Le Quotidien du 13 juin 2023 : Droit rural

[Brèves] Réaffirmation du principe du droit à indemnisation du preneur sortant : à propos d’une vente par adjudication

Réf. : Cass. civ. 3, 25 mai 2023, n° 21-23.015, FS-B N° Lexbase : A59709WZ

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 12 Juin 2023

► Il résulte de l'article L. 411-69, alinéas 1er et 4, du Code rural et de la pêche maritime et de l'article R. 322-11, alinéa 1er, du Code des procédures civiles d'exécution que, si le preneur et le bailleur doivent, à la demande du rédacteur du cahier des conditions de vente, et sous leur responsabilité, lui fournir les indications relatives à la nature, au coût et à la date des améliorations apportées par le preneur, l'omission de ces mentions dans le cahier des conditions de vente ne peut avoir pour effet de priver le preneur de son droit de demander à l'adjudicataire, bailleur à l'expiration du bail, le paiement d'une indemnité au titre de ces améliorations.

Voilà une question intéressante tranchée par la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt du 25 mai 2023, à la croisée du droit rural et des voies d’exécution, et qui permet de réaffirmer le principe du droit à indemnisation du preneur sortant.

Pour mémoire, l’article L. 411-69 du Code rural N° Lexbase : L4468I4A pose le principe d’un droit à indemnité pour les améliorations apportées par le preneur en cours de bail : le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail.

Le texte prévoit la situation de la vente du bien en cours de bail, et organise ainsi l’information de l'acquéreur du fonds loué : en cas de vente du bien loué, l'acquéreur doit être averti par l'officier public ou ministériel chargé de la vente du fait qu'il supportera, à la sortie du preneur, la charge de l'indemnité éventuellement due à celui-ci. Et il précise que si la vente a eu lieu par adjudication, le cahier des charges doit mentionner la nature, le coût et la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 N° Lexbase : L4469I4B et L. 411-73 N° Lexbase : L8705IMD. Cette mention est établie par l'officier public ou ministériel chargé de la vente d'après les indications fournies par le bailleur et par le preneur ; en cas de désaccord entre les parties, elle fait état des éléments contestés.

La question soulevée dans l’affaire soumise à la Cour suprême le 25 mai 2023 était de savoir si l’absence de cette mention devait être sanctionnée par l’inopposabilité, à l’adjudicataire, du droit à indemnisation du preneur à bail rural ? C’est ce que prétendait l’adjudicataire, au soutien de son pourvoi formé contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de Poitiers le 24 juin 2021 (CA Poitiers, 24 juin 2021, n° 19/02867 N° Lexbase : A47864XK), qui l’avait condamné à payer au liquidateur une certaine somme au titre de l'indemnité due au preneur sortant.

Mais telle n’est pas la solution retenue par la Haute juridiction, qui approuve la décision des conseillers de la cour d’appel de Poitiers.

La Cour de cassation se fonde par ailleurs sur l'article R. 322-11, alinéa 1er, du Code des procédures civiles d'exécution N° Lexbase : L3812AEW, relatif à la saisie immobilière, qui prévoit que le cahier des conditions de vente est élaboré sous la responsabilité du créancier poursuivant.

S'il résulte de l’article L. 411-69 précité et de ce dernier article, que le preneur et le bailleur doivent, à la demande du rédacteur du cahier des conditions de vente, et sous leur responsabilité, fournir les indications précitées, leur défaut de mention ne peut avoir pour effet de priver le preneur de son droit de demander à l'adjudicataire, bailleur à l'expiration du bail, le paiement d'une indemnité au titre de ces améliorations.

C’est donc à bon droit, que la cour d'appel avait énoncé que la circonstance que le cahier des charges de l'adjudication ne porte aucune mention relative à la nature, au coût et à la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 et L. 411-73 du Code rural et de la pêche maritime doit demeurer sans incidence sur les droits du preneur à indemnité. Elle en a exactement déduit que le liquidateur de la SCEA était fondé à demander à l'adjudicataire le paiement d'une indemnité au titre des travaux d'amélioration prévus par une clause du bail.

On relèvera que cette solution s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence de la Cour de cassation qui contribue à conférer un caractère d’ordre public au droit à indemnisation du preneur en sortie de bail (v. Cass. civ. 3, 8 décembre 1982, n° 81-12.567, publié au bulletin N° Lexbase : A6959CGT : précisant que sont réputées non écrites toutes clauses de conventions ayant pour effet de supprimer ou restreindre les droits conférés au preneur sortant), lequel constitue la contrepartie de la liberté économique (G. Chesné, La liberté économique du preneur, RD rur., 1985, p. 263.) laissée à ce dernier pendant la durée du bail rural.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Indemnisation du preneur sortant, spéc. Principe du droit à indemnité pour les améliorations apportées par le preneur en cours de bail, in Droit rural, (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E9189E99.

 

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