendu que le prêt consentis le 17 août 2009 par la Société LCL à la Société LEFRANC-VINOLUX ayant une durée supérieure à un an le cours des intérêts en application de l'article L 622-28 du Code de Commerce n'a pas été arrêté par le jugement du 16 septembre 2011 ; que l'acte de prêt comportant les modalités de calcul des intérêts de retard ayant été annexé par l'appelante à sa déclaration de créance datée du 4 novembre 2011 de sorte qu'elle a ainsi satisfait à l'obligation énoncée par l'article R 622-23- 2° du code précité, il convient, ajoutant à la décision frappée d'appel d'admettre au passif de la Société LEFRANC-VINOLUX outre le principal de 51 727,98 euros les intérêts de retard postérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective au taux de 7,60 % l'an ; qu'en revanche la créance d'indemnité contractuelle égale à 5 % du capital restant dû, laquelle figure à la déclaration de créance avec la mention 'mémoire' sera rejetée dès lors que son montant pouvait être calculé au jour de cette déclaration ;
Attendu que la Société LCL qui succombe dans l'essentiel de ses prétentions sera condamnés aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la SELARL 'GRAVE-RANDOUX', ès-qualités de liquidateur judiciaire de la Société LEFRANC-VINOLUXla somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, du titre de l'instance devant la Cour ;
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant par arrêt contradictoire ;
Reçoit l'appel en la forme ;
Constate l'intervention volontaire à l'instance de la SELARL 'GRAVE-RANDOUX', ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SAS LEFRANC-VINOLUX, fonctions auxquelles elle a été désignée par jugement du Tribunal de Commerce de SAINT-QUENTIN du 17 décembre 2012 ;
Confirme l'ordonnance ;
Y ajoutant ;
Admet à titre chirographaire du passif de la SAS LEFRANC-VINOLUXles intérêts de retard dus à compter du jugement d'ouverture au taux de 7,60 % l'an ;
Rejette la créance déclarée pour 'mémoire' au titre de l'indemnité contractuelle ; Condamne la Société LE CRÉDIT LYONNAIS aux dépens d'appel ;
La condamne également à payer à la SELARL 'GRAVE-RANDOUX', ès-qualité de liquidateur judiciaire de la SAS LEFRANC-VINOLUX la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au titre de l'instance d'appel ;
LE GREFFIER LE CONSEILLER