Le Quotidien du 9 août 2022 : Droit pénal du travail

[Brèves] Précisions sur l’organisation du travail en détention

Réf. : Circulaire du 18 juillet 2022, relative à l'organisation du travail en détention

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[Brèves] Précisions sur l’organisation du travail en détention. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/87158864-breves-precisions-sur-lorganisation-du-travail-en-detention
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par Lisa Poinsot

le 12 Septembre 2022

► Publiée le 28 juillet 2022 au Bulletin officiel du ministère de la Justice, la circulaire, du 18 juillet 2022, relative à l’organisation du travail en détention tend à apporter davantage de précisions quant au rapprochement des conditions de travail en détention aux conditions de droit commun dans une perspective d’insertion des détenus à leur sortie.

Contexte juridique. Dans le cadre d’une réforme du travail pénitentiaire, la loi n° 2021-1729, du 22 décembre 2021, pour la confiance dans l’institution judiciaire N° Lexbase : L3146MAR, a pour objectif de rendre attractif l’emploi en détention et de renforcer les chances de réinsertion des personnes détenues par la mise en place du contrat d’emploi pénitentiaire, d’une procédure de recrutement et de certains droits sociaux.

Le décret n° 2022-655, du 25 avril 2022, relatif au travail des personnes détenues et modifiant le Code pénitentiaire N° Lexbase : Z536152A a alors apporté plusieurs précisions.

Pour aller plus loin : lire L. Poinsot, Réforme du travail pénitentiaire, ce qui change au 1er mai 2022, Lexbase Social, mai 2022, n° 904 N° Lexbase : N1378BZ3.

→ Voici les précisions apportées par la circulaire du 18 juillet 2022.

Le travail peut être, notamment, effectué :

  • au service général, où les détenus participent à l’entretien et au fonctionnement de la prison ;
  • au sein d’ateliers de concession, où les détenus travaillent pour le compte d’entreprises extérieures qui installent un atelier en détention ;
  • au sein d’ateliers de la régie industrielle des établissements pénitentiaires, gérés par l’ATIGIP/SEP ;
  • au sein de structures d’insertion par l’activité économique, prenant la forme d’entreprise d’insertion ou d’ateliers et chantiers d’insertion implantés en détention ;
  • au sein d’entreprise adaptée implantée en détention pour les personnes détenues handicapées ;
  • par des actions de formation par apprentissage dans l’établissement pénitentiaire pour les personnes détenues âgées de plus de 29 ans révolus afin d’obtenir une qualification professionnelle sanctionnée par un diplôme ou un titre à finalité professionnelle ;
  • sur le domaine pénitentiaire ou aux abords immédiats, sur autorisation du chef de l’établissement pénitentiaire ;
  • sous le régime du placement extérieur sous surveillance, ce qui suppose l’existence d’un contrat de travail pour les personnes détenues placées à l’extérieur et accomplissant un travail pour le compte d’une administration, d’une collectivité publique, d’une personne physique ou morale.

Pour mettre en place les nouvelles structures encadrant une activité de travail en détention, il est important de préparer la phase d’implantation par l’organisation d’une visite immersive des ateliers pénitentiaires afin de mieux appréhender son fonctionnement, ses potentialités et ses contraintes. En outre, un contrat d’implantation doit être signé entre les entreprises souhaitant employer des détenus et le chef d’établissement pénitentiaire. Ce contrat est conclu pour une durée de trois ans, renouvelable par tacite reconduction (annexes 1 à 3). Ce contrat peut être résilié unilatéralement pour faute du titulaire par l’administration pénitentiaire, ou par le donneur d’ordre à échéance du contrat ou pour impossibilité d’en poursuivre l’exécution. Le non-renouvellement du contrat d’implantation est soumis à l’envoi d’une lettre recommandée avec avis de réception au chef d’établissement pénitentiaire au moins trois mois avant la date prévue de sa tacite reconduction.

Conditions de travail :

  • mise en place de la journée continue de travail sur la matinée de 7 heures ou 7 heures 30 à 13 heures ou 13 heures 30 ;
  • suspension de l’affectation (annexe 13) en raison soit du bon ordre et de la sécurité de l’établissement, la suspension totale ou partielle de l’activité, le déroulement d’une procédure disciplinaire  ;
  • affichage du règlement spécifique de chaque atelier sur les lieux de travail (annexe 12).

Accès au travail des personnes détenues :

  • une demande écrite de classement au travail de la part de la personne détenue ;
  • un classement au travail par le chef de l'établissement pénitentiaire conformément à l'avis de la commission pluridisciplinaire unique (le classement s'apparente désormais à une autorisation à travailler) et une orientation vers un ou plusieurs régimes de travail ;
  • une inscription sur liste d'attente et une démarche active de candidature par la personne détenue, soit par un formulaire préétabli, soit par une candidature écrite sous forme libre, soit par une candidature accompagnée d’une éventuelle lettre de motivation et d’un CV soit par d’autres modalités de candidature proposées par l’établissement (les listes des postes disponibles sont communiquées par voie d’affichage ou par d’autres moyens) ;
  • un ou plusieurs entretiens professionnels entre cette dernière et des donneurs d'ordre ;
  • la signature d'un contrat d'emploi pénitentiaire et l'affectation sur un poste de travail.

