Réf. : Cass. civ. 3, 5 janvier 2022, n° 20-22.670, FS-B (N° Lexbase : A42167HM)
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N0005BZ9
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, Rome Associés, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 13 Janvier 2022
► Le délai de deux ans dans lequel doit être intentée l’action résultant de vices rédhibitoires est un délai de forclusion qui n’est pas susceptible de suspension ;
► ce délai de forclusion peut toutefois être interrompu par une demande en justice jusqu’à l’extinction de l’instance.
L’opposition entre la première et la troisième chambre civile de la Cour de cassation sur la nature du délai de l’action résultant des vices rédhibitoires de l’article 1648 du Code civil (N° Lexbase : L9212IDK) est nette :
Au-delà de la beauté juridique du raisonnement et des prises de position, l’opposition est source d’insécurité juridique pour ceux qui, par chance ou malchance, se retrouvent, selon la nature du contentieux, devant la première ou la troisième chambre civile de la Cour de cassation.
En l’espèce, après avoir fait réaliser un diagnostic de l’installation d’assainissement non collectif, des acquéreurs vendent leur immeuble. L’acquéreur fait réaliser un autre diagnostic aux termes duquel il est fait état d’une installation vétuste, incomplète et polluante. L’acquéreur assigne, après expertise, le vendeur, le notaire et le diagnostiqueur en nullité de la vente pour dol et erreur sur les qualités substantielles outre le paiement de dommages et intérêts. Le vice caché de l’article 1648 sera plaidé pour la première fois devant le juge d’appel.
La cour d’appel de Rennes, aux termes d’un arrêt rendu le 15 septembre 2020 (CA Rennes, 15 septembre 2020, n° 18/04241 N° Lexbase : A72163TG), après avoir rappelé que l’action résultant des vices rédhibitoires devait être intentée dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice, estime qu’il s’agit d’un délai de forclusion. Il n’est donc pas susceptible d’être suspendu mais peut être interrompu, notamment par une demande en justice. L’acquéreur n’ayant pas formé cette demande devant les premiers juges mais seulement en cause d’appel est donc prescrit.
L’acquéreur forme un pourvoi en cassation. Il articule que la demande d’expertise formée serait interruptive de prescription, laquelle aurait été suspendue lorsque le juge a fait droit à la demande d’expertise avant tout procès, le délai de prescription recommençant à courir à compter du jour où la mesure a été exécutée.
Le pourvoi se fondait donc sur les dispositions de l’article 2239 du Code civil (N° Lexbase : L7224IAS), selon lequel la prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande d’instruction présentée avant tout procès. Le délai de prescription, toujours en application de cet article, recommence à courir à compter du jour où la mesure a été exécutée.
Le pourvoi est rejeté. Le délai de l’article 1648 est un délai de forclusion. Il a bien été interrompu par l’assignation en référé mais il a recommencé à courir à compter de l’ordonnance désignant l’expert.
Le délai de l’article 1648 du Code civil est susceptible d’interruption mais non de suspension devant la troisième chambre civile de la Cour de cassation.
La solution est inverse devant la première chambre civile de la Haute juridiction (cf. notamment : Cass. civ. 1, 25 novembre 2020, n° 19-10.824, F-D N° Lexbase : A174838A) :
« Ce délai est interrompu par une assignation en référé jusqu’à l’extinction de l’instance, conformément à l’article 2241 du Code civil. Il est, en outre, suspendu lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès en application de l’article 2239 du Code civil, le délai recommençant à courir à compter du jour où la mesure a été exécutée ».
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