Le Quotidien du 3 janvier 2023 : Autorité parentale

[Brèves] Enlèvement international d’enfants : interprétation stricte de l’exception au retour de l’enfant (rappel)

Réf. : Cass. civ. 1, 30 novembre 2022, n° 21-16.976, FS-D N° Lexbase : A35238XR

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N3700BZ3

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 02 Janvier 2023

► Il ne peut être fait exception au retour immédiat de l'enfant que s'il existe un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable, ces circonstances devant être appréciées en considération primordiale de l'intérêt supérieur de l'enfant ;
les repères acquis par l’enfant dans ses conditions de vie résultant du déplacement illicite sont impropres à caractériser le danger grave ou la situation intolérable faisant obstacle au retour de l'enfant déplacé illicitement.

Voilà un nouvel arrêt s’inscrivant dans la lignée de la jurisprudence très stricte de la Cour de cassation en matière d’enlèvement international d’enfant, dont il convient de rappeler à nouveau les principes.

Les textes. Pour rappel, la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 N° Lexbase : L6804BHH a pour objet d'assurer le retour immédiat dans l'État de leur résidence habituelle des enfants retenus illicitement dans tout autre État contractant.

Aux termes de l'article 13, alinéa 1er, b, de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, le retour de l'enfant déplacé illicitement de sa résidence habituelle peut ne pas être ordonné lorsqu'il existe un risque grave que le retour n'expose l'enfant à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable.

Et ces circonstances doivent être appréciées en considération primordiale de l'intérêt supérieur de l'enfant, en application de l'article 3, § 1, de la Convention de New York du 20 novembre 1989.

Interprétation stricte. Dans la lignée de sa jurisprudence, la Cour de cassation retient une lecture très stricte des dispositions de l'article 13, alinéa 1er, b, de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, dont elle rappelle en l’espèce, qu’il en résulte qu’il ne peut être fait exception au retour immédiat de l'enfant que s'il existe un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable (v. Cass. civ. 1, 16 février 2022, n° 21-19.061, F-B N° Lexbase : A63517NK ; Cass. civ. 1, 7 décembre 2016, n° 16-20.858, F-P+B N° Lexbase : A3851SPC ; Cass. civ. 1, 13 février 2013, n° 11-28.424, FS-P+B+I N° Lexbase : A0545I8P ; à noter que cette jurisprudence contredit celle de la Cour européenne, « qui tend à faire du seul intérêt supérieur de l'enfant un obstacle à son retour » : v. Adeline Gouttenoire, Déplacement illicite d'enfant : la difficile conciliation de l'obligation au retour et du respect de l'intérêt supérieur de l'enfant, Lexbase Droit privé, mars 2013, n° 520 N° Lexbase : N6287BTZ).

Il se dégage de la jurisprudence que, dès lors que le déplacement est illicite, le principe est celui du retour de l’enfant ; peu importe le laps de temps écoulé entre le déplacement et la date à laquelle statue le juge ; peu importe l’intégration de l’enfant dans ses nouvelles conditions de vie résultant du déplacement illicite. Seul un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable peuvent faire obstacle au retour, étant entendu que l’intégration de l’enfant est impropre à caractériser le danger grave ou la situation intolérable.

C’est bien ce que rappelle le présent arrêt rendu le 30  novembre 2022.

Faits et procédure. Une enfant est née en Espagne en 2018 d’une mère française et d’un père espagnol. En 2020, la mère quitte l’Espagne pour s’installer en France avec sa fille.

Le père a alors mis en œuvre la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants N° Lexbase : L0170I8S, et le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nîmes a saisi le juge aux affaires familiales aux fins de voir ordonner le retour immédiat de l'enfant en Espagne.

La cour d’appel (CA Nîmes, 6 avril 2022, n° 20/03494) a rejeté cette demande, constatant que l’enfant, âgée d'à peine quatre ans, vivait, depuis son arrivée en France à l'âge de deux ans, avec sa mère, au domicile de ses grands-parents maternels, où elle est scolarisée depuis quelques mois, qu'elle y avait donc ses repères et ses habitudes et que sa mère constituait depuis sa naissance son repère fondamental.

Elle en a déduit qu'une séparation prolongée avec sa mère, dans des conditions nécessairement conflictuelles et douloureuses, l'exposerait à un grave danger pour son équilibre psychique, et ajoute qu'un tribunal espagnol, appelé à statuer sur les mesures provisoires relatives à l'enfant, avait confié la garde à la mère. Les juges du fond en ont donc déduit que l’intérêt supérieur l’enfant était de rester en France auprès de sa mère.

Cassation. La Haute juridiction rappelle qu’aux termes de l’article 13, b, de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, il ne peut être fait exception au retour immédiat de l'enfant que s'il existe un risque de danger grave ou de création d'une situation intolérable, et énonce qu’il résulte de l’article 3, § 1, de la Convention de New York du 20 novembre 1989 N° Lexbase : L6807BHL que ces circonstances doivent être appréciées en considération primordiale de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Ainsi, selon elle, la cour d’appel a refusé la demande de retour de l’enfant en Espagne par des motifs impropres à caractériser, au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant, le danger grave encouru par celle-ci en cas de retour immédiat ou la situation intolérable qu'un tel retour créerait à son égard. Elle casse donc l’arrêt.

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