Critères d’orientation vers un régime de travail :

  • vers le service général : la compatibilité du profil pénal et comportemental avec les postes habituellement proposés au service général, la situation de précarité de la personne détenue, le souhait exprimé, l'expérience professionnelle sur un secteur professionnel correspondant aux besoins du service, le lien avec le projet professionnel, le degré d'autonomie ;
  • vers un régime de production : le souhait exprimé par la personne détenue, l'expérience professionnelle et la capacité à s'adapter à un environnement professionnel, le savoir-faire et savoir-être adaptés aux besoins des donneurs d'ordre, la capacité à travailler dans un collectif, le lien avec le projet professionnel ;
  • vers un travail au sein d’une structure d’insertion par l’activité économique : le souhait exprimé par la personne détenue, le reliquat de peine compris entre quatre et trenre-six mois, l'éloignement de l'emploi et difficultés sociales particulières, la nationalité française ou autorisation à travailler en France ;
  • vers un travail au sein d’une entreprise adaptée : le souhait exprimé par la personne détenue, le cas échéant, la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) ou la demande d'instruction en cours (minimum 55 % de TH dans les entreprises adaptées), l'éloignement de l'emploi et difficultés sociales particulières, la nationalité française ou autorisation à travailler en France, aucune condition de reliquat de peine n'est exigée ni expérience professionnelle particulière ;
  • vers le régime de l’apprentissage : les critères de production, la volonté d'alterner travail et formation, être âgé de 16 à 29 ans révolus ou disposer d'une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), être titulaire d'un passeport ou d'une carte d'identité en cours de validité justifiant de la qualité de citoyen français ou européen ou disposer d'un titre de séjour en cours de validité.

Le CEP, la formalisation de la relation de travail (annexes 7 à 11) :

  • contrat à durée déterminée (pour remplacement d’une autre personne détenue, accroissement temporaire de l’activité de travail concernée ou poste à caractère saisonnier) ou indéterminée, choisi par le donneur d’ordre ;
  • limitation de la durée de la période d’essai à un jour par semaine (pour un CEP d’une durée de six mois au plus, la période d’essai dure au maximum deux semaines calendaires ; pour un CEP d’une durée de plus de six mois ou indéterminée, la période d’essai est d'un mois calendaire maximum). La période d’essai débute le premier jour de la prise de poste du détenu et peut prendre fin de manière anticipée à tout moment par le donneur d’ordre et le détenu tout en respectant un délai de prévenance d’au moins 24 heures ;
  • respect de seuils minimums de rémunération en fonction du régime de travail, chacun étant indexé sur le SMIC. Sera déployé un système d’information en charge de la gestion de la paye des personnes détenues (OCTAVE) ;
  • respect du droit au repos et à la limitation de la durée du travail quotidienne hebdomadaire ;
  • encadrement des absences en dehors des heures de travail pour responsabiliser le détenu au regard de son emploi du temps.

Tout comme un contrat de travail, le CEP peut être suspendu en cas d’incapacité temporaire de travail pour raison médicale. Ce contrat peut par ailleurs être rompu d’un commun accord ou à l’initiative de la personne détenue, ou encore en raison de la fin de détention ou du transfert définitif du détenu. À l’instar de la rupture d’un contrat de travail, la résiliation du CEP peut avoir pour motif l’insuffisance professionnelle, pour motif économique ou en cas de force majeure.

Droits et protection du travailleur détenu :

  • droits sociaux : bénéfice de l’assurance chômage, de l’assurance vieillesse, de l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, l’assurance accidents du travail et maladie professionnelle ;
  • droits à la formation ;
  • protection contre le harcèlement et la discrimination ;
  • protection pour sa santé et sa sécurité (médecine du travail, inspection du travail).

Recours : tout litige lié au CEP (refus de classement, d’affectation, de fin d’affectation ou de déclassement) relève de la compétence de la juridiction administrative.

⚠️ Périodes transitoires :

  • 1er mai 2022 au 1er mai 2023 : les contrats de concession et contrats d'implantation signés antérieurement au 1er mai 2022 restent en vigueur, au plus tard jusqu'au 1er mai 2023 dans leur version en vigueur antérieure au décret n° 2022-655, du 25 avril 2022. Durant cette période, les chefs d'établissements pénitentiaires doivent proposer aux titulaires une mise à jour de leur relation contractuelle, en leur soumettant un projet de contrat d'implantation ;
  • 1er mai au 31 décembre 2022 : les actes d'engagement signés avant l'entrée en vigueur de la loi peuvent se poursuivre dans le respect de l'article 33 de la loi pénitentiaire, de sa déclinaison réglementaire applicable jusqu'au 1er mai 2022 et de la note DAP du 24 janvier 2021 relative à l'actualisation de la rémunération des personnes détenues et des prélèvements sociaux pour l'année 2022. Les personnes détenues déjà classées avant le 1er mai 2022 et ne bénéficiant pas encore de poste de travail intègrent automatiquement la liste d'attente.

Prochaines étapes :

  • 4e trimestre 2022 : publication de l’ordonnance relative aux droits sociaux des travailleurs détenus ;
  • 1er janvier 2023 : fin de la transformation des actes d’engagements en CEP – toutes les relations de travail pénitentiaire auront la forme d’un CEP.

Pour aller plus loin : v. L. Isidro et Th. Pasquier, Projet de loi « pour la confiance dans l’institution judiciaire » : une ébauche de statut pour les détenus travailleurs, Lexbase Social, juin 2021, n° 868 N° Lexbase : N7832BYQ.

 

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