Le Quotidien du 18 avril 2023 : Bancaire

[Brèves] Précisions sur l’aval porté sur une lettre de change irrégulière

Réf. : Cass. com., 5 avril 2023, n° 21-19.160, F-B N° Lexbase : A61629M8

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N4999BZ8

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[Brèves] Précisions sur l’aval porté sur une lettre de change irrégulière. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/95055940-0
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par Jérôme Lasserre Capdeville

le 17 Avril 2023

► Si l’aval porté sur une lettre de change irrégulière au sens de l’article L. 511-21 du Code de commerce peut constituer le commencement de preuve d'un cautionnement solidaire, ce dernier est nul s’il ne répond pas aux prescriptions de l'article L. 341-2 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016.

L’aval se définit, traditionnellement, comme l’engagement que prend une personne de payer tout ou partie du montant d'un effet de commerce à l'échéance, à la place du débiteur principal garanti qui a précédemment apposé sa signature sur le titre. Cette garantie est employée, dans la pratique moderne des établissements de crédit, en cas d’émission d’un billet à ordre ou, mais cela est plus rare, d’une lettre de change.

Son régime juridique fait, parfois, l’objet de précisions de la part de la Haute juridiction (Cass. com., 5 avril 2023, n° 21-17.319, F-B N° Lexbase : A61579MY : J. Lasserre Capdeville, Précisions sur le régime juridique applicable à l’aval, Lexbase Affaires, avril 2023, n° 753 N° Lexbase : N4998BZ7 ; Cass. com., 25 janvier 2023, n° 21-16.275, F-B N° Lexbase : A06459A7 : J. Lasserre Capdeville, Interruption de la prescription et donneur d’aval, Lexbase Affaires, février 2023, n° 744 N° Lexbase : N4194BZD ; Cass. com., 24 mars 2021, n° 19-18.614, F-P N° Lexbase : A67424MN : J. Lasserre Capdeville, Précisions sur la possibilité pour le donneur d’aval de limiter sa garantie, Lexbase Affaires, avril 2021, n° 671 N° Lexbase : N7024BYS). Nous en avons une nouvelle illustration ici.

Faits et procédure. Le 19 février 2014, M. L., gérant de la société Z., s’était porté avaliste d’une chaîne de lettres de change tirées sur cette société au bénéfice de la société B., son fournisseur. Ces lettres de change n’ayant pas été payées et la société Z. ayant été placée en liquidation judiciaire, la société B. avait déclaré sa créance puis avait assigné en paiement M. L. en qualité d’avaliste et, à titre subsidiaire, de caution.

La cour d’appel de Bourges avait, par une décision du 20 mai 2021 (CA Bourges, 20 mai 2021, n° 19/00940 N° Lexbase : A42224S8), condamné M. L. à payer à la société B. La somme de 156 708, 85 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2017. L’intéressé avait alors formé un pourvoi en cassation.

Décision. Celui-ci se révèle utile, puisque la Haute juridiction casse et annule, en toutes ses dispositions, l’arrêt de la cour d’appel.

La Cour de cassation commence par rappeler le contenu de l’article L. 511-21 du Code de commerce N° Lexbase : L6674AIZ (visant la possibilité de recourir à un aval en matière de lettre de change) et l’article L. 341-2 du Code de la consommation N° Lexbase : L5668DLI, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016 (devenu par la suite C. consom., art. L. 331-1 N° Lexbase : L1165K7B). Pour mémoire cette dernière disposition prévoyait que toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature d’une mention manuscrite dont le contenu devait être scrupuleusement respecté.

Ensuite, et surtout, la Cour indique que si l’aval porté sur une lettre de change irrégulière au sens de l’article L. 511-21 du Code de commerce peut constituer le commencement de preuve d'un cautionnement solidaire, ce dernier est nul s’il ne répond pas aux prescriptions de l'article L. 341-2 du Code de la consommation.

Or, pour condamner M. L. à payer à la société B. la somme de 156 708,85 euros, l’arrêt de la cour d’appel, après avoir exclu que l’acte du 19 février 2014 soit qualifié d'aval, au sens du droit cambiaire, avait retenu que les termes de l'engagement de M. L. figurant dans cet acte, qu'il reproduisait, expriment clairement la volonté de ce dernier, gérant et associé unique de la société L., de s'engager envers la société B. à garantir le paiement de la somme globale de 311 358,93 euros, pour une durée de vingt mois, en cas de défaillance de la société L., que ces mentions répondaient aux prescriptions de l’article 2288 du Code civil N° Lexbase : L1117HI9 en matière de cautionnement et que l’acte du 19 février 2014 devait donc s'analyser en un commencement de preuve par écrit de l'existence d'un cautionnement, complété par l’élément extrinsèque découlant de la qualité de gérant de M. L. prouvant son intention de cautionner la société qu'il dirigeait.

Dès lors, en se déterminant ainsi, sans constater que l’acte du 19 février 2014 comportait la mention manuscrite exigée à peine de nullité du cautionnement à l'ancien article L. 341-2 du Code de la consommation, la cour d'appel n’avait pas donné de base légale à sa décision.

Cette solution ne surprendra pas le lecteur. Elle se retrouve, déjà, dans une décision remarquée de la Haute juridiction du 5 juin 2012 concernant un aval porté sur un billet à ordre (Cass. com., 5 juin 2012, n° 11-19.627, FS-P+B N° Lexbase : A3795INU : : X. Delpech, obs., D., 2012, AJ, p. 1604 ; D. Legeais, obs., RD banc. fin., 2012, comm. 117 ; E. Netter, obs., Banque et droit, juillet-août 2012, p. 43 ; J. Lasserre Capdeville, obs., LEDB, septembre 2012, p. 7, n° 116).

Pour aller plus loin :

  • pour les dispositions applicables jusqu’au 31 décembre 2021, v. ÉTUDE : La définition du cautionnement,  L'aval, in Droit des sûretés, (dir. G. Piette), Lexbase N° Lexbase : E8827AGZ.
  • pour les dispositions applicables à compter du 1er janvier 2022, v. ÉTUDE : Le cautionnement, L’aval, in Droit des sûretés, (dir. G. Piette), Lexbase N° Lexbase : E8617B4W.

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